• il y a 13 heures
Interview ou reportage d'une émission cinéma produite par CANAL+ autour d'un film disponible sur CANAL+ ou sortant en salles, un événement ou une actualité du 7ème Art
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Transcription
00:00Barbara Schluss, bonjour. Je suis ravie de vous recevoir dans Tête-à-Tête, c'est notre première fois ensemble et en plus on va parler de votre premier film en tant que réalisatrice, ça s'appelle Le Secret de Keops.
00:09C'est une comédie qui va vite, qui déborde d'énergie, j'ai l'impression que ça vous correspond bien déjà.
00:13Oui, pareil, je me rends pas con, je le vis de l'intérieur mais pareil.
00:17Cette énergie c'est un peu votre marque de fabrique depuis vos débuts d'ailleurs. C'est votre moteur ?
00:23Je suis née comme ça, c'est comme Obélix. J'ai l'impression que depuis longtemps que je sais que la vie est courte et c'est un mélange de curiosité, d'excitation.
00:31Oui, d'en profiter au max. Enivrez-vous, c'était Baudelaire ça de tout.
00:36Alors ici, le trésor du pharaon Keops avait été découvert pendant la campagne d'Égypte de Napoléon, puis ramené en France, puis caché à Paris.
00:43C'est le point de départ de votre film et pour le dire, c'est vous qui l'avez écrit, donc ça a germé dans votre petit cerveau.
00:50C'est comme dit, mais enfin, un film d'aventure pour un premier film. Parce qu'effectivement, souvent, les premiers films sont personnels.
00:59Mais vous ne me connaissez pas, alors je ne suis pas, j'ai pas eu un père égyptologue, mais j'ai eu un père qui était aventurier,
01:04qui m'a fait vivre beaucoup d'aventures quand j'étais jeune, mais beaucoup.
01:08Les fouilles clandestines, des villages abandonnés en Espagne, comment il m'a emmenée, je savais à peine, nager sur un hobby cat, dormir sur des langues de sable au milieu de l'océan.
01:18Enfin, ce n'était pas toujours rassurant. Il était surfeur, la nuit tombait, et avec mon frère, on était là.
01:23Toutes les familles partaient, on entendait les mères qui disaient, je vais te faire tes petites coquillettes, tu vas prendre ton bain.
01:27Et nous, on était là, on se l'écaillait, il était 9h, on avait faim. Ils nous disaient, c'est lequel, papa ?
01:30Et bien, c'est lui, celui qui prend la vague.
01:32Vous racontez plein d'histoires aussi, je crois, complètement.
01:34Oui, on a une maison qui est en Charente où il m'a parlé d'un souterrain.
01:38Toute mon enfance qui, soi-disant, servait aux protestants à fuir et qui reliait notre champ.
01:43Il l'avait vu quand il était enfant. J'ai rêvé de souterrain.
01:46J'ai lu Dumas dans cet endroit, face à la mer, sous la lune, quand j'avais 17 ans.
01:51Donc, il y a de l'imagination.
01:53Il y en a.
01:54Depuis toujours.
01:55Et donc, ce film d'aventure m'est très personnelle parce que ça fait partie de mon ADN.
02:01Et c'est une réconciliation père-fille parce que j'ai perdu mon père il y a 20 ans.
02:04Et c'est pour ça que vous lui dédiez ce film.
02:05Et effectivement, la relation père-fille, elle est vraiment au cœur du récit.
02:08Elle évolue tout au long du film et j'imagine que pour vous, c'est une façon de lui dire tout ce que vous n'avez pas eu le temps de lui dire.
02:12Oui, je ne sais pas si c'est une façon de lui dire.
02:15En tout cas, c'est une façon de, en créant ce film, en l'écrivant, en le réalisant,
02:20j'ai fabriqué cette réconciliation qui n'a jamais eu lieu.
02:23Et voilà, j'ai tissé.
02:26Ça, c'était très amusant.
02:27J'ai mis en résonance la grande histoire et ma petite histoire.
02:30Parce qu'en fait, c'est une histoire de l'humanité.
02:33C'est ça, des grandes histoires et des petites histoires derrière.
02:36Et c'est vrai que c'est ce qui fait aussi que c'est un film d'aventure, pas comme les autres.
