À partir de 1933, le régime totalitaire nazi musèle toute forme d'opposition politique et les juifs deviennent ouvertement une cible prioritaire. Le tout sous l'oeil de représentants de la presse internationale présents sur place. Comment les médias ont-ils couvert la mise en oeuvre du nazisme en Allemagne au milieu des années 30 ?
Pour en parler, Jean-Pierre Gratien est en compagnie de l'auteur et réalisateur de documentaires, Jean Bulot, du journaliste, Daniel Schneidermann et de l'historienne, Hélène Miard-Delacroix.
LCP fait la part belle à l'écriture documentaire en prime time. Ce rendez-vous offre une approche différenciée des réalités politiques, économiques, sociales ou mondiales....autant de thématiques qui invitent à prolonger le documentaire à l'occasion d'un débat animé par Jean-Pierre Gratien, en présence de parlementaires, acteurs de notre société et experts.
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#LCP #documentaire #debat
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NewsTranscription
00:00:00Générique
00:00:02...
00:00:16Bienvenue à tous. Une fois nommé chancelier,
00:00:19le 30 janvier 1933, il aura fallu bien peu de temps
00:00:22à Adolf Hitler pour installer le régime nazi
00:00:25en Allemagne, un régime totalitaire
00:00:28où toute forme d'opposition politique est muselée
00:00:31et où les Juifs deviennent ouvertement
00:00:33une cible prioritaire, le tout sous l'oeil
00:00:35de représentants de la presse internationale
00:00:38présents sur place. Voilà ce que va nous raconter
00:00:41en image le documentaire exclusif qui va suivre,
00:00:44avant la catastrophe, la naissance de la dictature nazie,
00:00:471933-1936. Je vous laisse le découvrir
00:00:50et je vous retrouverai juste après,
00:00:52en compagnie de son auteur et son réalisateur,
00:00:54Jean Bulot, ainsi que le journaliste
00:00:56Daniel Schneiderman et l'historienne Hélène Millard-de-la-Croix.
00:01:00Avec eux, nous nous interrogerons sur cette couverture médiatique
00:01:04de la mise en oeuvre du nazisme en Allemagne
00:01:06au coeur des années 30. Bon doc.
00:01:08...
00:01:15-"Dès leur arrivée au pouvoir, en janvier 1933,
00:01:18les nazis ont voulu mettre en ordre l'image
00:01:21que le monde avait d'eux."
00:01:23...
00:01:29-"Les villes comme les rues sont devenues des décors de défilés
00:01:32et de rituels joués et rejoués."
00:01:35...
00:01:38-"Un spectacle permanent,
00:01:40durant lequel les nazis célébraient une communauté du peuple,
00:01:43imaginaire, basée sur la suprématie d'une race,
00:01:46aryenne, blanche et non juive."
00:01:49...
00:01:52-"Parmi la foule des spectateurs,
00:01:54il y avait des centaines de journalistes étrangers
00:01:57qui ont couvert la naissance de ce nouveau régime."
00:02:00...
00:02:01-"Si certains d'entre eux ont accepté les règles
00:02:04comme les secrets des nouveaux maîtres de l'Allemagne,
00:02:07d'autres ont fait le choix de raconter le hors-champ de la dictature,
00:02:10au risque d'être reconduits à la frontière,
00:02:12comme ce journaliste britannique."
00:02:14...
00:02:23...
00:02:26Presque un siècle plus tard,
00:02:28que nous apprennent ces articles lus et publiés
00:02:30à l'aube du Troisième Reich ?
00:02:32Que savait-on de la vie des Allemands,
00:02:35partisans comme ennemis du régime ?
00:02:37Qu'est-ce qui a été dit et caché
00:02:39des premiers mensonges et crimes d'Hitler ?
00:02:42Avant la guerre,
00:02:44avant la catastrophe.
00:02:45...
00:02:54...
00:03:0210 février 1933.
00:03:04Les partisans nazis se retrouvent une nouvelle fois
00:03:07au Sports Palace de Berlin.
00:03:09Des sénombres s'éloignent de l'église
00:03:11et de l'église de Berlin.
00:03:13Dès sa nomination à la chancellerie,
00:03:15leur chef, Adolf Hitler, a obtenu du président Hindenburg
00:03:18la dissolution du Parlement.
00:03:20Mais à quelques jours du scrutin,
00:03:23en pleine nuit,
00:03:24le Reichstag, symbole de la République de Weimar,
00:03:27sombre dans les flammes.
00:03:28...
00:03:30Dès l'aube, les journalistes étrangers sur place
00:03:33transmettent leurs articles par téléphone à leur rédaction.
00:03:36Parmi eux, le correspondant permanent du Chicago Daily,
00:03:40Parmi eux, le correspondant permanent du Chicago Daily News,
00:03:44l'américain Edgar Hanselmaurer.
00:03:46...
00:03:4828 février 1933.
00:03:51Le Reichstag allemand a été ravagé par les flammes
00:03:54la nuit dernière.
00:03:55On prétend que l'incendie serait l'oeuvre
00:03:58d'un incendiaire néerlandais,
00:03:59Marinus van der Leube,
00:04:01membre du Parti communiste.
00:04:03...
00:04:06On suppose qu'il aurait réussi à se faufiler
00:04:08ou qu'il aurait été introduit par des amis du Parti
00:04:11dans le bâtiment du Reichstag, qui est très soigneusement surveillé.
00:04:15Le chancelier Adolf Hitler,
00:04:17le viche chancelier Franz von Pappen
00:04:19et le ministre Hermann Göring
00:04:21sont personnellement arrivés sur les lieux du bâtiment en flammes
00:04:25en un temps record.
00:04:26Alors que des communistes individuels
00:04:28exprimaient leur totale incrédulité
00:04:30quant au fait que leur parti puisse avoir eu quelque chose à voir
00:04:34avec un incendie criminel,
00:04:35le gouvernement a agi avec une énergie inattendue.
00:04:38...
00:04:40Cet incendie du Reichstag va donner le prétexte aux nazis
00:04:44de faire tomber la chape de plomb de la dictature.
00:04:47De quelle manière ?
00:04:48Le lendemain, le 28 février 1933,
00:04:52le président du Reich, poussé par son chancelier Hitler,
00:04:56va signer une ordonnance
00:04:58sur la protection de l'Etat et du peuple allemand.
00:05:00...
00:05:02Cette ordonnance, elle abroge
00:05:05un nombre considérable de libertés individuelles,
00:05:09la liberté de réunion, la liberté de la presse.
00:05:12Elle autorise l'Etat à, non seulement,
00:05:15mettre en détention les gens,
00:05:17mais à faire des fouilles chez eux, etc.
00:05:19...
00:05:22Pendant les 100 premiers jours,
00:05:24mais on peut l'élargir aussi à toute l'année 1933,
00:05:28le régime nazi va vraiment cibler les opposants politiques
00:05:32et s'émerveiller de terreur.
00:05:35La répression contre les communistes,
00:05:37les syndicalistes, les socialistes,
00:05:40allemands non-juifs ou allemands juifs,
00:05:42sera féroce.
00:05:44Et portée notamment par les paramilitaires SA,
00:05:48qui, là, vont vraiment passer à des méthodes de torture,
00:05:52à des incarcérations sans fondement juridique.
00:05:57...
00:05:59Dans 5 jours auront lieu des élections,
00:06:02au cours desquelles le parti d'Hitler espère,
00:06:04avec ses alliés nationalistes,
00:06:06obtenir une majorité complète,
00:06:08ce qui leur permettrait de concrétiser leurs revendications
00:06:11pour 4 années de règne ininterrompue.
00:06:13...
00:06:18Le 5 mars 1933, les bureaux de vote ouvrent.
00:06:22Près de 12 millions d'Allemands votent
00:06:24pour des candidats communistes et sociodémocrates.
00:06:27Un score insuffisant pour renverser le gouvernement d'Hitler,
00:06:30qui obtient le vote des pleins pouvoirs.
00:06:33Merde.
00:06:34...
00:06:35Progressivement, par décrets successifs,
00:06:38la dictature s'abat sur l'ensemble du Reich
00:06:40et détruit peu à peu la République de Weimar.
00:06:43...
00:06:46Quelques touristes se retrouvent pris dans la nasse du nouveau régime.
00:06:49La presse internationale s'en fait l'écho.
00:06:51...
00:06:54Wolf, qui est venu en Allemagne il y a 3 semaines pour une visite,
00:06:58a juré qu'à 5h du matin, samedi,
00:07:005 hommes en uniforme ont fait irruption dans sa chambre,
00:07:04l'ont battu et l'ont emmené dans un endroit
00:07:06qu'ils pensaient être le quartier général des nazis.
00:07:09...
00:07:10Là, ils l'ont retenu prisonnier,
00:07:12ligoté et baillonné dans une pièce sombre pendant 2 heures.
00:07:16Puis, ils lui ont fait signer une déclaration comme suit.
00:07:19...
00:07:21« Je suis juif.
00:07:22Je partirai pour Paris par le premier train.
00:07:25Je promets de ne plus jamais revenir en Allemagne.
00:07:27Aucune violence n'a été commise
00:07:29et aucun bien ne m'a été enlevé. »
00:07:31...
00:07:33L'ASA a ouvert, dès fin janvier 1933,
00:07:37plusieurs centaines de camps de concentration sauvage,
00:07:40dans des caves, dans des cinémas, dans des entrepôts,
00:07:42dans des brasseries, dans des locaux commerciaux,
00:07:45au cœur même des villes,
00:07:46où elles se livraient à toutes sortes d'exactions.
00:07:49Ils l'ont ensuite emmené en voiture dans la forêt de Grönwald,
00:07:52dans la banlieue ouest de Berlin.
00:07:55Wolf a juré et a été jeté hors de la voiture.
00:07:58Il est retourné au consulat général,
00:08:00a rapporté l'affaire et est reparti.
00:08:04Wolf aurait admis avoir fait des remarques défavorables sur Hitler,
00:08:07en public, avant l'agression.
00:08:10C'était désastreux en termes de politique de communication
00:08:14à l'égard de la population allemande et de l'étranger,
00:08:17dans la mesure où la hiérarchie nazie
00:08:19voulait se poser en pacificatrice et ordonnatrice du pays.
00:08:24De ces violences des groupes SA nazis,
00:08:27il demeure quelques images.
00:08:29Cet homme était député social-démocrate.
00:08:33Cela nettoie des taxes anti-hitlériens.
00:08:37Celui-ci, enfin, aux pantalons coupés,
00:08:40était avocat, allemand et juif.
00:08:44Alors qu'il était venu porter plainte, on le tabassa,
00:08:47puis le jeta dans la rue avec cette pancarte,
00:08:49« Je ne me plaindrai plus à la police. »
00:08:52De nombreux journaux américains choisissent cette photo
00:08:55pour illustrer la terreur nazie.
00:09:00On sait ce qui se met en place.
00:09:02On sait les premières mesures de persécution,
00:09:05les vitrines cassées, etc.
00:09:07Il y a des images fortes, l'humiliation des Juifs,
00:09:10les premières mesures d'exclusion sociale,
00:09:12qui sont doublées par la mise en place d'un régime,
00:09:15d'une vraie dictature.
00:09:17Donc, c'est un peu comme si on avait un régime
00:09:20et une vraie dictature.
00:09:22Donc, tout ça, je pense,
00:09:24est facilement assimilé par l'opinion publique.
00:09:26Sa propre image à l'étranger est très importante pour le régime.
00:09:31C'est pourquoi on crée le ministère de la Propagande,
00:09:35avec Goebbels comme nouveau ministre,
00:09:37et qu'on le dote de ressources financières abondantes.
00:09:41Le principal objectif est avant tout de rayonner vers l'extérieur.
00:09:46C'est une mission qui va remplir avec un immense talent,
00:09:49parce que c'est quelqu'un d'extrêmement intelligent.
