Quand on expose un enfant sur les réseaux sociaux, quelle réalité se cache derrière les sourires, les cadeaux et les mises en scène ? Derrière la légèreté apparente de cette pratique, il y a du commerce, de la publicité, du travail et des mineurs pas toujours bien protégés… Alors enfants comme parents, savent-ils vraiment ce qu’ils font ? Le consentement des enfants est-il éclairé ? Peut-il l’être d’ailleurs ? L’encadrement légal est-il suffisant ?Rebecca Fitoussi et ses invités ouvrent le débat. Année de Production :
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00:00Enfant influenceur, une vie sur les réseaux, un film signé Anne-Marie Avoque avec des parents et des enfants qui ont accepté de se confier et on les en remercie.
00:12Évidemment des séquences et des propos peuvent susciter des réactions et même des inquiétudes mais il ne s'agira pas ici de juger qui que ce soit.
00:20L'idée est simplement de s'interroger sur les risques que certains prennent sans parfois en avoir vraiment conscience.
00:27Et on va le faire avec nos invités. Jean-Raymond Hugonnet, bienvenue. Sénateur de l'Essonne, apparenté au groupe LR, vice-président de la délégation sénatoriale à La Prospective.
00:35En 2020, vous aviez au nom de la Commission de la Culture déposé le rapport sur la loi visant à encadrer l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne.
00:45Et je précise qu'il y a un an, le Parlement a adopté une loi qui vient renforcer encore davantage le droit à l'image des enfants. On y reviendra.
00:53Virginie Sassoun, bienvenue à vous également. Vous êtes docteur en sciences de l'information et de la communication et vous êtes directrice adjointe du Clémy.
01:01Le Clémy, c'est le centre pour l'éducation aux médias et à l'information.
01:06Michael Stora, bienvenue à vous également. Psychologue et psychanalyste, directeur fondateur de l'École des héros qui accompagne les jeunes souffrant de phobie scolaire, sociale, addiction aux jeux vidéo,
01:14cofondateur de l'Observatoire des mondes numériques en sciences humaines. Et je vais citer votre dernier ouvrage écrit avec Alix Lelief-Delcourt,
01:23Réseau A-Socio, la face cachée des algorithmes paru chez Larousse.
01:28David Julia Ramille, bienvenue à vous également. Rédacteur en chef à l'ADN, un média qui décrypte les tendances et les mutations de nos sociétés.
01:35Et vous êtes l'auteur de L'Internet des enfants, une histoire secrète de l'Internet qui éduque, amuse et exploite la jeunesse aux éditions Divergence.
01:43Merci beaucoup à tous les quatre d'être ici. Beaucoup de choses à dire sur ces enfants influenceurs.
01:50Et on ne s'arrêterait pas là-dessus si le phénomène n'était pas massif. Est-il massif d'ailleurs, David Julia Ramille ?
01:57Est-ce qu'on peut parler d'un phénomène ? Est-ce qu'on a des chiffres ? Le nombre de comptes ? Le nombre de followers ?
02:02Alors, en termes de… Non, je n'ai pas de chiffres précis à vous donner sur le nombre d'enfants qui, on va dire, seraient sur les réseaux sociaux.
02:09En vrai, ce n'est pas un phénomène qui est massif comme on entend. C'est-à-dire qu'il n'y a pas 50% d'enfants qui sont influenceurs en France ni dans le monde.
02:20En revanche, c'est vrai que les enfants qui pratiquent cette activité, on pourrait même appeler ce métier-là, ils sont vus de manière effectivement très massive.
02:28Il y a beaucoup de gens qui les regardent, beaucoup d'enfants qui les envient et qui auraient envie de faire la même chose.
02:33Donc, on a raison quand même de s'y intéresser. Je lisais ce chiffre en préparant cette émission.
02:37Un enfant apparaît sur 1300 photographies publiées en ligne avant l'âge de 13 ans sur ses comptes propres, sur les comptes de ses parents ou même des proches.
02:46C'est quand même phénoménal, Michael Stora ?
02:48Oui, c'est vrai que ça interroge un petit peu cette tendance à faire de nos enfants comme ça des sortes de prolongation un peu narcissique de ce que l'on est en tant que parent.
02:58Et c'est vrai que ça pose des vraies questions en termes de droit d'image aussi, puisque c'est un peu l'idée de base.
03:04C'est qu'au fond, ces enfants n'ont pas signé quoi que ce soit.
03:08Et c'est vrai que faire de l'enfant une vitrine, au-delà des raisons mercantiles, est peut-être un phénomène qu'on observe de plus en plus.
03:18Et je crois qu'il y a une dérive qui vient peut-être aussi révéler une fragilité de la part des parents qui, peut-être, font un peu trop de leurs enfants,
03:27des sortes d'expressions un peu exhibitionnistes de ce qu'ils ont envie d'être et de montrer.
03:33Donc, je crois que faire de l'enfant une valeur, ce n'est pas forcément une bonne idée.
03:37Virginie Sassoun, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais en voyant ce film, moi, j'ai repensé,
03:42parce que la littérature s'est aussi emparée du sujet.
03:44J'ai évidemment pensé à l'ouvrage de Delphine de Vigan, qui a ensuite été adapté en film, Les enfants sont rois.
03:49Ça a été publié il y a quatre ans et ça avait provoqué un électrochoc.
03:52On sent qu'on est en train de prendre conscience progressivement du phénomène.
03:56Oui, il y a une prise de conscience.
03:57Et d'ailleurs, ce qui est intéressant dans ce roman, c'est qu'on voit que Mélanie Clot, l'héroïne,
04:01enfin, le personnage principal, c'est une femme d'affaires.
04:04Donc derrière, en fait, cette apparence, nous, des vidéos sur les réseaux sociaux qui apparaissent,
04:09c'est ce que montrait bien aussi le film.
04:11C'est-à-dire que derrière, il y a un business, il y a un modèle économique.
04:14Et dans ce roman, je pense, c'est arrivé à un endroit où on avait tous besoin aussi d'être sensibilisés.
04:21Et c'est le pouvoir aussi de la fiction de pouvoir nous montrer les risques, en fait, de la marchandisation de l'enfance.
04:27Jean-Rémoigonnet, ce film, qu'est-ce qui vous a inspiré ?
04:30C'est vrai qu'il fait penser à la littérature, à ce film.
04:32En tout cas, il est concernant.
04:33Oui, alors, vous l'avez dit dès le début, on ne va surtout pas juger.
04:36Oui, ça me semble important.
04:38Merci de cette précaution, parce que c'est très difficile.
04:40On ne peut pas rester, surtout quand on est parent soi-même, insensible à un tel reportage film.
04:47Parce que ça dit beaucoup de notre société.
04:50Ça dit sur l'individualisme forcené et les individus qui sont produits recherchent, en fait, la meute, finalement.
04:59La meute, c'est les followers.
05:00Et la recherche, pour des raisons, vous l'avez dit tout à l'heure, force justement, parce que c'est à la base de tout,
05:05d'un narcissisme effréné qui tombe dans une forme de perversité.
05:09Et puis, il n'a pas du gain facile.
