Au moment où l’Eglise et les fidèles catholiques pleurent la disparition du pape François, retour sur la vie et le pontificat de Jorge Mario Bergoglio, fils d’immigrés italiens devenu le premier pape latino-américain de l’Histoire.
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00:00Le pape François restera dans l'histoire comme le premier souverain pontife non européen à avoir dirigé l'église catholique.
00:30C'était une surprise ce pape du Nouveau Monde.
00:39Dans quelques jours, le Saint-Père se fera inhumer à Rome, dans un lieu cher à son cœur et à sa foi.
00:46On arrive là, devant la basilique Sainte-Marie-Major.
00:50Le pape François veut être enterré non pas au Vatican, mais à Sainte-Marie-Major.
00:54Là où tous les papes ont tendance à être enterrés ensemble dans la basilique Sainte-Pierre, là c'est un choix d'une dévotion à la Vierge de Marie.
01:01Jusqu'à la fin de son pontificat, ce pape argentin aura voulu tracer son propre chemin, fidèle à ses principes.
01:07Il aime la vie normale, c'est un pape normal.
01:11Et à ses racines.
01:12On ne peut pas comprendre le pape François sans faire référence à toute son histoire, qui est d'abord une histoire argentine.
01:21Le pape François est un migrant.
01:25Fils d'immigrés italiens installés en Argentine, la cause migratoire a été l'un des plus grands combats de Jorge Mario Bergoglio.
01:32Lui, il a ça dans ses tripes.
01:36Lui, le pape François, il comprend la cruauté de cette crise.
01:42Et pour lui, le drame de la réponse européenne, c'est qu'elle n'est pas assez généreuse, solidaire.
01:49Alors, quelles conséquences ce message d'un accueil inconditionnel des migrants du monde entier a-t-il eu en Europe ?
01:54Un des fossés entre l'Occident et le pape François, c'est la question migratoire.
02:00D'où avec les plus faibles, mais dur avec les puissants.
02:03Sur le plan de la politique intérieure, le pape François, qui avait été élu, entre autres, pour réformer la curie romaine,
02:09lui a mené la vie très dure durant tout son règne.
02:11C'est un homme qui sait où il veut aller, au point parfois d'être très autoritaire, trop autoritaire.
02:18Il a des réactions qui sont assez violentes.
02:20On n'avait jamais parlé à la curie de cette façon.
02:30Et ça, je pense que c'est une force du pontificat, mais aussi une faiblesse du pontificat.
02:35Alors, comment va-t-il laisser l'Église catholique ?
02:37Je pense qu'aujourd'hui, le pape François s'apprête à laisser l'Église profondément divisée.
02:44Par ses prises de position sur de nombreux sujets, ce pape aura creusé plus qu'aucun autre dernièrement
02:49un fossé avec la curie.
02:52Ces ambiguïtés ont créé des affrontements au sein de l'Église, comme on n'en avait pas vu, depuis les années 60.
03:00Alors que les cardinaux s'apprêtent à entrer en conclave pour élire un nouveau pape.
03:04Le prochain pape sera élu pour être davantage proche de cette curie que ne l'a été le pape François.
03:11Quel bilan pouvons-nous tirer du pontificat du pape François ?
03:14Quel rapport a-t-il entretenu avec la France ?
03:17Ce pape qui disait « Je viens à Marseille, je ne viens pas en France ».
03:20On se sentait un petit peu méprisés.
03:21A-t-il été le souverain pontife progressiste que beaucoup ont voulu dépeindre ?
03:25Et quel genre d'homme était-il dans l'intimité ?
03:27J'ai vu un homme très ouvert à l'écoute.
03:29Il a un jugement très sûr, je trouve.
03:31Et une tendresse pour l'humanité qui touche au cœur.
03:34Au début de l'année 2013, frappée par des scandales d'abus sexuels et de corruption,
03:58l'Église catholique est plongée dans la tourmente.
04:02Et pour ne rien arranger, les Vatilix, l'affaire des fuites de documents confidentiels au Vatican,
04:07jettent l'opprobre sur la curie romaine, l'organe central du gouvernement du Saint-Siège,
04:12en révélant qu'elle n'a jamais été aussi divisée.
04:15Fatigué par tous ces scandales, le pape Benoît XVI, alors âgé de 85 ans,
04:20décide de renoncer à sa charge pontificale.
04:22Ce geste historique, une première depuis 600 ans,
04:26démontre selon certains l'étendue des défis auxquels l'Église doit faire face.
04:31Et c'est dans ce contexte tendu que le 12 mars 2013,
04:34le Collège des Cardinaux entre en conclave pour élire le nouveau pape dans la chapelle Sixtine.
