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Alexis Corbière, député NFP de Seine-Saint-Denis, fondateur de l’Après (Association pour une République écologique et sociale), le 11 février 2025 sur franceinfo.

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00:00— Bonjour. — Qu'est-ce que vous pensez de la nomination de Richard Ferrand à la tête du Conseil constitutionnel ?
00:04— Je la soutiens pas. Je la soutiens pas. Et je vais dire les choses... Ça n'a rien de personnel, parce que le peu que j'ai connu
00:12Richard Ferrand quand il était président de l'Assemblée nationale, c'était plutôt un homme rond, cordial... La question est très politique.
00:18De quoi parlons-nous ? Du fait que le Conseil constitutionnel, qui est censé être une instance tout de même qui fixe des bornes
00:26à l'action de l'exécutif en particulier, dans le respect de la Constitution, il doit y avoir une indépendance par rapport à l'exécutif.
00:33Ça doit être une forme peut... J'oserais même dire peut-être de contre-pouvoir ou du moins de bornes qui sont fixées.
00:39Et Richard Ferrand a la particularité d'être très proche du président de la République. — Bon, c'est pas la première fois ?
00:44— Certes. Mais c'est la première fois que le président de la République est encore en activité encore 2 ans, 2 ans et demi,
00:51que Richard Ferrand est un de ses très très proches. Ça veut dire donc qu'on aura désormais quelqu'un – si c'était le cas, c'est pas encore fait –
00:58qui présiderait le Conseil constitutionnel, qui est en actif, si je puis dire, au service de l'action de ce président de la République.
01:04Alors ça, c'est une chose. Ça a déjà eu lieu. Vous avez parfaitement raison. Mais j'avais cru comprendre...
01:08— À droite comme à gauche, hein. Les présidents à droite comme de gauche. — Oui, oui. Roland Dumas peut continuer la liste.
01:12Et c'est pas glorieux. Mais j'avais cru comprendre qu'il y avait une révolution avec le macronisme. Donc là, c'est la vieille pratique.
01:17Mais quel est mon problème ? C'est que ces gens-là – les macronistes, là, je vais être un peu plus trivial – ont démontré un usage d'une pratique
01:25peu éthique de la Constitution, y compris – on l'a vu lors du débat sur les retraites – l'utilisation abusive – je vais pas entendre en détail –
01:32mais du PLFSS rectificatif pour faire passer le débat sur les retraites, ce qui, du point de vue de tous les juristes, était une absurdité,
01:39validée tout de même par le Conseil constitutionnel. Donc le Conseil constitutionnel a validé toute une série d'utilisations abusives,
01:45me semble-t-il, de la Constitution. — Mais ça a toujours été le cas, avec le Conseil constitutionnel, face du droit et de la politique.
01:50Il fait toujours les deux en même temps. — Ouais. Bah alors c'est pas bien. Et ça fait dégénérer le rapport et la confiance citoyenne vis-à-vis de cet instant.
01:57Vous savez, il y a quelque chose de vertueux de tout ça, même si je ne souhaite pas, donc, que Richard Ferrand... Parce qu'il ne symbolise pas,
02:04il ne marque pas cette indépendance par rapport à l'exécutif. Moi, je suis pas pour qu'on banalise l'utilisation autoritaire de la Constitution. Je l'ai dit.
02:11On est dans la multiplication, on va parler, des 49.3, où quand un homme comme moi proteste contre les 49.3, on dit « Bah enfin bon, ça a déjà eu lieu,
02:17l'année au 27e ». On habitue en petite dose les citoyens qu'on impose des budgets que même la représentation nationale ne veut pas.
02:24Et je voulais terminer en disant qu'il y a peut-être quelque chose de vertueux de tout ça, c'est qu'il est temps de passer à la VIe République.
02:29Il est temps d'avoir une discussion. — On va y revenir, parce que c'est le fond du sujet. — Parce que c'est le fond du sujet. Aujourd'hui,
02:32le président de la République, il concentre des pouvoirs comme dans notre pays, des pouvoirs à une légitimité extrêmement faible dans le pays.
02:40Il n'y a plus de consentement en l'autorité, etc. Donc il est temps de nous refonder – on va en parler – et d'avoir des institutions plus démocratiques
02:48dans lesquelles le citoyen peut intervenir, en finir avec le présidentialisme, le bonapartisme. Et j'ai envie de dire que Richard Ferrand
02:54est un petit soldat du bonapartisme macroniste actuel. Moi, je le soutiens pas. — Vous nous dites « C'est pas gagné, sa nomination ».
03:00Vous pensez qu'il peut être retoqué par l'Assemblée nationale ? — Bah il faut qu'il y ait les trois cinquièmes, si je crois bien...
03:05— Dans l'une des deux commissions des lois à l'Assemblée et au Sénat. — Voilà. Bon, écoutez, ça, je sais pas, parce que je suis pas dans les coulisses
03:11de l'accord potentiel avec notamment LR, le Sénat actuel. Je donne un avis politique. Et j'ai envie de dire même à Richard Ferrand,
03:18s'il m'écoute, n'y allez pas, parce qu'en participant à ça, vous allez encore plus décrédibiliser cette instance. Mais d'un certain point de vue,
03:25j'ai envie de dire puisque vous y allez, vous ouvrez le fait qu'il est temps d'en finir avec cette Ve République. Et moi, je l'ouvre avec...