05:12Et ça, ce sont des phénomènes qui, aujourd'hui, sont massifs.
05:16Effectivement, il n'y a pas de chiffre précis pour dire le nombre d'enfants.
05:19Il faut rester très modéré.
05:21Mais l'impact et la déviance réelle dans notre société est massive.
05:26Ça, c'est très clair.
05:27David Juniramil, vous avez vous-même employé le mot de métier.
05:30C'est vrai qu'à un moment donné, dans le film, on interroge des enfants à l'école
05:33et on leur demande ce qu'ils veulent faire plus tard.
05:35Et influenceur est un métier, ça devient un métier.
05:37Il y a quasiment 50% souvent des jeunes qui sont interrogés disent qu'ils aimeraient faire ce travail-là.
05:42Et j'employais le terme de métier à Essien parce que, sur votre première question,
05:47c'est vrai que l'idée, c'était de dire combien d'enfants font réellement cette activité-là
05:52de manière intense, comme on peut le voir sur les réseaux.
05:55En revanche, c'est vrai qu'il y a beaucoup d'enfants qui produisent du contenu sur les réseaux sociaux
05:59mais qui ne montrent pas forcément leur visage, qui vont jouer à du jeu vidéo,
06:02se mettre un peu en scène, même parfois le faire de manière plus ou moins privée
06:06et le partager à leurs amis.
06:08Donc, il y a une idée selon laquelle on aimerait en être,
06:11on aimerait participer à ce jeu-là, avec l'idée de...
06:15L'objectif, c'est de remplir les jauges, d'avoir le plus de followers, le plus de likes.
06:20Pour prouver quoi derrière, ça, je ne sais pas trop.
06:22Mais en tout cas, il y a une notion d'amusement qui est assez importante.
06:26Les enfants, oui.
06:27Les parents, non.
06:30Et c'est là.
06:31Et ce qui est intéressant, c'est que quand...
06:33Je rappelle que c'est Bruno Studer, l'ancien député qui avait lancé cette première loi,
06:39quand on a travaillé, quand j'ai eu à commettre ce rapport ici au Sénat,
06:43on arrivait sur un champ totalement vierge, qui n'avait jamais été exploré.
06:47Donc, la première des choses qui est apparue, assez clairement,
06:50et c'est pour ça que je rebondis sur les propos,
06:52c'est qu'il a fallu catégoriser en trois parties la cible,
06:59c'est-à-dire ceux qui sont déjà des professionnels,
07:03et là, il y a déjà une législation sur ce qu'on appelle les enfants artistes,
07:08ceux qui ne sont absolument pas, qui font ça pour un contenu personnel,
07:12et la catégorie du milieu, qui est la plus difficile à cerner,
07:16qui est ce qu'on va appeler les semi-pros.
07:18Et les semi-pros, c'est très difficile,
07:20parce que ça draine une somme d'argent importante,
07:23il n'y a pas de contrat de travail,
07:24et là, on tombe dans tout ce qui peut être des débordements.
07:28Donc, loin de nous, l'idée, je crois que Bruno n'avait pas dans l'idée
07:32de sortir la proposition de loi qui allait régler absolument les choses,
07:39mais au moins, c'était le point de départ,
07:40ça permettait justement d'avoir des bases, de prendre ensuite des décrets,
07:43mais on voit que ces trois catégories-là sont toujours présentes.
07:47Et c'est pour ça que j'allais vous demander,
07:48est-ce qu'il faut s'affoler de cette situation, Michael Stora ?
07:51Les enfants disent, je vais être influenceur plus tard,
07:53mais comme on pouvait dire, je vais être chanteur plus tard,
07:55ou je vais être acteur plus tard aussi, est-ce que c'est si...
07:57Non, il y a une sacrée différence quand même, parce qu'au fond,
07:59d'ailleurs, en reprenant le roman de Delphine de Vigan,
08:02elle montre bien cette continuité entre la télé-réalité et l'Internet-réalité.
08:08Et là, c'est très différent d'un enfant qui va être acteur,
08:11qui va chanter, puisqu'il est pris dans une structure productive,
08:16avec des règles très précises, pas le droit.
08:18Là, il s'agit quand même d'enfants qui sont filmés au quotidien.
08:20Ce ne sont pas des acteurs.
08:23Et on leur demande pourtant d'être des formes d'acteurs,
08:26mais dans un environnement qui est celui du quotidien familial.
08:30Donc là, ça repose des vraies questions.
08:31La loi était très... Heureusement qu'il y a eu cette loi,
08:34mais elle n'est pas suffisante, évidemment,
08:35parce que justement, elle vient créer une sorte de perversion du lien
08:39au sein même de la famille,
08:41où l'enfant se retrouve lui-même acteur dans la réalité de sa famille.
08:47Et ça, c'est ce paradoxe-là qui est quand même très gênant, je trouve.
08:49Virginie Sassou ?
08:51Oui, il y a un vrai travail de sensibilisation auprès des familles.
08:53C'est très bien, parce que c'est vrai que c'était le Far West.
08:55Donc là, la loi, on en avait vraiment besoin pour protéger les enfants.
08:57Ah, c'était le Far West !
08:59Et aujourd'hui, les enfants sont protégés par cette loi,
09:03mais beaucoup de parents n'ont pas conscience aussi des risques
09:06qu'ils prennent quand ils partagent une photo de leurs enfants, une vidéo.
09:11Et donc, je pense qu'il y a une responsabilité aussi des pouvoirs publics,
09:15de l'école, une responsabilité aussi individuelle,
09:19en tant que parent, on doit se poser la question.
09:21Qu'est-ce que je cherche ? De la reconnaissance ? Des likes ? Pourquoi ?
09:23Et si on a vraiment envie de partager des photos ou des contenus de ces enfants,
09:27on peut le faire de manière éthique, en floutant leur visage,
09:29en prenant certaines précautions.
09:31Moi, ce qui me questionne aussi, c'est la responsabilité des entreprises
09:34qui sont à la recherche de ces enfants influenceurs
09:39pour aussi, je veux dire, participer aussi à un marché
09:44parce qu'ils ont effectivement une influence.
09:46Ils deviennent égéris de marque.
09:47Voilà, ils deviennent égéris.
09:48Donc, il y a aussi une responsabilité des entreprises,
09:51évidemment, des plateformes.
09:52Donc, la responsabilité, elle est collective.
09:55Et effectivement, on a besoin de la loi,
09:57mais on a besoin des enseignants,
09:59on a besoin des professionnels de santé mentale.
10:01On a besoin aussi, nous, en tant que parents,
10:04de se questionner, de se sensibiliser,
10:07d'entretenir le dialogue avec nos enfants
10:09pour savoir quels sont les influenceurs qui suivent,
10:11pourquoi ça les intéresse,
10:12quelles sont les valeurs aussi
10:14qui sont véhiculées par les influenceurs.
10:16Juste, est-ce qu'on peut creuser la question psychologique,
10:19Michael Stora ?
10:19Qu'est-ce qu'ils cherchent exactement, parents et enfants ?
10:21Recherche de notoriété, recherche de revenus, on l'a dit,
10:24c'est aussi quand même un commerce.