00:09:51C'est le seul diplômé du cercle dirigeant en Asie.
00:09:54Il est docteur en littérature
00:09:56et il est responsable de la propagande du parti nazi
00:09:59depuis quelques années à l'échelle du Reich.
00:10:01Donc, là, il prend possession d'un ministère
00:10:04que l'on crée pour lui.
00:10:05Et, en l'occurrence, il va donner à voir le monde
00:10:09tel que les nazis veulent qu'on le voie.
00:10:15Pour cela, le gouvernement publie un décret
00:10:17qui condamne toute personne
00:10:19faisant des déclarations susceptibles de nuire au Reich.
00:10:23Les Allemands sont réduits au silence.
00:10:26Les journalistes étrangers, eux, perdent leurs témoins,
00:10:29comme le souligne la plume à serbe Edgar Hanselmohrer.
00:10:34De toute évidence, avec le pouvoir entre ses mains,
00:10:38selon cette disposition de décider ce qui est vrai ou non,
00:10:41le gouvernement pourrait être encore plus efficace
00:10:44pour empêcher la connaissance de la barbarie récente
00:10:47à la majorité des Allemands.
00:10:50Parallèlement à l'annonce de ces décrets,
00:10:53une campagne fantastique est menée
00:10:54pour discréditer les correspondants des journaux étrangers en Allemagne,
00:10:58accusés d'exagérer à l'infini l'abomination dans le pays.
00:11:04Edgar Hanselmohrer, par rapport à la communauté
00:11:07des journalistes occidentaux à Berlin, c'est l'exception.
00:11:10C'est-à-dire, c'est celui qui ne va pas jouer le jeu.
00:11:12Dès avant l'arrivée des nazis au pouvoir,
00:11:15il va écrire un livre dans lequel il raconte la pression quotidienne
00:11:19que font peser les SA à Berlin et dans toutes les villes de l'Allemagne.
00:11:23Donc déjà, quand ils arrivent au pouvoir,
00:11:25les nazis l'ont dans le collimateur, celui-là.
00:11:27Ils ont décidé de se le faire.
00:11:31Après l'accession au pouvoir de Hitler,
00:11:33la pression sur les journalistes étrangers en Allemagne s'est bien sûr accrue.
00:11:39Le régime a ainsi pris toutes sortes de mesures
00:11:42pour surveiller les téléphones et les télégrammes.
00:11:46Certains journalistes avaient même l'impression
00:11:49que leur domicile était fouillé lorsqu'ils n'étaient pas chez eux.
00:11:53Alors que dans les premiers mois du nazisme,
00:11:56on pouvait imaginer que des opposants
00:12:00se retrouvent la nuit,
00:12:03notamment dans le jardin zoologique de Berlin,
00:12:06à la faveur de l'obscurité,
00:12:08pour se passer des notes, des pièces, des infos.
00:12:12À partir d'un certain moment, c'est terminé.
00:12:16En ce printemps 1933,
00:12:18l'impact des articles des correspondants américains,
00:12:21dont ceux de Maurer,
00:12:22donne naissance à un mouvement de protestation
00:12:25sans précédent contre l'Allemagne nazie.
00:12:29Le 27 mars,
00:12:31plus de 50 000 personnes se retrouvent au Madison Square Garden.
00:12:36Face à l'émotion internationale,
00:12:38le ministre de la Propagande allemande, Joseph Goebbels,
00:12:41imagine un coup de force politique et médiatique.
00:12:46Hitler et Goebbels,
00:12:48complètement pris dans leur paranoïa antisémite,
00:12:52estiment que la presse internationale est tenue par les Juifs.
00:12:55Pour eux, c'est logique.
00:12:57Leur idée machiavélique, qui apparaît comme totalement folle,
00:13:00c'est de dire que les journalistes internationaux
00:13:03sont pour la plupart Juifs,
00:13:04nous allons menacer les Juifs allemands
00:13:06et faire taire la presse internationale.
00:13:10Le 1er avril 1933,
00:13:13Joseph Goebbels ouvre symboliquement la journée de boycott
00:13:16contre les magasins juifs d'Allemagne.
00:13:20Dans les rues des grandes villes,
00:13:22des dizaines de journalistes et envoyés spéciaux étrangers sont là,
00:13:26dont l'écrivain français Roger Vaillant,
00:13:28présent à Francfort pour Paris Soir.
00:13:32Voici comment cela se passa.
00:13:34Devant chaque porte de magasin juif,
00:13:36c'est-à-dire devant deux portes sur trois,
00:13:38il y eut soudain un nazi en uniforme.
00:13:42Les uns très jeunes, presque des enfants,
00:13:44souriaient aux jeunes filles et rougissaient
00:13:46si elles les regardaient avec insistance.
00:13:49D'autres aux visages ridés, dignes comme des magistrats.
00:13:54Tous graves et un peu solennels.
00:13:57La scène à laquelle Vaillant assiste et qui m'a frappé,
00:14:01c'est qu'il y a une armoire à glace,
00:14:03qui se trouve devant la porte du magasin.
00:14:06Arrive une jeune femme, 18-20 ans.
00:14:09Le SA lui dit qu'il n'entrait pas.
00:14:11Et Vaillant voit le SA rougir, manifestement intimidé
00:14:16par ce contact avec une jeune femme
00:14:18qu'il ne sait pas très bien comment appréhender.
00:14:22Des passants firent brusquement en cercle.
00:14:25La jeune fille n'avança plus, ne rentrant pas non plus.
00:14:28Elle resta là, immobile.
00:14:31Alors le nazi lui dit,
00:14:32vous êtes libre d'entrer tout de même si vous le voulez.
00:14:35Elle hésita encore un peu, puis soudain entra résolument.
00:14:40Le nazi resta immobile et silencieux.
00:14:42Le cercle des passants se dissipa.
00:14:46Comme il est écrivain et il aime bien cette scène,
00:14:50il en fait un peu le renfort de son reportage.
00:14:52Et du coup, ça atténue totalement, pour les lecteurs,
00:14:56la portée historique de ce boycott.
00:14:59Mais comment on peut lui reprocher ?
00:15:01On regarde ça aujourd'hui, presque un siècle plus tard,
00:15:04avec dans la tête et dans les yeux tout ce qui s'est passé depuis.
00:15:08Mais sur le moment, il n'en perçoit pas la portée politique.
00:15:14J'ai eu l'impression d'une grande manifestation totale.
00:15:17La foule, les spectateurs étaient très paisibles.
00:15:20Les hitlériens jouaient leur rôle très sérieusement.
00:15:23La mise en scène avait été minutieusement réglée.
00:15:29De grandes autos, pavoisées de drapeaux rouges à la croix gammée,
00:15:32passées lentement avec des pancartes sur lesquelles on lisait
00:15:35« n'achetez pas dans les magasins juifs ».
00:15:40À midi, dans les milieux officiels,
00:15:42on nous dit qu'aucun incident ne s'est encore produit dans la ville.
00:15:46Il ne s'agit d'ailleurs aujourd'hui que du prologue.
00:15:51C'est la volonté du parti, que ce soit calme et bien huilé.
00:15:54Ce que détestent les nazis, ça peut paraître paradoxal,
00:15:57c'est les effusions de violence, le sang.
00:16:00Ils veulent montrer qu'ils sont capables de régler
00:16:03ce qu'ils appellent la question juive d'une manière rationnelle,
00:16:07dépassionnée et organisée.
00:16:11Mais il faut toujours se méfier, c'est des images de propagande.
00:16:13On sait que pour ce boycott, comme pour d'autres événements,
00:16:16il y a des formes de violence
00:16:18mises en place par le parti, par les militants,
00:16:20mais aussi par la population.
00:16:24Le boycott des commerces juifs qui commence dès 1933
00:16:29est une sorte de test pour la presse allemande
00:16:32qui s'exprime encore contre le régime
00:16:34et qui doit être mise au pas.
00:16:37Et bien sûr, aussi pour la presse étrangère
00:16:39qui produit des récits hostiles au régime.
00:16:42C'est-à-dire qu'il y a une sorte de guerre journalistique
00:16:45entre la presse américaine et la presse allemande.
00:16:48Et le régime observe.
00:16:53Dans les jours qui suivent, plusieurs journaux internationaux
00:16:57racontent le hors-champ du boycott.
00:16:59C'est le cas du Manchester Guardian.
00:17:03Il n'est pas vrai que la terreur brune a cessé.
00:17:07Dans un village, une femme qui tenait une auberge
00:17:10fréquentée par des hommes du Reichsbanner
00:17:11a été traînée dans les rues après que ses cheveux ont été coupés.
00:17:17À Worms également, un certain nombre de Juifs ont été arrêtés,
00:17:22enfermés dans une porcherie et battus sur les fesses.
00:17:25Ensuite, on les a fait se frapper mutuellement.
00:17:31Le 7 avril, jour de la promulgation d'une loi
00:17:34qui exclut les Juifs de la fonction publique,
00:17:37Adolf Hitler s'adresse aux diplomates.
00:17:40En costume, le chancelier décrit la révolution nazie
00:17:44et tempère ses excès.
00:17:55...
00:18:12Comme on le constate au fil des ans,
00:18:16le nationalsocialisme devient avec le temps
00:18:19un mouvement transnational et finalement mondial.
00:18:22Hitler a l'intention notoire de conquérir le monde
00:18:27sur le plan politique et militaire.
00:18:31Il cherche aussi à le conquérir sur le plan médiatique
00:18:34et donc relativement tôt à gagner des batailles sur ce front.
00:18:38Il veut remporter ses victoires
00:18:41avant que n'éclate la véritable guerre.
00:18:45Dans les rangs des partisans et des compagnons internationaux,
00:18:48quelques journalistes étrangers acceptent de se prêter
00:18:51au jeu de la propagande.
00:19:15Les nazis n'ont pas eu à faire beaucoup d'efforts
00:19:18pour imposer leur vision du monde,
00:19:21en l'occurrence, leur vision de la biologie, du peuple, de la race.
00:19:25C'était leur très grande force
00:19:26de faire fond sur des idées très banales, très courantes,
00:19:31non seulement en Allemagne,
00:19:33mais dans tout l'Occident européen et nord-américain.
00:19:38Plusieurs patrons de presse américains, notamment,
00:19:41viennent visiter l'Allemagne au cours de l'année 1933
00:19:44et sont impressionnés.
00:19:47Ils sont impressionnés par une Allemagne qui se remet au travail,
00:19:51par une Allemagne où règne l'ordre.
00:19:53Ça leur plaît, ça, à des patrons capitalistes.
00:19:57On a un certain nombre d'exemples qui seront racontés dans les souvenirs,
00:20:01de débats entre les journalistes sur place et leurs patrons,
00:20:05les journalistes disant,
00:20:07attention, il y a quand même des problèmes
00:20:10avec l'opposition, les Juifs,
00:20:12et les patrons disant, ce que je vois, c'est un pays formidable
00:20:15où l'ordre règne.
00:20:18Parmi les expériences nazies
00:20:19qui soulèvent la curiosité de la presse internationale,
00:20:23il y a les camps de concentration.
00:20:26Ouverts depuis mars 1933,
00:20:28la dictature nazie y organise des visites
00:20:30pour certains journalistes étrangers.
00:20:36Aujourd'hui, cela semble étrange que le régime nazi
00:20:38n'ait pas fait des camps de concentration un sujet tabou.
00:20:42On voulait faire preuve d'une certaine transparence.
00:20:47C'était bien sûr des villages Potemkin.
00:20:50Quand les journalistes étrangers venaient visiter les camps de concentration,
00:20:53tout y était merveilleux et magnifique.
00:20:59On vendait les camps aux journalistes étrangers
00:21:01comme des centres de redressement pour les égarés politiques.
