• avant-hier
Grand invité : François Hollande, ancien Président de la République, député socialiste de Corrèze

HOMMAGE / Jean-Louis Debré, la politique au coeur

L'ancien Président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, est décédé dans la nuit du 3 au 4 mars 2025 à l'âge de 80 ans. Ce fidèle chiraquien, ténor de la politique française a été ministre de l'Intérieur de 1995 à 1997 puis Président de l'Assemblée nationale de 2002 à 2007 et président du Conseil constitutionnel de 2007 à 2016. Soucieux de sortir de l'ombre de son père, Michel Debré, qui fut Premier ministre sous Charles De Gaulle et rédacteur de la Constitution de la Ve République, Jean-Louis Debré s'est attaché à renforcer les institutions qu'il présidait en les modernisant et en rendant leur fonctionnement plus transparent. En tant que Président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré a mis un point d'honneur à défendre les droits de l'opposition. Président des « Sages » qui gardent la Constitution, fervent protecteur de la liberté et la République, quel est l'héritage politique de Jean-Louis Debré ?

Invités :
- Patrice Duhamel, éditorialiste politique et auteur,
- Bruno Fuligni, historien,
- André Chassaigne, Président du groupe « Gauche Démocrate et Républicaine », député du Puy-de-Dôme.

GRAND DÉBAT / Ukraine : les États-Unis changent-ils de camp ?

« Le récap » par Marco Paumier

Quelques jours après la sidérante altercation entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky devant les caméras du monde entier, l'administration américaine a annoncé le gel de l'aide militaire à l'Ukraine. En réponse à cet abandon américain, la Commission européenne, par la voix d'Ursula von der Leyen, propose un plan de réarmement européen et de soutien militaire à l'Ukraine. Ce plan survient après la rencontre des alliés de l'Ukraine à Londres qui avait pour but de convenir d'une action collective face au renoncement de Donald Trump et d'une proposition de paix. En France, cette proposition menée par le couple franco-britannique, rencontre la résistance de Marine Le Pen qui refuse certains de ses éléments comme l'ouverture à la discussion de la dissuasion nucléaire. Alors que Volodymyr Zelensky se dit ouvert à une trêve dans les airs et sur les mers, quel rôle la France peut-elle jouer dans la sécurité de l'Europe et dans l'arrêt de l'agression russe en Ukraine ?

Invités :

- Thomas Gassilloud, député « Ensemble Pour la République » du Rhône,
- Danièle Obono, députée « La France Insoumise » de Paris,
- Marie Récalde, députée socialiste de Gironde,
- Philippe Ballard, député « Rassemblement National » de l'Oise.

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

Abonnez-vous à la chaîne YouTube LCP - Assemblée nationale : htt

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Générique
00:02...
00:05Bonsoir à tous. Bienvenue dans Savourgarde.
00:09Au sommaire, une page d'histoire qui se tourne.
00:12L'ancien président du Conseil constitutionnel,
00:15Jean-Louis Debré, décidé à l'âge de 80 ans.
00:19L'Assemblée nationale qui l'avait présidée lui a rendu hommage.
00:23Portrait d'un homme qui refusait le sectarisme
00:26avec un témoin exceptionnel, François Hollande.
00:29Hollande sera notre invité dans un instant.
00:32Et puis, l'histoire en marche cette fois avec l'Ukraine.
00:35Donald Trump a acté la suspension de l'aide américaine.
00:39L'Europe est-elle prête à prendre la relève ?
00:41Un plan de réarmement a été annoncé à Bruxelles par la Commission.
00:45Une réunion a lieu à l'Elysée sur le même sujet.
00:48Quelle part pourrait prendre la France
00:51dans cette défense européenne ?
00:53La question divise les députés. Ce sera notre débat ce soir.
00:56Voilà, c'est le sommaire. Ca vous regarde ? C'est parti.
00:59Générique
01:02...
01:11C'est un nom de famille irrémédiablement lié
01:14à la Vème République.
01:15Jean-Louis Debré, fils du père de la Constitution
01:18et lui-même ancien président de l'Assemblée
01:22et du Conseil constitutionnel,
01:24il est donc décédé dans la nuit de lundi à mardi,
01:26à l'âge de 80 ans. Bonsoir, François Hollande.
01:29Merci d'avoir accepté notre invitation,
01:31au coin de mieux qu'un ancien président de la République
01:35pour parler d'une figure clé de la République.
01:37Vous allez nous dire les souvenirs que vous gardez
01:40de cet homme qui avait le don de susciter l'attachement.
01:43D'abord, retour sur un grand parcours avec Baptiste Gargui-Chartier.
01:47-"La Ve République a perdu ce matin
01:50un homme simple, un homme bien, qui avait l'art du lien."
01:54Applaudissements
01:56Dans l'hémicycle, cet après-midi,
01:58hommage à celui qui aura marqué l'histoire de la Vème République.
02:01Jean-Louis Debré, figure de la droite française,
02:04qui a su s'imposer parmi ses pères.
02:06D'abord magistrat, puis député, c'est en 1995
02:09qu'il fut propulsé ministre de l'Intérieur par Jacques Chirac,
02:12homme auquel il voue une fidélité sans faille.
02:15On ne croit pas qu'en politique,
02:16on puisse avoir de l'affection pour quelqu'un,
02:19et pour lui, une grande affection.
02:21-"La Place Beauvau", charge à lui de démunir des dossiers
02:24hautement sensibles.
02:25Vague d'attentats islamistes, affaires des sans-papiers
02:28de l'Eglise, l'ancien magistrat bâtit alors une stature
02:31qu'on ne lui soupçonnait pas forcément.
02:34Le moment était venu
02:36d'appliquer la loi
02:37avec fermeté.
02:39-"Ascension médiatique", les rouages des institutions
02:42n'ont, semble-t-il, aucun secret pour lui.
02:45A 58 ans, le voilà président de l'Assemblée nationale,
02:48le deuxième personnage de l'Etat, un Graal.
02:50-"Baissez-vous ! Asseyez-vous !
02:52Asseyez-vous ! Après !"
02:54-"La séance est suspendue, elle reprendra."
02:56Au perchoir, il multiplie les coups d'éclat,
02:59imprime sa marque,
03:00tantôt en recadrant sèchement les troupes,
03:02tantôt en dénonçant l'obstruction des oppositions
03:05d'une manière peu conventionnelle.
03:07L'intéressé s'en amuse.
03:08-"137 449 amendements déposés."
03:10Durant 5 ans, il aura forgé sa stature,
03:12parvenant même à acquérir le respect de l'opposition.
03:15Cela restera l'honneur de ma vie
03:18d'avoir présidé l'Assemblée nationale.
03:20Je vous remercie.
03:21Applaudissements
03:23-"À cette date, pas question d'une fin de carrière,
03:26bien au contraire. Dans la foulée,
03:28le protégé de Jacques Chirac règle la présidence
03:31du Conseil constitutionnel, fonction qu'il occupera
03:34durant 9 ans. Ces dernières années,
03:36Jean-Louis Debré se consacrait à l'écriture, au théâtre,
03:39continuer de commenter l'actualité politique.
03:41En retrait, dit-il.
03:42Avec le spectacle que la politique donne,
03:46vous voudriez que j'aille me remettre
03:49dans ce monde ?
03:53Non, c'est plus mon monde.
03:55-"Au Parlement, le Premier ministre lui loue aussi
03:58quelques mots en guise d'au revoir."
04:00-"Sa fidélité sera un modèle
04:02et son humour sera aussi pour nous une leçon de vie."
04:06-"Jean-Louis Debré s'en est allé,
04:08rejoint son père, l'artisan de la Constitution,
04:11à l'âge de 80 ans."
04:13François Hollande, votre présence ce soir
04:15pour évoquer la mémoire de Jean-Louis Debré
04:17nous dit d'emblée une chose, c'était un homme
04:20qui dépassait les clivages partisans.
04:22Vous vous souvenez de votre première rencontre avec lui ?
04:26Oui, nous étions députés l'un et l'autre,
04:29et il était président,
04:31ou en tout cas responsable du groupe RPR.
04:34Et il menait un combat féroce
04:37contre la majorité de l'époque dans laquelle j'étais.
04:41C'était François Mitterrand, président de la République,
04:44et il ne lâchait pas facilement ses coups,
04:47mais quand il les lâchait, ça pouvait aller assez loin.
04:50Mais il était dans son rôle.
04:52Et progressivement, à mesure qu'il a pris des fonctions
04:56qui n'ont pas été forcément très faciles,
04:58ministre de l'Intérieur, là aussi,
05:00il a été confronté à des moments difficiles,
05:03des épreuves, y compris le terrorisme.
05:06Lorsqu'il est devenu président de l'Assemblée nationale,
05:09c'est là qu'il a été, je crois, le plus heureux,
05:12parce qu'il connaissait très bien les rouages de l'Assemblée,
05:15il avait été dans l'opposition, dans la majorité,
05:18il savait les abus que pouvait faire une majorité,
05:21et il savait aussi les difficultés
05:23que peuvent rencontrer les députés de l'opposition.
05:26Alors, et c'était une surprise,
05:28alors qu'on s'attendait à une présidence
05:31qui puisse être, finalement, au service de l'exécutif,
05:35il a pris une autonomie.
05:38Et il a été capable de faire taire les opposants
05:43quand ils étaient trop brouillants, quand ils faisaient de l'obstruction,
05:47mais il les a protégés.