02:40On pourrait le comparer au Da Vinci Code.
02:42On pourrait le comparer à Indiana Jones.
02:44C'est vrai, mais c'est ce que j'allais dire.
02:47C'est qu'il y a aussi ce fond humain, social.
02:51Ces deux personnages qui sont joués par Fabrice Lucchini et Julia Piatron qui vont se retrouver à travers cette grande aventure.
02:57En fait, mes références, c'était vraiment parce qu'on a toujours des références.
03:01N'importe quel cinéma de n'importe quel cinéaste est nourri de cinéma.
03:04C'est toujours comme ça.
03:06Et c'est vrai que oui, j'ai vu Indiana Jones quand j'étais petite et ça m'a fascinée.
03:09Surtout à l'époque, j'avais le roman de la momie de Théophile Gautier et je voulais être égyptologue.
03:13Mais j'ai aussi vu Derzouzala et j'ai été bouleversée par cette aventure humaine des deux personnages.
03:19J'adorais le cinéma de De Broca ou de Rapneau avec ses histoires un peu folles et loufoques.
03:24Mais avec des personnages qui les vivaient au premier degré, c'est-à-dire sincèrement, sans jouer l'idée de la comédie.
03:30Il y a également dans Le secret de Kéops une touche de fantaisie qui est digne des comédies policières de Pascal Thomas.
03:35Et d'ailleurs, vous l'avez repérée.
03:37On l'a repérée.
03:38Il y a quand même un petit clin d'œil.
03:40C'est vrai que j'ai fait des clins d'œil à beaucoup de gens.
03:42J'ai mis beaucoup de ce que j'aimais dans ce film.
03:45J'ai mis des acteurs qui étaient mes amis dans la vie et que ça soit des acteurs connus ou des inconnus.
03:51J'ai mis toute la troupe du Shakespeare que j'ai faite il n'y a pas longtemps.
03:53D'abord parce qu'ils m'ont beaucoup vu écrire dans toutes les loges de France.
03:56Ils m'ont beaucoup entendu parler du projet.
03:58Je disais c'est la moindre des choses.
03:59Vous venez tous.
04:00J'ai mis Pascal Thomas qui m'a donné ma première chance à un grand rôle au cinéma et qui a été très fidèle et que j'admire.
04:07Il a beaucoup de fantaisie et j'ai beaucoup de tendresse pour lui.
04:11Il y a aussi l'influence par l'homme de Rio.
04:13Oui, l'homme de Rio parce que c'est une quête.
04:16On cherche cette statue.
04:17Bien sûr, il y a aussi chez Rapneau Le Sauvage ou même Tout Feu Tout Flamme.
04:21Voilà, tous ces films-là.
04:23Justement, ce qui est intéressant dans le film, c'est que c'est très réaliste aussi.
04:27Comment vous avez travaillé ?
04:28Qu'est-ce que vous avez fait comme recherche ?
04:29Il fallait que ça ait l'air vrai.
04:30J'ai fait une vraie enquête historique.
04:34C'était très amusant à faire d'ailleurs parce que j'ai trouvé tellement d'éléments concordants et étranges que je me suis même dit, mais je vais trouver un truc ou quoi ?
04:40Je vais changer de métier.
04:41Non, mais j'ai trouvé un trésor.
04:42C'est ça.
04:43C'est les misérables de Victor Hugo ?
04:45Oui, voilà.
04:46En 1830, certains des corps des martyrs de la Révolution, les morts des barricades, ont été enterrés dans la fosse commune du jardin du Louvre, le jardin de l'infante.
04:53Ça m'est revenu d'un coup.
04:55Oui, et alors ?
04:57Jusqu'à ce qu'on les exhume en 1840 pour les mettre ici, là, derrière.
05:03Je comprends rien, maman.
05:04Écoute, s'il te plaît.
05:06Quand on a déterré ces révolutionnaires des jardins du Louvre, on a pu emporter avec eux la momie ensevelie dans la même fosse quelques années auparavant.
05:13Dans votre film, Julia Piaton s'appelle Isis.
05:16C'est le nom d'une déesse égyptienne protectrice des défunts.
05:20Ça aussi, j'imagine que ce n'est pas choisi au hasard.
05:23Non, comme elle a un père égyptologue, il lui a donné Isis.