10:25On voit ces deux petites filles, ces jumelles,
10:27qui disent, on veut faire plaisir à maman,
10:29elle aura plus de followers.
10:32Oui, alors évidemment, sans juger,
10:33mais c'est vrai que ça interpelle.
10:35Qu'est-ce qu'ils cherchent, enfants comme parents ?
10:37Je crois que ça interpelle, comme vous le dites,
10:38puisqu'au fond, on se pose des questions
10:41sur, justement, qu'est-ce qui fait que...
10:45Ça rejoint un peu ce que je vous disais au début,
10:47c'est-à-dire, au fond, cette sorte de retour
10:48sur investissement affectif.
10:51Est-ce que ça vient révéler de la part des parents
10:53une fragilité de base,
10:54où l'enfant viendrait comme colmater
10:56quelque chose de cette fragilité,
10:58au-delà du modèle économique,
10:59parce qu'ils sont aussi très sensibles aux commentaires.
11:02Ils sont très sensibles.
11:05Et que donc, là, on se dit,
11:06tiens, au fond,
11:08qu'est-ce que l'enfant représente ?
11:09Comme ça a toujours un peu existé,
11:11parce qu'au fond, ces deux petites jumelles,
11:13à cet âge-là,
11:14on est naturellement, entre guillemets,
11:16exhibitionnistes,
11:17c'est-à-dire qu'on a du plaisir à être vus,
11:19parce que ça fait partie
11:20de ce que sont les enfants.
11:22Là, le problème,
11:23c'est qu'elles sont filmées,
11:24elles sont postées,
11:25et donc la question de l'enjeu existentiel,
11:27c'est comme si,
11:28parce que j'existe à l'image,
11:29j'existe, vous voyez,
11:31un enjeu qui devient assez étrange.
11:33Et j'existe aux yeux de maman.
11:34J'existe en plus aux yeux de maman.
11:36Et donc, qu'est-ce qui se passe
11:37lorsqu'il y a moins de likes ?
11:38C'est un vrai problème.
11:40Par exemple, on se dit,
11:41est-ce que si j'ai moins de likes,
11:42est-ce que ça veut dire
11:43que je serai autant aimé ?
11:44Est-ce que je vaux moins ?
11:45Est-ce que je vaux moins ?
11:46Et donc là,
11:46ça interroge quand même,
11:48et ça peut,
11:49sans juger,
11:50ça peut faire un,
11:50ça inquiète quand même.
11:51C'est aussi un phénomène
11:54vieux comme le monde.
11:56Je m'explique,
11:57il se trouve que je suis musicien,
12:00et petit,
12:01je l'étais déjà.
12:03Et donc,
12:03qui n'a pas vécu,
12:05musicien,
12:06danseur,
12:07danseuse,
12:08ou autre,
12:09le dimanche en famille,
12:10tiens,
12:11joue-nous ton petit morceau.
12:13Joue-nous ton petit morceau.
12:15Donc le gamin se trouve là,
12:16au milieu,
12:17alors il est à la fois fier,
12:18un peu tremblant,
12:19un peu,
12:19donc ça,
12:20c'était,
12:20il y a très longtemps,
12:22ça restait dans un cercle familial.
12:24Aujourd'hui,
12:24les plateformes numériques,
12:26les téléphones,
12:26tout le monde est connecté
12:28en permanence,
12:29et c'est ce phénomène-là
12:30qui est porté,
12:31mais cette fois-ci,
12:32de façon...
12:33Massive.
12:34Massive.
12:35Donc les répercussions de ça,
12:36c'est la raison pour laquelle,
12:38je fais toujours le lien
12:39avec la loi,
12:42on avait,
12:42c'est une notion très importante,
12:44parce que ce que l'on considère
12:45à un moment donné,
12:46comme enfant ou comme parent,
12:47n'est pas forcément
12:48la même chose
12:49qu'on va considérer
12:50quand on sera adulte.
12:51Et on avait introduit
12:52le droit à l'oubli,
12:54et il y a un des jeunes,
12:55d'ailleurs,
12:55dans le documentaire,
12:57qui est, je trouve,
12:58assez exceptionnel,
12:59qui analyse très, très bien,
13:00et on peut comprendre
13:01qu'à un moment donné,
13:02pour des raisons diverses,
13:03on le fasse,
13:03et de bonne foi,
13:04que ce soit des parents
13:05ou des enfants,
13:06mais arrivé à l'âge adulte,
13:07il faut avoir la possibilité,
13:09entre guillemets,
13:10d'oublier numériquement
13:11tout cela.
13:11– Je pense qu'il y a un phénomène
13:14qui est intéressant,
13:15qui n'est pas forcément abordé
13:17par le documentaire,
13:18mais que moi,
13:18j'avais vu,
13:19qui était l'exploitation
13:20de l'image des bébés,
13:22et notamment le fait
13:23qu'on a plusieurs tendances
13:25comme ça,
13:25qui consistent,
13:26par exemple,
13:26à faire claquer
13:27une tranche de fromage
13:28sur le cheese challenge.
13:30– Oui,
13:31il y a ce système
13:31des challenges,
13:32j'explique,
13:32pour les téléspectateurs,
13:33il y a des défis
13:33qu'on lance,
13:34notamment aux enfants.
13:35– Il y a aussi,
13:36en fait,
13:36cette idée,
13:37j'ai l'impression
13:37qu'on peut mettre
13:39un bébé ou un petit enfant
13:41comme ça devant une caméra
13:42et de filmer ses réactions.
13:43Les parents,
13:44je pense,
13:45veulent un peu mettre en avant
13:46le côté un peu innocent,
13:48un peu pur de l'enfance,
13:49mais il y a aussi
13:50un côté un peu indispositif
13:51du genre,
13:51ah,
13:52j'appuie sur un bouton
13:52et puis cet enfant
13:53va faire une réaction,
13:54qu'elle soit mignonne
13:55ou pas.
13:56on va faire goûter
13:57du citron à un bébé
13:58puis il va avoir
13:58une réaction un peu
13:59de dégoût
13:59ou alors,
14:00voilà,
14:00le cheese sur la tronche,
14:02c'est pas très très sympa.
14:03Le bébé,
14:03souvent,
14:04ça arrive de super,
14:05il y a même
14:05des challenges plus durs
14:06où on craque un oeuf
14:07sur la tête des enfants
14:08pendant qu'on fait un gâteau
14:09et l'enfant peut se mettre
14:10à pleurer
14:11parce qu'il est surpris.
14:12Et en fait,
14:13il y a vraiment une mécanique
14:14qui se met en place
14:15de,
14:16on va filmer
14:16la réaction principale
14:17de l'enfant
14:18qui va générer de la vue,
14:19générer de la...
14:20avec presque de l'humiliation
14:21quand même.
14:21On n'est pas loin de ça.
14:23Et moi,
14:23je trouve qu'il y a un chiffre
14:24aussi quand même
14:24assez éloquent,
14:25c'est que c'est le taux
14:26d'engagement,
14:27donc c'est un ratio
14:28entre le nombre de vues
14:29d'une vidéo,
14:30par exemple,
14:30et le nombre de réactions,
14:32donc de commentaires,
14:33de likes,
14:33etc.