05:48J'étais premier secrétaire du Parti socialiste,
05:51et nous étions face à la présidence Sarkozy,
05:55et aussi, nous avons connu la fin de la présidence,
05:59donc, Chirac,
06:00et il était très, très conscient qu'il avait un rôle à jouer,
06:05et donc, il faisait en sorte
06:07que ça puisse être d'abord comme président de l'Assemblée générale
06:11et ensuite comme président du Conseil constitutionnel.
06:14Comme président du Conseil constitutionnel,
06:16j'ai eu des rapports avec lui,
06:18qui étaient de l'ordre institutionnel,
06:20mais de l'ordre personnel.
06:22Je voudrais vous entendre sur un mot
06:24que vous avez prononcé, le mot de fidélité,
06:26celui de Jacques Chirac.
06:28Fidélité au gaullisme et fidélité à Jacques Chirac
06:31dans un lien quasiment indéfectible.
06:33Il lui avait même consacré un documentaire en 2022.
06:36Je vous propose d'en écouter un extrait, François Hollande.
06:40J'ai des souvenirs d'enfance.
06:42Un jour, j'arrive à la maison,
06:45avec 15 ans,
06:46plein de bonbons, plein de fleurs, le téléphone sonne,
06:49beaucoup de gens, ça s'agit partout, on rentre, on sort.
06:53Maman, qu'est-ce qui se passe ?
06:55Ton père est Premier ministre.
06:57Ah, voilà.
06:58Trois ans plus tard,
07:00j'arrive à la maison,
07:01plus de bonbons, plus de fleurs, plus personne.
07:05Votre père est dans son bureau en train de fumer la pipe.
07:09Il s'ennuie mortellement.
07:12Maman, qu'est-ce qui se passe ?
07:14Ton père n'est plus rien.
07:15Et j'ai raconté cette histoire plusieurs fois à Chirac.
07:19La politique est ainsi faite que le jour où vous partez,
07:22tous les bons amis que vous avez autour de vous,
07:24tous les courtisans, tous ces gens-là,
07:27le lendemain, ils sont allés voir le suivant.
07:30-"Extrait de Montchirac", de Jean-Louis Debré,
07:33réalisé par Fabrice Piroc,
07:34à 20h30 sur l'antenne de LCP.
07:36C'est une chose rare et précieuse,
07:38François Hollande, la fidélité en politique.
07:40Oui, c'est une chose nécessaire
07:43si on veut avoir un chemin rectiligne.
07:46Mais beaucoup s'en échappent de ce chemin-là
07:50et montrent quelquefois un empressement
07:53qui peut décevoir.
07:55Mais ce que j'ai retenu de Jean-Louis Debré,
07:57c'est que c'était un homme qui savait
08:00à qui il devait la carrière qui fut la sienne.
08:04C'est Jacques Chirac
08:06qui a, le premier, eu de Michel Debré un conseil.
08:11Vous pouvez peut-être regarder ce que pourrait faire
08:14Jean-Louis Debré. Il a envie de faire de la politique.
08:17Très tôt, Jacques Chirac et Jean-Louis Debré
08:19se sont retrouvés, l'un dans des fonctions ministérielles,
08:23l'autre dans son cabinet, et ils ont avancé ensemble.
08:26Et le dernier des fidèles, lorsqu'il n'y a plus rien,
08:30lorsque le pouvoir a été transmis,
08:33lorsque la solitude a pu gagner
08:36celui qui était hier le chef et qui,
08:39aujourd'hui, n'est qu'un citoyen réolé
08:41de sa fonction précédente,
08:43Jean-Louis Debré a été le dernier.
08:45On a parlé de cette image d'un homme assez consensuel,
08:48mais il ne l'a pas toujours été.
08:50Quand il était ministre de l'Intérieur,
08:52vous étiez porte-parole du Parti socialiste,
08:55entre 1995 et 1997.
08:57Vous aviez eu des mots assez durs.
08:59Qu'est-ce qui s'était passé ?
09:01Il y avait une église qui avait été envahie
09:04par un certain nombre de migrants
09:07qui demandaient des papiers,
09:09et donc il y avait eu un assaut
09:11qui avait été organisé, lancé
09:14par le ministre de l'Intérieur, Jean-Louis Debré,
09:16et on avait vu une hache d'un policier
09:20frapper la porte de l'église,
09:22créant une certaine émotion,
09:24y compris parmi les curés de la paroisse.
09:30Donc, Jean-Louis Debré a souffert de cette image,
09:33car ça ne correspondait pas à sa conception des libertés,
09:36mais il faisait son travail de ministre de l'Intérieur.
09:39Un lieu est occupé, il faut l'évacuer,
09:41sans doute la forme n'était pas la bonne.
09:44Donc, il en avait tiré une leçon,
09:46après qu'il ait quitté la place Beauvau,
09:48le ministère de l'Intérieur.
09:49Il voulait non pas se racheter, pas la question de ça,
09:52mais il voulait montrer qu'il était respectueux des libertés,
09:56parce qu'il avait une fidélité à Michel Debré
10:00et à la Constitution de la Vème République.
10:03Pour lui, c'était l'autorité de l'Etat,
10:05mais le respect des libertés.
10:07-"Respectueux des libertés",
10:08notamment des libertés des oppositions.
10:11Vous en avez parlé lors de son passage
10:13à la présidence de l'Assemblée nationale.
10:15Il a été salué pour son respect des oppositions.
10:18Vous étiez député pendant cette ménageure ?
10:21Oui.
10:22Il était président protecteur de l'opposition,
10:26parce qu'il avait été dans l'opposition.
10:29Il savait que ça avait une part de travail ingrat.
10:32Il avait noué de bons rapports avec Jean-Marc Ayrault,
10:35le président du groupe socialiste.
10:37Chaque fois qu'il pouvait permettre à l'opposition
10:41d'exprimer ce qu'elle avait à dire,
10:43de prendre plus de temps qu'il n'y avait prévu,
10:46pour éviter l'obstruction.
10:48Il avait compris que si on voulait éviter les cris,
10:50les manoeuvres, les empêchements, les blocages,
10:54il fallait donner de la place à l'opposition.
10:56En tant que président du Conseil constitutionnel,
10:59vous étiez chef de l'Etat.
11:01Quelles relations avez-vous eues ?
11:03Nos relations devaient être forgées par l'indépendance.
11:08Il n'est pas question que le président du Conseil constitutionnel
11:11vienne demander au président de la République
11:14que doit-il faire.
11:15Jamais, Jean-Louis Debré ne s'est placé,
11:18pas davantage moi-même comme chef de l'Etat,
11:20il était le président du Conseil constitutionnel,
11:23garant donc des droits et des principes et des libertés,
11:27et j'étais le président qui affrontait le terrorisme.
11:30C'est là que Jean-Louis Debré a compris
11:33que le rôle de son institution était non pas simplement
11:36de vérifier la lettre de la loi, c'était son devoir,
11:41mais aussi l'esprit de la loi.
11:43Il fallait que ça n'aille pas trop loin,
11:45même pour la sécurité de nos concitoyens,
11:48et il fallait que la liberté puisse être protégée.
11:52Et enfin, il m'avait donné sa version, sa philosophie.
11:55Il m'avait dit, écoutez,
11:56j'agis comme président du Conseil constitutionnel,
11:59puisqu'il était déjà en fonction depuis plusieurs années,
12:03et j'agis en toute indépendance.
12:06Si votre loi de finances comporte des dispositions
12:09qui sont contraires à la Constitution,
12:11même si c'est en votre programme,
12:13je censurerai, et c'est ce qui s'est passé,
12:16avec la fameuse taxe à 75 %, mais il m'a dit,
12:18si, en revanche, je sais que c'est une loi
12:21et qu'il y a une loi qui correspond à votre engagement
12:24et qui est la volonté du Parlement et donc de la société française,
12:28même si je pense qu'il peut y avoir quelques retouches,
12:31je ne censurerai pas le principe de cette loi.
12:33C'était la loi sur le mariage pour tous.
12:36Vous aviez gardé des contacts avec lui
12:38après son retrait de la vie politique ?
12:40Oui, parce qu'il avait pris beaucoup de libertés,
12:44et donc il faisait des livres, il faisait des conférences,
12:48il faisait des signatures,
12:49et donc nous nous retrouvions assez régulièrement.
12:52Et puis il avait ce spectacle. Je suis allé voir son spectacle
12:56sur les femmes de la République.
12:59C'était assez étonnant.
13:01Il ne s'était pas fait connaître
13:03comme un féministe particulièrement militant,
13:06mais là, il était convaincu que la République
13:08ne serait pas digne de ce qu'elle peut faire espérer
13:11s'il n'y avait pas l'égalité entre les femmes et les hommes
13:15et la présence de ces femmes-là, souvent ignorées.
13:18Je suis allé voir son spectacle, on avait dîné après,
13:21et paradoxalement, hier, j'étais dans le restaurant
13:24où nous avions dîné et on parlait avec celui qui nous recevait
13:27de ce qu'avait été ce dîner très fraternel,
13:30je dois dire, avec Jean-Louis Debré et sa compagne Valérie.
13:33Quel héritage il laisse pour vous
13:35dans la vie politique française ?
13:38C'est la passion.
13:40La passion de la politique.
13:43Il était animé de convictions.
13:45Il n'était pas simplement un proche de Jacques Chirac
13:48ou un héritier de Michel Debré, du général de Gaulle,
13:51il avait la passion, il aimait la politique.