00:21:08Ces ennemis du régime,
00:21:10les sociodémocrates, les communistes, les syndicalistes, les juifs, etc.,
00:21:14qui sèment le chaos en Allemagne,
00:21:16sont ramenés à la raison et à récipicence
00:21:20dans le cadre d'un lieu parfaitement géométrisé,
00:21:24ordonné, où on fait de la gymnastique obligatoire le matin,
00:21:27où l'on est astreint à un travail,
00:21:29astreint à la discipline, à la propreté, etc.
00:21:33Donc, c'est un véritable lieu de promotion
00:21:36de la volonté et des régimes nazis.
00:21:39C'est le réussi du régime.
00:21:42On a des photographies officielles qui sont véhiculées dans la presse,
00:21:47où on voit, justement, l'appel, par exemple.
00:21:51On voit aussi l'espace où ils vivent.
00:21:56On laisse un tout petit peu entrevoir ce qu'est un camp de concentration.
00:22:01C'est, d'un côté, une volonté aussi pour communiquer la terreur
00:22:05et s'aimer la terreur,
00:22:06mais, d'autre côté aussi, c'était pas aussi réfléchi.
00:22:09On teste un peu ce que ça donne dans la société civile nazie.
00:22:15Une promotion éphémère qui ne dure que le temps des premiers mois.
00:22:19Pour entendre des voix discordantes sur les camps,
00:22:22c'est dans la presse militante qu'il faut se plonger.
00:22:25Dans la presse française engagée contre le régime hitlérien,
00:22:28il y avait le populaire,
00:22:30dirigé alors par le socialiste Léon Blum.
00:22:33En juin 1933,
00:22:35c'est lui qui envoie Daniel Guérin chercher les dernières voies
00:22:38de l'autre Allemagne.
00:22:44À quelques centaines de kilomètres d'ici,
00:22:47des hommes comme nous se meuvent dans un autre monde,
00:22:50un monde fermé,
00:22:52où rien de ce qui compose nos habitudes de penser,
00:22:55de sentir, de combattre, n'est plus admis.
00:22:57Un socialiste voyageant aujourd'hui de l'autre côté du Rhin
00:23:00a comme l'impression d'explorer, après un tremblement de terre,
00:23:04une cité en ruine.
00:23:05La peste brune a passé par là.
00:23:10Ce qui est intéressant dans le cas de Daniel Guérin,
00:23:14c'est qu'on a là quelqu'un qui vient en électron libre un peu.
00:23:17Il vient, il va rester plusieurs semaines, un mois,
00:23:20et puis après, il repart.
00:23:21Donc, il a une liberté de se dire
00:23:24que non pas les journalistes en poste à Berlin,
00:23:29qui doivent gérer les rapports avec le pouvoir nazi
00:23:33jour après jour,
00:23:34et qui sont toujours sous le coup d'une menace latente
00:23:38d'expulsion.
00:23:41Dans son périple, il fait d'abord face à la révolution nazie.
00:23:45Il s'infiltre dans ses lieux, interroge ses amis,
00:23:48et, dans le cadre de son voyage,
00:23:50il découvre qu'il n'y a pas d'économie,
00:23:52il s'infiltre dans ses lieux, interroge ses jeunes partisans,
00:23:56se plonge dans la littérature et les chants du régime.
00:23:59Au cinquième jour,
00:24:01le journaliste français croise un ami révolutionnaire,
00:24:04étudiant en droit, dont il fait le portrait.
00:24:09Je ne doute pas qu'il soit resté fidèle à ses convictions.
00:24:12Pourtant, quel étrange décor.
00:24:15Sur la table, sur le lit, sur le plancher,
00:24:18des ouvrages fascistes.
00:24:21Ce que cela signifie ?
00:24:23Mon pauvre vieux.
00:24:24Mais tout simplement que je prépare des examens de droit ?
00:24:27Parfaitement.
00:24:29Tu sais ou tu ne sais pas que, pour être un juge allemand,
00:24:32il faut avoir compris l'essence intime du nationalsocialisme.
00:24:37Alors, tu comprends, ces messieurs vont me faire subir
00:24:40un interrogatoire de cinq heures sur cette essence intime.
00:24:43Et je m'y prépare.
00:24:46La question qu'on doit se poser, c'est aussi qui est un nazi ?
00:24:50Donc, qui est un nazi ?
00:24:51Est-ce qu'un nazi, c'est une personne qui est membre du parti nazi ?
00:24:57Ou être nazi, est-ce que ça signifie se comporter en nazi,
00:25:01faire du nazisme dans la vie quotidienne ?
00:25:06Si on choisit cette dernière définition,
00:25:09alors, évidemment, on doit dire que la majorité de la société allemande
00:25:15était nazie, parce qu'on commence à s'adapter.
00:25:20C'est justement là où on peut dire que les gens font le nazisme.
00:25:25Et peu importe s'ils sont convaincus ou pas,
00:25:28rien par le fait d'assister à un tel spectacle
00:25:32donne de la légitimité à ce régime
00:25:37et contribue à cette hégémonie
00:25:41qui devient la culture nazie.
00:25:44Après plusieurs semaines de divagation, à Hambourg,
00:25:48près des chantiers des Grands Ports et dans les vieilles rues des quartiers d'Altona,
00:25:52Daniel Guérin pense trouver enfin l'autre Allemagne.
00:25:58Soudain, sur le trottoir, de grandes lettres blanches fraîchement tracées.
00:26:03Le communisme vit.
00:26:06Et si vous pénétrez dans les impasses nauséabondes,
00:26:09sous les voûts de Zoppan,
00:26:11vous pouvez lire sur tous les murs de semblables inscriptions.
00:26:14« Abba Hitler, vive la Révolution ! »
00:26:18Dès l'hiver 1933,
00:26:20la vie publique est impossible pour un opposant au régime,
00:26:25et singulièrement pour un syndicaliste et un militant de gauche.
00:26:29Vous avez des militants de base ou des sympathisants de base
00:26:32qui peuvent pratiquer non plus de la politique,
00:26:36mais de l'infrapolitique.
00:26:38Du graffiti, du papillon,
00:26:40distribué sous forme de papier, parfois même rédigé à la main,
00:26:44qui peut également rester bras croisés
00:26:48lors d'une cérémonie où tout le monde est censé tendre le bras
00:26:51dans le sallut nazi.
00:26:55Donc vous avez tous ces éléments d'un registre infrapolitique
00:27:01qui sont mobilisés par des gens qui,
00:27:04très courageusement, veulent montrer qu'il existe une autre Allemagne,
00:27:09qu'elle est dormante, peut-être,
00:27:12parce qu'écrasée par une chape de plomb et par une botte,
00:27:16mais qu'elle demeure.
00:27:21Le 14 juillet 1933,
00:27:23le Mouvement National Socialiste devient le seul parti autorisé
00:27:27sur l'ensemble du Reich.
00:27:30Toute critique de l'Allemagne,
00:27:33toute critique se limite désormais aux secrets des maisons et à l'intimité.
00:27:40Les journalistes étrangers les plus virulents, eux, sont expulsés.
00:27:45Après des semaines de pression et de menaces,
00:27:47Edgar Hanselmorrer quitte l'Allemagne en août 1933.
00:27:53L'expulsion de Morrer va avoir un effet dissuasif très fort
00:27:58sur la communauté des correspondants occidentaux à Berlin,
00:28:03en leur montrant bien qu'il y a certaines limites qu'il ne faut pas franchir.
00:28:09L'expulsion doit rester le dernier recours.
00:28:11On ne peut pas l'utiliser de manière inflationniste
00:28:14et se débarrasser constamment de tout le monde.
00:28:17On tolère donc de nombreux articles critiques et négatifs.
00:28:22Mais disons qu'il est toujours judicieux,
00:28:24deux à trois fois par an, d'expulser quelqu'un.
00:28:26Cela arrive toujours.
00:28:56À l'automne 1933, Joseph Goebbels se rend à Genève,
00:29:00au siège de la Société des Nations.
00:29:27Hitler est présenté, et se présente lui-même à la presse internationale
00:29:30dans des grands entretiens très complaisants,
00:29:33qui font la une de journaux français, britannique, américain.
00:29:37Il se présente comme der Friedenskanzler, le chancelier de la paix.
00:29:41L'argumentation est très convaincante.
00:29:43« Je suis un ancien combattant, j'ai connu l'horreur de la guerre,
00:29:46j'ai connu l'horreur de la guerre,
00:29:48j'ai connu l'horreur de la guerre,
00:29:50j'ai connu l'horreur de la guerre,
00:29:52j'ai connu l'horreur de la guerre,
00:29:55j'ai connu l'horreur des tranchées, plus jamais ça. »
00:30:03Et c'est ce que l'on a envie d'entendre à l'étranger.
00:30:06Donc, on achète ça, on le reçoit, et on l'accepte,
00:30:10parce que c'est doux aux oreilles d'opinions publiques,
00:30:14qui sont horrifiées
00:30:16par une guerre qui a fait 20 millions de morts,
00:30:18et qui est au fond la venveille.
00:30:24Donc les nazis c'est la paix, disent-ils. La guerre c'est les juifs, c'est les
00:30:31communistes, c'est les sociodémocrates. Et ça c'est parfaitement reçu à
00:30:36l'étranger. Hitler manie avec un cynisme absolu, un double standard, dans la parole
00:30:43toujours apaisé, toujours dire que tout va bien aller, toujours appeler à la paix
00:30:48et faire exactement l'inverse dans les actions.
00:30:51En fait Hitler sait qu'il va à la guerre, la remilitarisation de l'Allemagne c'est
00:30:55très très tôt dans le Reich, mais il ne veut pas que ça déclenche une
00:30:59conflagration internationale au mauvais moment.
00:31:03Fin octobre, l'Allemagne quitte la Société des Nations pour protester contre les
00:31:08contraintes du traité de Versailles qui pèse sur son armée, qu'elle reconstruit
00:31:12pourtant de façon clandestine.
00:31:14C'est un tabou, mais c'est aussi un secret de polichinelle.
00:31:18Chacun essaie donc d'y faire face à sa manière, mais parmi ceux qui souhaitent
00:31:22rester plus longtemps à Berlin, qui souhaitent être accrédités comme
00:31:25correspondants étrangers, qui apprécient ce travail et souhaitent passer les
00:31:29prochaines années auprès de ce régime, aucun n'écrit à ce sujet de manière
00:31:34très critique.
00:31:35C'est impossible à dissimuler. Quand vous produisez un
00:31:40armement pour passer d'une armée de 100 000 hommes à une armée de 3 millions,
00:31:44puis de 5 millions d'hommes, quand vous multipliez par 30 et 50 les effectifs,
00:31:48et donc les équipements afférents, c'est évident que ce n'est pas dissimulable.
00:31:54Les nazis essaient au maximum de masquer certaines opérations, mais ils n'y
00:32:01parviennent pas.
00:32:02Ensuite, il y a l'arrivée de l'arrivée de l'arrivée de l'arrivée de l'arrivée
00:32:09Ensuite, c'est la question de la réception. Qui voit quoi, et qui croit à ce qu'il voit, et pourquoi ?
00:32:19A Londres, en mai 1934, un journal brise l'OMERTA.
00:32:25Le Daily Express révèle l'existence d'un aérodrome caché et dévoile la
00:32:29nouvelle aviation nazie. Un article signé de Pembroke Steffens, qui fait le tour du
00:32:35monde.
00:32:38C'est le plus vaste que j'ai jamais vu. Ses dimensions dépassent celles de
00:32:42Cromdorne et du Bourget. Malgré cela, totalement entouré de
00:32:47bois, invisible de la route et du chemin de fer, il est extrêmement difficile à
00:32:51découvrir.
00:32:54Le Reich n'a pas pour le moment de flotte aérienne, ou plus exactement, cette
00:32:58flotte n'est pas perceptible. Elle se trouve répartie éparse et en
00:33:03pièces détachées dans diverses parties du territoire.
