"C'est des humains qu'on a entre les mains, c'est pas des colis postaux."
Infirmière aux urgences de l'hôpital Saint-Antoine à Paris, Raquel tire la sonnette d'alarme. Dans la nuit du 9 au 10 juin, 12 urgentistes sur 19 étaient en arrêt maladie dans son service.
Infirmière aux urgences de l'hôpital Saint-Antoine à Paris, Raquel tire la sonnette d'alarme. Dans la nuit du 9 au 10 juin, 12 urgentistes sur 19 étaient en arrêt maladie dans son service.
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00:00Là, il faut faire quelque chose pour la santé en France.
00:02Mais apparemment, ça n'intéresse personne, ou pas grand monde du moins.
00:13C'est des humains qu'on a entre les mains, c'est pas des colis postaux.
00:16On a démarré il y a trois mois chez nous maintenant parce qu'en très peu de temps,
00:31nous avons eu cinq collègues agressés physiquement.
00:32Ça fait des années qu'on tire la sonnette d'alarme en disant que les locaux ne sont
00:36pas sécurisés.
00:37De toute évidence, on n'est pas les seuls en France.
00:40Ça a été ce qui a déclenché le mouvement parce qu'il y a eu cinq collègues figues
00:45agressés physiquement, suivis de quelques agressions physiques dans les jours qui ont
00:49suivi également.
00:51Et ça a été la sonnette d'alarme pour tout le monde, le ras-le-bol général.
00:54C'est très difficile de prendre la détresse humaine en pleine figure toute l'année.
00:59Aux urgences, on voit beaucoup de gens qui sont gravement malades, ça c'est une chose.
01:02Après, on voit toute la misère sociale.
01:04Et on voit énormément de détresse.
01:07Et on se la prend en pleine figure toute l'année.
01:10Il y a des jours où ça passe, puis il y a des jours où ça ne passe pas.
01:13Des jours où nous, on est peut-être plus faibles aussi, on est des humains, nous aussi
01:17on est humains.
01:18Et des jours où on a du mal à la faire passer cette détresse, et on n'arrive pas à l'assumer
01:22entièrement.
01:23Au sein de l'hôpital Saint-Antoine, la situation est un petit peu critique.
01:25Nous avons beaucoup de collègues qui sont en arrêt de maladie, si bien que nous sommes
01:29déjà toute l'année à effectifs tendus, là on est en sous-effectifs majeurs.
01:33Donc la direction a décidé de faire un délestage, c'est-à-dire que nous ne prenons ni les
01:38pompiers, ni les SAMU, ni les ambulances, on ne peut accepter que les piétons.
01:42On ne veut pas mettre les patients en danger, on ne peut pas accepter tout le monde, parce
01:45que ce serait mettre leur vie en danger.
01:47Il y a ce contexte de 84 services d'urgence en France en grève ce dimanche soir, c'est
01:53nombreuses arrêts de maladie, on imagine qu'ils s'inscrivent dans un contexte compliqué.
01:56Compliqué, mais ça signe aussi d'une fatigue extrême et d'un ras-le-bol des personnels,
02:02surtout d'une fatigue, de travailler toujours en sous-effectifs, ou vraiment très très
02:08limite.
02:09Nous avons tiré une sonnette d'alarme, nous avons fait plusieurs communiqués de
02:15presse, nous avons fait une manifestation nationale jeudi dernier, avec un parcours
02:20qui aboutissait au ministère de la Santé, madame Buzyn n'a pas daigné nous recevoir,
02:25de toute évidence elle ignore le problème des urgences, elle ne doit pas l'intéresser,
02:29et les médecins elles-mêmes, comment peut-elle laisser les gens en souffrance, nous ne sommes
02:33plus capables en France d'accueillir les gens dans un service d'urgence de façon
02:36digne.
02:37On n'a plus le temps de leur parler.
02:38C'est des humains qu'on a entre les mains, ce n'est pas des colis postaux, il nous faut
02:43des effectifs pour pouvoir soigner les gens correctement, mais de toute évidence elle
02:46a oublié qu'elle a été médecin.
02:47Je ne sais pas s'il reste encore en France des services d'urgence qui ne sont pas en
02:49grève, s'il y en a, j'espère qu'ils vont se joindre à notre mouvement.
02:53Il faut tirer une sonnette d'alarme et ce n'est pas pour nous, on parle beaucoup de
02:57burn-out du personnel, mais le burn-out du personnel est juste lié aux mauvaises conditions
03:01de travail, et de la façon dont on est amené à traiter les gens, les patients, quand on
03:05les a entre les mains.