En 2018, l'ex-conjoint de Laura l'étrangle devant sa fille de 2 ans, après des années de violences conjugales. Sauvée par des voisins, elle tente aujourd'hui de se reconstruire. Elle raconte à StreetPress ses années de combat judiciaire et les centaines de milliers d'euros dépensés.
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NewsTranscription
00:00Il arrive, il me prend, il m'éclate la tête à plusieurs reprises sur le mur.
00:03Je tombe par terre, il continue à m'éclater la tête.
00:05Et puis après, ses mains sur la gorge.
00:07Et là, je me suis dit, c'est bon, je me voyais partir.
00:10La demande d'aménagement de peine de mon ex-compagnon,
00:13condamné pour tentative de meurtre, vient d'être acceptée.
00:16Il n'a même pas fait 5 ans et qu'il peut être relâché.
00:19Alors qu'entre temps, il m'a harcelée.
00:21Avec tous les cabines d'avocats que j'ai pris,
00:23j'en ai eu à peu près pour 80 000 euros.
00:26Donc j'aurais été presque 7 ans en procédure judiciaire.
00:28Et en fait, c'est une spirale infernale
00:30où je me dis que c'est une seconde violence.
00:40Je m'appelle Laura Rapp.
00:42Je suis maman d'une petite fille qui a 9 ans.
00:44J'ai 37 ans et j'ai survécu à une tentative de féminicide.
00:49Alors, il y a 3 ans, je vivais en région parisienne dans le Val-de-Marne.
00:54J'ai fait le choix de partir loin pour mettre de la distance,
00:57pour ma sécurité, celle de ma fille.
00:59Ici, on a le séjour.
01:01Avec beaucoup de jouets.
01:02Oui, oui, ma fille en a beaucoup.
01:03Elle adore les Legos, les Barbies, les Playmobiles.
01:06Donc ici, on a la cuisine.
01:08Toutes ces violences conjugales,
01:09cette tentative de meurtre ont quand même beaucoup de conséquences.
01:13Avant, je travaillais dans l'immobilier.
01:15J'avais mes amis, j'avais mes repères, j'avais tout.
01:17Maintenant, forcément, j'ai tout quitté.
01:19C'est vrai que le fait d'être chez mes parents,
01:22même si ce n'est pas toujours facile,
01:23je me sens quand même plus en sécurité,
01:26loin de mon ex-compagnon.
01:29J'ai rencontré mon ex-compagnon en février 2013.
01:34Quand je l'ai vu, ça a été un peu comme un coup de foudre.
01:37Donc, on s'est rapidement mis ensemble.
01:39Donc au départ, on va dire, les premiers mois, tout se passait bien.
01:42Il était drôle, charmant, intelligent, cultivé.
01:46Je me suis dit vraiment que c'était une belle personne.
01:50Il a eu la première gifle au bout de 4 ou 5 mois.
01:54Il est entré d'une soirée alcoolisée.
01:55Il m'a sauté dessus.
01:56Et en fait, je n'ai pas compris ce qui s'est passé.
01:58Je suis restée en état de choc, en état de sidération.
02:01J'ai vraiment mis ça sous le coup de l'alcool.
02:04Et là, s'en suit des violences psychologiques.
02:07On passe largement d'un cran et des humiliations.
02:10Quand on était dans son appartement chez lui,
02:11j'étais tromblée à de multiples reprises.
02:14Des gifles, étouffée avec un oreiller.
02:17Donc voilà, parfois, des coups sur la tête.
02:21On te tire les cheveux, on te traîne par terre dans l'appartement.
02:24C'était assez violent.
02:29Je suis tombée enceinte début 2015.
02:33Au départ, ça se passe bien.
02:34Et en fait, le répit a été de courte durée
02:38parce que les coups ont repris à 4 ou 5 mois de grossesse.
02:42Je ne m'étais même pas posée la question
02:43qu'il puisse me frapper enceinte.
02:46Alors, il y a eu 5 années de violences conjugales
02:47avant la tentative de meurtre du mois d'avril 2018.
02:51Il est rentré alcoolisé.
02:53On a commencé à se disputer.
02:54Il me prend, il m'éclate la tête à plusieurs reprises sur le mur.
02:56Je tombe par terre, il continue à m'éclater la tête.
02:58Et puis après, ses mains sur la gorge.
03:01Et là, je me suis dit, c'est bon.
03:03Je me voyais partir.
03:04Je me suis dit, ça y est, je n'ai plus aucune chance.
03:07Et ce qui s'est passé, c'est que les voisins ont frappé à la porte.
03:10Il s'est enfui.
03:11Il a été rattrapé par la police très rapidement.
03:16Il a été placé en garde à vue.
03:18Et après, il est parti en détention provisoire
03:20pour tentative de meurtre.
03:25Même si je suis très mal, ça reste un soulagement.
03:27Je me suis dit, je vais être enfin protégée avec ma fille.
03:31Et contre toute attente, dix mois après, le 14 février 2019,
03:34il est relâché en attente de son procès.
03:37Il a enfreint son contre judiciaire à plusieurs reprises.
03:40Je me retrouve l'année avec lui le dimanche de Pâques
03:43devant chez mes parents.
03:44Et en fait, j'ai compris que j'étais seule,
03:47que personne ne m'aiderait.