00:33:08Tous les travailleurs affectés à la fabrication des armements doivent
00:33:12s'engager par un serment écrit à garder un secret absolu.
00:33:17En vertu des nouveaux codes, toute révélation faite à un étranger est
00:33:22punie de mort.
00:33:26Ce qui est le plus intéressant à propos de l'affaire Pembroke Steffens,
00:33:30c'est que très peu se sont montrés solidaires avec lui. De très nombreux
00:33:35journalistes américains, britanniques, français, italiens ont déclaré qu'il
00:33:39était allé trop loin. Ce sont des révélations que n'importe quel pays
00:33:43considérerait comme de l'espionnage. Vous ne pouvez pas voyager à travers un
00:33:47pays, photographier ses installations militaires et parler aux gens de ce qui
00:33:51y est produit, de ce qui y est fait. Aucun pays n'accepterait ça longtemps.
00:33:57Mes amis se sont moqués de moi à l'époque, mais les événements m'ont
00:34:01conforté dans l'idée qu'il est impossible de dire la vérité, la vraie
00:34:04vérité sur l'Allemagne et de rester un correspondant accrédité à Berlin.
00:34:11À partir du moment de l'expulsion de Maurer, tous les correspondants
00:34:13occidentaux accrédités qui restent à Berlin acceptent de jouer le jeu.
00:34:20C'est-à-dire de ne pas être trop curieux sur les problèmes économiques, les
00:34:27conditions de vie des Allemands qui ne sont pas non plus
00:34:31mérifiques et évidemment le totalitarisme croissant du régime à
00:34:40l'égard de ses oppositions et les persécutions croissantes à l'égard des
00:34:44juifs.
00:34:48L'année 1934 est marquée par de nouveaux coups de force d'Hitler.
00:34:53Dans la nuit du 29 au 30 juin, le chancelier donne l'ordre d'assassiner
00:34:57une centaine de figures nazies opposées à lui, dont le chef S.A. Ernst Röhm.
00:35:06Quelques semaines plus tard, le président Hindenburg décède.
00:35:10Hitler s'octroie alors le titre de Führer. L'influence du pouvoir nazi se
00:35:15déploie désormais dans l'ensemble des terres de l'Ancien Empire,
00:35:18notamment en Sars.
00:35:23Cette terre fut de façon alternative française et allemande. Après la Première
00:35:28Guerre mondiale et conformément aux traités de Versailles,
00:35:31c'est la Société des Nations qui l'administre.
00:35:35En janvier 1935, un référendum doit trancher de son futur. Le statu quo,
00:35:42leur attachement à la France ou à l'Allemagne.
00:35:46Parmi les journalistes étrangers présents pour couvrir le vote, l'une des
00:35:50plus célèbres de France, Andrée Violis.
00:35:54Andrée Violis dit que l'atmosphère est irrespirable en Sars et elle recueille
00:35:59beaucoup de témoignages sur les violences physiques que subissent les
00:36:03partisans du statu quo et les opposants au régime hitlérien et les opposants au
00:36:11rattachement à l'Allemagne. Elle est invitée chez eux, elle voit bien qu'ils
00:36:16sursautent quand on frappe à leurs portes, ils sont obligés de mettre à
00:36:22l'abri leur famille.
00:36:256 janvier 1935, la foule coule par flots serrés et ordonnés, à la fois de la rue
00:36:31qui descend de la gare et de celle qui vient des faubourgs.
00:36:35Sombres masses mornes et disciplinées, hommes et femmes, bras dessus, bras
00:36:40dessous. Voici le défilé des drapeaux, 400
00:36:45magnifiques drapeaux des sections du Deutsche Front. Des cris, des chants confus
00:36:50s'élèvent, le spectacle est assez émouvant. L'après-midi, ce furent en nombre à
00:36:56peu près égal les partisans du statu quo. Max Braun, le leader socialiste,
00:37:02dénonce les crimes d'Hitler parmi lesquels sa politique de haine envers la
00:37:06France. Chaque voix contre Hitler, conclut Max
00:37:10Braun, est une voix pour l'autre Allemagne, celle que nous aimons, notre
00:37:14patrie, celle de la liberté. Andrée Violi s'est très inquiète quand
00:37:19même sur l'organisation du plébiscite puisqu'elle pense que la sincérité du
00:37:26vote sera difficilement obtenue. Elle voit bien, elle a recueilli de
00:37:35nombreux témoignages sur les manipulations auxquelles s'adonnent les
00:37:40partisans du rattachement à l'Allemagne, en allant chercher des voix auprès des
00:37:46aliénés, de gens qui n'habitent plus en Sarre.
00:37:54Le 13 janvier 1935, au soir des résultats du référendum, près de 90% des
00:37:59votants, soit plus de 477 000 sarrois, ont appelé à la réunification avec
00:38:04l'Allemagne, qui pour la première fois, s'agrandit.
00:38:15La question de la Sarre est une question parfaitement anodine de leur point de
00:38:21vue. Il s'agit de rendre à l'Allemagne un territoire allemand, sur le fondement
00:38:27même des principes édictés par les vainqueurs en 1918, le droit des peuples
00:38:31à disposer de même. Et c'est d'ailleurs comme ça que ça va être perçu à
00:38:36l'étranger. Pourquoi est-ce qu'on va s'en émouvoir ? Pourquoi est-ce qu'on s'en
00:38:39émeuverait, en fond ? L'Allemagne envahit l'Allemagne, la belle affaire.
00:38:46Pour son dernier article, Andrée Violis se rend à la frontière, où elle assiste au
00:38:51départ de nombreuses familles.
00:38:54À peine quelques heures se sont-elles écoulées depuis le plébiscite, et c'est
00:38:58déjà le début des violences. Quant aux barrages de police, ils viennent d'être
00:39:03rétablis sur tous les points de la frontière. 160 malheureux s'y sont
00:39:08présentés au cours de la nuit. Un certain nombre, faute des visas exigés par les
00:39:13nouveaux règlements, durent être refoulés. Un homme qui s'était déjà enfui d'Allemagne
00:39:18parce qu'on le menaçait de stérilisation, arrivait devant nous. Il lui
00:39:22fallut rebrousser chemin. Je le vis, avec sa femme et un enfant, s'en aller,
00:39:28dos courbé, tête basse, traînant ses bagages dans un sentier couvert de neige.
00:39:34Quand on relie à la lumière, évidemment, de ce qu'on sait, de ce qui s'est passé
00:39:39par la suite, voilà, tout était là, en fait, déjà, y compris la barbarie,
00:39:47la torture contre les opposants politiques.
00:39:53Alors que le pouvoir nazi célèbre le retour de la SAR, une nouvelle vague de
00:39:57persécutions antisémites s'abat sur l'ensemble du Reich. Les Allemands, en
00:40:02couple avec des Juifs, sont pris pour cible.
00:40:06Toute personne qui a des relations sexuelles avec une personne juive est
00:40:13targuée, si elle est dénonciée. Et donc, on met en place des rituels
00:40:20d'humiliation publique, qui sont vraiment des pylories modernes.
00:40:26On a énormément de personnes qui assistent, des enfants qui regardent, des femmes qui
00:40:31applaudissent, qui rigolent. Et évidemment, ça a un impact énorme sur la société.
00:40:41Si certaines de ces photos sont publiées dans la presse allemande nazie, aucune
00:40:45n'apparaît dans la presse étrangère généraliste. La persécution antisémite
00:40:50de l'été 1935 se limite à quelques articles, en page intérieure, sans photos.
00:40:57Au début, il y a forcément une espèce de pic à la fois d'horreur, d'anéantion,
00:41:02de curiosité également, qui par la suite tend un peu à s'estomper. S'estomper
00:41:07sous le coup non pas d'une lassitude, mais d'une forme de normalisation. On finit
00:41:15par intégrer le fait qu'on a un régime à côté qui persécute. Mais finalement,
00:41:19c'est une menace, mais la vie continue.
00:41:23Ces violences publiques-là préexistent à la norme qui va intervenir plus tard, puisque
00:41:31ce sont les lois de Nuremberg qui, de manière explicite, en septembre 1935, interdisent
00:41:36tout mariage interracial, mais en amont de cela, toute relation sexuelle interraciale,
00:41:42pour éviter toute mixtion des fluides et toute mixtion des sangs.
00:41:49Alors, il faut dire que ces lois sont votées à la sauvette, à Nuremberg, où le Parlement,
00:42:02où ce qu'il en reste, a été rassemblé, dans la nuit, et le lendemain et jour suivant,
00:42:08je veux dire, les lois de Nuremberg, c'est deux paragraphes, deux petits paragraphes
00:42:12dans les articles de la presse internationale.
00:42:15Ce n'est pas un événement politique ou militaire comme les autres.
00:42:19On ne peut pas l'illustrer avec des photos, avec des images.
00:42:23Elles n'existent pas.
00:42:25C'est une mesure administrative et législative.
00:42:28Aujourd'hui, on le considère comme un événement majeur, un événement clé dans la persécution
00:42:34et la privation des droits de nombreuses personnes en Allemagne, en particulier des Juifs.
00:42:39Mais à l'époque, tout comme le boycott des Juifs en 1933, si on en fait mention,
00:42:45il n'est alors pas du tout perçu comme quelque chose de si crucial.
00:42:55De ce congrès de Nuremberg de 1935, les envoyés spéciaux présents ne retiennent qu'une image,
00:43:01celle de l'armée.
00:43:04Les exercices en eux-mêmes, comme tous ceux dans ce genre, présentés dans le cadre artificiel
00:43:10d'un terrain de manœuvre, n'avaient pas d'autre intérêt que celui d'un spectacle.
00:43:15Ce qui retient l'attention devant le matériel terrestre de la nouvelle armée allemande,
00:43:20c'est l'unité des modèles employés, leur robustesse et l'emploi général de moteurs
00:43:25extrêmement puissants pour tous les véhicules, y compris les motocyclettes et les sidecars.
00:43:30Tout cela va vite et s'arrache bien du terrain.
00:43:36Hitler souhaite toujours jouer, encore une fois, d'une politique insaisissable.
00:43:41Montrer la Wehrmacht, c'est en même temps un jeu, c'est un jeu dangereux, c'est-à-dire
00:43:47c'est une manière de bomber le torse, de montrer le réarmement, de, encore une fois,
00:43:53mettre un coup de canif dans chacune, une par une, chacune des conditions du traité
00:43:57de Versailles, et il y en avait de nombreux, d'articles, et en même temps c'est aussi
00:44:00un discours vers la population allemande.
00:44:03C'est une manière de dire, regardez, nous restaurons la tradition de l'armée allemande
00:44:07qui était quand même chérie par un certain nombre d'acteurs du corps national, pour le dire vite.
00:44:13Mais ce qui frappe plus que tous les progrès, si grands soient-ils, que l'armée allemande
00:44:17a fait depuis un an, c'est la solidarité de la foule allemande avec elle.
00:44:21Les acclamations soulevaient littéralement les hommes en marche, et à chaque pas, dans
00:44:27la foule, ce n'était qu'une longue succession de saluts adressés aux officiers, avec une
00:44:32ferveur, un respect qui ne trompe pas sur l'esprit d'un peuple.
00:44:38Le régime nazi se fonde sur plusieurs relais pour susciter l'adhésion ou l'obéissance
00:44:43de sa population, et ce qu'on perçoit un peu aujourd'hui, mais dont on ne comprend
00:44:47pas assez l'ampleur, c'est que le nazisme est une dictature de l'acclamation nationale.
00:44:54C'est-à-dire que participer dans son corps, dans sa chair, à des événements publics,
00:45:00ça sculpte une opinion de manière extrêmement puissante, d'autant qu'ensuite on en tire
00:45:04des jolies images, les films de Léni Riefenstahl, Triomphe de la Volonté, Fête des Peuples,
00:45:10on voit ces grandes foules dans des stades, dans les rues, pavoisées, avec la croix gammée
00:45:15comme symbole, comme logo du régime, et tous ces gens-là qui font le salut nazi.