13:54Il était triste de voir dans quel état
13:56elle pouvait quelquefois se dégrader ou tomber.
13:59C'était ça qui le faisait vivre, cette envie de convaincre,
14:03cette passion pour les idées, les convictions.
14:06C'est ça, Jean-Louis Debré.
14:08Il était en mission, il avait un côté presque prophétique.
14:12Il était là...
14:13-"Prophétie n'était pas toujours juste".
14:15Parfois, oui.
14:17Il partait dans des discours, mais il avait la passion,
14:20et c'est ce qui manque, il faut avoir l'envie et la passion.
14:23Merci, François Hollande, d'avoir été notre invité
14:26pour évoquer cette mémoire de Jean-Louis Debré.
14:29On va poursuivre cet hommage avec d'autres personnalités
14:32qui vont nous rejoindre pour déployer d'autres facettes
14:35de l'hommage à l'Assemblée nationale.
14:37Elles sont réunies par Clément Perreault.
14:40Il laissera la trace de l'engagement,
14:42ça, c'est un point fort, de la fidélité,
14:44qui est une valeur importante et qui, mon bon monsieur,
14:47aurait peut-être tendance à se perdre,
14:50mais je crois que c'est ça, l'engagement,
14:52une certaine idée de la France, la République par-dessus tout.
14:56Je dois avouer qu'il m'aimait bien
14:58parce que j'avais battu Ségolène Royal,
15:01et ça lui avait beaucoup plu.
15:05Et donc, on plaisantait souvent sur la vie politique.
15:09Il a été un président de l'Assemblée
15:11qui savait manier l'humour, ce qui, parfois,
15:14est quand même une bonne manière de prendre un peu de recul
15:17sur les choses qui nous agressent tous les jours.
15:20Il avait des convictions qui nous séparaient,
15:22mais aussi une certaine idée de la France qui nous rassemblait.
15:26Il mettait l'intérêt supérieur de la nation au-dessus de tout.
15:30M. Debré fait partie de ces personnes
15:32et, quelle que soit la position partisane,
15:35inspire le respect. Voilà.
15:38On rejoint sur ce plateau trois invités.
15:40Bonsoir, André Chassaigne,
15:42président de la gauche démocrate et républicaine à l'Assemblée,
15:45élu au Palais-Bourbon depuis 2002.
15:47Vous avez donc connu Jean-Louis Debré au perchoir.
15:50Avec nous, Patrice Duhamel,
15:52que l'on ne présente pas.
15:53Journaliste et essayiste, Bruno Fuligny,
15:56écrivain et historien, vous avez connu Jean-Louis Debré
15:59en tant que fonctionnaire au Palais-Bourbon,
16:02sous sa présidence de l'Assemblée.
16:04Un mot d'abord sur les réactions qu'on vient d'entendre.
16:07Il est rare d'entendre des hommages aussi unanimes
16:10de la classe politique à une personnalité.
16:12A quoi est-ce dû ?
16:14C'est le paradoxe de Jean-Louis Debré,
16:16qui était à la fois... Je l'ai connu il y a 50 ans.
16:19On était dans la même bande,
16:20moitié journaliste, moitié jeune, ambitieux politique,
16:23de toute sensibilité politique.
16:25C'était l'époque où les journalistes et les politiques
16:28avaient le droit de déjeuner et de dîner ensemble.
16:32On faisait souvent des dîners assez longs
16:34avec Jean-Louis et d'autres.
16:36Il est à la fois militant,
16:38mais un vrai militant pur et dur.
16:40J'ai rarement vu quelqu'un avoir des convictions politiques
16:43aussi ancrées et n'en changeant pas,
16:45ce qui est à noter.
16:47Et puis, les batailles politiques, il adorait ça,
16:50les batailles politiques.
16:51Le combat politique, il adorait ça,
16:53comme son second père, Jacques Chirac.
16:56Et en même temps, il s'est révélé,
16:58à deux témoins et acteurs,
17:00quand il était à la présidence de l'Assemblée nationale,
17:03mais également au Conseil constitutionnel.
17:06Je vais très vite.
17:07On a dit, par exemple, que c'est lui
17:09qui avait agi au Conseil constitutionnel
17:12pour que les comptes de Sarkozy soient invalidés.
17:14Ils avaient des relations.
17:16Mais au Conseil constitutionnel, ils sont neufs.
17:19C'est pas le président qui décide d'invalider les comptes.
17:22Donc, il y a ce paradoxe.
17:24Et la période, je dis ça parce que peut-être
17:27j'aurai pas le temps, on va laisser les acteurs politiques
17:30s'exprimer, et je crois que l'une des périodes
17:32les plus heureuses et les plus tristes en même temps,
17:35c'est les deux dernières années de Jacques Chirac.
17:38Il était quasiment le seul ou l'un des très rares
17:41à venir voir Jacques Chirac.
17:43Il l'accueillait avec affection, etc.
17:46Ils allaient se promener boulevard Saint-Germain.
17:49Tous les gens les arrêtaient tous les deux.
17:51Il adorait ça et en même temps, il voyait
17:53que le déclin s'accélérait.
17:56Il l'a accompagné, en tout cas, jusqu'au bout.
17:59On reviendra peut-être sur leur début et leur rencontre.
18:02André Chassaigne, il y a eu un concert de louanges
18:05à l'Assemblée, vous vous y êtes joint.
18:07On savait que vous seriez avec nous ce soir.
18:10Que retenez-vous, vous, de ce personnage,
18:12Jean-Louis Debré ? Vous avez des mots très élogieux.
18:15Quand je suis arrivé en 2002, on me l'avait présenté
18:18comme étant un républicain très dur.
18:21Pas spécialement, copain-copain, avec les communistes,
18:24si on peut dire, et j'ai découvert
18:26un président de l'Assemblée qui avait une forme de sympathie,
18:30comme gaulliste, une forme de sympathie pour les cocos.
18:34En fait, c'est ça.
18:35Et cette présidence, j'en garde vraiment un souvenir
18:39d'une présidence exemplaire, c'est-à-dire que c'était
18:43à la fois d'une autorité naturelle,
18:45il remettait en place...
18:46J'étais assis à côté de Maxime Grémetz,
18:49le parti, le groupe avaient dit qu'il fallait essayer de le tenir
18:52et il fallait bien se mettre à deux,
18:54moi, jeune député, ou nouveau député,
18:57parce que je n'étais pas très jeune,
18:59et le président de l'Assemblée, pour essayer de tenir Grémetz.
19:02Je pense qu'il arrivait à le tenir,
19:04mais tout ça, il le faisait avec une pointe d'humour.
19:07J'ai le souvenir, je m'ennuyais un mercredi après-midi,
19:10je savais qu'il y avait beaucoup de personnes âgées
19:13de ma circonscription qui regardaient
19:15le mercredi après-midi et le mardi après-midi
19:18les questions au gouvernement, je lui fais passer un mot
19:21en me disant que beaucoup d'anciens de chez moi
19:25regardent sans savoir que je suis dans l'hémicycle.
19:28Et au bout d'un moment,
19:29alors que j'étais très sage, comme d'habitude,
19:32au bout d'un moment, j'écoute,
19:33M. Chassen, taisez-vous !
19:35Du coup, tout le monde savait que j'étais bien présent au poste.
19:39Bruno Fuligni, avant qu'on revienne
19:41sur cette présidence de l'Assemblée,
19:43ses débuts en politique, c'est la rencontre avec Jacques Chirac
19:46qui a été décisive dans son parcours ?
19:48Une rencontre très jeune,
19:50puisqu'en fait, l'anecdote, c'est qu'il accompagne son père
19:53qui vient accueillir le général de Gaulle,
19:56ça se passe à Orly,
19:57puis il voit un jeune type un peu remuant
19:59qui fume cigarette sur cigarette, il lui demande qui est celui-là,
20:03c'est sa première rencontre avec Chirac.
20:06Et effectivement, au départ, il va vraiment démarrer
20:09avec Chirac, il va être proche de Chirac,
20:11il va être un collaborateur de Chirac,
20:13et c'est pour cela, d'ailleurs, le président Chassen l'a dit,
20:17plus tard, il devient président de l'Assemblée,
20:19au tout début, un proche du président de la République
20:23au perchoir, ça pouvait faire peur,
20:25et son intelligence, c'est qu'il a montré qu'il était impartial.
20:28C'est vrai qu'il avait des convictions,
20:31mais il aimait aussi la controverse,
20:33il respectait, je dirais, la liberté de pensée
20:36de ses adversaires, et à partir de là,
20:38il a surtout beaucoup veillé à ce que le temps de parole
20:42des opposants soit respecté, et en particulier,
20:45le coup qu'il vous a fait, il le faisait aussi
20:48avec un député de droite qui est décédé récemment,
20:50monsieur De Gauchy, député de l'Oise,
20:53et il n'arrêtait pas de lui dire
20:55monsieur De Gauchy, chaque fois que l'autre remuait,
20:58pour bien montrer qu'il tapait un coup à droite, un coup à gauche,
21:01et qu'il était impartial.
21:03C'est cette image d'impartialité qu'on retient,
21:05et il se l'est forgée à la présidence de l'Assemblée
21:08pendant ces cinq années passées au palais Bourbon.
21:11Avant, il a eu un parcours politique brillant,
21:14assez classique, député, maire, ministre, etc.,
21:18et comme l'a dit François Hollande tout à l'heure,
21:21quand il était ministre de l'Intérieur
21:23avec Jacques Chirac à l'Elysée et Alain Juppé à Matignon,
21:28il avait plutôt une réputation de droite dure,
21:31c'était la période qui était un peu costaud,
21:33politiquement, effectivement, l'Eglise Saint-Bernard, etc.
