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Emmanuel Macron s'adresse aux Français à 20 heures ce soir, mercredi 5 mars 2025, dans une allocution depuis l'Élysée.

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Transcription
00:00Française, Français, mes chers compatriotes,
00:02je m'adresse à vous ce soir en raison de la situation internationale
00:06et de ses conséquences pour notre pays et pour l'Europe,
00:09et cela après plusieurs semaines d'action diplomatique.
00:14Vous êtes en effet, je le sais, légitimement inquiets devant les événements historiques en cours
00:18qui bouleversent l'ordre mondial.
00:21La guerre en Ukraine, qui a entraîné près d'un million de morts et de blessés,
00:26continue avec la même intensité.
00:28Les États-Unis d'Amérique, notre allié, ont changé leur position sur cette guerre,
00:34soutiennent moins l'Ukraine et laissent planer le doute sur la suite.
00:38Dans le même temps, les mêmes États-Unis d'Amérique
00:41entendent imposer des tarifs douaniers aux produits venant d'Europe.
00:45Enfin, le monde continue d'être sans cesse plus brutal
00:50et la menace terroriste ne faiblit pas.
00:52Au total, notre prospérité et notre sécurité
00:57sont devenues plus incertaines.
00:59Et il faut bien le dire, nous rentrons dans une nouvelle ère.
01:04La guerre en Ukraine dure maintenant depuis plus de trois ans.
01:08Nous avons, dès le premier jour, décidé de soutenir l'Ukraine
01:11et de sanctionner la Russie.
01:13Et nous avons bien fait.
01:14Car c'est non seulement le peuple ukrainien qui lutte avec courage pour sa liberté,
01:18mais c'est aussi notre sécurité qui est menacée.
01:22En effet, si un pays peut envahir impunément son voisin en Europe,
01:26alors personne ne peut plus être sûr de rien.
01:29Et c'est la loi du plus fort qui s'applique.
01:30Et la paix ne peut plus être garantie sur notre continent même.
01:35L'histoire nous l'a enseigné.
01:37Au-delà de l'Ukraine, la menace russe est là et touche les pays d'Europe.
01:43Nous touche.
01:44La Russie a déjà fait du conflit ukrainien un conflit mondial.
01:47Elle a mobilisé sur notre continent des soldats nord-coréens,
01:51des équipements iraniens, tout en aidant ces pays à s'armer davantage.
01:56La Russie du président Poutine viole nos frontières pour assassiner des opposants,
02:01manipule les élections en Roumanie, en Moldavie.
02:04Elle organise des attaques numériques contre nos hôpitaux
02:07pour en bloquer le fonctionnement.
02:10La Russie tente de manipuler nos opinions avec des mensonges diffusés sur les réseaux sociaux.
02:14Et au fond, elle teste nos limites.
02:16Elle le fait dans les airs, en mer, dans l'espace et derrière nos écrans.
02:21Cette agressivité ne semble pas connaître de frontières.
02:26Et la Russie, dans le même temps, continue de se réarmer,
02:29dépensant plus de 40% de son budget à cette fin.
02:34D'ici 2030, elle prévoit d'encore accroître son armée,
02:38d'avoir 300 000 soldats supplémentaires, 3 000 chars, 300 avions de chasse de plus.
02:44Qui peut donc croire, dans ce contexte,
02:48que la Russie d'aujourd'hui s'arrêtera à l'Ukraine ?
02:51La Russie est devenue, au moment où je vous parle,
02:54et pour les années à venir, une menace pour la France et pour l'Europe.
02:58Je le regrette très profondément.
03:01Et je suis convaincu qu'à long terme,
03:03la paix se fera sur notre continent avec une Russie redevenue apaisée et pacifique.
03:09Mais la situation que je vous décris est celle-là, et nous devons faire avec.
03:14Face à ce monde de danger, rester spectateur serait une folie.
03:19Il s'agit, sans plus tarder, de prendre des décisions pour l'Ukraine,
03:23pour la sécurité des Français, pour la sécurité des Européens.
03:27Pour l'Ukraine d'abord.
03:29Toutes les initiatives qui aident à la paix vont dans le bon sens,
03:32et je veux ce soir les saluer.
03:35Nous devons continuer d'aider les Ukrainiens à résister,
03:38jusqu'à ce qu'ils puissent négocier avec la Russie
03:41une paix solide pour eux-mêmes et pour nous tous.
03:44C'est pour cela que le chemin qui mène à la paix
03:47ne peut pas passer par l'abandon de l'Ukraine.
03:49Bien au contraire.
03:51La paix ne peut pas être conclue à n'importe quel prix et sous le dictat russe.
03:56La paix ne peut pas être la capitulation de l'Ukraine.
03:59Elle ne peut pas être son effondrement.
04:01Elle ne peut pas davantage se traduire par un cessez-le-feu qui serait trop fragile.
04:05Et pourquoi ? Parce que là aussi, nous avons l'expérience du passé.