00:45:20C'est extrêmement puissant, parce que ça montre l'adhésion.
00:45:29Janvier 1936.
00:45:31La journaliste française Suzanne Bertillon est venue fêter la nouvelle année à Berlin.
00:45:37Envoyée spéciale du journal national et anti-bolchevique Le Jour, elle n'était pas
00:45:43revenue ici depuis le temps de la République.
00:45:46Parmi les changements qu'elle note, Winterhilfe, les secours d'hiver.
00:45:52Partout, sur les murs, dans les magasins, dans les restaurants, dans les journaux, ce
00:45:59mot frappe le regard et se grave dans l'esprit.
00:46:01Des tirelires, des affiches, des quêtes, tout pour la Winterhilfe.
00:46:06On ne parle, on ne se préoccupe que de la réussite de la Winterhilfe.
00:46:13C'est une œuvre magnifique, me dit l'un des directeurs.
00:46:15Une œuvre grandiose.
00:46:17Un des plus grands bienfaits du national-socialisme.
00:46:24Nous secourons toutes les infortunes, ou du moins les plus intéressantes.
00:46:27Les familles nombreuses, les jeunes ménages qui n'ont pas d'argent pour s'établir,
00:46:31les chômeurs méritants.
00:46:33Les secours d'hiver sont vraiment un peu le symbole de cette société de bienfaisance
00:46:42et de bien-être.
00:46:44Cette solidarité qu'on célèbre publiquement et qu'on met en scène sans arrêt pour dire
00:46:51voilà, nous nous occupons de nos propres citoyens, ceux et celles qui font partie
00:46:58de cette communauté peuple-race, ceux qui sont dans les normes.
00:47:05Nous avons besoin de fonds énormes pour arriver à les secourir tous.
00:47:09Et nous ne pouvons et ne voulons compter que sur des dons bénévoles.
00:47:14Nous souhaitons que des liens d'affection et de sollicitude mutuelles unissent toute
00:47:17la grande nation allemande, du plus humble au plus puissant, sans distinction de classe.
00:47:28C'est une société qui se pense comme une entité homogène, évidemment en excluant
00:47:34énormément de personnes, soit du point de vue racial, soit du point de vue social,
00:47:39soit du point de vue aussi eugéniste.
00:47:43Mais la société majoritaire est une vie assez paisible.
00:47:50C'est des personnes qui veulent réussir, c'est des personnes qui veulent avoir une
00:47:55bonne vie et qui s'engagent dans un projet politique qui peut-être, au départ, n'était
00:48:01pas le leur.
00:48:05En cette année 1936, ce sont les Jeux Olympiques qui sont dans toutes les conversations.
00:48:11Depuis des mois, les correspondants étrangers racontent la transformation de l'Allemagne
00:48:16et de sa capitale.
00:48:18Sous leurs plumes et devant les objectifs du régime, la révolution nazie semble s'achever
00:48:24pour faire naître un nouveau monde.
00:48:28La question des Jeux Olympiques de Berlin est évidemment une question qui est centrale
00:48:32pour le régime nazi, qui veut, d'une certaine manière, normaliser son image tout en montrant
00:48:37sa puissance.
00:48:39Et évidemment, pour les anti-nazis, c'est un moment aussi de mobilisation très important.
00:48:47Donc il y a un grand mouvement de boycott qui est organisé à travers le monde.
00:48:54Il y a une mobilisation, mais elle ne prend pas dans la presse générale, encore moins
00:48:58dans la presse sportive.
00:49:00Je dirais la logique à la fois politique et puis l'événement sportif, plus les intérêts
00:49:07commerciaux ou autres prennent le dessus et finalement c'est un échec.
00:49:15Le 6 février 1936, les Jeux Olympiques d'hiver s'ouvrent à Garmisch-Bartenkirchen.
00:49:24Le 4 février 1936, les Jeux Olympiques d'hiver s'ouvrent à Garmisch-Bartenkirchen.
00:49:34À l'entrée des villes, les pancartes antisémites ont été remplacées par les anneaux olympiques.
00:49:39Les journalistes en prennent note, rien de plus.
00:49:43Les regards sont ailleurs, vers les pistes et les sportifs.
00:49:47Hitler et le régime ont vraiment, si j'ose dire, mis les petits plats dans les grands
00:49:55pour présenter un visage tout à fait apaisé et harmonieux.
00:49:58Tous les journalistes qui viennent pour couvrir les Jeux Olympiques vont avoir l'impression
00:50:03de vivre dans un pays parfaitement harmonieux et où toutes les traces visibles des discriminations
00:50:10ont été effacées.
00:50:14Ce qu'il y a de plus intéressant et de plus fascinant dans la presse de l'époque,
00:50:18c'est qu'en fait, on savait tout et qu'on pouvait tout savoir.
00:50:23Aussi, le vieux slogan « Bad news is good news » avait déjà cours chez les nazis.
00:50:28Ils ne voulaient précisément pas d'une dictature verrouillée et hermétique,
00:50:33ils ont au contraire toujours voulu se faire remarquer et apparaître sur la scène
00:50:37et dans la presse internationale.
00:50:44Le 7 mars, Hitler acte la remilitarisation de l'Arénanie, sans que cela ne soulève
00:50:49une réaction internationale.
00:50:53Quelques semaines plus tard, comme si de rien n'était, les délégations de sportifs
00:50:59et des milliers d'étrangers débarquent à Berlin pour assister aux Jeux d'été.
00:51:03Parmi eux, le journaliste français Gaston Benac.
00:51:08J'ai retrouvé Berlin en fête, tout enrubané d'oriflames, de drapeaux, de banderoles,
00:51:14accueillants, souriants, mais terriblement secoués par l'intense propagande olympique.
00:51:20À la fièvre brune a succédé la fièvre, j'allais écrire la folie olympique.
00:51:27Les Jeux olympiques, c'est évidemment un outil de soft power auprès des puissances
00:51:32internationales pour dire « Regardez tout ce que vous avez entendu sur les violences,
00:51:37la répression des mouvements de gauche, communistes et socialistes, les persécutions
00:51:40contre les juifs, tout ça, ce ne sont que de la propagande.
00:51:43Nous sommes un pays qui fonctionne, un pays, l'Allemagne que vous avez toujours connue,
00:51:48mais en plus jeune, en nouveau, et un certain nombre d'acteurs vont être charmés.
00:51:57On voit moins ces jours-ci d'uniformes bruns.
00:51:59Et les hitlériens ne se hissent plus sur des camions pour hurler comme ils le faisaient
00:52:03leur haine du juif et du catholique à grand renfort de caricatures ridicules.
00:52:08C'est la trêve du muscle.
00:52:10Pour combien de temps ?
00:52:17Dans la manière dont les nazis se présentent, se projettent, se mettent en images, se mettent
00:52:23en récits et en mots, tout est faux.
00:52:25Tout est faux.
00:52:27C'est Jean Genet qui le dit très bien.
00:52:30Jean Genet fait un voyage en Allemagne à cette époque-là et il est très décontencé,
00:52:37il est même un peu éperdu.
00:52:38Parce qu'il dit, mais le voleur et le menteur, c'est moi d'habitude.
00:52:42Et là, je n'ai même plus ma singularité, ma spécificité.
00:52:47Ils sont tous menteurs, ils sont tous voleurs.
00:52:50C'est une nation d'escrocs.
00:52:52Cet été 1936, les touristes venus assister aux Olympiades découvrent une dictature sans
00:52:58heurts, sans violence.
00:53:02Dans les stades, les athlètes américains, anglais, français et allemands s'affrontent
00:53:08de façon pacifique.
00:53:11La foule applaudit et encourage leurs champions.
00:53:15Le fureur célèbre son triomphe et l'indifférence du monde face au démantèlement du triomphe
00:53:20du monde face au démantèlement du traité de Versailles et de la République.
00:53:26Alors qu'au même moment, en Espagne, aux côtés des nationalistes du général Franco,
00:53:32des soldats de la Wehrmacht se battent et meurent au combat.
00:53:38Si Hitler promet aux puissances européennes la paix, sa marche vers la guerre a déjà
00:53:43commencé.
00:53:50Musique d'ambiance
00:54:08Une fois nommé chancelier, le 30 janvier 1933, il aura donc fallu bien peu de temps
00:54:12à Adolf Hitler pour installer le régime nazi en Allemagne, un régime totalitaire
00:54:17où toute forme d'opposition politique est rapidement muselée et où les juifs
00:54:22deviennent ouvertement une cible prioritaire, le tout sous l'œil de représentants de
00:54:26la presse internationale présents sur place.
00:54:29Voilà ce que vient de nous raconter en images ce documentaire exclusif écrit et réalisé
00:54:34par Jean Bulot que nous retrouvons maintenant avec nous sur ce plateau de débat d'oeuvre
00:54:38en compagnie de nos autres invités.
00:54:41Jean Bulot, bienvenue, bravo pour ce documentaire.
00:54:44On va y revenir, bien entendu, vous êtes historien, auteur, réalisateur.
00:54:48Daniel Schederman est également avec nous.
00:54:49Bienvenue à vous, Daniel Schederman.
00:54:51Vous êtes journaliste et auteur, fondateur du site Arrêt sur image, du nom de l'émission
00:54:56que vous avez animée pendant 12 ans, j'étais chez nos confrères de France 5.
00:55:00Nous venons de vous entendre témoigner avec d'autres, bien entendu, dans ce documentaire
00:55:05et pour cause, puisqu'on vous doit Berlin 1933, la presse internationale face à Hitler,
00:55:10un ouvrage publié aux éditions du Seuil, avec une réédition ensuite en poche, et
00:55:16puis vous avez par ailleurs une actualité littéraire avec ce livre, Le charlisme, raconté
00:55:20à ceux qui ont jadis aimé Charlie, c'est un ouvrage tout juste publié aux éditions
00:55:25du Seuil également.
00:55:27Et puis enfin avec nous, Hélène Millard de Lacroix, bienvenue à vous.
00:55:30Vous êtes historienne, professeure d'histoire et de civilisation de l'Allemagne contemporaine
00:55:35à Sorbonne Université, vous êtes aussi secrétaire générale de l'Académie franco-allemande
00:55:41de Paris.
00:55:42Merci à vous aussi d'avoir accepté notre invitation.
00:55:45Jean Bullot, vous n'en étiez pas à votre coup d'essai avec ce film que nous devons
00:55:48voir à l'instant, parce qu'il y a eu un premier volet, cette fois sur la période
00:55:511930-1933, il s'agissait donc de traiter l'accession au pouvoir des nazis, cette fois
00:55:57ils y sont, au début de ce film, ils y sont dès donc janvier 1933 avec Adolf Hitler nommé
00:56:04à la chancellerie.
00:56:05Pourquoi avoir produit, réalisé, écrit ces deux films, celui que nous venons de voir
00:56:11et celui que je viens de citer juste avant ?
00:56:12C'est utiliser vraiment les articles de presse comme une source pour l'historien pour raconter
00:56:17finalement la vie en Allemagne, c'est avant tout deux films, une collection sur les bouleversements
00:56:24en Allemagne.