21:36Mais en même temps, ce que disait André Chassein tout à l'heure,
21:40on m'étonne pas, parce qu'il avait une religion
21:43qui était la fidélité, pas seulement aux hommes,
21:45c'est pas de se raconter des histoires,
21:48dans la politique, c'est rare, une vraie fidélité,
21:50mais les gens qui sont fidèles à leurs convictions.
21:53Vous avez des adversaires politiques,
21:55monsieur Chassein, bien évidemment,
21:58mais on vous connaît, vous et beaucoup de communistes,
22:01pour la fidélité à leurs convictions.
22:03Et ça, pour lui, c'était quelque chose
22:05d'absolument essentiel.
22:06André Chassein prend les rênes de l'Assemblée
22:09et modifie le règlement pour donner plus de droits,
22:12plus de pouvoirs oppositions, des pouvoirs financiers,
22:15mais aussi du temps de parole.
22:16Ca a été un vrai changement.
22:18Je suis arrivé en 2002, quand il a pris la présidence,
22:21mais j'étais impressionné par le fait
22:24que, dans son souci de respecter l'opposition,
22:28de donner la parole à l'opposition,
22:30quelquefois, il passait assez rapidement sur le règlement.
22:34J'ai un exemple. Un exemple.
22:36Des amendements ont été déposés
22:38par l'ensemble des députés de la Réunion
22:40pour supprimer ce qu'on appelait le colonnat,
22:43qui était une forme de métaillage
22:45qui datait de l'époque coloniale à la Réunion.
22:48Et ce jour-là, par hasard incroyable,
22:50il y avait un déplacement ministériel à la Réunion
22:53et personne pour défendre les amendements
22:56qui étaient déposés.
22:57Son père avait été député de la Réunion.
22:59Bien sûr. J'avais été averti par Huguet de Belleau.
23:02Je n'étais pas signataire de l'amendement.
23:05Je me précipite sur le micro,
23:06et ce qu'on ne verrait jamais aujourd'hui.
23:09Il m'a quand même laissé la parole.
23:11J'étais pas signataire et j'ai fait passer cet amendement.
23:14J'ai eu donc une représentativité à la Réunion
23:17comme quelqu'un qui avait supprimé le colonnat.
23:20Mais c'était plutôt grâce au président Debray.
23:22Bruno Fuligni, président de l'Assemblée,
23:25c'est le président de la Chambre des députés,
23:27mais aussi d'une institution, l'Assemblée nationale.
23:30Vous étiez à ce moment-là fonctionnaire de l'Assemblée.
23:33Comment il était perçu de l'intérieur,
23:36si on peut dire ?
23:38Si vous voulez, je peux difficilement
23:40avoir un recul d'historien, je vais en parler avec émotion,
23:43parce qu'il y a plus de 20 ans, j'étais un jeune fonctionnaire
23:47et on lui avait dit qu'il y avait un fonctionnaire un peu bizarre
23:50qui écrivait des histoires de députés oubliés.
23:53Je me suis retrouvé dans son bureau,
23:55n'en menant pas très large, au départ,
23:57et puis ayant devant moi un président
23:59qui était, à l'évidence, un homme de culture,
24:02un homme qui s'intéressait à l'histoire,
24:04et c'était aussi un politique qui n'opposait pas
24:07la culture et la politique.
24:09Il avait compris que par la culture et la culture historique,
24:12il pouvait parler à ses opposants, aux citoyens, aux Français.
24:15Et à partir de là, ça a fait de lui un président
24:19qui a commencé à ouvrir les portes du Palais-Bourbon,
24:23qui a fait venir des comédiens,
24:25il avait institué les mardis de la ceste,
24:27des lectures publiques qui avaient lieu dans la galerie des fêtes,
24:31il a commencé à publier des ouvrages,
24:33qu'il préfaçait, mais dont il était l'instigateur,
24:36des anthologies de grands discours.
24:38Il a fait rayonner l'institution en dehors.
24:41Il a fait rayonner son histoire et son patrimoine.
24:43S'il y a au Palais-Bourbon une salle des Mariannes,
24:46c'est parce qu'il a fait l'acquisition
24:48d'une très grande collection de Mariannes,
24:51constituée par le journaliste Pierre Bonte,
24:53qui est devenue une collection patrimoniale de l'Assemblée.
24:57Voilà pour l'héritage quasiment patrimonial.
24:59On a parlé des droits de l'opposition.
25:01A l'époque, la majorité était pléthorique.
25:04165 députés pour l'UMP et ses alliés.
25:06C'était peut-être plus facile à gérer qu'aujourd'hui, quand même.
25:10Oui, évidemment, mais ça...
25:13Quel regard il jetterait sur l'Assemblée ?
25:16J'ai eu des conversations...
25:18Il est tombé malade au mois de décembre,
25:21mais j'avais souvent des conversations avec lui,
25:23notamment quand on allait signer nos livres respectifs
25:26dans les salons du livre, où il était accueilli
25:29avec une ferveur incroyable.
25:31Tous les militants gaullistes, chiraciens,
25:33ils faisaient la queue et ils signaient les livres
25:36d'une manière très drôle, en faisant des grands dessins, etc.
25:39C'était assez spectaculaire.
25:41Franchement, il avait un regard de critique sur...
25:44Pardon, sur le monde politique actuel,
25:47sur l'exécutif actuel,
25:48sur le président de la République actuelle.
25:51Franchement, c'était même assez spectaculaire,
25:56la force de la critique.
25:59Il considérait...
26:00Il y avait aussi de la nostalgie,
26:02parce qu'il avait beaucoup d'affection pour Chirac,
26:05c'était un gaulliste de coeur, son père, etc.
26:07Mais il considérait,
26:10peut-être de manière excessive, d'ailleurs,
26:13c'est peut-être la critique que je pourrais lui apporter,
26:16je suis aussi critique que lui,
26:18mais vraiment, il considérait qu'on était passé
26:21d'une période à une autre dans la qualité
26:23du personnel politique, et je pense que c'était vrai,
26:26mais qu'il exagérait un peu.
26:28André Chassaigne, vous connaissez la nouvelle Assemblée,
26:31vous vous confirmez ?
26:32...à LCP, je me suis trouvé dans un débat avec lui,
26:35vous trouverez ça dans vos archives,
26:37il était très critique sur ce nouveau monde
26:40qui balançait tout.
26:41Lui, par exemple, quand il y a eu des milliers d'amendements,
26:44il a pas modifié le règlement de l'Assemblée
26:47parce qu'il y avait des milliers d'amendements,
26:49il a fait le spectacle, il a empilé les amendements,
26:52il a ridiculisé les socialistes et les communistes,
26:55qui avaient été l'auteur de cet abus de dépôt d'amendements,
26:59et le lendemain, nous les avons retirés
27:01parce qu'il avait gagné la partie sans modifier le règlement.
27:04Il vivait mal le monde actuel, les réseaux sociaux, etc.
27:07L'Assemblée mise les séquences sur les réseaux sociaux,
27:10c'est pas quelque chose qu'il aurait beaucoup apprécié.
27:14Vous comptiez écrire un livre avec lui ?
27:16Oui, je l'avais sollicité, il était d'accord,
27:19parce que je suis un collectionneur de citations,
27:22et j'avais eu une idée, je lui ai dit,
27:24voilà, on va écrire un livre ensemble,
27:26on prendra des mots, on choisira des mots ou des thèmes,
27:30et chacun de notre côté, on choisira des citations
27:33en lien avec le thème ou avec le mot,
27:36et on écrira un livre, on sera page contre page
27:40pour voir ce qu'un gaulliste peut retenir comme citation
27:43et ce qu'un communiste peut retenir comme citation.
27:46On l'avait pas fait, j'avais trop d'activité,
27:48je m'attendais à le faire dans les mois qui viennent,
27:51pour qu'on sorte cet ouvrage ensemble,
27:53je pense que ça aurait été la fin.
27:55On aurait peut-être trouvé des citations communes
27:58qu'on aurait pu laisser comme étant une production partagée.
28:02Voilà qui aurait bouclé la boucle du gaullisme et du communisme.
28:05Merci à vous trois d'être venus évoquer
28:07cette mémoire de Jean-Louis Debré.
28:09Merci à vous pour cette page d'histoire.
28:12Nous allons retourner dans le feu de l'actualité,
28:15un feu brûlant marqué par la suspension
28:17de l'aide américaine à l'Ukraine.
28:19Nous ferons tout pour tenir à réagir Kiev aujourd'hui.
28:23Voilà l'Europe en première ligne, en tout cas.
28:26Peut-elle seule sauver l'Ukraine et assurer sa propre défense ?
28:30Nous allons en débattre dans un instant
28:32avec quatre députés qui vont nous rejoindre
28:34au lendemain d'un débat à l'Assemblée
28:36qui a laissé paraître bien des divisions sur le sujet.
28:39On va y revenir, mais d'abord, le récap' pour tout comprendre.
28:43Il est signé ce soir de Marco Pommier.
28:50Musique rythmée
28:52...
28:56Bonsoir, Marco.
28:57Les Etats-Unis suspendent donc leur aide militaire à l'Ukraine.
29:01Kiev, privé d'armes, de renseignements
29:04et de soutien pour faire face à l'invasion russe.
