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Morandini Live : Les larmes du médecin de 64 ans défiguré dans son cabinet de Drancy - VIDEO

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00:00On est en direct donc avec le docteur Mohamed Oulmeki. Bonjour docteur, merci d'être en direct avec nous et c'est vrai que c'était important de vous avoir ce matin
00:08puisque le verdict est tombé hier. D'abord, vous l'avez revu, votre agresseur, comment ça s'est passé lors du procès ? Il s'est excusé ? Il a dit quelque chose ?
00:18Non, il ne s'est pas excusé, il a passé son temps à rigoler pendant toute l'audience. C'est la double peine pour moi.
00:28A aucun moment il s'est tourné vers vous ? Il vous a dit je suis désolé, je me suis énervé ? A aucun moment. A aucun moment.
00:38Donc la décision de justice, je ne sais pas si vous voulez que je vous la rappelle, c'est trois semaines de travaux d'intérêt général, un an d'illégibilité,
00:472000 euros d'amende et interdiction de venir au cabinet sans que j'ai aucune garantie qu'ils ne le fassent pas.
00:55Comment vous avez réagi en entendant ce verdict ? J'étais écœuré, il n'y a pas d'autre terme, écœuré. La douleur que j'ai subie je crois est pire,
01:07hier est pire que ce que j'ai subi quand j'avais le nez cassé. Vous vous dites quoi aujourd'hui ?
01:23Docteur, on sent votre émotion encore aujourd'hui, bien évidemment. Oui, désolé, vraiment je suis désolé. Ce que je voulais dire, merci déjà de me donner l'occasion
01:37de pouvoir moi m'exprimer hier. Je n'ai pas eu l'occasion de dire un mot pendant tout le procès. Pas un mot. La décision qu'on vient de dire,
01:51c'est vraiment légitimer la violence faite aux médecins et aux soignants en particulier. Je ne sais pas. Sincèrement, je voudrais avoir votre opinion.
02:02Qu'est-ce que vous pensez, vous, de cette décision ? La sanction, c'est pareil que si on volait un scooter. Je ne sais pas. Franchement, ça m'a laissé sans voix.
02:17Vous avez le sentiment, et c'est ce que vous dites, parce qu'il a frappé très fort. On a vu les photos tout à l'heure. Il vous a massacré, il vous a défiguré.
02:24Vous auriez pu y rester. Et en fait, votre sentiment, c'est en gros l'avis d'un médecin ne vaut rien ? Ne vaut rien, exactement. Je porte encore les séquelles.
02:34Avant, je vous avais dit que l'odorat, ça peut peut-être revenir. Maintenant, c'est définitif. Je n'ai plus d'odorat, plus de goût. Je dois refaire un scanner des dents,
02:45parce qu'il y a des racines des dents de matière supérieure qui sont certainement nécrosées. Donc, il va falloir refaire ça.
02:53Mais le but de mon intervention, ce n'est pas le matériel. Moi, j'aurais voulu une décision qui soit à la hauteur du préjudice que j'ai subi.
03:04Ce n'est pas une question d'argent. Ce n'est pas ça le plus important.
03:09Docteur, on s'était parlé quelques heures après votre agression et vous aviez témoigné de façon courageuse. Vous avez témoigné en plus à visage découvert.
03:17Mais je vous sens aujourd'hui encore plus touché, on l'a vu tout à l'heure avec votre émotion, encore plus touché, encore plus ému par le verdict que par ce qui vous est arrivé.
03:28Tout à fait, tout à fait. Sincèrement, je me suis fait violence pour reprendre. Chaque jour, quand je revenais au cabinet, c'était la peur au ventre pour retravailler.
03:38Je me dis que ce n'est pas grave. Je le fais pour les patients, pour tous les autres patients qui n'y sont pour rien et qui sont gentils et pour lesquels je vais tout faire.
03:45Mais avec la décision d'hier, sincèrement, je me dis mais on va où ? On va où ? Il aurait fallu qu'il me tue pour qu'on fasse, je ne sais pas, même pas trois jours en sursis.
03:58Rien. La prison, on n'en a même pas parlé. Pas de brasser l'extrême. Je ne demande pas, je ne veux pas qu'on fasse une peine disproportionnée.
04:08Mais là, elle est disproportionnée dans l'autre sens. J'espère que le parquet, parce que seul le parquet peut faire appel de cette décision, va avoir la clairvoyance et juger s'il pense que c'est ça la justice.
04:23Je n'ai plus rien à dire.
04:25Docteur, reste avec nous parce qu'on a sur ce plateau une sénatrice. On a Nathalie Goulet qui est sénatrice. Qu'est-ce que vous auriez envie de dire à ce docteur, madame la sénatrice ?
04:33D'abord, je comprends évidemment son émotion qu'on partage parce que, vous savez, on est tous des victimes en puissance de cette espèce de criminalité de voisinage.