04:09Nous ne pouvons pas oublier que la Russie a commencé d'envahir l'Ukraine dès 2014,
04:14et que nous avons alors négocié un cessez-le-feu à Minsk.
04:17Et la même Russie n'a pas respecté ce cessez-le-feu.
04:21Et nous n'avons pas été capables de maintenir les équilibres,
04:25faute de garanties solides.
04:27Aujourd'hui, on ne peut plus croire la Russie sur parole.
04:30L'Ukraine a droit à la paix et la sécurité pour elle-même.
04:34Et c'est notre intérêt, et c'est l'intérêt de la sécurité du continent européen.
04:39C'est en ce sens que nous travaillons avec nos amis britanniques,
04:42allemands et plusieurs autres pays européens.
04:45C'est pourquoi vous m'avez vu ces dernières semaines
04:47rassembler plusieurs d'entre eux à Paris,
04:49aller les retrouver il y a quelques jours à Londres
04:51pour consolider les engagements qui sont nécessaires à l'Ukraine.
04:56Une fois la paix signée,
04:58pour que l'Ukraine ne soit pas à nouveau envahie par la Russie,
05:01il nous faut le préparer.
05:03Cela passera à coup sûr par un soutien à l'armée ukrainienne dans la durée.
05:07Cela passera aussi peut-être par le déploiement de forces européennes.
05:11Celles-ci n'iraient pas se battre aujourd'hui.
05:13Elles n'iraient pas se battre sur la ligne de front.
05:15Mais elles seraient là, au contraire, une fois la paix signée,
05:19pour en garantir le plein respect.
05:22Dès la semaine prochaine, nous réunirons à Paris
05:25les chefs d'État-major des pays qui souhaitent prendre leur responsabilité à cet égard.
05:30C'est ainsi un plan pour une paix solide, durable, vérifiable,
05:37que nous avons préparé avec les Ukrainiens et plusieurs autres partenaires européens,
05:42et que j'ai été défendre aux États-Unis il y a 15 jours et à travers l'Europe.
05:47Et je veux croire que les États-Unis resteront à nos côtés.
05:50Mais il nous faut être prêts si tel n'était pas le cas.
05:56Que la paix en Ukraine soit acquise rapidement ou non,
05:59les États européens doivent, compte tenu de la menace russe que je viens de vous décrire,
06:05être capables de mieux se défendre et de dissuader toute nouvelle agression.
06:09Oui, quoi qu'il advienne, il nous faut nous équiper davantage,
06:15hausser notre position de défense, et cela pour la paix même, pour dissuader.
06:21À ce titre, nous restons attachés à l'OTAN
06:23et à notre partenariat avec les États-Unis d'Amérique.
06:27Mais il nous faut faire plus, renforcer notre indépendance en matière de défense et de sécurité.
06:33L'avenir de l'Europe n'a pas à être tranché à Washington ou à Moscou.
06:37Et oui, la menace revient à l'Est.
06:40Et l'innocence, en quelque sorte, des 30 dernières années,
06:43depuis la chute du mur de Berlin, est désormais révolue.
06:48À Bruxelles demain, lors du Conseil extraordinaire
06:50qui réunira les 27 chefs d'État et de gouvernement
06:53avec la Commission et le Président du Conseil,
06:58nous franchirons des pas décisifs.
07:01Plusieurs décisions seront prises que la France proposait depuis plusieurs années.
07:05Les États membres pourront accroître leurs dépenses militaires
07:08sans que cela soit pris en compte dans leur déficit.
07:11Des financements communs massifs seront décidés
07:14pour acheter et produire sur le sol européen
07:17des munitions, des chars, des armes, des équipements parmi les plus innovants.
07:23J'ai demandé au gouvernement d'être mobilisé
07:25pour que d'une part cela renforce nos armées le plus rapidement possible
07:29et d'autre part que cela accélère la réindustrialisation dans toutes nos régions.
07:34Et je réunirai avec les ministres compétents
07:36les industriels du secteur dans les prochains jours.
07:40L'Europe de la défense que nous défendons depuis huit ans
07:44devient donc une réalité.
07:47Cela veut dire des pays européens davantage prêts à se défendre et à se protéger,
07:52qui produisent ensemble les équipements dont ils ont besoin sur leur sol,
07:56qui sont prêts à davantage coopérer,
07:58à réduire leur dépendance à l'égard du reste du monde.
08:01Et c'est une bonne chose.
08:04L'Allemagne, la Pologne, le Danemark, les États baltes
08:08et nombre de nos partenaires ont annoncé
08:11des efforts inédits en matière de dépenses militaires.
08:14Alors dans ce temps de l'action qui s'ouvre enfin,
08:18la France a un statut particulier.
08:20Nous avons l'armée la plus efficace d'Europe
08:23et grâce aux choix faits par nos aînés après la Deuxième Guerre mondiale,
08:27nous sommes dotés de capacités de dissuasion nucléaire.
08:30Ceci nous protège beaucoup plus que nombre de nos voisins.