29:07Une décision brutale annoncée la nuit dernière
29:10par la Maison-Blanche.
29:11Donald Trump a mis sa menace à exécution
29:14quatre jours après son altercation
29:16avec Volodymyr Zelensky
29:18dans le bureau Oval l'Objectif.
29:20Il est clair, faire pression sur le président ukrainien
29:23pour l'obliger à négocier avec la Russie,
29:26pour le président, pour le vice-président américain,
29:29Zelensky est un va-t'en-guerre.
29:31Zelensky a montré un refus clair
29:33de s'engager dans le processus de paix
29:35que le président Trump a déclaré être la politique du peuple américain.
29:39C'est là que ça bloque.
29:40Je pense que Zelensky n'était pas encore prêt.
29:43Et je pense qu'il n'est toujours pas prêt.
29:45Mais il finira par y arriver.
29:48Washington lâche l'Ukraine, la Russie jubile.
29:51Pour le porte-parole du Kremlin,
29:53il s'agit de la meilleure contribution pour la paix.
29:56L'Ukraine, de son côté, calme le jeu.
29:58Cet après-midi, Volodymyr Zelensky assure que son pays
30:01est reconnaissant de l'aide militaire américaine
30:04et propose même une trêve dans les airs et en mer
30:07pour entamer des discussions de paix.
30:09En France, quelle réaction ? Est-ce que c'est l'Union nationale ?
30:13En apparence, la décision de Donald Trump,
30:15de toutes les forces politiques françaises,
30:17la condamne.
30:19Trahison, a dit ce matin Édouard Philippe.
30:21Décision brutale et cruelle pour Marine Le Pen.
30:24François Bayrou a aussi réagi, c'était cet après-midi, au Sénat.
30:27-"Car le mot de suspension ne trompe personne.
30:31La suspension dans la guerre
30:34de l'aide à un pays agressé,
30:38ça signifie qu'on abandonne le pays agressé
30:40et qu'on accepte ou qu'on souhaite
30:43que son agresseur l'emporte."
30:46François Bayrou veut réunir tous les moyens
30:48pour compenser le gel de l'aide américaine,
30:51ouvrir à nouveau les cordons de la Bourse.
30:54Et là, ça bloque.
30:55Renforcer le soutien militaire de l'Ukraine,
30:57c'est oui pour le camp présidentiel,
30:59les socialistes et les écologistes.
31:02Pour la France insoumise, il n'y a pas d'issue militaire au conflit.
31:05Autre divergence, l'idée d'une défense européenne.
31:08Oui, François Bayrou et Emmanuel Macron,
31:11l'appel de leur vœu,
31:12la présidente de la Commission européenne
31:14a mis sur la table un plan à 800 milliards d'euros
31:17pour réarmer l'Europe.
31:18Le RN et les Insoumis ne veulent pas en entendre parler.
31:23800 milliards, pour quoi faire ?
31:25Si c'est pour acheter des armes américaines,
31:27je ne vois pas en quoi cela renforce l'autonomie stratégique européenne.
31:31Marine Le Pen, elle, ne veut pas défendre
31:33ce qu'elle appelle une défense européenne chimérique
31:37et s'oppose, comme les Insoumis, encore une fois,
31:39à l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN.
31:42Les réalités, c'est d'abord admettre
31:44que nous ne pouvons pas promettre à l'Ukraine une adhésion à l'OTAN,
31:48alors que nous savons que cette option a été une justification
31:51à l'agression russe et est clairement rejetée par les Etats-Unis.
31:55Bref, Thibault, vous l'avez compris,
31:57la classe politique française soutient l'Ukraine dans les mots,
32:00mais les divergences stratégiques sont nombreuses.
32:03Je vous laisse en débattre.
32:04Merci, Marco. Le décor est donc planté.
32:06J'accueille mes invités. Bonsoir, Thomas Gassiou.
32:09Vous êtes député pour la République du Rhône,
32:12membre de la commission de la défense
32:14que vous avez présidée à l'Assemblée de 2022 à juin dernier.
32:17Bonsoir, Marie Récalde, députée socialiste de Gironde.
32:20Vous siégez aussi au sein de la commission de la défense.
32:23Avec nous aussi Daniel Obono.
32:25Bonsoir. Député de la France insoumise de Paris.
32:27Philippe Ballard est avec nous, député
32:30de l'Assemblée nationale de l'Oise.
32:32D'abord, revenons sur cette annonce, cette déflagration,
32:35les Etats-Unis qui suspendent leur aide militaire à l'Ukraine.
32:38Que dites-vous de cette décision ?
32:40C'est jeter la brebis dans la gueule du loup ?
32:43C'est fichu pour l'Ukraine ?
32:44C'est une nouvelle donne qui arrive au pire moment.
32:47C'est finalement une décision qui encourage l'agresseur
32:50à poursuivre son oeuvre en indiquant au pire moment
32:54qu'on ne va plus soutenir le pays qui est agressé.
32:57C'est une décision qui doit nous amener, nous, Européens,
33:01à ouvrir les yeux pour prendre en main notre propre sécurité,
33:04même si la France l'a plus fait que ses voisins européens,
33:07pour aller vers ce qu'on nous pousse depuis 2017,
33:10l'autonomie stratégique européenne.
33:12On a entendu la réaction de Marine Le Pen
33:14qui parle de décision brutale. Brutale et illégitime ?
33:17Elle dit cruelle et brutale.
33:19Illégitime ?
33:20Elle est illégitime, la décision du président américain ?
33:23Je peux parler au nom du président des Etats-Unis,
33:26mais elle est cruelle, elle est brutale.
33:28On a compris que ce qui guide Donald Trump,
33:31comme tous les présidents américains,
33:33qui sont isolationnistes, c'était les intérêts économiques,
33:37des Etats-Unis, avec l'histoire des terres rares.
33:39C'est aussi, par ricochet, essayer de désarimer la Russie de la Chine.
33:44Donc, alors que des dizaines de milliers,
33:47centaines de milliers d'Ukrainiens,
33:49un million, d'ailleurs, de soldats et de civils russes
33:52et ukrainiens ont déjà péri depuis trois ans,
33:55oui, c'est un coup cruel, brutal et incompréhensible
33:58qui est donné aux Ukrainiens.
34:01Quand vous voyez cette séquence,
34:03vendredi, l'esclandre contre Volodymyr Zelensky
34:05dans le bureau Oval. Aujourd'hui, cette annonce.
34:08Trump fait le jeu de Poutine. Il a choisi son camp ?
34:11On peut sans doute le dire, oui, qu'il a choisi son camp,
34:14mais on a l'impression de tomber de l'armoire.
34:17En fait, il ne fait que ce qu'il avait dit
34:19pendant sa campagne, ce qu'il a fait lors de son premier mandat,
34:22avec plus de tempérance, il est vrai,
34:25mais en fait, ce qui nous surprend, c'est le calendrier.
34:29Il est arrivé au bureau Oval le 20 janvier
34:31et les choses se précipitent.
34:33On se couche un soir, le lendemain,
34:35des annonces plus que dramatiques
34:38sont faites pour l'Ukraine et pour l'Europe, je dois dire.
34:41Donc, ce qui nous surprend, c'est l'accélération du temps
34:44auquel on n'était pas préparés.
34:46Par contre, sur le fond, on n'est pas très surpris
34:49de la position du président américain,
34:51qui ne fait que exécuter ce qu'il avait dit.
34:54Daniel Obono, Volodymyr Zelensky propose aujourd'hui,
34:57on l'a entendu, une trêve dans le ciel et sur la mer
35:00pour réitérer l'engagement de l'Ukraine vers la paix,
35:03qui est remis en cause dans le discours américain.
35:06Il pose une condition que la Russie en fasse de même.
35:09Est-ce possible sans pression américaine ?
35:11Écoutez, de toute évidence,
35:13Donald Trump et les Etats-Unis d'Amérique
35:16ont décidé de clore leur soutien à l'Ukraine
35:19pour passer à autre chose,
35:21c'est-à-dire leur confrontation avec la Chine.
35:24C'est ce qu'on voit se déployer
35:26et c'est le programme sur lequel il a fait campagne
35:29et qu'il annonce depuis un certain temps.
35:32La précipitation, c'est la même, d'ailleurs,
35:34que ce qu'il met à démanteler une partie
35:37de l'aide états-unienne à l'étranger,
35:39et donc, voilà, il avance au pas de charge.
35:42Et de ce point de vue, effectivement,
35:46l'enjeu, c'est de faire en sorte
35:48que les Ukrainiens, en premier lieu,
35:51puissent avoir leur mot à dire
35:54en premier concerné
35:57dans comment vont se faire
35:59les négociations de paix
36:01et le cessez-le-feu.
36:04Donc, évidemment, il faut qu'ils puissent avoir
36:06un certain nombre de garanties.
36:08Il faut des garanties mutuelles de sécurité.
36:11C'est d'abord, en premier lieu, pour l'Ukraine,
36:13qui est le territoire et le pays qui a été agressé,
36:16sur lequel la question de son intégrité territoriale
36:19est posée, et donc, c'est un élément
36:22qu'il faut prendre en compte
36:24de la part des Etats-Unis.
36:26La question, c'est que, malheureusement,
36:28Donald Trump, aujourd'hui, n'écoute pas ou écoute peu
36:32d'autres voix que celles de ses propres intérêts.
36:36La sienne est peut-être celle de Vladimir Poutine.