00:56:25J'utilise les articles parce que ce sont des, ce que j'appelle moi, des témoins de
00:56:29papier, ils racontent au temps présent ce qu'ils ont vu, ils racontent d'un point
00:56:33de vue social, pour ceux que j'ai utilisés, j'ai un propos sur l'ensemble de la presse,
00:56:39mais moi je les utilise vraiment comme une source et ça m'a permis dans ces deux films
00:56:45d'éloigner le regard en fait de la tribune, des figures comme Hitler ou des différentes
00:56:50figures de la République de Weimar et ensuite de la dictature et plutôt se rapprocher de
00:56:56la société et voir comment la mise en place dans ce deuxième épisode de la dictature,
00:57:01de la mise au pas de la société allemande, a été perçue à l'étranger grâce à ces
00:57:06journalistes et la chance qu'on a aujourd'hui c'est que toute cette presse est accessible
00:57:11de chez soi, autant la presse française que la presse internationale, notamment anglo-saxonne,
00:57:16et c'est vrai de se plonger dans ce quotidien, dans les articles des correspondants et plutôt
00:57:21des envoyés spéciaux, ça permettait d'avoir un regard différent et c'est aussi l'importance
00:57:29de cette collection, c'est de faire un focus sur trois ans parce que l'événement est tellement
00:57:33important que de temps en temps les dates réduisent l'événement ou réduisent les espaces et là de
00:57:40rester sur trois ans, du 30 janvier jusqu'aux Jeux Olympiques, ça permettait d'avoir un regard
00:57:47différent. Hélène Millière de Lacroix, vous êtes historienne, vous travaillez beaucoup sur les
00:57:51archives j'imagine, est-ce que vous travaillez aussi sur les coupures de presse en tant qu'historienne,
00:57:56est-ce que les historiens aujourd'hui travaillent sur cette période justement en regardant ce qu'on
00:58:01a dit la presse de l'époque ? Absolument, la presse, les médias qui façonnent l'opinion
00:58:06publique sont un acteur fondamental, quelle que soit d'ailleurs l'époque que l'on prenne,
00:58:11jusqu'au temps présent mais que vous soyez dans la guerre froide ou dans cette époque,
00:58:14c'est une source absolument incontournable et c'est une source à prendre bien au sens historien,
00:58:20une source c'est pas là où on va chercher ses informations, c'est un objet que l'on observe en
00:58:24lui-même avec ses conditions de production, qui sont les actes, qui sont les producteurs de ses
00:58:31discours, à quelles contraintes, quelles influences sont-ils soumis et ce qu'ils voient et je trouve
00:58:39que ce qui est tout à fait intéressant dans ce documentaire, c'est non seulement ce que les
00:58:43nazis donnent à voir, à leur propre population aussi, c'est tout à fait bien montré comment la
00:58:49terreur n'est pas évidente, y compris pour gagner une population qui est en partie pas
00:58:55à temps complètement convaincue, mais surtout entre ce qui est donné à voir et ce que les
00:59:00observateurs ici étrangers saisissent, comprennent, décodent et être capables de décoder, ça veut
00:59:07dire aussi avoir les moyens d'identifier les signaux et pour avoir les signaux, il faut avoir
00:59:13un peu plus de connaissances antérieures à ce qu'était le programme de ce régime et je trouve
00:59:18que de ce point de vue c'est tout à fait instructif, quelle que soit la période sur laquelle on
00:59:22travaille. Alors Daniel Schindermann, j'ai évoqué cet ouvrage Berlin 1933 qui évidemment lui se
00:59:28focalise sur ces fameux correspondants internationaux qui étaient présents pour la plupart d'entre
00:59:32eux à Berlin, c'est ce qu'on découvre dans votre ouvrage. Alors ils n'ont pas tout à fait rien dit
00:59:37ces correspondants étrangers, mais ils n'ont pas dit grand chose. Censure, autocensure, pourquoi
00:59:43avoir raconté aussi peu de choses sur cette montée du nazisme qu'on a redécouvert dans ce
00:59:48documentaire ? Censure, autocensure, évidemment il y avait tout ça à l'époque et en Allemagne.
00:59:56Hélène disait ce qu'ils voient, mais le problème des envoyés spéciaux, des correspondants occidentaux
01:00:05à Berlin dans ces années-là, c'est pas seulement ce qu'ils voient, c'est aussi d'arriver à croire ce
01:00:11qu'ils voient, parce que très souvent ils sont dans une situation où effectivement ils voient des
01:00:15choses, mais on est quand même, à l'arrivée d'Hitler au pouvoir, dans une situation de jamais vue,
01:00:23c'est-à-dire qu'il va se passer en Allemagne, dans toutes les années qui vont suivre, quelque chose
01:00:29qui n'a jamais été vue et qui en même temps, dont des éléments étaient déjà préexistants dans les
01:00:36années précédentes, 1931-1932, etc. Donc ils sont dans cette situation où ils doivent démêler le jamais
01:00:45vu du déjà vu. Il y a une historienne américaine qui a utilisé un mot qui, je pense, décrit bien la
01:00:54situation, c'est unprecedented, c'est-à-dire ils sont dans une situation de sans précédent. Donc la
01:00:59difficulté quand on est dans le sans précédent, parce que comme n'importe qui, un journaliste a
01:01:04toujours tendance à essayer de rattacher ce qu'il voit, à ce qu'il a déjà vu, à ce qu'il connaît, à ses repères
01:01:09familiers, etc. Puis il y a des moments où c'est juste pas possible. Donc comment trouver les mots ?
01:01:13Comment trouver l'équilibre entre surdire, c'est-à-dire dramatiser, ou soudir, c'est-à-dire atténuer,
01:01:22euphémiser, etc. Et par exemple, c'est une situation dans laquelle on est encore aujourd'hui par rapport
01:01:28à ce qui se passe aux Etats-Unis. Comment trouver les mots, par exemple, sur le salut nazi de
01:01:33de de Musk ? Est-ce qu'il faut dire salut nazi ? Qu'est-ce qu'on a devant les yeux ? Est-ce qu'il faut dire gestes
01:01:40interprétables comme un salut nazi ? Gestes dans lesquels on voit un salut nazi ? Je pense que
01:01:47se replonger dans ces questions que se posent les journalistes de l'époque peut nous aider
01:01:54aujourd'hui, nous les journalistes, à essayer de trouver les mots les moins faux possibles.
01:02:01On découvre aussi dans votre livre que la grande peur de l'époque, ce n'est pas le nazisme, c'est le
01:02:06bolchevisme, et qu'un certain nombre de patrons de presse, de ce point de vue-là, ont limité la
01:02:12couverture de ce qui s'est passé à Berlin entre 1933 et 1936, pour en revenir à cette période que
01:02:19nous avons redécouverte ensemble. Oui, c'est la peur des patrons. Non mais il y a plusieurs choses,
01:02:23du contexte de l'époque, qui aident à comprendre, et notamment ça, c'est-à-dire qu'on est en 1933,
01:02:30donc la révolution russe est toute proche, 1917 c'était la semaine dernière quasiment pour eux à
01:02:34l'époque, et effectivement les grands patrons de l'époque, les grands patrons américains, les
01:02:39patrons britanniques, les patrons français, sont exactement comme aujourd'hui des industriels,
01:02:43des milliardaires, donc des gens plutôt conservateurs et plutôt à droite, on peut le dire,
01:02:47et effectivement leur angoisse c'est le bolchevisme, la propagation du bolchevisme en Europe.
01:02:52Et plusieurs, enfin je pense qu'ils le pensent tous, et plusieurs l'ont dit, et l'ont écrit, bon si cet Hitler,
01:02:59qui est un personnage certes un peu excentrique, un peu bizarre, peut nous aider, et peut aider à
01:03:07contenir le bolchevisme, va pour Hitler après tout.
01:03:11– Le bolchevisme, et en l'occurrence Staline, qui était lui déjà au pouvoir du côté de l'Union soviétique.
01:03:16On va revoir un extrait de votre film, c'est la visite d'un camp de concentration organisé par le régime nazi,
01:03:23et évidemment où participent un certain nombre de journalistes étrangers.
01:03:29– Parmi les expériences nazies qui soulèvent la curiosité de la presse internationale,
01:03:34il y a les camps de concentration.
01:03:36Ouvert depuis mars 1933, la dictature nazie y organise des visites pour certains journalistes étrangers.
01:03:47– Aujourd'hui cela semble étrange que le régime nazi n'ait pas fait des camps de concentration
01:03:51à un sujet tabou.
01:03:56On voulait faire preuve d'une certaine transparence.
01:04:00C'était bien sûr des villages Potemkin, quand les journalistes étrangers venaient visiter les camps de concentration,
01:04:06tout y était merveilleux et magnifique.
01:04:12On vendait les camps aux journalistes étrangers comme des centres de redressement pour les égarés politiques.
01:04:17– Visite d'un camp de concentration, nous ne sommes pas à Dachau.
01:04:21Dachau est le premier camp de concentration qui a été ouvert en Allemagne,
01:04:25c'était le 20 mars 1933, autrement dit nous sommes deux mois et demi après
01:04:30qu'Hitler ait été nommé à la chancellerie.
01:04:33Où est-ce que nous sommes là, Jean Bulot, sur ces images ?
01:04:35– À Oryanenburg, mais il faut savoir que ça c'est une visite mais il y en a plusieurs dans l'année.
01:04:41Il y a aussi des camps de concentration sauvages un peu partout en Allemagne.
01:04:46Et ce que montre cette séquence, c'est que cette année 1933, les nazis montrent tout.
01:04:53Ils montrent finalement leur évolution, ce sont les termes utilisés par le chancelier
01:04:59à propos des camps de concentration mais aussi de la journée de boycott
01:05:02qui aura lieu le 1er avril 1933.
01:05:04– Alors attendez, les nazis montrent tout,
01:05:07mais est-ce que les confrères, les journalistes sur place sont autorisés à poser des questions,
01:05:11à s'interroger sur ces personnes qui sont dans ces camps, jusqu'où ouvrent-ils tout ?
01:05:17– Non, mais il faut savoir que, alors effectivement, c'est une opération de communication.
01:05:22Donc les mots utilisés, et après tout dépend des bons et des mauvais journalistes.
01:05:25Ceux qui vont à ces visites finalement officielles, contrôlées,
01:05:31ils racontent finalement ce qu'on leur fait entendre.
01:05:33– Ils en déduisent que c'est un joyeux camp de travail ?
01:05:36– Quasiment, mais c'est très très encadré.
01:05:40Bon, c'est très très encadré.
01:05:42Et sur ces visites, moi j'ai trouvé des documents incroyables
01:05:46que j'avais mis dans Berlin 33.
01:05:48Une des premières visites donc en 33, dans un camp,
01:05:52parmi les journalistes conviés, il y a le correspondant de la société de presse,
01:05:56A.P. qui est un personnage clé de cette époque
01:05:58parce que c'est le président de l'association de la presse étrangère.
01:06:02Et donc il va visiter le camp et notamment la cellule
01:06:06où est détenu un dirigeant communiste emprisonné.
01:06:10Et alors, la dépêche qu'il envoie,
01:06:13c'est une dépêche où on a l'impression que le gars,
01:06:16il a sa bibliothèque dans sa cellule, on lui demande s'il mange bien,
01:06:21oui les menus sont bons, etc.
01:06:23Et après-guerre, quand le correspondant de A.P.
01:06:27va raconter ses souvenirs, Louis Leutner il s'appelle,
01:06:31et qu'il va essayer de se justifier sur effectivement
01:06:35ces euphémismes du moment, il va raconter la même visite,
01:06:38mais alors cette fois en expliquant, oui, on était très encadrés,
01:06:42j'ai bien vu que l'expression des prisonniers
01:06:46était très contrainte, etc.
01:06:47On a deux textes racontant exactement le même événement
01:06:51et effectivement qui ne sont pas du tout les mêmes.
01:06:551933, le régime montre beaucoup de choses, nous dites-vous,
01:06:59Jean Bulot.
01:07:00C'est la réalité, mais que montre-t-il ?
01:07:03Est-ce qu'effectivement, cette année 1933,
01:07:05comme vient de le dire Jean Bulot,
01:07:07c'est l'année où le régime décide de montrer une vitrine
01:07:10à ses correspondants ?
01:07:12C'est-à-dire qu'il y a une partie de ce qui est montré,
01:07:15officiellement montré comme propagande,
01:07:17fait partie aussi du message à envoyer.