14:34Et il a été prouvé
14:35que par exemple,
14:35sur Instagram,
14:37les gens qui partagent
14:37une photo classique,
14:38les Instagrammeuses,
14:39par exemple,
14:40vont avoir un taux d'engagement
14:41au moyen de 3%,
14:42et si on rajoute
14:43un enfant ou un bébé,
14:44il va monter à 5%.
14:45Donc en fait,
14:46directement,
14:47on voit l'intérêt
14:48qu'on a de montrer un bébé
14:49sur les réseaux.
14:50Évidemment,
14:51exposer ses enfants
14:52sur Internet,
14:52ce n'est pas son risque,
14:53on vient de le voir,
14:54risque psychologique,
14:55risque de haine en ligne
14:56et risque sécuritaire aussi.
14:58Et ça,
14:59c'est le père de Pink Lily
14:59qui nous le dit
15:00finalement assez tranquillement
15:02dans le film.
15:02Je voudrais qu'on l'écoute
15:03et qu'on en reparle
15:03juste après.
15:06Alors à un moment donné,
15:06on a dû déménager.
15:08Alors du fait que
15:09on était un peu connus
15:11dans le quartier,
15:13dans la ville,
15:15donc à un moment donné,
15:16où les abonnés
15:19venaient sonner
15:20à notre porte.
15:21Après,
15:22ça devenait,
15:23c'était de plus en plus
15:23et puis même à un moment donné
15:25où il y a eu
15:28des coups de pied
15:28dans la porte,
15:29les gens ont voulu
15:32rentrer
15:33ni plus ni moins
15:36de la violence gratuite.
15:39Alors Lily Rose,
15:39bien sûr,
15:39ça lui a fait peur.
15:42C'est la sécurité
15:43de Lily Rose avant tout,
15:44de mes enfants,
15:45Lily Rose et Esteban.
15:46Cette phrase,
15:50c'est la sécurité
15:50qui compte avant tout.
15:52Mais il pense
15:52à une sécurité physique
15:53comme si la sécurité
15:55sur Internet
15:55était assurée.
15:57Virginie Stassoun,
15:58c'est troublant ?
15:59Oui,
15:59c'est troublant.
16:00Et puis,
16:00c'est surtout la violence
16:01à laquelle Lily Rose
16:03et sa famille
16:05par extension
16:06ont été exposées.
16:07Je pense que pour revenir
16:08à ce qu'on disait
16:09tout à l'heure,
16:09c'est-à-dire que quand même
16:11les enfants sont vulnérables,
16:12il ne faut pas l'oublier.
16:13Et en fait,
16:13partager des photos,
16:15des vidéos,
16:15ça peut être vraiment
16:16des vraies bombes
16:17à retardement
16:17dans des actes
16:18de cyber-violence,
16:20cyber-harcèlement
16:20qui vont après pouvoir
16:22ressortir
16:23avec des actes malveillants
16:25où les camarades
16:26vont aller prendre
16:27sur les profils
16:29Facebook,
16:29Instagram des parents.
16:31Et là,
16:31ce qui arrive,
16:32effectivement,
16:33c'est un niveau au-dessus.
16:36Il n'y a plus de frontières
16:37entre le virtuel
16:37et le réel.
16:38Oui,
16:39on se pose la question
16:40aussi de la répercussion
16:41pour cet enfant,
16:43pour Lily Rose
16:44qui reste une enfant
16:44et qui quand même
16:45a été co-responsable
16:47ou a alimenté
16:48le cyber-harcèlement
16:50et le harcèlement
16:52dont ont été victimes
16:52la génération 2010,
16:54ce qui est rentré
16:55en sixième
16:55et qui a été
16:56quelque chose
16:57que le ministère
16:57de l'Éducation nationale
16:58a dû prendre aussi en main,
17:01d'accompagner les parents,
17:03les enseignants.
17:04Là,
17:05on voit bien le lien
17:05qui existe.
17:06On ne peut pas dissocier
17:07la réalité de ce qu'on vit en ligne
17:09de la réalité
17:09de ce qu'on partage
17:11tous ensemble
17:12dans la vie sociale.
17:13Mais c'est ce même papa
17:13qui nous dit aussi...
17:15Moi,
17:16en gros,
17:16Internet,
17:16je n'y connaissais pas grand-chose.
17:18J'ai suivi,
17:18ils sont un peu suiveurs,
17:19les parents,
17:19ils sont un peu paumés
17:20pour le terme.
17:21Mais qu'est-ce qu'il faut leur dire ?
17:23Comment on les forme ?
17:24Est-ce qu'il faut des campagnes
17:25de prévention ?
17:25Qu'est-ce qu'il faut faire ?
17:26Oui,
17:26moi,
17:26je suis convaincue
17:27qu'il faut des campagnes
17:28de prévention
17:28et il faut des campagnes
17:29de prévention
17:30qui articulent
17:31et qui favorisent
17:32les alliances
17:33entre les parents
17:34et l'école
17:36parce qu'en fait,
17:37l'école ne peut pas tout
17:38même si,
17:39évidemment,
17:39l'éducation média
17:40et l'information...
17:41Et moi,
17:41je conseille à tous les parents
17:42de voir ce documentaire
17:43avec leurs enfants.
17:44Moi,
17:44je l'ai vu avec mes enfants
17:45qui avaient 6 et 9 ans
17:46et c'est vraiment
17:46de l'éducation média
17:48dans le sens
17:48où on découvre
17:49la fabrique
17:50de l'influence,
17:51de ce que ça signifie aussi
17:52que d'être un enfant
17:53influenceur,
17:55des motivations
17:55des parents derrière
17:56et même s'il ne faut pas juger,
17:58ça permet d'engager
17:59aussi la conversation
18:00avec son enfant
18:01et des campagnes
18:01de sensibilisation
18:02effectivement
18:03qui touchent
18:04toute la chaîne
18:05de responsabilité
18:06des plateformes,
18:07des parents,
18:09des entreprises
18:09comme je l'ai dit
18:11tout à l'heure
18:11et évidemment,
18:12je pense qu'il y a aussi
18:14une responsabilité
18:15des influenceurs eux-mêmes
18:16qui savent
18:17qui touchent
18:17les enfants
18:18et les adolescents
18:19de aussi pouvoir
18:21être responsable
18:22et plus éthique aussi,
18:25il y a quand même
18:25je ne sais pas,
18:26quelque chose
18:27de l'ordre du collectif
18:29à se poser
18:29tous ensemble
18:30pour avancer.
18:32Les parents,
18:33il est un peu perdu
18:34ce papa,
18:35il a suivi,
18:36il a suivi.
18:36Oui,
18:36c'est son fils
18:37qui est le manager
18:38et lui,
18:39il s'y connaît
18:40très très bien.