04:39Là, nous nous trouvons sur la place Saint-Pierre.
04:52Vous voyez le petit toit triangulaire là-haut ?
04:55C'est la chapelle Sixtine.
04:56La chapelle Sixtine, c'est là où se tient le conclave.
05:03Et c'est depuis la cheminée de ce petit toit triangulaire
05:06que s'échappe la fumée que le monde entier attend.
05:09Noire si le vote n'est pas concluant,
05:11ou blanche si un nouveau souverain pontife a été élu.
05:14Le lendemain, après seulement quelques tours de scrutin,
05:17la fumée blanche est apparue.
05:21Et on a dû attendre une bonne heure
05:24avant que de la loggia centrale
05:27apparaisse le cardinal Protodiacre
05:30qui est venu pour annoncer le verdict.
05:34A bemus papa !
05:36Le nouveau pape est un cardinal argentin,
05:42inconnu du grand public,
05:43nommé Jorge Mario Bergoglio,
05:45qui, dès sa prise de fonction, va casser les codes.
05:48Quand il est venu saluer le peuple chrétien
05:59qui était là, sur la place Saint-Pierre,
06:01sous les ovations,
06:03quand il arrive, tout le monde se dit,
06:04tiens, il y a un truc bizarre.
06:06C'est qu'il est tout recroquevillé,
06:09tout modeste.
06:09Il va prendre une soutane
06:19qui n'est pas blanche immaculée,
06:21elle est un peu crème,
06:21et ça change tout,
06:22parce que ça donne moins de prestige à la tenue.
06:26Elle va être aussi dépouillée de tous les appareils.
06:28Il n'a même pas l'étole au départ,
06:29on va lui mettre ensuite,
06:31et il va venir comme un pasteur.
06:35L'élection de ce pape marque un tournant historique
06:51dans l'histoire de l'Église.
06:53C'est la première fois qu'un souverain pontife
06:54n'est pas européen.
06:55Elle avait eu avant un pape allemand
06:58et un pape polonais,
06:59donc on était sortis aussi
07:01de l'élection de pape italien,
07:04qui était quand même la coutume depuis très longtemps.
07:07Peut-être d'ailleurs qu'on va y revenir,
07:08on verra.
07:09Mais oui, c'était une surprise,
07:10ce pape du Nouveau Monde.
07:13C'est une première
07:14qu'un pape venu du Sud soit élu.
07:19Pourquoi c'est tellement important ?
07:21Parce qu'au fil des ans,
07:24les grands pays catholiques,
07:26ce n'est plus la France,
07:27l'Angleterre, l'Espagne et l'Italie.
07:29Les grands pays catholiques aujourd'hui,
07:31c'est le Sénégal, le Congo,
07:32le Brésil, les Philippines,
07:35ce sont ces pays-là.
07:3780% des catholiques aujourd'hui
07:39habitent dans l'hémisphère sud.
07:41C'était aussi le premier pape jésuite de l'histoire.
07:44Ça, c'est intéressant,
07:45parce que traditionnellement,
07:48les jésuites refusent les honneurs.
07:50Pape argentin, pape du Sud,
07:53pape jésuite,
07:54ce pape-là était décidément
07:56un homme peu banal.
07:57Peu banal, comme le choix de son nom,
08:02il sera le premier pape dans l'histoire
08:03à s'appeler François.
08:05Une décision loin d'être anodine.
08:09Pourquoi il s'est appelé le pape François ?
08:11Aucun pape ne s'était appelé François.
08:13Parce que pendant le conclave,
08:14il avait bavardé avec son collègue brésilien
08:16qui lui avait dit
08:18« N'oublie pas les pauvres ».
08:20Il m'a dit
08:21« Non te dimentiques des pauvres ».
08:25Et voilà la parole à l'entrée.
08:28« Les pauvres, les pauvres ».
08:30Et qui symbolise le plus
08:33les pauvres dans l'histoire ?
08:35Saint François.
08:36Saint François d'Assise.
08:38Qui était un jeune homme riche
08:40qui a décidé de se séparer
08:42de toutes les richesses qu'il avait
08:43pour fonder un ordre religieux
08:45et pour se mettre au service
08:47des plus pauvres.
08:52Sa priorité, ce sera les pauvres.
08:56Et en effet, il l'a bien montré
08:57pendant ses 12 ans de pontificat
08:59que sa priorité, c'était effectivement
09:01les pauvres.
09:06Et après, il a fait quelque chose
09:07d'assez étonnant.
09:08Il va demander à la foule
09:09de prier pour lui.
09:10Alors qu'en général,
09:11c'est plutôt l'inverse.