36:39Thomas Gassillou, sur les conséquences
36:41de cette annonce, est-ce que la France, par exemple,
36:44est en mesure de suppléer aux besoins
36:46de l'armée ukrainienne après cette annonce ?
36:48Est-ce qu'on a les moyens de prendre le relais ?
36:51Les conséquences, c'est que les Européens
36:53doivent sortir de leur minorité stratégique.
36:56Comme une puissance, ils sont 500 millions,
36:58et aujourd'hui, ces 500 millions d'Européens
37:00demandent aux 350 millions d'Américains
37:03de les protéger contre 150 millions de Russes.
37:05Ces 500 millions d'Européens doivent prendre conscience
37:08qu'ils sont une puissance, ils doivent assumer
37:11par eux-mêmes leur sécurité.
37:13Pour cela, la France a un rôle primordial à jouer,
37:15puisque depuis le début, la France sait
37:17que cette autonomie stratégique est importante
37:20et elle met en oeuvre, depuis les années 60,
37:23une politique d'indépendance,
37:24notamment portée par le général de Gaulle,
37:26qui dit que non seulement les Etats-Unis sont nos alliés,
37:29mais ils sont aussi prévisibles
37:31et on ne peut pas mettre notre sécurité entre leurs mains.
37:34Aujourd'hui, il faut qu'on arrive à bâtir en Européens
37:37les moyens de nous défendre nous-mêmes.
37:40Est-ce qu'on a la capacité de production d'armes de défense ?
37:43Les Américains fournissaient des missiles Patriot
37:46pour empêcher les attaques de bombes russes.
37:50Est-ce qu'on a les moyens de prendre ce relais-là ?
37:53D'un point de vue de la production, de la technologie, en Europe ?
37:56C'est une vraie question.
37:58La France, de ce point de vue-là, n'est pas si en retard
38:01que parfois, bien au contraire.
38:03La question, c'est celle du rampe-peuple.
38:05Est-ce qu'on va être en capacité de produire rapidement ?
38:08Si tenter qu'on ait les budgets en face,
38:11c'est une vraie question sur la loi de programmation militaire,
38:14la revue nationale stratégique,
38:16dont la révision est lancée, ne suffira pas
38:19à répondre à ces questions.
38:20On a interrogé le gouvernement encore cet après-midi,
38:23ma collègue Anna Pic, notamment, sur ces sujets-là.
38:26La question, c'est, l'outil industriel derrière suffira-t-il ?
38:30Sera-t-il au rendez-vous ?
38:31Les industriels français sont au rendez-vous,
38:34mais aurons-nous la capacité, collectivement,
38:37de mobiliser suffisamment
38:39pour pouvoir fournir le matériel nécessaire ?
38:42Quel matériel, par ailleurs ?
38:44Aujourd'hui, on sait qu'on a des sujets,
38:46notamment sur la frappe en profondeur,
38:48et d'autres sujets importants et stratégiques.
38:51Je voudrais qu'on revienne sur des points concrets
38:54pour comprendre vos positions, loin d'être unanimes.
38:57On l'a vu hier, lors du débat à l'Assemblée
38:59sur l'envoi de troupes en Ukraine,
39:01l'utilisation des avoirues gelées,
39:03et la question de la dissuasion nucléaire.
39:06Sur la question des troupes françaises,
39:08sur le sol ukrainien, d'abord,
39:10pour rassurer un hypothétique maintien de la paix à venir,
39:13Marine Le Pen a dit que ce serait une folie.
39:15A quel titre ?
39:16Marine Le Pen a été très claire.
39:18Si c'est sous l'égide des Nations unies,
39:21il y a la finule aussi de Liban...
39:23Ils sont très compliqués,
39:24la Russie est membre du Conseil de sécurité.
39:27Une guerre, ça se finit toujours de la même façon.
39:29C'est soit l'armistice, soit un traité de paix.
39:32Dans ce traité de paix à négocier,
39:34il peut y avoir des clauses sur le déploiement de troupes au sol,
39:38mais sous le contrôle de l'ONU.
39:39Il est hors de question d'envoyer des troupes françaises au sol.
39:43On ne va pas déléguer toute notre souveraineté,
39:46le peu qu'il en reste, à Mme van der Leyen,
39:48à l'Union européenne.
39:49La France est un grand pays.
39:51On a l'arme nucléaire avec le Royaume-Uni,
39:53mais qui n'est plus dans l'Union européenne.
39:56On a un siège au Conseil de sécurité de l'ONU,
39:59que M. Macron voulait partager avec l'Allemagne,
40:01comme sur le nucléaire.
40:03On n'a pas très bien compris sa position.
40:05Pour uniquement prendre cet exemple
40:07des troupes françaises au sol en Ukraine,
40:10la réponse est très claire, c'est non.
40:12Thomas Gassiou, sur les troupes françaises en Ukraine.
40:15Il y a plusieurs points qui ne sont pas tout à fait exacts.
40:18S'il y a des troupes françaises en Ukraine,
40:20ils ne sont pas sous commandement européen.
40:23Il n'y a pas eu de question de partager
40:25le siège permanent de la France au Conseil de sécurité.
40:28Pour les questions de dissuasion, il y a beaucoup de politiques
40:32par rapport à la doctrine française,
40:34qui restent changées depuis 1960,
40:36en reconnaissant une dimension européenne des intérêts vitaux.
40:39La première garantie de sécurité pour les Ukrainiens,
40:42c'est l'armée ukrainienne.
40:44Aujourd'hui, la priorité, c'est de continuer
40:46à conforter l'armée ukrainienne, y compris si demain,
40:49un cessez-le-feu ou une trêve est signée.
40:52La question éventuelle des troupes au sol,
40:54qui ne seraient pas des troupes combattantes,
40:57mais des troupes, on va dire, de maintien de la paix,
41:00pourrait se poser dans un cadre européen.
41:02Daniel Obono, votre position sur ce sujet
41:05de l'envoi des troupes françaises au sol en Ukraine
41:08en cas de paix avec la Russie ?
41:10Encore une fois, la question, c'est quel moyen avons-nous
41:14pour cela ?
41:15De quelle manière des troupes françaises
41:17seraient en capacité de sécuriser quoi que ce soit
41:20sur ce territoire ?
41:21L'objectif, quel est-il ?
41:23Quel est l'objectif que nous poursuivons ?
41:26Pour qu'il y ait un cessez-le-feu, que la guerre s'arrête
41:29et qu'il puisse y avoir un certain nombre de garanties
41:32qui soient données à l'Ukraine, en premier lieu,
41:35et à la Russie.
41:37Et donc, pour cela, il faut d'abord des moyens diplomatiques
41:40pour faire en sorte que les conditions
41:45du cessez-le-feu et de la paix soient respectées
41:49et soient garanties pour l'ensemble des belligérants.
41:52Donc, pour ce qui est de l'engagement,
41:55nous, vous le savez, nous défendons
41:57l'engagement multilatéral au sein de l'ONU,
42:02et la France, au sein de l'ONU,
42:03fait partie du Conseil de sécurité, doit prendre sa part.
42:07Mais là, on n'est pas dans un cadre de discussion au niveau onusien.
42:11On est dans un cadre où il faut d'abord faire en sorte
42:14que les partis soient autour de la table,
42:16que tout le monde soit autour de la table,
42:19et pas que ce soit une discussion entre Donald Trump
42:22et Vladimir Poutine, et qu'on ait les moyens, ensuite,
42:25de faire en sorte que la négociation puisse se faire
42:28et qu'on apporte, ensuite, les moyens
42:32dans cette négociation de paix.
42:34Envoyer des troupes pour envoyer des troupes,
42:36ça n'a pour le coup aucun intérêt concret sur le terrain.
42:40Vous avez évoqué la dissuasion nucléaire.
42:42Philippe Ballard, Marine Le Pen, là aussi,
42:45a une position tranchée, hier, lors des débats à l'Assemblée.
42:48La partager, c'est l'abolir, a-t-elle dit.
42:51D'accord, mais la France est le seul pays européen à en disposer.
42:54Si les Etats-Unis ne sont plus là,
42:56que fait-on ? On laisse les autres pays européens
42:59à leur triste sort ?
43:00Non, mais l'arme nucléaire, le feu nucléaire,
43:03ça s'emploie pas n'importe comment.
43:05C'est un dernier, tout, tout, tout dernier recours.
43:08Le général de Gaulle avait dit
43:10si le Benelux, l'Allemagne sont menacées
43:14et si les intérêts vitaux...
43:15En fait, le mot-clé, c'est ça.
43:17Est-ce que les intérêts vitaux de la France sont menacés ?
43:20Dans ce cas-là, oui, on emploie l'arme nucléaire,
43:23mais c'est pas un char d'assaut, une arme nucléaire.
43:26Il faut avoir conscience de ce que ça peut représenter.
43:29Si nos intérêts vitaux sont menacés,
43:31oui, il y a l'arme nucléaire dont dispose la France.
43:34Thomas Gassiou, sur cette question,
43:36le chef de l'Etat a fait une ouverture.
43:39Aucun changement depuis 1960 en matière de doctrine
43:42concernant l'arme nucléaire,
43:44qui est conçue, produite, mise en oeuvre,
43:46décidée par le président de la République.
43:48C'est pour ça que la Vème République
43:50donne au président la force du suffrage universel
43:53pour engager la dissuasion au nom de l'ensemble des Français
43:56littéralement attachés à leurs intérêts vitaux.
43:59La question ne s'était jamais posée
44:01comme elle se pose aujourd'hui pour des voisins européens.