03:48Du coup, je lance une bouteille à la mer le 14 mai 2019
03:52sur les réseaux sociaux.
03:55Et là, ça fait ce qu'on appelle,
03:58je n'aime pas véritablement le terme, le buzz.
04:00Au bout de quelques heures,
04:01j'ai les premiers journalistes qui me contactent.
04:03Et au bout de quelques jours,
04:04je commence à faire la une de tous les médias.
04:05Je n'ai pas pensé aux conséquences de faire la une des médias.
04:08Je voulais être protégée avec ma fille.
04:10Je n'ai jamais voulu que la justice se rende sur les réseaux sociaux.
04:13Je tiens à le préciser, je voulais être protégée
04:15face à l'inertie de la justice.
04:17Et une semaine après, il est remis en détention provisoire
04:21pour toutes les infractions qu'on dénonçait.
04:24Twitter m'a sauvée la vie.
04:26Mon ex-compagnon a été condamné en décembre 2019
04:29par la Cour d'Assise des Hauts-de-Seine à 8 ans de prison ferme
04:32et 5 ans de suivi socio-judiciaire.
04:34Toutes ces procédures judiciaires, ça m'a coûté beaucoup d'argent.
04:39Les frais d'avocat, au départ, ça a été la folie.
04:42Le 12 décembre 2018, on me demande 4 800 euros TTC.
04:46Je pense, si je compte les frais médicaux,
04:47je dois être à peu près à 150 000 euros.
04:50Oui, après, j'ai été remboursée d'une partie.
04:53Enfin, pas encore, là, ça va se faire, pour les dommages d'intérêt.
04:56Mais moi, au mois d'avril, ça fera 7 ans.
04:58Donc, j'aurai été presque 7 ans en procédure judiciaire.
05:01C'est-à-dire qu'il faut tenir sur la durée aussi financièrement.
05:03Donc, pour m'en sortir, au départ, j'avais mon travail, mes économies.
05:07Donc, tout y est passé.
05:09J'ai pris des crédits à la consommation.
05:12Et après, mes parents ont pris la relève financièrement.
05:19Là, on est dans la chambre de ma fille.
05:21Alors, ça, c'est son doudou quasiment de naissance.
05:24Celui-là, on le voit, il est assez usé.
05:28Puis, elle aime beaucoup, c'est celle-ci,
05:30que mon père lui a achetée quand on est arrivés, il y a 3 ans.
05:33Alors, ma fille, elle a été très impactée par cette nuit
05:37où son père a essayé de me tuer et puis par les scènes de violences avant.
05:41Donc, elle a eu un syndrome post-traumatique sévère.
05:44Elle a eu énormément de mal à parler.
05:46Pendant des mois, elle m'y met les gestes de strangulation.
05:49Pour s'endormir, après, elle dormait avec moi.
05:52C'était très compliqué.
05:53Toutes les heures, elle se réveillait.
05:55Rapidement, je l'ai fait prendre en charge par une pédopsychiatre.
05:58Mais c'est vrai que pendant 3, 4 années qu'ils ont subi,
06:02ça a été très compliqué.
06:03Je pense que ma fille m'aide à m'en sortir et m'a aidée à tenir debout
06:07car plusieurs fois, c'est vrai que j'ai eu des idées noires.
06:09Et c'est vrai que si je ne l'ai pas fait, c'est pour elle.
06:12Et c'est aussi pour elle que je reste engagée dans cette cause.
06:20Alors là, on est à Neuilly-sur-Seine
06:22et je vais aller faire une interview pour RTL.
06:26Je pense que c'est vraiment important de témoigner.
06:29Je me dis qu'il y a peut-être une personne qui est victime
06:32qui va entendre ce podcast et ça va sauver la vie d'une personne.
06:36Bonjour Laura Rapp.
06:37Bonjour Anaïs.
06:39Un jour, vous avez failli être la prochaine sur la liste.
06:42C'était quel jour ? Et comment ça s'est passé ?
06:45J'ai beaucoup souffert de la violence institutionnelle.
06:47Ça a été extrêmement violent.
06:49Même si ça a été un long chemin semé d'embûches,
06:52je ne regrette pas pour ma fille.
06:55Là, aujourd'hui, quasiment toutes mes procédures sont finies.
07:00Quand vous êtes tellement maintenu dans la violence,
07:02pendant cinq ans dans les violences conjugales,
07:05pendant presque sept ans dans les violences institutionnelles,
07:09il y a un temps, même au niveau du corps,
07:12il y a un temps, même au niveau du corps et de l'esprit,
07:15pour se réadapter et se dire « mais là, c'est bon ? Est-ce que c'est fini ? »
07:18Là, je me dis que je vois enfin la lumière au bout du tunnel.
07:22On peut s'en sortir.
07:24Je ne vais pas dire que c'est facile, que c'est simple,
07:26mais on peut s'en sortir et qu'il y a une vie après les violences conjugales.
07:34Merci à Laura d'avoir accepté de témoigner.
07:37Si vous voulez en savoir plus sur son histoire,
07:38elle a écrit un livre qui s'appelle « Tweeter ou mourir »
07:41Pour ne pas louper nos prochaines vidéos, abonnez-vous à Street Press.
07:43À très vite.