09:12Je prie pour vous.
09:13Non, là il dit
09:14« Priez pour moi ».
09:15Facciamo in silencio
09:17questa preghiera de voi su di me.
09:25Je voyais là quelque chose
09:26d'assez fort quand même.
09:28Le pape, qu'on voit
09:29comme un chef, en fait,
09:31pour qui on pourrait presque dire
09:32« On n'a pas besoin de prier,
09:33c'est le pape ».
09:34Mais en fait, si,
09:35on a d'autant plus besoin de prier
09:37parce que c'est le pape.
09:38C'est un humain normal,
09:40mais il a une immense responsabilité.
09:42Et j'ai trouvé ça très beau,
09:43un vrai signe d'humilité.
09:48Mais alors,
09:49qui est le pape François ?
09:50À quoi va ressembler son pontificat ?
09:52En quoi est-il différent
09:53de ses prédécesseurs ?
09:54Jean-Paul II était un philosophe.
09:59Benoît XVI était un théologien.
10:01Lui, il n'est pas philosophe,
10:03il n'est pas théologien,
10:05c'est un homme d'action.
10:06Et c'est pour cette raison
10:08que je pense aussi
10:09que c'est un homme politique.
10:10Et quand vous êtes un homme politique,
10:12vous descendez dans la règle politique
10:14et évidemment,
10:14vous prenez des cours.
10:16Un homme politique,
10:17bien connu du monde
10:18des cardinaux à Rome.
10:20Une élection peu surprenante
10:21pour celui qui avait déjà reçu des voix
10:23lors du précédent conclave en 2005.
10:26Et quand Benoît XVI a renoncé,
10:29ce n'était pas absurde
10:31que ce fameux Bergoglio
10:32soit élu cette fois
10:34normalement.
10:37Notamment,
10:38les cardinaux américains
10:39l'avaient repéré,
10:40s'étaient dit
10:41ça serait quand même pas mal
10:42que celui-là
10:43il reprenne un peu l'église en main
10:45et puis surtout
10:46qu'il fasse des réformes,
10:48la curie, etc.
10:49Il avait un vrai cahier des charges
10:51à l'époque, Bergoglio.
10:57Il y a ce qu'on appelle
10:58des faiseurs de pape.
11:00Ces faiseurs de pape
11:01agissent avant le conclave,
11:03lors de congrégations,
11:05ce sont des réunions officielles,
11:07mais il y a aussi
11:07des réunions officieuses.
11:09Et l'aile gauche
11:10de l'église,
11:12représentée par plusieurs cardinaux,
11:15a voulu pousser la candidature
11:18du cardinal Bergoglio
11:20pour prendre un peu
11:22le contre-pied
11:23des deux derniers pontificats
11:25qui ont été les pontificats
11:25de Jean-Paul II et Benoît XVI.
11:27C'est quelqu'un
11:28qui est tellement déconnecté
11:30de l'appareil,
11:31à ce moment-là en tout cas,
11:32de l'appareil romain,
11:33c'est-à-dire qu'il n'aime pas Rome.
11:34Au moment où il va être élu,
11:36il a prévu d'être retraité,
11:39de se retirer dans une maison
11:41de retraite jésuite.
11:42Il ne se voit pas du tout
11:43élu lors du conclave,
11:46mais il a quand même la volonté
11:47de porter quelques questions
11:48à la connaissance des autres cardinaux.
11:51Et ça lui a valu
11:52effectivement d'être remarqué.
11:54Il paraît que le discours
11:55qu'il a tenu
11:56lors des congrégations générales
11:58aura beaucoup marqué
11:59les participants,
12:01notamment pour cette question
12:02d'aller vers les périphéries.
12:06C'est vraiment en ce moment-là
12:06où le cardinal Bergoglio
12:08dit que l'Église
12:09ne doit pas être mondaine
12:10et qu'elle doit sortir d'elle-même,
12:12aller vers les périphéries,
12:14aller vers les pauvres.
12:16Certains lui disent
12:17« Mais tu as tout à fait raison,
12:19il faut faire ça, ça, ça, ça, ça. »
12:20Et le pape François dit
12:21« Oui, mais alors qui
12:23pour appliquer tout ça ? »
12:24Et les deux, trois cardinaux
12:26lui répondent « Mais toi ! »
12:27Il dit « Non,
12:27n'y pensez même pas
12:28bonsoir chez toi,
12:30comme il dit,
12:31je ne serai pas pape. »
12:36Et pourtant,
12:36le pape François n'a pas tardé
12:38à rentrer dans son costume
12:39de Saint-Père
12:40qu'il a directement taillé
12:41à son image,
12:42celle d'un homme
12:43qui se veut résolument modeste.
