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Le chouchou de la French Tech pourrait bientôt se mettre en veille. Aldebaran, l’entreprise qui l’a conçu est en redressement judiciaire.

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00:00Qui peut se vanter d'avoir blagué avec Emmanuel Macron,
00:03papoté avec la reine d'Angleterre et câliné François Hollande ?
00:06C'est Nao, le petit robot.
00:08Il était le chouchou de la French Tech,
00:09mais l'Android pourrait bientôt se mettre en veille.
00:11Aldebaran, l'entreprise qu'il a conçue, est en redressement judiciaire.
00:15Créée il y a 20 ans, elle portait l'espoir d'une industrie française à la pointe de la technologie.
00:20Rachetée par un conglomérat japonais, puis par un groupe allemand,
00:24la pépite de la robotique n'en finit plus de s'enliser.
00:27Aldebaran est une entreprise qui a un potentiel incroyable.
00:30Et c'est dommage que de si beaux rêves se soient heurtés à une réalité aussi dure.
00:37Les robots humanoïdes sont plus que jamais sur le devant de la scène.
00:40Mais Aldebaran est resté à la traîne.
00:43Ils dessinaient des seins de filles et le robot poussait des petits cris.
00:46Voilà, le genre de truc que je trouve complètement con sans aucun intérêt.
00:51Alors je m'appelle Nao, j'ai 7 ans, je mesure 60 centimètres.
00:55En 2013, François Hollande reçoit un drôle d'invité à l'Elysée.
00:58Je vous présente Nao, qui est le robot développé par la société Aldebaran Robotics.
01:03Le président de la République vient d'annoncer son plan de bataille
01:05pour doper l'industrie française grâce aux nouvelles technologies.
01:08J'ai souhaité vous faire une photo avec lui.
01:10Des yeux ?
01:11Je suis avec.
01:13A l'époque, les perspectives sont alléchantes.
01:16Combien on va vendre de ces ?
01:17Millions !
01:18Des millions, très bien.
01:19Des millions de robots.
01:20Sauf que 12 ans plus tard, on est loin du compte.
01:23Moins de 20 000 Nao ont été vendus.
01:25Pour comprendre pourquoi, on a d'abord contacté le créateur de Nao.
01:29Bruno Mezzoni a fondé Aldebaran Robotics en 2005.
01:32Il a passé 10 ans aux commandes de l'entreprise.
01:34Cette entreprise a été créée dans l'objectif de faire des robots humanoïdes compagnons.
01:39En sachant que c'était difficile de faire des robots compagnons, des robots humanoïdes,
01:43que les autres n'y arrivaient pas et que personne n'était encore à ce stade.
01:46Mais pourtant, nous, c'est ça qu'on s'était fixé comme objectif.
01:49Dans sa catégorie, Aldebaran fait la course en tête.
01:51Chaque année, les pays en pointe se retrouvent à la RoboCup,
01:54une sorte de coupe du monde de foot jouée par des robots.
01:57Et si Nao galère encore en pénalty, en 2008, c'est déjà la star.
02:02Sa bonne bouille s'est faite remarquer.
02:03Pour autant, Nao n'est pas juste un jouet pour enfants.
02:10Nao est un robot social, un androïde intelligent,
02:13développé pour l'aide à la personne dans les maisons de retraite, les hôpitaux ou les écoles.
02:17Je suis un robot humanoïde imaginé et fabriqué en France.
02:21Je suis autonome et me connecte à Internet grâce au Wifi.
02:26En quelques années, le mignon robot s'est taillé une réputation mondiale.
02:29Le robot Nao.
02:30Nao.
02:31Nao.
02:31Nao.
02:31Nao.
02:32Le robot Nao.
02:33La société Aldebaran en France a été les premiers à concevoir du robot humanoïde
02:39qu'ils destinaient à un large public.
02:41Jade le maître est directrice du réseau Proxynov,
02:43qui accompagne des entreprises du secteur.
02:45Nao reste une petite pépite de technologie
02:48que sur une taille aussi réduite réussit à embarquer en fait toute la techno,
02:54à la fois la motorisation, les capteurs, l'intelligence,
02:59à un prix somme toute assez raisonnable pour tout ce qui était mis en fait à l'intérieur.
03:03Peu d'entreprises sont capables de faire pareil.
03:05Le prix de ce bijoujou, 12 000 euros.
03:09Sauf que pour exploiter son potentiel, il faut savoir le programmer.
03:13Donc la clientèle, c'est surtout des laboratoires et des universités.
03:17Sa complexité et son prix freinent son déploiement.
03:19Si on veut cibler le grand public,
03:21il faut arriver sur des gammes de prix qui sont inférieures à 500 euros.
03:25Quand on voit que Nao, le prix était quand même 20 fois le prix cible au maximum.
03:32Donc pour industrialiser Nao et faire baisser son prix,
03:35Aldebaran avait besoin d'argent.
03:37Beaucoup.