44:04A plusieurs reprises, la dimension européenne
44:07des intérêts vitaux a été rappelée.
44:09Le président de la République a fait un appel
44:11à un dialogue avec les voisins pour voir dans quelle mesure
44:14cette dissuasion peut concourir encore davantage
44:17à la sécurité européenne.
44:19Il y a quelque chose que tout le monde oublie,
44:21c'est que des têtes nucléaires américaines
44:24sont présentes dans plusieurs pays européens,
44:26comme l'Allemagne, la Belgique, par ailleurs.
44:28Si les Américains se désengagent totalement du théâtre européen,
44:32il faudra qu'on ait ce dialogue stratégique
44:34pour voir comment la dissuasion nucléaire française,
44:37et qui restera française, peut concourir encore davantage
44:40à l'autonomie stratégique européenne.
44:43Il y a un autre sujet qui sous-tend le débat qu'on a,
44:45c'est la question du budget de la Défense.
44:48Il est d'environ 2 % du PIB aujourd'hui.
44:50Emmanuel Macron évoquait le chiffre de 5 %.
44:52Il faut passer en économie de guerre.
44:54La ministre de l'Economie a répondu oui à cette question.
44:58Ecoutez, ça fait partie des sujets
45:00sur lesquels on se positionne les uns les autres,
45:02sur lesquels on travaille à la Commission de la Défense
45:06depuis un petit moment déjà, de toute façon.
45:08Bien évidemment qu'il faut augmenter le budget de la Défense.
45:11On le sait, la Défense a connu des années difficiles.
45:14On avait déjà remonté le budget depuis 2015.
45:18La question a été poursuivie et cet effort a été maintenu.
45:21On est aujourd'hui dans une situation inédite.
45:25Est-ce que c'est 3 %, est-ce que c'est 5 %,
45:27les chiffres en soi ne signifient pas grand-chose.
45:30Ce qui est certain, c'est que l'effort de Défense
45:33va être nécessaire, couplé à un questionnement
45:36sur un emprunt de Défense, éventuellement,
45:38d'ailleurs, que le président de la République
45:41a également abordé.
45:42On ne sait pas encore trop bien sur quel sujet,
45:45mais oui, on est très clairement passés
45:47dans un autre moment, dans une autre économie.
45:50Pour revenir à la question que vous avez posée,
45:52pas sur les troupes, mais sur l'OTAN
45:54et sur le positionnement de la France et de l'Europe,
45:57on a aujourd'hui la nécessité, enfin, je dirais,
46:00enfin, en tout cas, ça apparaît au grand jour,
46:03de prendre nos responsabilités, d'avancer.
46:05Je me souviens avoir commis un rapport
46:07sur l'Europe de la Défense en 2014.
46:10Je l'ai repris.
46:11Bon, il n'y a pas grand-chose qui a bougé.
46:14Les choses ont l'air d'avancer.
46:15On va y venir.
46:17Sur le plan européen, il y a eu des avancées importantes.
46:20La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen,
46:23a annoncé un plan pour réarmer l'Europe
46:26avant un Conseil des chefs d'Etat qui s'annonce décisif jeudi.
46:29Dario Borgogno vous résume ces derniers événements.
46:33Face aux tensions diplomatiques,
46:35l'Union européenne a décidé de renforcer sa défense.
46:38L'Europe est prête à assumer ses responsabilités.
46:42Le plan Réarmer l'Europe pourra mobiliser
46:45jusqu'à 800 milliards d'euros pour la défense
46:48et les dépenses d'une Europe sécurisée et résiliente.
46:53800 milliards pour mettre à niveau la défense européenne,
46:57dont 150 milliards de prêts pour investir en priorité
47:00dans la défense antiaérienne, missiles, drones
47:04ou encore dans les systèmes d'artillerie.
47:06La présidente propose aussi de sortir les dépenses militaires
47:09de la règle stricte du 3 % du PIB.
47:12En clair, permettre aux Etats d'augmenter leur budget de défense
47:16sans se faire épingler par Bruxelles pour déficit excessif.
47:19Un discours d'économie de guerre qui résonne en France.
47:23On va devoir réfléchir aussi à nos modèles économiques,
47:26à investir plus dans la tech, dans la défense,
47:30pour dépendre au moins des autres, et notamment des Etats-Unis,
47:34et être capable de jouer des coups.
47:36Ursula von der Leyen veut aussi faciliter les prêts
47:38par la Banque européenne d'investissement,
47:41pour l'instant interdite de financer des projets de défense.
47:44La Commission suggère d'utiliser des fonds d'aide
47:47pour les régions défavorisées de l'Europe
47:49et se tourner vers des fonds privés.
47:51Ces propositions seront discutées ce jeudi
47:54lors d'un Conseil européen extraordinaire.
47:56Ces annonces marquent-elles un tournant ?
47:59C'est l'Europe de la défense qu'Emmanuel Macron appelait de ses voeux
48:02et qu'il était seul à défendre ?
48:04Oui, c'est un vrai tournant.
48:06Il faut rappeler brièvement ces 30 dernières années,
48:09depuis les années 90, depuis la fin de la Guerre froide,
48:12avec 5 ou 6 % du PIB en matière de défense,
48:14on a réduit drastiquement les budgets de défense.
48:17Finalement, qu'est-ce qu'on a conservé ?
48:19On a conservé la dissuasion nucléaire,
48:22qui reste crédible, et on a conservé
48:24une capacité expéditionnaire, à mener des opérations limitées,
48:27loin, contre un ennemi souvent bien moins équipé que le nôtre.
48:31Aujourd'hui, il faut qu'on passe dans une nouvelle étape,
48:35qu'on réapprenne ce qu'on savait faire pendant la Guerre froide
48:38en regagnant en masse, en épaisseur de nos armées,
48:41et il faut qu'on réussisse également
48:43les grands défis technologiques qui sont en cours
48:46et qui modifient la manière de faire la guerre.
48:49Troisième chose, il faut qu'on arrive à faire face
48:51à des menaces hybrides du champ cyber,
48:54du champ informationnel, pour lequel on n'est pas toujours
48:57bien équipé.
48:58Daniel Obono, je vous vois faire nom de la tête.
49:01Non, effectivement, nous, nous sommes en désaccord
49:04avec cette rhétorique de l'économie de guerre,
49:06parce qu'aujourd'hui, nous pensons que s'il y a une menace
49:10existentielle qui existe, c'est la menace existentielle
49:13du dérèglement climatique, de la nécessaire bifurcation
49:16écologique, et que, face à ça, nous devrions mettre
49:19les moyens et la coopération et les financements à la hauteur.
49:23Aujourd'hui, y compris une discussion sur l'économie de guerre,
49:26ça sert, comme, effectivement, l'a dit le ministre de l'Economie,
49:30à justifier, y compris, d'autant plus d'austérité.
49:33On va nous expliquer, c'est l'économie de guerre,
49:36et donc, vous allez devoir accepter,
49:38comme dans certains pays du Nord, où c'est annoncé de travailler
49:41jusqu'à 70 ans, parce que c'est l'économie de guerre,
49:44vous devriez accepter toujours moins de financement pour l'éducation.
49:48Ce sont des choix politiques, souverains,
49:50qui ne peuvent être laissés à la décision de Mme van der Leyen,
49:54qui fait des annonces, mais bien au-delà de ce que sont
49:57ses prérogatives, je le rappelle, et puis, c'est un choix de société.
50:00Nous, nous pensons, par ailleurs, qu'il y a des besoins
50:03en termes de défense, bien entendu, qu'on doit évaluer,
50:06mais pas de l'incitation à une escalade militaire
50:09qui ne va enrichir que les marchands de canons,
50:12au détriment des besoins écologiques, démocratiques et sociaux
50:15de nos sociétés, et parce que nous pensons,
50:18effectivement, que nous serons d'autant plus protégés,
50:21que les droits humains, sociaux, économiques seront garantis,
50:24que nous aurons aussi, par exemple, une diplomatie à la hauteur.
50:28Depuis ces dernières années, notre corps diplomatique
50:31est remis en cause, est cassé, il y a même eu des mobilisations
50:35traditionnellement plutôt discrètes,
50:37et c'est ce genre d'armes diplomatiques
50:40dont nous avons besoin, et pas de, simplement,
50:43offrir des marchés à toutes les industries militaires.
50:46Thomas Gassillot et Philippe Ballard veulent répondre.
50:49Il ne faut pas opposer l'ensemble des objectifs.
50:52Les objectifs de transition énergétique,
50:54de biodiversité, sont une condition de durabilité de la société,
50:58mais l'effort de défense est aussi une condition de durabilité
51:01de notre société. Vous n'avez pas de possibilité
51:04d'assurer votre propre sécurité,
51:06donc n'opposons pas les choses, et l'effort de défense,
51:09c'est vraiment une condition de durabilité de nos sociétés.
51:12C'est pour ça que j'ai proposé de faire un livret défense,
51:15de la même manière qu'existe un livret de développement durable,
51:18pour qu'on puisse ensemble flécher une partie de l'épargne des Français
51:22pour cet effort de défense, parce que je pense
51:25qu'au même titre des investissements en matière
51:28de développement durable ou du logement social,
51:31investir dans notre défense,
51:32c'est permettre d'avoir une société plus durable.
51:35Pour l'idée du livret de défense, on verra si elle est retenue.
51:39Elle a été proposée, y compris par des députés de droite,
51:42pendant les débats hier.