12:47Alors là,
12:47on est devant le palais apostolique
12:49que vous voyez ici.
12:50Depuis 1870,
12:52ça a été la résidence des papes.
12:53Le palais apostolique,
12:54le dernier étage
12:56était l'appartement papal
12:57qu'ont occupé tous les papes
12:58jusqu'à Benoît XVI.
12:59Mais en 2013,
13:01le pape François,
13:02il va choquer tout le monde
13:04en décidant de ne pas
13:05s'installer là
13:05et de s'installer plutôt
13:07dans la résidence Sainte-Marthe
13:08qui était l'hôtel de passage.
13:10Sainte-Marthe,
13:10c'est l'hôtellerie
13:11qui est à l'intérieur
13:12du palais apostolique.
13:14Mais c'est une hôtellerie,
13:15c'est-à-dire qu'il y a
13:15du monde qui passe.
13:17Et il avait dit
13:17« Moi, j'ai besoin
13:18de voir des gens.
13:19Je ne peux pas prendre
13:20mon petit déjeuner
13:21tout seul dans mon coin
13:22et puis prier tout seul
13:24dans ma chambre.
13:24Ce n'est pas mon truc. »
13:25Donc on s'était dit
13:26« Tiens, c'est assez gonflé
13:28mais au fond,
13:29c'est assez cohérent. »
13:32Rien n'empêche
13:32que son successeur
13:33se retourne s'installer là.
13:35Il n'a pas fixé
13:35la tradition.
13:37Il va aussi,
13:38lorsqu'il va être élu,
13:39refuser de monter
13:39dans la berline.
13:40Il va prendre le minibus
13:41avec tous les cardinaux.
13:43Le pape,
13:43lorsqu'il est au Vatican,
13:45mange au réfectoire
13:46tous les midis
13:47au milieu des employés
13:48du Vatican.
13:49Il porte son plateau
13:50et il se met à la table
13:52des ouvriers
13:53de la fabrique
13:53de Saint-Pierre
13:54qui sont les petites mains
13:55du Vatican.
13:56On n'a jamais vu ça
13:57au Vatican.
13:57C'est quelqu'un
13:58qui va oublier
13:59un instant qu'il est pape.
14:03Il aime la vie normale.
14:05C'est un pape normal.
14:07Il a fait la même chose
14:07quand il a été nommé
14:09archevêque de Bénozer.
14:11Il n'a pas voulu
14:12qu'une cuisinière
14:13lui fasse à manger,
14:15qu'il fasse son lit.
14:16Il a continué
14:17à lui-même recevoir
14:18ses amis,
14:19ses visiteurs.
14:20Sur la forme,
14:22le pape François
14:22n'a donc pas tardé
14:23à imposer son propre style.
14:25Sur le fond,
14:26son pontificat
14:27va également marquer
14:28une rupture
14:28avec ceux
14:29de ses prédécesseurs,
14:30surtout sur le plan géopolitique,
14:32un domaine pour lequel
14:33l'ex-cardinal de Bénozer
14:34va montrer
14:35beaucoup d'appétence.
14:36Officiellement,
14:37c'est la secrétarie
14:38d'État du Vatican
14:39qui est chargée
14:40de la diplomatie.
14:41Mais le pape
14:42a la liberté,
14:43bien sûr,
14:44de témoigner
14:46de sa vision du monde
14:48qu'il a d'emblée affirmé
14:50avec beaucoup de force.
14:54Ce qu'il va affirmer
14:55directement avec force,
14:56c'est sa défiance
14:57envers l'Europe,
14:58le vieux continent,
14:59avec qui le nouveau
15:00Saint-Père argentin
15:01va entretenir
15:01des relations compliquées.
15:04Il y a effectivement
15:05un fossé
15:06entre l'Occident
15:08et lui,
15:08c'est évident.
15:09Et l'Occident,
15:10c'est à la fois
15:10l'Europe
15:11et l'Amérique du Nord.
15:13Pourquoi cela ?
15:14Parce qu'il est le symbole
15:15d'un catholicisme
15:17qui se recentre
15:19sur l'hémisphère sud.
15:20Parce qu'il pense
15:21que l'avenir de l'Église
15:22n'est plus en Occident
15:23et se situe
15:26dans ces espaces
15:27du Sud.
15:28Ce sont des pays
15:29où le catholicisme
15:31se développe
15:32quand l'Occident
15:33se déchristianise
15:35de plus en plus.
15:36Il a toujours considéré
15:41que l'Europe
15:42c'était égoïste
15:44et riche.