03:38Parce que la robotique, ça coûte cher.
03:40Très cher.
03:40La robotique, c'est vraiment, c'est un carrefour de discipline.
03:43Donc vous devez à la fois maintenir une équipe qui fait du logiciel,
03:47une équipe qui fait de l'IA,
03:49une équipe qui fait les interfaces avec les humains,
03:52une équipe qui fait ce qu'on appelle la partie hardware.
03:54Ensuite, vous devez vous occuper de la manière dont ça va être industrialisé.
03:58Et c'est extrêmement coûteux parce qu'en fait,
04:01faire un moule plasturantier,
04:04ça coûte des dizaines de milliers d'euros pour des petites pièces.
04:07Pour son démarrage, la société avait trouvé des investisseurs en France,
04:1110 millions en fonds privés,
04:12et bénéficiaient de l'aide des pouvoirs publics.
04:15Mais la phase de croissance s'avère plus compliquée.
04:17Pour lever des fonds, la start-up va devoir se tourner vers l'étranger.
04:21Je n'ai pas réussi à convaincre des Français,
04:22des Français ou des Européens.
04:24Du coup, c'est un Japonais qui a investi, qui a été emballé,
04:26qui a mis des grosses sommes d'argent.
04:30En 2014, la holding japonaise Softbank, géant des télécoms,
04:34annonce avoir pris le contrôle de la majorité de l'entreprise
04:36pour un montant qui dépasserait la centaine de millions d'euros.
04:39Et qui dit mariage, dit…
04:41Youpi, Nao va bientôt avoir un petit frère.
04:44Enfin plutôt, un grand frère.
04:45Deux fois plus grand que lui.
04:50Pepper, c'est son petit nom, est d'abord commercialisé au Japon.
04:54A 2000 dollars environ, il se fait embaucher pour faire l'accueil
04:57dans des aéroports ou des centres commerciaux.
04:59Son papa, c'est lui, Masayoshi Son, le patron de Softbank.
05:03Avec sa maman, Aldébaran, au début tout se passe bien.
05:06Enfin, jusqu'à la naissance de Pepper.
05:08Et à ce moment-là, ils sont devenus beaucoup plus intrusifs.
05:12Softbank, c'est un groupe, à l'époque c'était 90 000 salariés.
05:15Il y avait une quinzaine de personnes au Comex, au comité de direction.
05:18Du coup, ils voulaient m'imposer à chaque fois leur façon de faire,
05:20mais ils ne connaissaient rien à la robotique.
05:22Softbank, c'est un groupe télécom.
05:24Les télécoms, c'est un marché qui est très mûr, très mature.
05:27Vous êtes dans cette phase, start-up Aldébaran,
05:30mais on vous impose, on vous demande d'essayer d'aller vers un business model
05:33d'opérateur télécom.
05:34Il y a une contradiction.
05:36Le choc des cultures est violent entre la multinationale et la start-up,
05:39qui emploie alors 400 personnes en France.
05:42Résultat, en 2015, c'est la séparation.
05:45Un mois après que je sois parti, que j'ai quitté la direction,
05:48la première application qui est sortie avec Pepper,
05:50ils dessinaient des seins de filles et quand on touchait les seins
05:53et qu'on caressait l'écran, le robot poussait des petits cris, etc.
05:57Voilà, le genre de truc que je trouve complètement con, sans aucun intérêt.
06:01En 2016, 20 000 exemplaires de Nao et Pepper ont été vendus dans 70 pays.
06:06Mais le problème, c'est qu'ils ne sont plus seuls.
06:08Plein de petits cousins ont fait leur apparition dans la famille.
06:11Kirobo chez Toyota, Aiko chez Toshiba, Asimo chez Honda
06:14ou encore Buddy, développé par le français Blue Frog.
06:17Nao a été copiée de partout.
06:20Il y a beaucoup de copies de petits humanoïdes
06:23qui sont sortis un peu partout dans le monde.
06:25Sous contrôle japonais, l'entreprise végète.
06:28Il y a eu zéro innovation.
06:30Les équipes, petit à petit, ont bien compris qu'elles n'auraient plus leur place,
06:34plus leur capacité à décider dans son parti.
06:36Mais vous voyez, ça a donné le fait que l'entreprise, petit à petit, s'est mise à dépérir.
06:41Et le petit Nao se fait oublier,
06:43comme le raconte anonymement un ancien cadre de l'entreprise.
06:46Masasone avait été intéressé par Nao
06:50pour le rachat de l'entreprise Aldebaran.
06:53Mais en fait, les Japonais ne croyaient pas,
06:56n'étaient pas intéressés par un avenir de Nao.
07:00Toutes leurs demandes étaient insolubles,
07:02c'est-à-dire la rentabilité à court terme, c'était inatteignable.
07:05Le truc, c'est que la révolution des robots, elle se fait attendre.
07:09Leur utilité s'est finalement révélée limitée,
07:11les ventes ont stagné et les pertes se sont accumulées.