04:44Je pense que le parquet fera appel. Je ne sais pas si vous vous souvenez, il y a quelques semaines, des enseignants qui avaient été menacés, les auteurs avaient eu une peine très très faible.
04:52C'est un encouragement à recommencer.
04:54Tout à fait.
04:55Et ça, c'est inacceptable dans la société. Donc, vous avez évidemment, docteur, tout notre soutien. C'est évident. Je suis certaine que le parquet fera appel.
05:03Ce n'est pas possible. D'abord, pour la victime, pour l'ensemble des victimes et puis pour l'exemplarité de la peine, c'est inacceptable.
05:10Mais vous comprenez son désespoir, on l'a entendu tout à l'heure. En fait, c'est désespérant d'entendre des décisions comme ça. Comment ça s'explique aujourd'hui qu'on puisse avoir des décisions comme ça ?
05:19Vous savez, le vieux principe qui consiste à ne pas commenter une décision.
05:23Non, mais c'est trop facile, ça.
05:24Oui, justement, c'est parce que je suis en train de faire. Je suis en train de dire que c'est inacceptable et que le parquet va faire appel.
05:30Je pense que c'est une incompréhension complète et un mépris du droit des victimes. Et ça, je crois que ce n'est pas possible.
05:35Le policier, Jean-Pierre Colombias.
05:37Oui, effectivement, le juge est souverain dans sa décision, même quand elle est parfaitement incongrue et incompréhensible et totalement décalée.
05:45Et qu'elle constitue quasiment une incitation à poursuivre dans ce parcours.
05:49Vous savez quoi ? Je vais faire un parallèle qui va peut-être vous choquer, mais je le fais avec l'affaire de cette pauvre enfant de Louise et d'Elias.
05:57Pourquoi ? Parce qu'on est face à chaque fois à des cas où on est confronté à des auteurs de crimes et de délits qui n'ont peur de rien.
06:05Et pour qui, surtout, l'autre n'est rien. Et surtout, la victime potentielle n'est rien.
06:09Elias est agressé par deux types qui trouvent parfaitement normal de le planter, je reprends leur terme.
06:15Et puis, Louise est face, à un moment donné, à un type qui, pour, je dirais, exprimer sa frustration, quel qu'elle soit, trouve rien de mieux que de massacrer une enfant.
06:25Et là, on a un autre gars, d'ailleurs c'est à peu près... Bon, c'est pas la même génération, ceux d'Elias sont plus jeunes, mais Owen est l'agresseur du docteur, c'est la même génération, une vingtaine d'années.
06:35On se rend bien compte que notre société, notre système éducatif, social a engendré des monstres pour qui la frustration n'a plus aucun frein.
06:43— Mais c'est la faute de la société, hein. — Des politiciens. Non, non, non. Des politiciens.
06:47— Non, non, parce que les lois, elles existent. Excusez-moi. Les lois, elles existent. — C'est pas leur application. Non, non.
06:51— Ah bah oui, mais l'application, c'est pas les politiciens. L'application, c'est les juges. Non. Bah non.
06:55— Si, je vous expliquais pourquoi. Pour une raison simple, c'est que dans bien des cas, l'insuffisance des capacités carcérales fait qu'on n'arrive pas à...
07:01— Non, mais là, du sursis... Si l'agresseur du docteur avait été condamné de la prison avec du sursis, il n'y a pas de problème de capacités carcérales. Excusez-moi.
07:09— Bah non. Juste, docteur, vous allez continuer quand même à exercer ? — Sincèrement, autant la dernière fois, je vous avais dit que je suis en train de me donner le temps
07:19pour permettre aux patients de retrouver quelqu'un et tout, mais dans ces conditions, c'est impossible. Franchement, c'est impossible.
07:25C'est écoeuré. Je me suis fait violence pour venir ce matin. Je vous jure. Et pourtant, je suis d'une nature plus...
07:37Non, je ne suis pas quelqu'un de stressé de façon habituelle. Hier, j'ai envisagé... Sincèrement, si j'avais des médicaments sous la main, je crois que j'aurais mis une fin à mes jours.
07:53Je suis écoeuré, écoeuré. — Enfin docteur, c'est compliqué de vous entendre dire ça quand même.
07:59— Non mais il y a un choc. — Franchement, qu'est-ce que vous voulez ? Quand on attend... Je veux dire ça faisait combien de semaines que j'attendais réparation ?
08:09Mais au moins un semblant de justice. S'il aurait eu, je sais pas, 3 mois avec sursis, j'aurais été un peu... Mais là, 3 semaines d'intérêt, c'est quoi ?
08:19C'est ça, ce que ça vaut d'avoir agressé un médecin dans son cabinet, donc qui est là pour soigner le tout-venant sans faire distinction entre les gens,
08:31qu'ils aient les moyens ou qu'ils aient pas les moyens. On soigne tout le monde de la même façon. On est dévoués à notre métier. Et tout ça pour ça.