05:27C'est la créature, c'est la déesse égyptienne par excellence.
05:33Et d'ailleurs, pour l'anecdote, c'est marrant.
05:35Au début, quand j'écrivais le scénario, il y a une joute verbale d'experts dans mon film.
05:39Parce que j'avais lu que la ville de Paris tenait son nom de Para-Isis.
05:44Je me suis dit, waouh, incroyable.
05:46D'ailleurs, si vous regardez un blason de la ville de Paris au XIXe siècle, il y a une petite statue d'Isis qui a été enlevée après par Haussmann.
05:52Je me suis dit, mais c'est dingue.
05:54Et j'ai écrit ça dans le scénario.
05:56Et quand mon ami égyptologue a lu, il a mis faux.
06:00Je me suis dit, ah merde.
06:01Donc j'ai cliqué, il m'a fait des notes très détaillées.
06:03Et dans la note, c'était faux.
06:05Car, gna gna gna, le pilier des notes, les Parisiens.
06:09Je me suis dit, waouh.
06:10Trop compliqué.
06:11Trop compliqué.
06:12Mais du coup, j'ai dit, moi j'adore dans la vie les experts qui s'affrontent et les gens autour qui ne captent rien.
06:16Et donc, c'est ce que j'ai mis dans le film.
06:17En fait, j'ai pris ce morceau de dialogue.
06:20J'ai fait un dialogue entre Fabrice Lucchini et Jean-Paul Borde, qui est un autre expert.
06:24Ils s'affrontent comme ça.
06:25Alors justement, Fabrice Lucchini, c'est lui qui va chercher à percer le mystère de Kéops.
06:30Est-ce que pour vous, c'était une évidence ?
06:32Oui, il est arrivé très vite.
06:34Il était en haut de ma liste.
06:36Et oui, c'était une évidence.
06:37Pourquoi ?
06:38Pour sa folie ?
06:39Pour sa flamme.
06:41Sa fantaisie, d'ailleurs.
06:42Sa fantaisie, sa flamme.
06:43Et en même temps, mêlée à beaucoup de poésie.
06:46Il a quelque chose de solitaire.
06:49Et en même temps, il est un peu fantasque.
06:54Comment est-ce que vous l'avez dirigé pour s'approprier ce personnage ?
06:56Je lui ai donné une liste de films.
06:58Après, je ne sais pas s'il les a vus.
07:00Mais je n'étais pas très inquiète.
07:02Parce que s'il y a bien quelque chose qui est Fabrice Lucchini, c'est un immense travailleur.
07:05C'est ça qui est fou.
07:06C'est un mélange de travail, travail, travail, travail.
07:08Mais ce n'est pas juste un exécutant.
07:11C'est aussi quelqu'un qui a des intuitions extraordinaires.
07:13C'est ça, il est connu pour improviser énormément.
07:16Et ses impros, parfois, ça tombe à côté.
07:19Mais les trois quarts du temps, c'est comme...
07:22Vous voyez quelqu'un qui marche dans des traces.
07:24Il dit votre texte.
07:25Et tout d'un coup, ça part.
07:27Mais il a tellement réfléchi à la scène.
07:30Il est tellement dans l'instant, dans ce qui se passe,
07:32qu'il a des fulgurances, des envolées qui sont brillantes.
07:36Et il y en a deux, trois que j'ai gardées et qu'il m'a fait ses cadeaux dans le film.
07:39Bingo à Monaco !
07:43Bingo à Monaco !
07:44Bingo à Monaco !
07:45Je savais que j'avais déjà vu cet endroit.
07:47Et c'est la même date.
07:48Viens voir, viens voir.
07:49Quoi ?
07:51Le trésor de Khéops, tel que Dominique Vivant-Denon l'a dessiné en 1799,
07:57au Caire, juste avant de le remporter en France.
08:00Attendez, ça fait deux siècles que ce dessin est ici, au Louvre,
08:02et personne n'aurait vu ça.
08:03Mais personne ne pouvait.
08:04Il n'y a aucune référence à Khéops.
08:06Cette relation, on le disait, conflictuelle avec sa fille,
08:09qui est jouée par Julia Piaton,
08:10qui est dès le départ, dès le début du film, fortement excédée par son père.
08:14On sent le lourd passé.