15:45Ce n'est pas son truc.
15:46Lui,
15:47le pape du Sud,
15:48il est très attentif
15:50aux étrangers,
15:51aux migrants.
15:52Il ne parle que des migrants,
15:53que de cette crise.
15:54Et pour lui,
15:55la réponse européenne,
15:56c'est qu'elle n'est pas
15:57assez généreuse,
15:58solidaire.
15:59Ça explique
16:00que le rapport
16:00soit très différent.
16:03La cause migratoire
16:04sera le combat
16:05du pontificat
16:06du pape François
16:07qui a d'ailleurs choisi
16:08de se rendre
16:08sur l'île italienne
16:09de Lampedusa
16:10pour son premier
16:10voyage officiel.
16:14Une petite île
16:15au sud de l'Italie
16:16qui est complètement
16:17dépassée
16:18par le nombre
16:19de migrants
16:20qui débarquent
16:20et aussi dépassée
16:22par le nombre
16:22de morts,
16:23de migrants
16:23morts en mer
16:24au large
16:24des côtes de l'île.
16:32Il va jeter
16:33des fleurs
16:33dans la mer,
16:34il va prier
16:34longuement.
16:36Il y a une espèce
16:44de prophétie
16:45du pape François
16:45qui comprend
16:47avant même
16:49l'été 2015
16:50où cette crise
16:51fait vraiment
16:51la une
16:52de tous les médias.
16:53Lui,
16:53le pape François,
16:54il comprend
16:55la cruauté
16:57de cette crise.
16:58qui est responsable
17:00du sang
17:02de ses frères
17:03et sœurs ?
17:05Personne.
17:07Nous répondons
17:08tous ainsi.
17:09Ce n'est pas moi.
17:11C'est sans doute
17:12quelqu'un d'autre.
17:16Nous avons perdu
17:17le sens
17:17de la responsabilité
17:18fraternelle.
17:19Et pour lui,
17:21cette cause
17:21de la migration,
17:23c'est encore une fois,
17:24il l'a martelé
17:25comme un leitmotiv
17:26la tragédie
17:28de la migration.
17:29Cette mer
17:30méditerranée
17:31qui a été
17:31la marée nostre,
17:32notre mer,
17:34devienne
17:35un grand cimetière.
17:36Son obsession
17:37pour les migrants
17:38l'a même poussée
17:39à installer à Rome
17:40sur la place Saint-Pierre,
17:41cette statue
17:42en bronze
17:42monumentale
17:43dans le but
17:44d'éveiller les consciences.
17:45Nous sommes devant
17:46la statue
17:46Angel of Nowheres.
17:48C'est une statue
17:49importante
17:49dans le pontificat
17:50de François.
17:50C'est un peu sa marque
17:51sur la place Saint-Pierre.
17:52Vous voyez,
17:53elle représente
17:53une barque
17:54sur laquelle
17:55on trouve
17:56tout un tas
17:57de migrants
17:57qui ont été
17:58entassés là
17:58par l'artiste
17:59Timothy Schmalz,
18:00un Canadien.
18:01Le pape l'a voulu
18:02ici,
18:03il a inauguré
18:04en 2019
18:04et c'est assez
18:05significatif.
18:06L'idée,
18:07c'est de faire
18:07prendre conscience
18:07aux gens
18:08du sort
18:09des migrants
18:09et de la nature
18:10migrante
18:11d'une certaine façon
18:11de l'humanité.
18:12La barque,
18:13c'est aussi
18:13la barque de l'église.
18:14C'est l'humanité
18:14embarquée ensemble.
18:18Le choix fort
18:18du pape,
18:20c'est de mettre
18:20cette statue
18:21qui vient un peu
18:22perturber
18:23les belles lignes
18:24de la place Saint-Pierre,
18:26de la mettre
18:27là en plein milieu
18:27pour que tout le monde
18:28puisse la voir.
18:29Si cette cause
18:29lui tient tant à cœur,
18:31c'est qu'elle fait écho
18:31à sa propre histoire.
18:33Lui,
18:33l'Argentin,
18:34fils d'immigré italien.
18:35Le pape,
18:36évidemment,
18:36pour lui,
18:36c'est quelque chose
18:37de personnel.
18:38Lui-même n'est pas migrant,
18:40mais il est fils
18:40et petit-fils de migrants.
18:42C'est un homme
18:42qui a grandi
18:44en Argentine
18:45dans un quartier
18:46de migrants,
18:47donc au milieu
18:48d'Italiens,
18:49de Français aussi,
18:50d'Espagnols,
18:51parfois de Syriens aussi,
18:53de Libanais,
18:53de Juifs.