08:41— Vous comprenez aussi que vous entendez parler de suicide sur cette décision. C'est quand même très très violent. Très très violent pour vous, bien évidemment, et pour les gens qui nous regardent.
08:53— Oui. Oui. Franchement, je laisse les gens juger... Je laisse les personnes juger... — Surtout, docteur, battez-vous. Battez-vous. Et surtout, baissez pas les bras.
09:06— Il faut être à côté de lui. Il faut être à côté de lui. — Voilà. Enfin penser au suicide sur une décision de justice, c'est quelque chose qui est terrible.
09:12Battez-vous. Battez-vous, docteur. Baissez pas les bras. Battez-vous. Et c'est grâce à des gens comme vous, justement, qu'on peut faire bouger les choses.
09:18C'est grâce à des gens comme vous qu'on peut faire avancer les choses. Surtout, pensez pas au suicide.
09:22— Dans l'état de droit, c'est pour le défendre, lui. — Juste un mot, Andréa Cotarac. C'est vrai, je dois avouer qu'il m'a un peu glacé, le médecin, avec ces derniers mots.
09:30— Je pense qu'on n'a pas de mots assez puissants. Quand on écoute le docteur Oulmeki, moi, j'aimerais lui dire qu'on lui apporte tout notre soutien.
09:38Il n'est pas question de suicide. C'est pas vous qui êtes fautif. C'est pas vous qui êtes fautif. Vous menez votre mission. Vous vous êtes fait agresser.
09:46Et la décision de justice, force est de constater, n'est pas du tout à la hauteur. C'est pas vous qui êtes fautif.
09:52Et je pense que l'ensemble des téléspectateurs aujourd'hui vous soutiennent, parce que vous avez dit tout à l'heure, et je pense que vous avez le courage,
10:01ne serait-ce que d'intervenir sur ce plateau. Parce que quand on est agressé, quand l'agresseur sourit, se croit tout puissant et qu'il est peut-être dans les parages,
10:09il faut avoir du courage pour intervenir sur la télévision. Et donc je vous remercie. Par ailleurs, vous avez dit quelque chose tout à l'heure d'intéressant.
10:16Je pense que ce cas d'espèce, c'est pas un fait divers. C'est un fait de société. Vous avez parlé tout à l'heure des soignants.
10:23Il y a eu 18 700 signalements de violence en 2022, c'est-à-dire sur un an. C'est 51 signalements par jour des aides-soignants, des infirmiers, des médecins.
10:35Et on peut aller au-delà. On a une explosion des violences contre les élus, contre les professeurs, contre tous ceux qui mènent une mission de service public ou de service à la population.
10:44Donc maintenant, deux choses d'une, c'est que là on se met tous à votre place parce qu'objectivement on est tous émus par votre témoignage.
10:51Moi je me mets à la place de votre agresseur. Quel est le sens de la peine ? Est-ce qu'il a compris quand on se croit tout puissant, souriant au tribunal comme vous l'avez expliqué,
11:01et qu'on se retrouve à avoir cassé la gueule d'un médecin, à l'avoir défiguré, et dans le même temps à avoir trois semaines d'intérêt général qui peut-être ne seront même pas exécutées,
11:10parce que c'est généralement le cas, on va se le dire. Quel est le sens de la peine ? Aucune. Je veux dire, là c'est l'État qui est en responsabilité.
11:18Quand l'intégrité physique n'est plus sacralisée dans notre pays, elle n'est plus sacralisée dans notre pays.
11:23Moi je pense qu'il faut des peines planchées, d'une part quand on s'attaque à une personne, à l'intégrité physique, mais aussi il faut supprimer les peines d'aménagement
11:31pour des personnes qui ont attaqué l'intégrité physique de quelqu'un, pour une peine parfois minime, parce que monsieur Morandini vous avez dit six mois avec sursis,
11:39ou s'il avait du sursis. Mais généralement, toutes ces peines d'aménagement ne sont pas exécutées. Je veux dire, quand vous avez attaqué quelqu'un, atteint l'intégrité physique de quelqu'un,
11:49vous devez avoir une peine beaucoup plus sévère, même si c'est deux mois avec sursis.
11:53– Docteur, bon courage, merci d'avoir témoigné.
11:57– Merci infiniment de m'avoir donné l'occasion de vous le dire tous au moins.
12:03– Vous avez tout notre soutien je crois.
12:05– Merci beaucoup.
12:06– On est avec vous docteur, et continuez à nous tenir au courant de l'évolution et s'il y a appel, etc.
12:12Mais on est avec vous et surtout, je vous le redis vraiment, sincèrement, les yeux dans les yeux, surtout ne baissez pas les bras.
12:17Ne baissez pas les bras, ce serait donner raison à votre agresseur, ce serait lui dire que c'est lui qui a gagné,
12:22et il ne peut pas gagner, les agresseurs ne peuvent pas gagner docteur.
12:25Tenez bon.
12:26– Merci infiniment.
12:27– Merci.

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