08:34Et de plus, nous n'avons pas attendu l'invasion de l'Ukraine
08:38pour faire le constat d'un monde inquiétant
08:41et à travers les deux lois de programmation militaire que j'ai décidées
08:44et que les parlements successifs ont votés,
08:47nous aurons doublé le budget de nos armées en presque dix ans.
08:52Mais compte tenu de l'évolution des menaces,
08:54de cette accélération que je viens de décrire,
08:58nous aurons à faire de nouveaux choix budgétaires
09:01et des investissements supplémentaires
09:03qui sont désormais devenus indispensables.
09:06J'ai demandé au gouvernement d'y travailler le plus vite possible.
09:09Ce seront de nouveaux investissements qui exigent
09:12de mobiliser des financements privés,
09:15mais aussi des financements publics,
09:17sans que les impôts ne soient augmentés.
09:20Pour cela, il faudra des réformes, des choix, du courage.
09:26Notre dissuasion nucléaire nous protège.
09:28Elle est complète, souveraine, française de bout en bout.
09:33Elle a, depuis 1964, de manière explicite,
09:36toujours joué un rôle dans la préservation de la paix
09:39et de la sécurité en Europe.
09:42Mais répondant à l'appel historique du futur chancelier allemand,
09:47j'ai décidé d'ouvrir le débat stratégique
09:49sur la protection par notre dissuasion
09:52de nos alliés du continent européen.
09:56Quoi qu'il arrive, la décision a toujours été
09:59et restera entre les mains du président de la République,
10:02chef des armées.
10:04Maîtriser notre destin, devenir plus indépendant,
10:07nous devons y œuvrer au plan militaire,
10:10mais aussi au plan économique.
10:13Oui, l'indépendance économique, technologique,
10:15industrielle et financière sont des nécessités.
10:19Nous devons aussi nous préparer à ce que les États-Unis
10:22décident de tarifs douaniers sur les marchandises européennes,
10:26comme ils viennent de le confirmer à l'encontre du Canada et du Mexique.
10:30Cette décision incompréhensible,
10:32tant pour l'économie américaine que pour la nôtre,
10:35aura des conséquences sur certaines de nos filières.
10:38Elle accroît la difficulté du moment,
10:41mais elle ne restera pas sans réponse de notre part.
10:45Alors, tout en préparant la riposte avec nos collègues européens,
10:49nous continuerons, comme je l'ai fait voilà 15 jours,
10:52à tout tenter pour convaincre que cette décision
10:56nous ferait du mal à tous.
10:57Et j'espère, oui, convaincre et en dissuader
11:02le président des États-Unis d'Amérique.
11:05Au total, le moment exige des décisions sans précédent,
11:09depuis bien des décennies.
11:12Sur notre agriculture, notre recherche, notre industrie,
11:15sur toutes nos politiques publiques,
11:17nous ne pouvons pas avoir les mêmes débats que Naguère.
11:20C'est pourquoi j'ai demandé au Premier ministre et à son gouvernement,
11:25et j'invite toutes les forces politiques, économiques et syndicales du pays,
11:29à leur côté, à faire des propositions à l'aune de ce nouveau contexte.
11:35Les solutions de demain ne pourront être les habitudes d'hier.
11:40Mes chers compatriotes, face à ces défis et ces changements irréversibles,
11:47il ne faut céder à aucun excès,
11:51ni l'excès des vates en guerre, ni l'excès des défaitistes.
11:54La France ne suivra qu'un cap,
11:58celui de la volonté pour la paix et la liberté,
12:01fidèle en cela, à son histoire et à ses principes.
12:06Oui, c'est ce en quoi nous croyons, pour notre sécurité,
12:11mais c'est ce en quoi nous croyons aussi, pour défendre la démocratie.
12:15Une certaine idée de la vérité,
12:19une certaine idée d'une recherche libre, du respect dans nos sociétés,
12:24une certaine idée de la liberté d'expression,
12:27qui n'est pas le retour des discours de haine,
12:29au fond, une certaine idée de l'humanisme.
12:32C'est cela ce que nous portons et qui se joue.
12:35Notre Europe possède la force économique, la puissance et les talents
12:40pour être à la hauteur de cette époque.
12:42Et que nous nous comparions aux Etats-Unis d'Amérique
12:44et a fortiori à la Russie, nous en avons les moyens.
12:47Nous devons donc agir en étant unis en Européens
12:51et déterminés à nous protéger.
12:55C'est pourquoi la patrie a besoin de vous, de votre engagement.
12:58Les décisions politiques, les équipements militaires,
13:01les budgets sont une chose,
13:03mais ils ne remplaceront jamais la force d'âme d'une nation.
13:08Notre génération ne touchera plus les dividendes de la paix.
13:13Il ne tient qu'à nous, que nos enfants récoltent demain
13:17les dividendes de nos engagements.
13:21Alors nous ferons face, ensemble.
13:25Vive la République.
13:26Vive la France.

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