01:07:20Je pense qu'il est important de souligner
01:07:22que le vocabulaire et le regard que nous avons aujourd'hui
01:07:25sur camps de concentration, beaucoup de nos contemporains
01:07:28mélangent un camp de concentration et un camp d'extermination.
01:07:31Je pense qu'un camp de concentration, c'était un endroit
01:07:35tout à fait important de le souligner,
01:07:37les premiers camps de concentration, mars 1933,
01:07:39d'Achao, dans la banlieue de Munich,
01:07:41est un endroit, il faut le dire, pour enfermer les opposants politiques.
01:07:45Ils sont dans l'ensemble tous des communistes et des socialistes.
01:07:49C'est pourquoi, quand Mme Weidel dit aujourd'hui
01:07:52que Hitler était un communiste,
01:07:53rien que ses images le montrent très bien,
01:07:56parenthèses fermées,
01:07:57on appelle ça camp de concentration,
01:07:59mais en fait, c'est un camp de redressement.
01:08:02Là aussi, il y a un problème du vocabulaire.
01:08:04Il s'agit juste de concentrer, dit-on,
01:08:06et de rééduquer et de ramener au travail des gens qui sont égarés
01:08:10contre lesquels nous devons nous défendre.
01:08:12C'est quelque chose qui, je trouve, traverse votre documentaire,
01:08:16qui est absolument intéressant et qui a des échos après,
01:08:19jusqu'au temps présent, qui est l'argumentaire de dire
01:08:22que nous voulons la paix et nous voulons nous défendre
01:08:25contre les ennemis qui veulent saper notre régime, nos valeurs, etc.
01:08:29Vous pouvez très bien remplacer ces personnes
01:08:31qui sont enfermées, considérées comme hostiles,
01:08:34avec d'autres personnes qui, aujourd'hui,
01:08:36pourraient être identifiées comme menaçant la cohérence
01:08:40de la communauté dans laquelle nous sommes.
01:08:42L'intensité des événements dans les 100 premiers jours
01:08:46de prise de pouvoir,
01:08:47il y a cet accès d'Hitler à la chancellerie,
01:08:49la dissolution du Parlement intervient quelques jours après,
01:08:53c'est le 10 février, incendie du Reichstag, bien sûr,
01:08:5627 et 28 février, qu'on a revu dans ce documentaire,
01:09:00élection législative à nouveau le 5 mars,
01:09:03ouverture de Dachau, on l'a dit, le 20 mars,
01:09:06le 24 mars, c'est la loi donnant plein pouvoir à Hitler,
01:09:09et puis ensuite, un premier décret, le 7 avril,
01:09:12qui exclut les Juifs de la fonction publique.
01:09:15En 100 jours, les choses vont très vite,
01:09:17il y a une intensité folle, et ce pouvoir se met en place
01:09:21sous ce regard des confrères présents sur place.
01:09:26Ils vont au-delà des dates, au-delà des décrets.
01:09:29En fait, les décrets, ça dit une chose, ça marque un temps,
01:09:33mais quel est l'impact, finalement, de ces lois sur la société ?
01:09:37Effectivement, dans les articles que je mets en avant,
01:09:40qui sont à part, finalement,
01:09:42parce que la majorité de la presse internationale
01:09:45ne revient pas là-dessus, mais ils donnent à voir leur impact
01:09:49au sein de la société allemande.
01:09:51Daniel Guérin, qui écrit au Populaire,
01:09:54marqué à gauche.
01:09:55Il donne à voir, notamment, l'impact
01:09:59pour ceux qui passent les concours d'avocats.
01:10:02Il a cette rencontre avec un ancien camarade
01:10:05et il explique qu'il est obligé de lire autour du nazisme,
01:10:08de cette idée, et ça me fait penser,
01:10:10il y a un autre livre qui se parle de l'histoire d'un Allemand,
01:10:14où on revient sur cette étape-là, où, dans la vie quotidienne,
01:10:17le régime avait un impact, et ces journalistes donnent à voir cela,
01:10:21donnent à voir cet impact,
01:10:23et même si ça ne fait pas événement dans la presse internationale,
01:10:27ça ne fait pas la une.
01:10:28Le camp de concentration ne fait pas la une.
01:10:31Les personnes qui passent, ils passent.
01:10:33Ils n'y meurent pas.
01:10:34C'est vraiment un passage de rééducation,
01:10:37et certains ont parlé, certains sont venus en France.
01:10:40Il y avait tout un...
01:10:42Je me rappelle d'un article où, à l'arrivée à la gare du Nord,
01:10:45on va interviewer des gens et ils racontent la terreur qui s'abat,
01:10:49mais elle ne fait pas événement.
01:10:51Ce que vient de dire Jean Bulot,
01:10:53c'est quand vous citez Guérin du Populaire.
01:10:56Ce qui m'a frappé, quand on lit la presse de l'époque,
01:10:59c'est le contraste entre la presse militante,
01:11:02le Populaire était un journal militant,
01:11:04l'Humanité était un journal militant,
01:11:06et la presse prétendument apolitique et non militante,
01:11:09dont Paris Soir,
01:11:11qui est l'ancêtre de la presse populaire de l'époque.
01:11:14En fait, les seuls qui font le boulot,
01:11:16ou ceux qui font vraiment le boulot, c'est la presse militante.
01:11:19Et ça, c'est tout à fait frappant.
01:11:22Notamment, une des choses que j'ai découvertes,
01:11:24c'est que les seuls qui parlent du nazisme et de Hitler
01:11:28comme on en parle aujourd'hui, avec 80 ans de recul,
01:11:31c'est-à-dire en écrivant les mots barbarie, horreur, etc.,
01:11:35c'est l'Humain.
01:11:36Donc, c'est le journal communiste.
01:11:39L'Humain...
01:11:40Il y en a un qui a fait le boulot pour reprendre votre expression,
01:11:43c'est Edgar Morin.
01:11:45Ce correspondant du Chicago Daily News
01:11:47sera expulsé très vite, en 1933.
01:11:49On l'a vu dans votre film.
01:11:51Lui, il avait déjà écrit sur les exhastions des SA,
01:11:55ses paramilitaires nazis.
01:11:57Et vous dites, dans votre livre,
01:11:59c'est pour une raison simple,
01:12:01qu'il était, lui, inséré dans le tissu social allemand.
01:12:04Il n'était pas enfermé à Berlin avec ses confrères,
01:12:07un entre-soi que vous décrivez très bien dans votre livre.
01:12:10Berlin entre correspondants étrangers.
01:12:13Ceux qui ont osé dire quelque chose,
01:12:15sont ceux qui étaient en contact avec ce tissu social allemand.
01:12:19Lui aussi était à Berlin.
01:12:20Mais effectivement, il a des enfants,
01:12:22donc ses enfants ont des médecins, des dentistes,
01:12:25il y a des commerçants.
01:12:27Il est inséré dans le tissu.
01:12:29Donc, effectivement, dès avant 1933,
01:12:31c'est-à-dire dès avant l'arrivée d'Hitler au pouvoir,
01:12:34oui, il fait des papiers très, très durs
01:12:37sur les exhastions des SA et des nazis.
01:12:40Et donc, comme vous le dites, il va être expulsé très vite.
01:12:43Et son expulsion, si j'ose dire,
01:12:45va servir de leçon pour les autres.
01:12:47C'est-à-dire que les autres, ceux qui restent,
01:12:50vont tout de suite voir où sont les clôtures électrifiées,
01:12:53si j'ose dire,
01:12:55qui n'ont pas le droit d'approcher sous peine d'expulsion immédiate,
01:12:59parce qu'ils ne veulent pas être expulsés.
01:13:01D'une part, parce qu'une grande part de leurs plus-values professionnelles,
01:13:06c'est qu'ils parlent allemand, ils sont germanistes,
01:13:09donc s'ils sont expulsés, où vont-ils aller bosser ?
01:13:12D'autre part, ils sont comme beaucoup de journalistes,
01:13:15que c'est, comme disent les journalistes, un gros coup.
01:13:18Les nazis les tiennent comme ça, par la menace de l'expulsion.
01:13:21On s'interroge censure, auto-censure.
01:13:24On parle beaucoup des correspondants étrangers présents sur place,
01:13:27c'est le thème du film.
01:13:29Qu'en est-il des journalistes locaux ?
01:13:31On peut parler d'une censure de la part du régime
01:13:34vis-à-vis de ces journalistes allemands,
01:13:37très rapidement ou pas ?
01:13:38C'est évident qu'il y a une censure active,
01:13:41mais il y a aussi cette forme d'auto-censure,
01:13:43qui vaut pour les correspondants étrangers,
01:13:46pour les journalistes qui ne veulent pas perdre leur emploi,
01:13:49mais aussi pour tout un ensemble de catégories sociales.
01:13:53Jean Bulot évoque les juristes qui veulent être juristes
01:13:56et savent qu'ils doivent avaler ce gros morceau de l'idéologie nazie,
01:14:00parce qu'ils vont être interrogés là-dessus.
01:14:02Les gens qui sont fonctionnaires,
01:14:04qui ne veulent pas perdre leur emploi,
01:14:07s'adaptent progressivement par le discours,
01:14:09s'adaptent aussi par une gestuelle.
01:14:11Je trouve ça intéressant, dans ces documents d'archives.
01:14:15Beaucoup font partie de la propagande,
01:14:17mais il y a aussi, si on a le regard
01:14:19qui ne suit pas ce qu'on veut nous montrer,
01:14:22mais qu'on va regarder autour,
01:14:24le comportement des personnes, des qui-dames,
01:14:27comment la gestuelle s'adapte,
01:14:29comment certains lèvent le bras,
01:14:31d'autres lui baissent le bras,
01:14:33et si, quand même, on le lève,
01:14:35ces phénomènes d'adaptation progressive de l'individu,
01:14:39qui sont, j'allais dire, une réaction trop humaine,
01:14:41soit pour se protéger parce que tout le monde n'est pas un héros,
01:14:45soit parce qu'on pourrait avoir une approche cognitive.
01:14:49Quand l'ensemble de votre environnement
01:14:51se comporte d'une certaine façon,
01:14:53avec cet enthousiasme qui est propagé,
01:14:56la tentation est grande de faire pareil,
01:14:58et on voit ainsi,
01:15:00et c'est d'ailleurs dit très bien aussi dans le reportage,
01:15:03que ce qui est anormal devient légitime.
01:15:07C'est-à-dire que le hors-norme, l'extraordinaire,
01:15:10devient le quotidien et devient ordinaire.
01:15:13Jean Bulot, il y a forcément des leçons à tirer
01:15:16d'une époque comme celle-ci,
01:15:18de la couverture médiatique d'une époque comme celle-ci,
01:15:211933-1936.
01:15:22Mais quelles leçons à tirer pour aujourd'hui ?
01:15:25Quelles leçons peut-on encore tirer
01:15:28du travail que vous avez retiré de cette période
01:15:31si on la ramène aujourd'hui à notre époque contemporaine ?
01:15:34Moi, ça sera des leçons personnelles.
01:15:36Comme on vient de le dire,
01:15:39c'est vraiment l'idée de...
01:15:41Il y a un article qui m'a marqué sur ce 2e volet,
01:15:44de Soupault, qui parle de l'indifférence.
01:15:46L'indifférence des Allemands face à la situation,
01:15:49face à ce changement de régime,
01:15:51mais aussi l'indifférence de la presse internationale
01:15:54et des lecteurs internationaux
01:15:56face à ce qui se passait de l'autre côté du Rhin.
01:15:59Notre indifférence face aussi au choix des mots utilisés.
01:16:04À quel moment on parle d'un changement de régime ?
01:16:07On parle de la dictature en Asie,
01:16:09de la naissance du 3e Reich, comme on le dit souvent,
01:16:12mais, sauf erreur, la constitution de Weimar n'est pas abrogée.
01:16:16Le régime en tant que tel, la constitution est toujours là.