18:54Voilà.
18:55Ses parents
18:55étaient des migrants,
18:56ont quitté le Piémont
18:57au début du XXe siècle,
18:59ont risqué leur vie
19:00sur des paquebots
19:01de fortune,
19:02on peut le dire.
19:04Nombreux,
19:04il en fait référence
19:05dans son autobiographie,
19:06sont morts lors de cette traversée,
19:07lors de naufrages
19:08absolument tragiques.
19:10Lui,
19:10il a ça en tête,
19:12il a ça dans ses tripes.
19:15Mais cette question migratoire
19:17va devenir un réel sujet
19:18de tension
19:19entre l'Occident
19:19et le pape François,
19:21dont la vision sud-américaine
19:22de la crise
19:22va même finir
19:23par créer un fossé
19:24avec le vieux continent.
19:25L'Occident est marqué
19:28par la question des attentats,
19:31par cet afflux migratoire
19:34qui devient une question
19:35de société,
19:35qui devient une question politique
19:37et ça montre
19:39que les gouvernements
19:40ne peuvent plus souscrire
19:41au message du pape François
19:43d'un accueil inconditionnel
19:46des flux migratoires.
19:48Ces frères et sœurs
19:56rencontrent trop souvent
19:58en chemin
19:58la mort.
20:02Je pense que le problème
20:03du pape François,
20:05c'est d'une part
20:06de l'avoir lu
20:08avec des lunettes
20:10un peu sud-américaines,
20:12de ce qu'il a pu connaître
20:13du multiculturalisme
20:15en Argentine
20:16et qu'il transpose dans
20:18le contexte européen
20:19qui n'a pas grand-chose
20:20pourtant à voir
20:21avec la situation argentine
20:22et puis d'en avoir eu
20:23une approche
20:24qui, sous couvert
20:26de charité,
20:28était en fait
20:28une approche très politique.
20:30C'est-à-dire qu'il a voulu
20:32rappeler de manière constante
20:34une vérité
20:36qu'on ne peut pas nier,
20:37c'est que les migrants
20:39sont avant tout
20:40des personnes
20:41et qu'il faut les regarder
20:42évidemment comme des personnes
20:44avant de les regarder
20:45comme des agrégats statistiques.
20:47Mais au nom de cette obsession
20:50de l'individualité des migrants,
20:52il a voulu complètement ignorer
20:54les conséquences collectives
20:56de ces migrations de masse,
20:58que ce soit en termes économiques,
21:01que ce soit en termes sociaux,
21:02que ce soit en termes sécuritaires.
21:03sur le plan politique,
21:09je pense qu'il y a
21:11un échec à court terme.
21:14C'est-à-dire qu'encore une fois,
21:16si des personnages
21:18comme Mélanie,
21:20comme Trump,
21:21comme Orban sont élus,
21:24quand vous voyez
21:25que le gouvernement allemand,
21:27le gouvernement français
21:28veut prendre des mesures
21:31contre une immigration
21:34incontrôlée,
21:36en quelque sorte,
21:37cela donne tort
21:38à tout le message
21:40pontifical sur la question.
21:41L'appétit du pape François
21:47pour la diplomatie
21:48et la politique
21:48ont réellement marqué
21:50le début de son pontificat.
21:52En 2014,
21:52en se montrant très habile,
21:54il va réussir
21:55à réconcilier deux pays
21:56qui paraissaient pourtant
21:57brouillés à tout jamais,
21:58les Etats-Unis
21:59et Cuba.
22:01C'est une arrivée triomphale
22:02pour le pape à la Havane.
22:04Le président cubain,
22:05Raoul Castro,
22:06est le premier
22:06à l'accueillir
22:07à sa descente de l'avion.
22:09Avant de rencontrer
22:10Barack Obama
22:11le 27 mars 2014
22:15au Vatican,
22:16c'était sa première rencontre,
22:18il arrive à le convaincre
22:21lors de cette audience
22:22de la nécessité
22:24d'en finir
22:25avec cette rupture
22:27des relations
22:28entre les Etats-Unis
22:29et Cuba
22:31qui est là
22:31depuis 50 ans.
22:32Et donc,
22:33il dit à Barack Obama
22:34« Je vais vous aider ».
22:35Le monde a besoin
22:40de réconciliation
22:41dans cette atmosphère
22:46de Troisième Guerre mondiale
22:47qui souffle par moments.
22:48C'était avant un sommet,
22:50le huitième sommet
22:51des Amériques
22:52qui prévut pour se tenir
22:53dans un pays
22:54d'Amérique latine.