18:41Lily Rose,
18:42c'est un peu compliqué
18:42parce qu'elle est plus
18:43presque créatrice
18:44de contenu,
18:45c'est-à-dire
18:45qu'elle chante,
18:47donc elle produit,
18:47donc elle est musicienne,
18:48on va dire,
18:49je ne sais pas après,
18:50selon les goûts,
18:51mais elle est créatrice
18:53et donc ce qui est vrai,
18:55c'est qu'en même temps,
18:56elle a subi
18:56le bashing des 2010
18:58qui finalement
19:00a touché énormément
19:01de jeunes
19:02nés en 2010
19:03et je crois que
19:05ce qu'on découvre derrière,
19:06c'est le phénomène
19:07de la haine en ligne
19:08qui est un phénomène
19:09qui prend une proportion
19:10et je fais partie des gens
19:12qui ont essayé de comprendre
19:13et comment est-ce que même
19:14on pourrait imaginer
19:15des campagnes de prévention
19:16parce que c'est vrai
19:17que c'est finalement
19:18cette question
19:19de se dire
19:19mais où est l'empathie ?
19:22Parce que par exemple
19:22pour parler des bébés,
19:23on sait que les bébés,
19:24comme les chiots
19:25et les chatons,
19:27ce sont des contenus
19:28qui plaisent énormément
19:29avec une dimension terrible
19:31avec le défi
19:33de la tranche de fromage
19:34qui montre ce paradoxe étrange
19:36parce qu'on aime le beau,
19:37les bébés c'est beau
19:38comme les petits chatons,
19:39c'est mignon,
19:40c'est kawaii
19:41comme disent les japonais,
19:41donc ça crée
19:42une sorte d'ambiance,
19:43une sorte d'antidépresseur
19:44j'ai envie de vous dire
19:45et puis en même temps
19:47là on l'humilie
19:47et donc on voit
19:48comment nous,
19:49nous sommes convoqués
19:50dans une forme de voyeurisme
19:52puisque derrière le voyeurisme
19:53il faut savoir
19:53que c'est une pulsion sadique
19:55quelque part,
19:56c'est prendre l'autre
19:57par la vue,
19:57c'est une forme
19:58d'emprise sur l'autre
19:59et que donc
20:00on est convoqué
20:01dans ce double mouvement
20:02paradoxal,
20:03terriblement humain
20:05et je crois
20:05que c'est là
20:06où ça pose
20:07beaucoup de questions,
20:08est-ce qu'on doit
20:09l'interdire ?
20:10Est-ce qu'on doit réfléchir
20:11sur ce que l'on est ?
20:12Est-ce qu'on doit éduquer ?
20:14Est-ce qu'on doit éduquer ?
20:15Est-ce que derrière
20:15ce n'est pas une question
20:16d'une problématique d'empathie
20:18plus profonde
20:19sur notre société
20:20qui peut-être se repose ?
20:22L'être humain
20:23n'est pas toujours empathique,
20:24parfois il est ambivalent.
20:25C'est complexe,
20:26c'est vrai que c'est très complexe.
20:27Et puis il faut faire avec,
20:28le truc existe.
20:28Oui, je voulais rebondir
20:29sur la sécurité,
20:30sur ce que vous venez de dire
20:31fort justement
20:32et j'en reviens
20:33à cette idée
20:34d'individu
20:36puisque la société
20:37met en exergue
20:38l'individu
20:38et l'individualisme
20:39et la recherche permanente
20:41de la meute.
20:43Quand on est
20:44avec des images comme ça,
20:45ce qui vous catégorise,
20:47c'est le nombre de followers,
20:48très clairement.
20:50Et donc on cherche la meute
20:51sans penser un instant
20:53que la meute
20:53peut être très violente.
20:56Et quand les coups de pied
20:57dans la porte,
20:58c'est la meute
20:59qui...
21:00Mais sauf que
21:00ce qui est très pratique
21:01avec les réseaux,
21:03c'est que la meute,
21:03vous ne la voyez pas
21:04comme les gens
21:06qui libèrent la parole
21:07en disant n'importe quoi
21:09sur les réseaux,
21:10c'est la même chose.
21:10On a l'impression
21:11qu'on s'adresse
21:11au monde entier
21:12et que le monde entier
21:13est loin.
21:14On est tranquille chez soi.
21:15Ce n'est pas ça la réalité.
21:16Mais est-ce que la loi
21:17peut encore faire quelque chose
21:18Jean-Raymond Egonet ?
21:18Alors...
21:19Est-ce qu'il faut aller plus loin ?
21:20Des lois, on en vote.
21:21Il y en a encore une l'année dernière
21:22qui est censée avoir renforcé
21:24le droit à l'image
21:25de ces mineurs.
21:26Est-ce qu'on peut aller plus loin ?
21:27Alors,
21:28ce n'est pas un parlementaire
21:29qui devrait dire ça.
21:30Des lois dans notre pays,
21:32on en fait beaucoup trop.
21:34On ne les applique
21:34quand tout va bien
21:36que la moitié du temps.
21:38Elles sont souvent...
21:39Là, je fais le petit couplet Sénat,
21:41vous m'en excuserez,
21:41mais souvent mal écrites
21:43par l'Assemblée nationale
21:44et on essaie de réparer
21:45les choses ici au Sénat.
21:46Mais très sincèrement,
21:48les lois, oui,
21:48mais on a toujours l'impression
21:50qu'on court derrière quelque chose.
21:52Quand Bruno Studeau
21:52a fait cette proposition de loi,
21:55le domaine était vierge.
21:57On a avancé loin de nous l'idée,
21:59et je l'ai répété
22:00à la tribune plusieurs fois,
22:01loin de nous l'idée
22:02d'avoir la prétention
22:04de croire qu'avec ça,
22:04on réglait le problème.
22:05On l'avait réglé un petit peu,
22:07on commençait à le mettre
22:08sur les rails,
22:08on montrait que la société
22:10était concernée.
22:11La première des choses,
22:12Madame l'a dit fort justement
22:13aussi tout à l'heure,
22:14c'est l'éducation.
22:15Mais quand on parle
22:16d'éducation aux médias,
22:18à la tenue,
22:18ce ne sont pas des outils
22:20qui sont comme ça inertes.
22:22C'est très violent,
22:23c'est très puissant.
22:24Maintenant,
22:25le vrai sujet,
22:26l'éducation face
22:28à l'appât du gain,
22:30je vous garantis
22:31que l'éducation,
22:31elle doit être faite
22:32non seulement par des messages,
22:34non seulement à l'école,
22:35non seulement en famille,
22:36pour essayer de résister.
22:38Et je trouve que dans
22:39le film
22:41que vous nous avez présenté,
22:43ça se voit
22:43par moments quand même
22:44beaucoup.
22:45Je ne peux pas croire
22:45deux secondes
22:46que le monsieur
22:47avec la chemise hawaïenne,
22:48le papa de...
22:50Pink Louis.
22:50dit,
22:51ah ben non,
22:51je suis totalement perdu
22:52dans ce monde.
22:53Non,
22:53il ne m'a pas l'air
22:54d'un vieux barbon quand même.
22:56Voyez ce que je veux dire,
22:56il est connecté à ce monde
22:58et si son fils a pris
22:59en tant que producteur,
23:00parce que c'est lui
23:01qui drive le truc.
23:02La jeune fille est un peu...
23:04Moi, ça m'a fait peur
23:05quand je l'ai entendue
23:06parce qu'elle m'a dit
23:06si ça s'arrête,
23:07qu'est-ce qui se passe ?