51:43Philippe Ballard, ces annonces d'Ursula von der Leyen,
51:46la présidente de la Commission européenne est-elle là ?
51:49Il serait mieux de se mêler de ce qui la regarde.
51:52Ce n'est pas à madame von der Leyen de nous dicter
51:55ce que l'on doit faire.
51:56Elle avait été mandatée par les chefs d'Etat
51:58pour proposer ces solutions.
52:00Madame von der Leyen est à la tête de son instance.
52:03Mais moi, je vous renvoie, vos confrères de La Tribune
52:07ont publié une lettre des industriels de la défense française
52:11et qui disent, texto,
52:12Bruxelles n'a pas à s'arroger des droits qu'elle n'a pas.
52:16Voilà, c'est notre souveraineté en matière de défense.
52:19La souveraineté, c'est fondamental.
52:21On parle de financement,
52:23mais personne ne dit que la Commission va décider
52:25de l'armée française.
52:27800 milliards pour acheter quoi ? Du matériel américain.
52:3055 % des armes achetées au sein de l'Union européenne
52:33proviennent des Etats-Unis.
52:34On va être plus dépendants.
52:36Il y a un autre point.
52:37800 milliards, on va mutualiser, sans doute, cette dette.
52:40On va perdre, d'un point de vue financier,
52:43notre souveraineté sur la défense.
52:45C'est deux fois non aux propositions de madame von der Leyen.
52:48Il y a une nouveauté dans ces annonces,
52:50c'est l'assouplissement des règles budgétaires.
52:53Les pays européens pourront aller au-delà des 3 %
52:56et on aura un déficit sur les questions de défense.
52:59C'est une sorte de tabou.
53:00C'est une demande de longue date de sortir
53:02les questions de défense et les dépenses de défense
53:05de la règle de calcul des 3 %.
53:07Il faut être prudent avec ça,
53:09même si c'est une piste très intéressante.
53:11Il faut faire attention sur ces sujets-là.
53:14Ca demande un certain travail.
53:16Oui, c'est une piste importante.
53:18Ca dépendra des dépenses de défense que l'on fait rentrer.
53:21On est vraiment aux prémices de cette réflexion.
53:25Il ne faut pas, bien sûr, éviter,
53:27mais je pense que c'est une piste importante.
53:29Sur les 800 milliards, la question, effectivement,
53:32est de savoir à quoi vont servir ces 800 milliards.
53:35Qu'est-ce qui sera attribué à l'Ukraine pour sa défense ?
53:38Qu'est-ce qui reviendra aux industries européennes
53:41et françaises, évidemment, en matière de défense ?
53:44Il ne s'agit pas non plus, comme ça a été dit,
53:47d'une défense européenne, d'une armée européenne.
53:50Je pense que chaque pays n'est pas prêt, et c'est normal,
53:53de laisser sa souveraineté stratégique au plan européen.
53:57Par contre, qu'une coordination européenne...
54:00On a désormais un commissaire à la défense européenne,
54:03ce qui n'était pas le cas pendant très longtemps.
54:06On a des sujets à traiter en commun.
54:08Mais ça existe depuis longtemps.
54:10En fait, nos forces, aujourd'hui, sur le territoire européen,
54:13travaillent en format OTAN depuis longtemps,
54:16mais pas forcément sous commandement américain.
54:18Les commandements sont français,
54:21sont, la plupart du temps, européens,
54:25au sens des Etats, mais ce sont des exercices OTAN.
54:28Aujourd'hui, on sait faire travailler dans le format OTAN.
54:31Par ailleurs, dans l'OTAN, il n'y a pas que les Etats-Unis.
54:34La défense n'est pas, et je pense qu'on sera d'accord là-dessus,
54:38que des capacités militaires et des financements.
54:40La défense est aussi un rôle pour chaque citoyen
54:43qui doit comprendre la nouvelle donne du monde.
54:46Chaque citoyen est une cible de nos compétiteurs stratégiques,
54:49ne serait-ce qu'au travers du champ informationnel,
54:52des opérations cyber.
54:53Chacun doit avoir conscience dans le monde dans lequel on est
54:57et on doit développer tous ensemble une culture de défense.
55:00La défense doit être l'affaire de tous
55:02pour que des chefs d'entreprise, des ouvriers, des agriculteurs
55:06se demandent ce qu'ils peuvent apporter à la souveraineté du pays.
55:09Je voudrais qu'on fasse un tour de table rapidement
55:12pour terminer sur une idée qui a ressurgi dans le débat,
55:15notamment en Allemagne, sur la question du service militaire.
55:19Vous l'avez peut-être entendu.
55:21Il va falloir se reposer aussi cette question en France.
55:24Philippe Ballard ?
55:25Je fais partie d'une classe d'âge qui a connu
55:28le service obligatoire.
55:29Il y avait un brassage, mais il faut se méfier aussi,
55:32c'est pas forcément idyllique,
55:34parce qu'en fonction de son incorporation,
55:36on tombait à la 0,8, par exemple,
55:38c'était ceux qui étaient incorporés au mois d'août ou d'octobre.
55:42Il y avait beaucoup d'étudiants, donc c'était plutôt intellectuel.
55:46Moi, il se trouve que j'étais intégré à la 0,4, avril,
55:51et il y avait des gens qui étaient analfabètes,
55:53mais dans la chambre, on leur apprenait à lire et à écrire.
55:57Après, la question...
55:58C'est pour les moments de vie, mais sur le plan de la défense.
56:01Est-ce qu'on a des casernes ? On a tout vendu.
56:04Il faut les loger, ces soldats.
56:05C'est pas quelque chose qu'on fait en un claquement de doigts.
56:09Ça prendra, si c'était le cas, sûrement plusieurs années.
56:12A l'heure actuelle, je pense pas que ce soit la voie
56:15vers laquelle il faille se diriger.
56:17Nos priorités, c'est déjà d'équiper nos soldats d'actives,
56:20qui sont sous-équipés, malgré les efforts de défense
56:23qu'on fait depuis 2017.
56:25On a besoin d'équiper nos soldats d'actives
56:27et on a besoin de développer les réserves opérationnelles.
56:31On va doubler ce nombre de réservistes
56:34dans les prochaines années pour les passer à 100 000,
56:37quasiment un réserviste pour deux militaires d'actives.
56:40La priorité, c'est d'équiper ceux qui nous protègent
56:43en portant les armes de la France
56:45et réinstaurer aujourd'hui le service militaire,
56:47qui n'a été que suspendu,
56:49ne correspondrait plus aux enjeux de défense
56:52tels qu'on les propose.
56:53Marie-Éclaide ?
56:54Le service militaire, c'est le mythe qu'on nous ressort.
56:57Ceux qui en parlent, c'est ceux qui ont cherché
57:00à ne pas le faire en demandant une dérogation.
57:02On tourne la page du service militaire.
57:05On ne reviendra pas en arrière, nous n'avons plus les moyens,
57:08ni en hommes, ni financiers,
57:10de remettre une classe d'âge.
57:12Une classe d'âge, ne serait-ce que ça,
57:15vers le service militaire ?
57:16La question est plutôt celle de la résilience de la nation,
57:20et je rejoins Thomas Gassilou sur ce sujet-là.
57:22C'est une question d'éducation,
57:24ce sont plusieurs actions,
57:26mais la résilience de la nation me paraît un sujet important.
57:29Nos amis et collègues des pays du nord de l'Europe
57:33et de l'est de l'Europe, eux, sont très impliqués là-dessus.
57:36Ils ont des manuels à destination de la population
57:39sur la résilience de la nation.
57:41C'est un apprentissage des questions de défense nationale.
57:45On n'a pas cette culture en France.
57:47On a quelques classes de défense, et on commence au collège.
57:51Très très jeunes, dès le primaire.
57:53C'est la même façon que la culture industrielle.
57:56On n'a pas cette culture en France de la résilience de la nation,
58:00et ça passe par la réserve, bien sûr, qui va être augmentée,
58:03ça passe par un emploi d'efforts spécifiques.
58:06On ne reviendra pas sur le service militaire,
58:08je n'y crois pas du tout.
58:10Daniel Obono, sur ces questions de défense,
58:12elles sont la compétence des Etats.
58:14On peut imaginer une défense européenne
58:16qui soit plus qu'une juxtaposition de forces nationales,
58:20où c'est chaque pays, son armée, sa direction intégrée ?
58:23Déjà, il faut poser la question de l'OTAN,
58:26parce que c'est la marotte, effectivement.
58:29Ca fait des années qu'on parle d'une défense européenne.
58:32Tant qu'on reste dans le cadre de longtemps
58:34où nous sommes contraints de suivre,
58:36alors ce n'est pas toujours commandement américain,
58:39mais ce sont des intérêts stratégiques
58:42qui sont déterminés par la première puissance
58:44qui fournit, y compris une majorité des moyens militaires.
58:49Et donc, si on ne pose pas cette question,
58:51on va tourner en rang,
58:53comme on l'a vu ces derniers jours
58:55avec les dirigeants européens qui disent
58:58qu'on veut bien envoyer des troupes,
59:00mais si les Américains veulent bien.
59:02Donc oui, c'est la question, dans la tradition gaulliste,
59:05du commandement intégré et de l'OTAN qui se pose.
59:08Merci, Daniel Obodo.
59:09Merci à tous d'avoir participé à ce débat.
59:12C'est la fin de cette émission. Merci de nous avoir suivis.
59:15Bonne soirée à tous.
59:16SOUS-TITRAGE ST' 501

Recommandations