22:56Et Barack Obama,
22:57dont c'est le dernier,
22:59le second mandat
23:00qui ne peut pas se représenter,
23:00est convaincu
23:02et se laisse entraîner
23:04par le pape François
23:04dans cette réconciliation.
23:07Mais sur le plan géopolitique,
23:27le souverain pontife
23:28n'a pas connu
23:28que des succès.
23:30En 2022,
23:30lorsque la guerre
23:31en Ukraine éclate,
23:32le chef de l'Église catholique,
23:34casquette de médiateur international
23:36vissée sur la tête,
23:37va prendre des positions
23:38qui vont faire grincer
23:39des dents l'Occident.
23:41Voyons comme il nous a déçus,
23:44nous les Européens,
23:45sur l'affaire ukrainienne.
23:47Et comme il a déçu
23:48les Ukrainiens.
23:49Et comme il a déçu
23:50les Ukrainiens catholiques.
23:52Il y a quand même
23:525 à 6 millions de catholiques
23:54en Ukraine,
23:54dans tout l'ouest du pays.
23:56Il ne faut pas leur parler
23:57du pape François.
23:57parce que ce pape du Sud,
24:01qui avait un regard
24:03pas du tout européen,
24:05très différent du nôtre,
24:07sur ce conflit,
24:08a beaucoup déçu
24:09les catholiques européens
24:11sur ce plan-là.
24:12Les observateurs
24:13dans cette partie du monde,
24:14en Occident,
24:15m'ont jugé problématiques
24:19puisqu'il a mis beaucoup de temps
24:20à dénoncer
24:21l'agresseur russe
24:22et que donc
24:24ces prises de position
24:25qui parlaient à un moment
24:28des aboiements de l'OTAN
24:30ont parfois épousé
24:32aussi la propagande russe.
24:35Pour le coup,
24:37le politique pape François
24:39s'est un peu pris les pieds
24:41dans sa soutane.
24:48En revanche,
24:49dès le début de son pontificat,
24:50grâce à une communication
24:51simple et directe,
24:53le Saint-Père va tout de suite
24:54remporter l'adhésion
24:55des fidèles catholiques.
24:56Une nouvelle rupture de style
24:58avec les papes précédents.
24:59Je crois qu'il a un sens
25:00du contact, effectivement,
25:02qu'il tient,
25:03de ce qu'il raconte
25:05dans son autobiographie,
25:06encore une fois,
25:07de ce quartier de Buenos Aires
25:09où il était,
25:09où le contact était facile.
25:11Il a cette familiarité
25:13d'expression aussi.
25:14Il est assez libre,
25:15spontané,
25:16parce qu'il parle
25:17à tout type de public.
25:18Il parle simplement,
25:19il ne parle pas
25:19comme un docteur.
25:21Et donc,
25:21c'est vrai que pour les gens simples,
25:23c'est tout à fait accessible.
25:25C'est aussi un pape,
25:26et il ne faut pas non plus
25:27s'y tromper,
25:28qui a le sens des médias,
25:30de la parole publique.
25:32C'est un malin,
25:32le pape François,
25:33c'est un malin.
25:33Il communique en effet,
25:35mais il communique à sa manière.
25:36C'est là aussi
25:37où c'est un pape du Sud.
25:39Ce pape du Sud,
25:40il rompt avec une tradition.
25:42La tradition des papes,
25:43c'est l'écrit.
25:45Un pape,
25:45quand il dit
25:46la moindre phrase,
25:48il faut préparer
25:49les neuf traductions,
25:51il faut préparer
25:52la publication,
25:53la diffusion,
25:54etc.
25:55Lui,
25:56le pape du Sud,
25:57c'est un pape de l'oral.
25:58C'est-à-dire qu'il a
26:00beaucoup plus utilisé l'oral
26:02au retour d'un voyage en avion
26:04ou même
26:05au débeauté.
26:07Jamais un pape
26:07n'a accordé
26:08au taux d'interview
26:09au débeauté
26:10que ce pape.
26:14Le souverain pontife
26:15a perpétué
26:16une tradition
26:16mise en place
26:17par le pape Jean-Paul II,
26:18les conférences de presse
26:19dans l'avion
26:20au retour d'un voyage.
26:22Un moment fort
26:22pour les journalistes
26:23comme nous l'explique
26:24Romilda Ferrotto,
26:26conseillère spéciale
26:27de la salle de presse
26:27du Saint-Siège.
26:29Alors,
26:30tous les voyages
26:30des papes
26:31ont accueilli
26:32des journalistes
26:33à bord des avions.
26:35Un peu comme cela se passe
26:36pour les chefs d'État.