23:08Elle ne peut même pas envisager.
23:10Si ça s'arrête,
23:11elle s'effondre.
23:12Alors,
23:12au risque de me faire
23:13l'avocat du diable,
23:13c'est aussi un jeune homme
23:14qui a développé
23:15des qualités
23:16de chef d'entreprise,
23:17d'entrepreneuriat.
23:18Ça crée aussi peut-être
23:19d'autres qualités,
23:20y compris d'ailleurs
23:20chez cette jeune chanteuse
23:22qui crée quelque chose,
23:23qui lutte contre cette timidité.
23:25Est-ce qu'il faut
23:25plus de lois,
23:26plus d'éducation ?
23:27Qu'est-ce qu'il faut,
23:27David Dunirani ?
23:28Je pense qu'il faudrait
23:30surtout beaucoup plus
23:31de connaissances
23:33des mécaniques
23:33de l'Internet
23:34et du web
23:35de manière globale.
23:37Savoir que,
23:38par exemple,
23:40de tout temps,
23:40on va dire,
23:41depuis le temps
23:41que l'Internet existe,
23:43les enfants ont été dessus,
23:44mais on n'a jamais
23:45vraiment compris
23:46pourquoi ils y étaient
23:46et on a toujours eu l'impression
23:48que ce n'était pas
23:48vraiment leur place,
23:49que ce n'était pas
23:50un endroit pour eux
23:51et que,
23:52de manière globale,
23:53les enfants sur Internet
23:54vont se faire bizuter,
23:55quoi qu'il arrive.
23:56C'est un endroit
23:56un peu,
23:57effectivement,
23:58un peu méchant.
24:00Comme dans la vie.
24:01Effectivement,
24:01comme dans la vie.
24:02Et je me rappelle
24:03de cette séquence
24:03dans le film
24:04où on voit,
24:05justement,
24:05le frère de Lily Rose
24:06en train de lire
24:07les commentaires
24:07et de dire,
24:09oulala,
24:09celui-là,
24:09il est un peu salé
24:10et il y en a
24:11qui sont très drôles.
24:12Et en fait,
24:12il ne faut pas sous-estimer
24:13le pouvoir de méchanceté
24:15presque drôlatique
24:16que peut avoir Internet.
24:18Il y a cette idée
24:19selon laquelle Internet,
24:19c'est l'intelligence collective.
24:21Elle peut servir
24:22pour faire le bien,
24:22mais elle peut aussi servir
24:23pour principalement
24:24se moquer et s'amuser.
24:26Et ça,
24:26c'est quelque chose
24:26qu'on ne peut pas...
24:27Aucune loi pourra le réguler
24:28tant qu'Internet sera comme ça.
24:30On ne pourra pas vraiment l'empêcher.
24:31Donc, effectivement,
24:32travailler avec les parents
24:34pour promouvoir
24:35le fait de protéger
24:36la vie privée
24:37de leurs enfants,
24:38leurs visages.
24:39Je trouve qu'il y a eu
24:39des campagnes
24:40qui ont déjà été menées,
24:41notamment sur le charenting,
24:43sur le fait que...
24:43Le charenting ?
24:44Donc, c'est la notion...
24:45C'est partager des photos
24:47ou des vidéos
24:48de ces enfants
24:49sur les réseaux sociaux.
24:50C'est le point de départ,
24:51en fait,
24:51c'est-à-dire le fait
24:51de poster une photo
24:52de son fils,
24:53de sa fille...
24:54Donc, à la source,
24:55elle est vraiment à la source
24:56et de le montrer
24:57de manière non floutée.
24:58Ce qu'on disait,
24:59c'est que ça apporte
24:59plus d'engagement.
25:00Ça, on l'a compris.
25:02Et ce que les parents
25:02doivent comprendre,
25:03c'est que ça peut être
25:04éventuellement récupéré
25:05dans des forums pédo
25:07pour pouvoir servir
25:09de matériel pour ça.
25:10Mais ça peut aussi,
25:12par le jeu du hasard,
25:13une photo peut être
25:14montée en épingle.
25:15la personne peut être...
25:17Enfin, l'enfant
25:18peut être doxé.
25:19Donc, c'est-à-dire
25:19son identité,
25:21son adresse peut être publiée.
25:22C'est ce qui s'est visiblement
25:23passé avec cette adolescente.
25:25Et à ce moment-là,
25:26on peut avoir, effectivement,
25:27des phénomènes de meute.
25:27Donc, ce que je comprends,
25:28c'est qu'il ne faut pas forcément
25:29une loi de plus, alors, Virginie ?
25:30Juste pour rebondir,
25:31l'Association des Enfants
25:32se rappelle quand même
25:32souvent régulièrement
25:33que 50% des photographies
25:35d'enfants
25:35qui se retrouvent
25:36dans des forums pédo-criminels
25:38sont postées
25:39par les parents eux-mêmes.
25:41Donc, ça, ça nous interpelle aussi.
25:43Et sur la question
25:44du charrentine,
25:44je trouve que ce qui est...
25:45Du partage.
25:46Du partage, en fait,
25:47des photos sur les réseaux sociaux.
25:48On voit une génération
25:49qui grandit, là,
25:51et qui est assez critique
25:52vis-à-vis des pratiques
25:53des parents.
25:54Ah !
25:55Et qui, nous,
25:55on a fait un podcast
25:57au Clémy
25:58qui s'appelle
25:59Médialogue en famille.
26:00Il y a beaucoup d'enfants, aussi,
26:01qui renvoient aussi
26:02un questionnement
26:03assez critique
26:04aux parents
26:05en leur disant
26:06mais, en fait,
26:07vous, nous,
26:08vous êtes obsédés
26:09par notre temps d'écran,
26:10par ce qu'on fait,
26:10mais vous-même,
26:11vous postez des photos nous,
26:12etc.
26:12C'est intéressant.
26:13Et cette génération
26:15qui grandit
26:16et qui a subi, aussi,
26:17un peu les réseaux sociaux,
26:18il faut bien le dire,
26:19puisque nous,
26:20on est la première génération
26:21de parents
26:21à élever des enfants
26:23qui sont connectés
26:24à des smartphones
26:25et on n'a pas
26:26l'expérience, nous,
26:27de ça.
26:27On tâtonne tous un peu.
26:28On tâtonne tous.
26:29On découvre,
26:29on tâtonne tous.
26:30Et donc, voilà,
26:32on a besoin d'aide,
26:34on a besoin d'outils.
26:35Nous, sur le site du Clémy,
26:36on a des ressources
26:37qui sont gratuites,
26:38aussi pour les professionnels
26:39de l'éducation,
26:40tous les médiathécaires,
26:42les bibliothécaires,
26:43aussi,
26:43qui font un travail formidable,
26:44les associations,
26:45aussi,
26:46dans les quartiers.
26:47Il ne faut pas hésiter,
26:48aussi,
26:48à se réunir,
26:49même entre parents,
26:50pour partager.
26:51Moi,
26:52quand je fais des ateliers
26:52parentalité numérique,
26:54je dis aux parents,
26:54mais moi,
26:55vous avez fait 80% du job
26:57parce que vous êtes là.