03:31Je demande une assemblée constituante avec mes amis. — Et avant d'aller à l'assemblée constituante, est-ce que vous soutenez la proposition des communistes
03:37de modifier le processus de nomination du président du Conseil constitutionnel ? — Mais il est temps... Pourquoi pas ? Mais il est temps non plus de modifier
03:49les choses sur les marges. Quel est le problème ? C'est que nous avons un système politique qui, d'ailleurs, est né en 1958 dans un monde coup de force,
03:56de quasi coup d'État militaire pour imposer une nouvelle constitution, avec énormément de pouvoirs qui se concentrent sur un président de la République,
04:01avec une absence et une faiblesse de pouvoirs du point de vue de l'Assemblée nationale. Écoutez, vous m'invitez aujourd'hui. Hier, j'étais à l'Assemblée.
04:08On vote des motions de censure. Tout le monde s'en fout. Une fois que c'est terminé, M. Béroud remonte à la tribune en convoquant à nouveau 49.3.
04:15Les Français ne suivent même plus l'année au 27e 49.3. — Non mais là, vous voulez une assemblée constituante pour édiger une nouvelle constitution.
04:20Mais déjà, vous venez de le dire. Vous n'arrivez même pas à vous mettre d'accord sur un budget. Alors une nouvelle constituante, on en est loin.
04:26— Ce dont on parle, c'est des Français. Que l'ensemble des Français, que les 49 millions d'électeurs français soient convoqués pour élire des représentants,
04:32des députés constituants de toute sensibilité politique, ils auront le droit. Moi, je suis un homme de gauche. J'ai une certaine idée de la République.
04:38Mais dans ce pays, mon opinion n'est pas partagée par tout le monde. Eh bien tant mieux. Et que des députés constituants, dans le cadre d'une assemblée constituante,
04:44discutent de ce que pourrait être une nouvelle constitution. D'accord ? Ça s'est souvent passé comme ça dans notre histoire,
04:49hormis sous la Ve République, qu'il y ait une assemblée constituante. Et au terme de ce débat, qui peut prendre un an, j'en sais rien, par référendum,
04:55la constitution qu'il propose pourrait être adoptée ou rejetée. À quoi je pense, moi, notamment ? Mais ce serait l'opinion que je défendrais avec mes amis
05:02qui seraient députés constituants là-dedans. C'est l'idée qu'aujourd'hui, donc, moins de pouvoir au président de la République, plus de pouvoir,
05:09comment dirais-je, collectif, et notamment plus de parlementarisme, plus de pouvoir pour les citoyens, des droits pour les citoyens de contrôler les élus,
05:15le droit de révoquer les élus. Peu importe, il y a tout un débat qui est ouvert aujourd'hui. Emmanuel Macron doit-il démissionner ou pas ?
05:21Mais cette question ne doit pas être posée comme une supplique en direction du président de la République, mais c'est un pouvoir citoyen.
05:27Nous ne sommes pas des citoyens en culot de courte entre deux élections. C'est du moins l'idée que je me fais. Nous avons le droit de continuer à avoir
05:34une possibilité d'intervention civique et politique proposée sur les choix, même entre deux rendez-vous électoraux. Et la Ve République,
05:40c'est une fois tous les cinq ans, élis ton monarque, et entre-temps, ferme-la. Moi, je ne suis pas d'accord. La VIe République que je plaide pourrait être celle-là,
05:47en finir avec le présidentialisme, comme on dit dans notre jargon, cette monarchie présidentielle qui pourrit tout et qui impose aux Français, écoutez-moi les Français,
05:54vous le savez d'ailleurs, une réforme des retraites, par exemple, qui impose à près de 30 millions de salariés deux ans de travail de plus alors qu'il n'y a
06:01aucune majorité sociale, aucune majorité politique pour ça. Donc, révoltons-nous, refusant la banalisation de l'autoritarisme.
06:07– En attendant, Alexandre Ferrand. – C'est le sujet Ferrand, c'est-à-dire que derrière ça, pardon, Richard Ferrand, si vous m'écoutez,
06:12parce que vous prenez pour le coup, mais c'est la marque d'une absence, comment dirais-je, de règles éthiques, je nomme mon plus proche.
06:18Et il y a aussi un dernier argument. Richard Ferrand a déclaré dans la presse, dans Le Figaro, qu'il était de ceux qui pensaient que peut-être
06:25on pourrait imaginer qu'Emmanuel Macron, s'il venait à démissionner avant la fin de son mandat, pourrait se représenter pour un troisième mandat.
06:31C'est une idée quand même de tord encombreuse. – Vous lui demandez d'être clair là-dessus ?
06:34– De toute façon, je lui demande de ne même pas être là dans l'essence, donc vous voyez.

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