01:16:20Elle devient caduque, par principe,
01:16:22mais ces petits décrets, ces petites lois
01:16:25qui changent la vie de la société,
01:16:27on les a vues, on les a racontées, finalement,
01:16:30mais on est indifférents.
01:16:32C'est le sentiment que j'ai eu à la lecture de ces articles
01:16:35et de l'impact notamment en France.
01:16:38La journée du boycott du 1er avril 1933
01:16:40ne soulève pas de manifestations en France.
01:16:43Il n'y a pas de grands meetings comme aux Etats-Unis.
01:16:46Ca dit plein de choses aussi sur l'antisémitisme.
01:16:49Cette première journée du boycott des magasins juifs
01:16:52devait durer trois jours, à l'origine,
01:16:55et un certain nombre de correspondants,
01:16:57j'ai aussi vu ça dans votre livre,
01:16:59se sont surtout réjouis que les nazis les ramenaient
01:17:03à une seule journée, ce qui tentait à prouver
01:17:05qu'il n'y avait pas de boycott.
01:17:07Ca n'a pas marché, la population n'a pas autant marché
01:17:11qu'on le voulait. On s'attendait à une révolte
01:17:13violente de la population contre tous ses voisins juifs,
01:17:17et on le voit bien, c'est montré dans le film.
01:17:19En fait, on organise ce boycott,
01:17:22la prise de choix de celle d'âme.
01:17:24Vous pouvez quand même entrer, si vous voulez,
01:17:27et la dame entre dans le magasin.
01:17:29Ca, c'est un décalage qui signe
01:17:31cette erreur de calcul qu'avait faite...
01:17:33On va reparler de l'Allemagne dans un instant avec vous
01:17:37et de la couverture médiatique de la montée de l'extrême-droite,
01:17:40peut-être aujourd'hui, en Allemagne.
01:17:43Daniel Schindermann avance là.
01:17:45Quelle leçon tirez-vous du traitement de cette période
01:17:48pour les confrères et la manière de couvrir
01:17:50ce qu'est la montée du populisme, des extrémismes ?
01:17:54Et Trump ?
01:17:55C'est Trump qui vous vient tout de suite à l'esprit ?
01:17:58Oui, mais aujourd'hui, l'AFD en Allemagne,
01:18:01Trump aux Etats-Unis,
01:18:03on est dans une espèce de unprecedented de 2025.
01:18:07Je veux dire, on est exactement dans la même situation
01:18:11dans laquelle les mots nous manquent,
01:18:13à nos journalistes, pour décrire ce que nous voyons.
01:18:17Je parlais au début...
01:18:19On l'a déjà vu, Trump.
01:18:21Si je me réfère à ce que vous avez dit tout à l'heure,
01:18:24c'était inédit, ce que découvraient
01:18:26ces correspondants étrangers à l'époque.
01:18:28Là, c'est pas inédit.
01:18:30C'est un deuxième passage à la Maison-Blanche.
01:18:33C'est Trump 2.
01:18:34Maintenant, tout le monde nous dit que Trump 2,
01:18:37ce sera pas Trump 1, ce sera beaucoup plus dur, etc.
01:18:40Je parlais au début du débat du choix entre surdire et soudire.
01:18:44Moi, c'est quelque chose auquel j'ai toujours été
01:18:47extrêmement attentif, à faire attention
01:18:49de ne pas surinterpréter, d'être toujours très attentif
01:18:53à ce qui différencie ce que nous vivons aujourd'hui,
01:18:56par exemple, avec la montée de l'extrême droite
01:18:59dans plusieurs pays européens,
01:19:01avec les montées du fascisme, du nazisme,
01:19:03notamment avec une différence quand même de taille
01:19:06entre les deux situations.
01:19:08C'est que dans les années 20 en Italie
01:19:10ou dans les années 30 en Allemagne,
01:19:12les fascistes et les nazis tiennent la rue.
01:19:15Ils tiennent la rue physiquement.
01:19:17C'est extrêmement violent.
01:19:19On n'est pas dans cette situation.
01:19:21Il faut faire attention aux différences.
01:19:24Cela dit, la leçon, personnellement,
01:19:26que je tire de mon enquête, de mon voyage dans les années 30,
01:19:30c'est que je crois que tout bien pesé,
01:19:32il vaut mieux surdire que soudir.
01:19:35C'est-à-dire qu'il vaut mieux surligner,
01:19:38il vaut mieux être plus explicite,
01:19:41quitte, effectivement, à ce qu'un Schneiderman,
01:19:45dans 50 ans ou dans 80 ans,
01:19:47puisse reprocher aux journalistes d'aujourd'hui,
01:19:50plutôt que de cacher.
01:19:51Au total, c'est toujours, si vous voulez,
01:19:54une espèce de balance de risque-avantage.
01:19:58Je crois que le risque de la sous-estimation
01:20:01de ce que nous voyons est plus important
01:20:03que le risque d'y être trop attentif.
01:20:07L'AfD, c'est l'extrême droite allemande.
01:20:10Elle n'a jamais été aussi forte en Allemagne qu'aujourd'hui.
01:20:14Cette montée en puissance, on peut la dater,
01:20:17je crois, c'est 2015, la crise migratoire,
01:20:19et l'accueil d'un certain nombre de réfugiés politiques
01:20:23en Allemagne, sous l'égide d'Angela Merkel.
01:20:26Jusqu'où peut-on comparer, un tant soit peu,
01:20:29ce qu'on a vu ici, cette montée du nazisme,
01:20:32et cette résurgence de l'extrême droite allemande aujourd'hui ?
01:20:36La comparaison, c'est une opération intellectuelle
01:20:39que nous faisons tous.
01:20:41Nous comparons en permanence en disant ce qui est identique,
01:20:44ce qui est différent, ce qui est similaire.
01:20:47Les choses ne se répètent pas.
01:20:49C'est pourquoi l'argument, lorsqu'on essaie de convaincre
01:20:53des extrême-droites en disant qu'ils sont nazis,
01:20:56c'est contre-productif.
01:20:57Ils ont l'impression qu'ils ne sont pas nazis
01:21:00et qu'on n'est plus dans la même période.
01:21:03Il ne faut pas dire que ça se répète.
01:21:05En revanche, il faut mettre en évidence des dynamiques,
01:21:09des similitudes de constellation de force.
01:21:12Lorsque vous dites qu'aujourd'hui,
01:21:14ce n'est pas dans la rue, mais dans les réseaux sociaux,
01:21:18où la violence, l'insulte et la brutalité,
01:21:20cette brutalisation de la pensée
01:21:22et le fait qu'on est soit pour, soit contre,
01:21:25soit mon ennemi, soit mon ennemi, se passe dans d'autres endroits.
01:21:29Ce qu'il faut rajouter en plus,
01:21:31c'est que ce parti joue aussi sur l'histoire qui a existé
01:21:36et sur la mémoire que nous en avons.
01:21:38Sur le côté prescriptif de cette mémoire,
01:21:41en Allemagne, il faut être anti-nazi.
01:21:44Donc, si on veut être autrement, comme cette alternative,
01:21:48il faut arriver à dire qu'on n'est pas contre le nazisme,
01:21:51mais sans le dire pour être quand même entendus.
01:21:54C'est tous les jeux sur la connivence,
01:21:57sur la transgression, la réutilisation de schémas,
01:22:00de motifs, de formes.
01:22:02La campagne électorale de Alice Weidel,
01:22:05marquée par le grand mot
01:22:07« Alice für Deutschland »,
01:22:10c'est-à-dire « Alice pour l'Allemagne »,
01:22:12qui est un détournement d'un des champs d'ESA
01:22:15« Alice für Deutschland », tout pour l'Allemagne.
01:22:18On n'a pas le droit de dire en Allemagne « Alice für Deutschland »,
01:22:22parce que ça tombe sous le coup de la loi,
01:22:25mais si on dit « Alice für Deutschland »,
01:22:27c'est une répétition.
01:22:29C'est un jeu, et on joue sur la mémoire
01:22:31et sur l'expérience des uns et des autres.
01:22:34L'AFD, idéologiquement, où commence ou s'arrête
01:22:37la comparaison possible avec cette extrême droite des années 30 ?
01:22:41Il y a des éléments,
01:22:43dans les infrastructures du parti,
01:22:45comme dans les autres partis populistes, y compris en France,
01:22:49il y a des éléments néo-nazis,
01:22:51c'est-à-dire s'inspirant de la même idéologie,
01:22:54de la même vision fantasmée d'une communauté homogène, raciale,
01:22:58à laquelle on ne peut pas appartenir lorsqu'on n'y serait pas né.
01:23:02Et puis, il y a une violence,
01:23:04et il y a surtout des schémas de communication,
01:23:07qui sont d'ailleurs communs
01:23:09avec ce que nous montrent Donald Trump et Jay Devance,
01:23:12de retourner l'accusation, de dire
01:23:14vous êtes haineux envers nous, vous ne nous donnez pas la liberté.
01:23:19C'est une arme absolument diabolique,
01:23:21parce qu'elle désarme celui qui, au contraire,
01:23:24est un démocrate bienveillant.
01:23:26Les nazis, Goebbels, pardon,
01:23:28les nazis se présentent comme des défenseurs
01:23:31de la liberté d'expression, aussi.
01:23:34Les nazis, Goebbels, critiquent la presse américaine
01:23:38et critiquent les mensonges,
01:23:40la grossière propagande de la presse américaine,
01:23:43de la même façon que Vance, le vice-président,
01:23:46vous venez d'en parler, mène une offensive,
01:23:49on l'a vu ces derniers jours,
01:23:51contre l'Europe qui aurait sabordé sa liberté d'expression.
01:23:55Là, il y a quand même des parallèles troublants.
01:23:58Et le dernier parallèle, c'est aussi que le nazisme
01:24:01est un complotisme, on l'oublie,
01:24:03mais dans sa formation, c'est un complotisme,
01:24:06et là, par rapport à l'actualité et le parallèle,
01:24:09la participation d'Elon Musk aux meetings
01:24:12montre bien aussi cet international du complotisme,
01:24:15cet international aussi d'une idée
01:24:17qu'on n'arrive pas encore à nommer vraiment,
01:24:20mais qui montre aussi ses parallèles
01:24:23et ses résonances avec aujourd'hui.
01:24:25Est-ce qu'il y aura un troisième volet ?
01:24:27Peut-être.
01:24:28Est-ce qu'on aura, 1936, 1939, signé Jean Bulot ?
01:24:32Dans l'idée, ça serait justifié,
01:24:34parce qu'il se passe aussi plein de choses
01:24:37entre ces trois années.
01:24:391938, qui est aussi une crise de l'accueil.
01:24:42Donc, peut-être.
01:24:44De l'accueil des migrants.
01:24:46On sera à grand plaisir de diffuser ce troisième volet.
01:24:50D'année libre, grand plaisir.
01:24:52J'ai pris l'habitude.
01:24:54En tout cas, nous, on aura grand plaisir
01:24:56à le diffuser dans cette émission.
01:24:58Nous l'avions fait pour le premier volet,
01:25:00nous venons de le faire pour le deuxième.
01:25:02J'ai pas parlé de second,
01:25:04parce que ça voudrait dire qu'il n'y aura pas un troisième.
01:25:07Ce que je souhaite, c'est qu'il voit bien le jour.
01:25:10Merci à tous les trois d'avoir participé à ce Débat doc.
01:25:14Encore merci pour ce documentaire.
01:25:17Vos réactions, ce sera sur hashtag Débat doc.
01:25:20Merci aussi à Félicité Gavalda,
01:25:22Victoria Bellé, qui m'a aidée, comme à l'accoutumée,
01:25:25à préparer cette émission.
01:25:27Je vous donne rendez-vous pour un prochain Débat doc,
01:25:30avec son documentaire et son débat.
01:25:32A très bientôt.