26:58Déjà,
26:58vous vous posez la question
26:59et vous vous dites,
27:00on va partager
27:01et c'est le plus important,
27:03en fait,
27:03c'est de prendre
27:04cette conscience-là.
27:05Oui, pardon.
27:05Pardon,
27:06sur le phénomène législatif,
27:07parce que c'était aussi
27:08votre question
27:09et j'y répondais
27:10un petit peu tout à l'heure,
27:10mais pour préciser les choses,
27:13il existe déjà des lois
27:14et notamment,
27:16ce qu'évoque Madame,
27:17ça s'appelle tout simplement
27:18le droit à l'image
27:18et le droit à l'image
27:20est déjà,
27:21il y a déjà
27:22une législation dessus,
27:23ce que peut faire
27:24le parlementaire,
27:24c'est quand on voit
27:25une niche ou une faille
27:27quant à l'exploitation,
27:29on précise ce que l'on en fait,
27:30préciser la loi,
27:31peut-être,
27:31venir préciser la loi
27:32parce que c'est...
27:33Et venir y apporter
27:34des nuances.
27:35Mais le droit à l'image
27:36est fondamental
27:37et on assiste maintenant
27:38à quelque chose
27:39qui se retourne
27:39où les enfants,
27:40effectivement,
27:41sont critiques
27:41et veulent avoir accès
27:43parce qu'ils ont bien compris
27:44dans cette société médiatisée
27:45l'importance de l'image.
27:47C'est super intéressant, ça.
27:48Oui, non, pour rebondir,
27:49c'est qu'aux Etats-Unis,
27:50il y a eu un adolescent
27:51qui a dit, disons,
27:52un majeur
27:53qui a porté plainte
27:54contre ses parents.
27:55Voilà.
27:55Donc c'est ce genre
27:56de cas d'école
27:57qui vient un petit peu
27:58montrer que c'est pas
27:59n'importe quoi,
28:00que c'est un acte
28:01qui est interdit par la loi
28:02et je trouve ça bien
28:03quand la loi,
28:04finalement, petit à petit,
28:05va s'insinuer
28:06dans toutes les mécaniques
28:08d'Internet
28:09pour leur montrer
28:09à quel point, non,
28:10il y a des pratiques
28:11hors la loi.
28:12On a évoqué
28:12diverses responsabilités
28:13mais pas encore assez
28:14celles du public.
28:16On l'a un petit peu abordé.
28:17Dans cette histoire,
28:18il y a effectivement
28:18de l'exhibition
28:19mais vous l'avez dit,
28:20Michael Stora,
28:21il y a beaucoup
28:21de voyeurisme
28:22et là, vous, moi,
28:24tous, autant que nous sommes,
28:25nous likons des photos,
28:26nous suivons des comptes
28:27qui publient des vidéos
28:29avec des bébés,
28:30avec des enfants,
28:31sans compter ceux,
28:31évidemment,
28:32qui commentent
28:33parfois de façon odieuse.
28:35Regardez.
28:38Je supprime
28:39tous les commentaires
28:39désobligeants
28:40et je bloque
28:41et des fois,
28:42quand ça va trop loin,
28:43je signale.
28:44Ouais, il faut être costaud.
28:45Ouais, il faut être costaud
28:46parce que des fois,
28:47c'est des commentaires méchants.
28:49Déjà, comme je dis,
28:51si mon contenu
28:52ne plaît pas,
28:53passe ton chemin
28:53mais ne prends pas
28:54le temps de commenter
28:55sur des enfants
28:55de 7 ans
28:56parce qu'elles ont mal
28:57fait la danse
28:58ou parce que
28:59ça reste des enfants
29:00de 7 ans.
29:01Les gens sont méchants.
29:05J'entends d'avance
29:06ceux qui pourraient dire
29:07que ses propos
29:07sont naïfs,
29:08elle n'a qu'à pas
29:09exposer ses enfants
29:10sur les réseaux,
29:10certes,
29:12mais il y a des gens
29:12qui regardent,
29:13il y a des gens
29:13qui likent
29:14et il y a des gens
29:14qui critiquent
29:15et ce sera un peu
29:16ma dernière question
29:16et la conclusion
29:17de ce débat.
29:17Est-ce qu'effectivement
29:18la pierre n'est pas
29:19dans notre jardin
29:20à nous,
29:20ceux qui sommes
29:21sur les réseaux sociaux,
29:22qui likent,
29:22très gentiment
29:24et très naïvement
29:24parce qu'on sourit
29:25à une vidéo de bébé
29:26mais est-ce qu'en fait
29:26ce n'est pas ça
29:27qu'il faut arrêter ?
29:28Il y a ce questionnement
29:30fondamental,
29:31je pense qu'on doit
29:31tout savoir en tant
29:32qu'internaute,
29:32c'est pourquoi est-ce
29:33que je like,
29:33pourquoi est-ce
29:34que je regarde,
29:35qu'est-ce qui fait
29:35que cette vidéo
29:36m'a accroché
29:37et pourquoi j'ai envie
29:38d'en savoir plus.
29:40Je pense que c'est
29:40notamment le cas
29:41quand on est sur TikTok
29:42et où on sait en plus
29:43que tout ce comportement-là
29:45va influencer l'algorithme
29:46et va lui donner envie
29:48de nous en donner plus.
29:50Déjà, si on est conscient
29:50de cette manière-là
29:51de naviguer sur Internet,
29:52c'est déjà un énorme pas.
29:53Et je voudrais préciser aussi
29:55qu'effectivement,
29:57cette maman,
29:57elle déplore
29:59les commentaires négatifs,
30:00mais moi,
30:01j'ai pu voir
30:01des mamans influenceuses
30:03mettre en scène
30:03leurs enfants
30:04en disant
30:05c'est un rôle qu'on joue,
30:07c'est pour les réseaux,
30:08c'est pour de faux,
30:08mais en mettant en scène
30:09des enfants
30:11avec des comportements
30:11catastrophiques,
30:12ultra malpolis,
30:13qui voleraient la carte bleue,
30:15etc.
30:16Tout ça,
30:16tout se trouve
30:16dans cette même logique
30:17de la télé-réalité,
30:18on joue un rôle
30:19mais on est un peu
30:20à la frontière
30:20entre le réel
30:21et la fiction.
30:23Et avec cette idée
30:24de générer
30:25le plus de commentaires
30:26et même de plus de haine.
30:28Et finalement,
30:29cette dimension
30:30de on apprend à aimer
30:31mais on apprend aussi
30:32à détester
30:32un enfant,
30:34une personnalité en ligne,
30:35elle fait aussi partie
30:36de ce jeu-là,
30:37malheureusement.
30:38Et effectivement,
30:39du point de vue
30:39de l'internaute,
30:40c'est une question fondamentale.
30:41Et puis ce qu'elle dit
30:42est juste,
30:42si ça ne te plaît pas,
30:43passe ton chemin,
30:44ne t'arrête pas
30:44sur cette vidéo,
30:45Miquel, c'est toi.