07:14155 millions d'euros entre 2017 et 2020.
07:18Un an plus tard, la production de Pepper est mise en stand-by.
07:20Nao et ses copains ont beau manifester dans la pure tradition française,
07:24le Japonais supprime la moitié des effectifs.
07:27Avant de faire ses adieux.
07:28Sa banque était un investisseur avec des poches extrêmement pleines.
07:33Donc avec un projet convaincant de la volonté de le faire
07:37et une bonne organisation, on aurait pu y arriver.
07:40Quel gâchis !
07:41En 2022, Aldebaran change de main.
07:44Nouveau départ chez l'Allemand URG,
07:46qui veut devenir leader européen de la robotique de service.
07:50Un nouvel espoir qui sera vite douché.
07:53Pour relancer les ventes, URG a misé sur Plateau,
07:55un nouveau robot destiné à la restauration.
07:58Mauvaise pioche selon cet autre employé qui souhaite rester anonyme.
08:10Plateau, qui était fabriqué à Rouen, est un échec commercial.
08:13En 2023, le chiffre d'affaires s'effondre.
08:15A peine 12,3 millions d'euros contre 55 en 2017.
08:19Plateau est enterré, URG lâche Aldebaran.
08:28Depuis les débuts d'Aldebaran, environ 40 000 robots ont été écoulés.
08:31On est loin des millions espérés à son lancement.
08:34Une nouvelle version de Nao,
08:36intégrant les dernières avancées en intelligence artificielle,
08:39devait sortir cette année.
08:41Mais son avenir est compromis.
08:43Sans perspective, la société a été déroulée.
08:46Elle ne peut plus s'occuper d'elle-même.
08:48Elle ne peut plus s'occuper d'elle-même.
08:50Elle ne peut plus s'occuper d'elle-même.
08:53Elle ne peut plus s'occuper d'elle-même.
08:55Sans perspective, la société a été placée
08:57en redressement judiciaire en février 2025.
09:00La moitié des emplois vont être supprimés.
09:02Aldebaran risque maintenant la liquidation,
09:04à moins de trouver un repreneur.
09:06Les investisseurs sont friloux,
09:08et sont assez peu nombreux à pouvoir soutenir
09:10une entreprise de ce type.
09:12C'est extrêmement compliqué d'aller trouver
09:14des investisseurs qui complérennent
09:16les cycles de vie d'une start-up deep tech
09:19qui doit faire face à des chaînes d'approvisionnement
09:21et qui doit faire face à des cycles de développement
09:23qui ne sont pas du tout les cycles régimes
09:25du software ou de l'IA.
09:27Pourtant aujourd'hui, les robots humanoïdes
09:29font toujours rêver.
09:33Mais en réalité, sont-ils vraiment adaptés
09:35aux missions qu'on veut leur confier ?
09:37On a toujours cette espèce de tropisme
09:40de création d'un objet qui aurait une forme humaine
09:43et qui serait hyper utile et qui résoudrait
09:45tous nos problèmes.
09:46Et en fait, ce tropisme se heurte
09:48à la réalité des choses.
09:49Si on veut un robot qui nous aide
09:51à passer l'aspirateur,
09:52une galette sur eau comme un Roomba
09:54est quand même vachement plus efficace
09:56qu'un robot humanoïde.
09:57Je suis dans un marché industriel
09:59qui est extrêmement pragmatique,
10:01qui a besoin de solutions
10:03qui soient simples, fiables
10:05et pas très chères
10:06pour pouvoir aller continuer
10:09à porter l'industrie en France.
10:11Le constat, c'est aussi qu'en 15 ans,
10:13la France s'est fait largement distancer
10:14par la Chine et les Etats-Unis,
10:16qui s'affrontent aujourd'hui dans une course effrénée
10:18avec des robots toujours plus sophistiqués.
10:22Sur ces dix dernières années,
10:24je peux encore compter
10:26sur les doigts de ma main
10:28le nombre d'entreprises
10:29de robotique française
10:30qui sont encore en vie
10:31et qui ont un avenir
10:32sur les prochaines années.
10:33La taille de nos marchés
10:35et sa fragmentation
10:36font que pour pouvoir
10:37très rapidement se développer,
10:39on fait face à des barrières
10:40incommensurables
10:41de langues,
10:42des réglementations,
10:43de fiscalité.
10:44Aldebaran est une entreprise
10:46qui a un potentiel incroyable
10:47et c'est dommage
10:50que de si beaux rêves
10:51se soient heurtés
10:52à une réalité aussi dure.
10:56D'autres Français
10:57n'ont pas non plus abandonné leurs rêves.
10:58Le robot Mirokai,
10:59fabriqué par des anciens d'Aldebaran,
11:01a ouvert la conférence
11:02de son partenaire NVIDIA
11:03au CES cette année.
11:05Il a déjà rencontré
11:06le président de la République
11:07au sommet de l'IA en février.
11:09Ça vous rappelle quelque chose ?
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