08:16Voilà, on se reconnaît tous à certains moments dans des relations avec des parents.
08:23On ne se comprend pas toujours.
08:24Non, on ne se comprend pas toujours.
08:25On attend de nos parents certaines choses.
08:28On pense qu'à partir du moment où ils sont parents,
08:30ils doivent remplir un certain nombre de fonctions.
08:32Et moi, c'était ça, le drame avec mon père,
08:34c'est que je l'ai perdu le jour où moi-même, je suis devenue mère.
08:36Le pile.
08:37Je suis devenue mère, une demi-heure après, il mourait.
08:38Et donc, j'ai compris ce jour-là.
08:42Je me suis dit, d'accord, en fait, je suis la même qu'hier, mais avec un enfant.
08:45Je n'ai pas de diplôme.
08:46Je n'ai pas l'impression de savoir plus ou mieux.
08:48Et donc, j'ai compris que globalement, les parents font le fait comme on peut.
08:52On pardonne beaucoup plus.
08:54Mais c'est vrai que quand on est enfant,
08:56c'est très marrant l'évolution des rapports par enfant.
09:00Quand on est petite fille, on regarde notre père avec des yeux comme ça.
09:03C'est notre héros.
09:04Ado, il commence un peu à nous casser les pieds,
09:05à nous dire, ne t'habille pas comme ça.
09:07Il nous énerve.
09:08Bien sûr.
09:09Parfois un peu plus, apparemment.
09:10Et puis, quand on devient adulte, on pardonne beaucoup de choses.
09:15Vous vous foutez de moi ou quoi ?
09:16Maman ?
09:17Ah, tu nous as retrouvés ?
09:18J'avais dit non.
09:19Bon, allez, toi, tu prends ton sac, on y va.
09:20Dépêche-toi.
09:21Non, mais enfin, s'il te plaît, chérie.
09:22Non, je vais t'expliquer, papa.
09:23C'est mon fils, OK ?
09:24Donc, les conneries que tu as faites avec moi, tu ne les fais pas avec lui.
09:26Enfin, écoute, ça va.
09:27Tu ne vas pas te mettre dans un état pareil.
09:28Il n'y a pas mort d'homme.
09:29Allez, on y va.
09:30Non, mais maman, c'est moi qui voulais venir ici.
09:31Je m'en fous.
09:32Je les connais, ces vieux trucs.
09:33Figure-toi.
09:34Non, je te jure.
09:35Tiens, regarde ce qu'on a trouvé.
09:36Bon, écoute.
09:37Julien, tu arrêtes maintenant, d'accord ?
09:38Il y a le saut de keuf dessus.
09:39Et alors ?
09:40Avec papy, on pense que cette clé ouvre une espèce de cachette dans le château.
09:44C'est ça, hein ?
09:45D'accord.
09:46Et vous vous imaginez qu'il y a genre une petite porte secrète avec un gros trésor derrière ?
09:48C'est papy qui t'a dit ça ?
09:49Et en quoi être comédienne, alors, vous a servi sur ce tournage ?
09:52À plein de niveaux.
09:53Ça sert déjà, moi, spectatrice de plein de plateaux de tournage où j'ai pu aller,
09:59je vois parfois où on perd du temps, où parfois c'est pas précis, où j'étais en
10:04terrain familier terriblement.
10:06Après, du point de vue d'actrice, moi, bien souvent, j'étais malheureuse ou j'ai été
10:10malheureuse, pas souvent, mais quelquefois, on va dire, la moitié du temps, avec des
10:15réalisateurs qui ont peur des comédiens ou ils ne savent pas qu'on peut nous demander
10:20dix fois plus.
10:21Ils ne savent pas qu'on a tant que ça, on attend d'être nourrie, qu'on nous embarque,
10:25on est là pour ça.
10:26C'est aussi pour ça que vous aviez envie d'être réalisatrice ?
10:28Ce n'était pas en opposition à la comédienne, c'était un véritable désir de cinéma
10:34qui a mis du temps à se l'autoriser.
10:37J'ai réalisé un court-métrage, j'ai adoré.
10:39Non, non, c'était vraiment un désir de cinéaste, d'amoureuse de cinéma, mais c'est vrai
10:46que pour diriger des acteurs, notamment, c'est utile d'avoir été actrice.