30:46Oui, alors,
30:47c'est vrai qu'on voit bien
30:49la question
30:50de la culture
30:52des commentaires
30:52qui finalement
30:54est propre à Internet,
30:55qui a créé
30:56cette forme d'horizontalité
30:57où tout le monde
30:57peut s'exprimer,
30:59même les journalistes
31:00sont critiqués,
31:00les articles sont commentés,
31:02etc.
31:03Et puis on voit,
31:03il y a des commentaires
31:04tout à fait enrichissants,
31:06intéressants,
31:07et puis il y a une grande part
31:08de ce qu'on appelle
31:09les haters,
31:09entre autres,
31:10dont la vocation
31:11est de détruire,
31:13parce que derrière,
31:13il y a aussi l'idée
31:14qu'Internet est venu
31:16révéler,
31:17amplifier le phénomène
31:18de comparaison sociale
31:19et autres,
31:20qui est un phénomène
31:21terriblement humain,
31:23mais qui est complètement
31:24amplifié au point
31:24où les gens peuvent
31:25éprouver des sentiments
31:27de jalousie
31:27ou de haine
31:28ou d'envie
31:30qui peut aboutir
31:31justement à ce type
31:33de violence.
31:34Et donc,
31:34c'est vrai que
31:35cette maman influenceuse
31:38est un peu,
31:38en effet,
31:39prise elle-même
31:40par son propre piège,
31:41c'est-à-dire,
31:43malheureusement,
31:43en mettant son enfant
31:45en avant,
31:47elle prend le risque
31:48que ses enfants
31:50soient critiqués
31:52de manière assez violente.
31:53Jeter en pâture.
31:54Et puis,
31:54merci l'anonymat.
31:55Il y a quand même
31:55encore un problème
31:55avec cette question
31:56de l'anonymat sur Internet.
31:57Ces gens,
31:57peut-être,
31:58ne se permettraient pas
31:59ces commentaires
31:59s'ils étaient identifiés
32:01et qu'ils risquaient
32:01des choses juridiquement.
32:04On en revient à la meute
32:05dont je vous parlais
32:05tout à l'heure.
32:06Mais ce sur quoi
32:07je veux insister là,
32:08à ce moment,
32:10c'est qu'il y a
32:11quelque chose
32:11auquel je crois,
32:13évidemment,
32:14qui s'appelle l'éducation.
32:16Donc,
32:16ce n'est pas dit
32:17dans le reportage.
32:19Au niveau scolaire,
32:20comment se comportent
32:22les enfants
32:22qui sont au cœur ?
32:25Est-ce qu'ils sont
32:25en décrochage scolaire ?
32:27Est-ce qu'ils vont à l'école
32:28entre deux prises de vue ?
32:30Parce que ça pose aussi
32:32ce problème
32:32et on s'était penché
32:33là-dessus
32:34lors de la proposition
32:36de loi
32:36sur les enfants youtubeurs.
32:38Donc,
32:39je crois profondément
32:40à l'éducation.
32:41Est-ce que les parents,
32:43encore une fois,
32:43sans pointer du doigt
32:44et sans juger,
32:45mais est-ce que cette maman
32:46se rend compte
32:47réellement
32:49si elle prend
32:49deux secondes
32:50un peu de recul
32:51de la situation
32:52dans laquelle
32:53elle se trouve ?
32:54Bien sûr qu'on vit
32:54dans un monde,
32:56vous achetez une voiture
32:57qui roule très vite,
32:57vous ne savez pas la conduire,
32:59vous ne respectez pas
33:00les règles du code de la route,
33:01vous allez vous faire du mal
33:02et peut-être,
33:03potentiellement,
33:03faire du mal aux autres.
33:05Donc,
33:06là,
33:06c'est exactement la même chose.
33:07Mais il faut
33:08éduquer à cela.
33:09Et puis,
33:10cette maman dit
33:10« c'est mes enfants,
33:11je fais ce que je veux ».
33:12C'est une phrase assez forte.
33:14Pour conclure,
33:15c'est aussi une éducation
33:17effectivement au regard
33:18et à notre regard critique
33:19sur les images
33:20pour remettre un peu
33:21d'éthique aussi
33:21dans ce qui nous plaît.
33:23Je pense que l'éducation
33:24média à l'information,
33:25on sort de la semaine
33:26de la presse
33:26et des médias dans l'école,
33:27donc c'est l'occasion
33:28de sensibiliser
33:29et 3 millions d'élèves
33:30qui ont été sensibilisés.
33:32Et si on commence
33:32dès la maternelle,
33:34dès l'école primaire,
33:36à éduquer à ses regards
33:38à la sécurité en ligne,
33:40à la protection
33:40de la vie privée,
33:41à qu'est-ce que ça veut dire
33:42que d'avoir un usage éthique
33:44des réseaux sociaux.
33:44Donc ça,
33:45c'est vraiment un enjeu
33:46de justice sociale
33:47et une responsabilité
33:48vraiment cruciale
33:50de l'école.
33:50Et puis,
33:51notre responsabilité citoyenne
33:52en tant que parents,
33:53c'est vraiment
33:53de s'intéresser
33:54à ce que font
33:55nos enfants en ligne,
33:56de les laisser
33:56le moins seuls possible.
33:57et quand ils sont seuls,
33:59de débriefer avec eux après,
34:01leur demander
34:01ce qui les a intéressés
34:03chaque semaine,
34:04de dire alors
34:04quel est ton TikToker préféré,
34:06ton YouTuber préféré
34:07pour engager le dialogue.
34:08S'impliquer plutôt
34:09que de diaboliser.
34:10Le dialogue,
34:11c'est interdire,
34:12on ne fera plus sans
34:14le numérique.
34:14Moi,
34:15je rejoins complètement
34:16cette idée
34:16parce que c'est vrai
34:17que dans les collègues
34:19et même dans certaines associations
34:20qui ont eu tendance
34:21à tellement diaboliser
34:22que ça pouvait créer
34:24du clivage
34:25au sein même de la famille.
34:26Donc je crois
34:26que c'est important
34:27de remettre du dialogue.
34:28Moi,
34:28je vais même plus loin,
34:29je dirais partager.
34:30C'est-à-dire qu'il y a
34:31des temps de partage
34:32où on tient,
34:32t'as vu telle vidéo,
34:33on en parle.
34:34Et à ce moment-là,
34:35on remet à la place
34:36finalement le média
34:38en lui-même
34:38en disant,
34:39voilà,
34:39c'est une occasion
34:40de le partager en famille
34:41plutôt que d'être
34:42dans une sorte
34:43d'inquiétude
34:44où personne ne communique.
34:45Et on peut découvrir
34:45des choses formidables.
34:47Bien sûr.
34:48Moi, ma fille m'a fait découvrir
34:49des YouTubers extraordinaires.
34:50Bien sûr.
34:51Très intéressant.
34:52Le dialogue,
34:53voilà le message.
34:53Merci.
34:54Merci beaucoup à tous les quatre
34:57de nous avoir suivis.
34:58Comme chaque semaine,
34:59émissions et documentaires
35:00à retrouver sur notre plateforme
35:01publicsénat.fr.
35:02À très bientôt.
35:03Merci.
35:03Merci.