26:37Les chefs d'État,
26:38quand ils se déplacent,
26:39ils ont des journalistes
26:40à bord de l'avion.
26:42La différence,
26:43c'est que nous sommes
26:44très inclusifs.
26:45Généralement,
26:46il y a environ 70 journalistes
26:48qui voyagent
26:50à bord de l'avion du pape.
26:52Ce qui fait qu'on a quand même
26:53beaucoup de journalistes
26:55de langues
26:56et nationalités différentes.
26:58C'est un moment
26:58très attendu
26:59par les journalistes.
27:01Les journalistes,
27:03au moins les premières
27:05conférences de presse,
27:06ont demandé
27:06ce qu'ils voulaient,
27:07ce qu'ils voulaient.
27:08Et le pape a été
27:09formidable,
27:10magnifique.
27:11Surtout les premières
27:12conférences de presse.
27:13Après,
27:14il a commencé
27:14à se répéter.
27:16Il a multiplié
27:17les interviews
27:19avec des journaux.
27:20Alors,
27:21il a un peu
27:21inflationné
27:23la communication.
27:24Il a un peu banalisé.
27:25Il a signé
27:26une quantité énorme
27:27de préfaces,
27:29des livres,
27:30des contes.
27:31Mais,
27:33c'est trop.
27:34Du coup,
27:35il a dit des bêtises.
27:36Parce que l'oral,
27:37c'est un peu ça le problème.
27:38quand vous rentrez
27:39d'un voyage
27:40de cinq
27:40ou six jours
27:41épuisant
27:42et que dans le fond
27:43de l'avion,
27:44il y a un journaliste
27:45qui vous lance
27:45une question,
27:47vous n'avez pas réfléchi,
27:48vous pouvez aussi
27:49dire une bêtise.
27:50C'est arrivé.
27:50Quelques semaines
27:53après son élection,
27:54en rentrant
27:54d'un voyage
27:55à Rio de Janeiro
27:56au Brésil,
27:57une conférence
27:57de presse informelle
27:58s'organise
27:59dans l'avion.
28:00L'occasion
28:00pour les journalistes
28:01de parler
28:01de manière
28:02très spontanée
28:02avec le pape
28:03qui va alors
28:04lâcher une petite phrase
28:05qui va faire
28:06grand bruit.
28:06Ce ton conciliant
28:20à l'égard
28:20des homosexuels
28:21posera au moment
28:22de tirer le bilan
28:23de son pontificat
28:24la question
28:24du progressisme
28:25du pape François,
28:27une interrogation
28:27à laquelle la réponse
28:28sera loin d'être évidente.
28:30Mais pour le moment,
28:31cette ouverture d'esprit
28:32marque une véritable rupture
28:33qui va séduire la jeunesse.
28:34Il est populaire
28:42auprès des jeunes.
28:44On le voit
28:44à chaque fois
28:44qu'il parle,
28:45quand il a des prises
28:46de parole
28:46devant plein de gens,
28:47régulièrement
28:48il se détache
28:48de ses notes.
28:49Et puis il a toujours
28:50le sens de la formule
28:51avec l'AOJMJ
28:53à Lisbonne,
28:55il disait
28:56tout le monde
28:56a sa place
28:57dans l'église
28:57et tout le monde
28:58dans l'église
28:58doit jouer un rôle
28:59pour accueillir
29:00et être vraiment chrétien.
29:01Et il faisait répéter
29:02à tout le monde
29:03pour dire
29:06tout le monde
29:07à sa place.
29:11Je pense que ça a
29:16beaucoup marqué les gens
29:17et c'est un sujet
29:18qui revient régulièrement.
29:19Le pape sait parler
29:20aux jeunes.
29:22Ce n'est pas une église
29:24qui se regarde le nombril,
29:25c'est une église
29:26qui va vers les autres,
29:27qui est tournée
29:28vers les autres,
29:29qui est inclusive
29:31et non pas exclusive.
29:32Son humilité,
29:36son sens du contact
29:37et du dialogue
29:38ont rendu le pape François
29:39extrêmement populaire
29:40auprès des fidèles.
29:41Mais entre les murs
29:42du Vatican,
29:43l'image du souverain pontife
29:44n'est pas du tout la même,
29:46surtout auprès
29:46de la curie romaine
29:47à qui il a mené
29:48la vie dure
29:49tout au long
29:49de son pontificat.
29:50C'est assez curieux
29:51parce qu'il se présente
29:52comme le pape
29:53de la culture
29:53de la rencontre
29:54et du dialogue
29:55et en même temps,
29:57quand on émet des positions
29:59qui ne sont pas
30:00complètement alignées
30:01sur les siennes,
30:02il a des réactions
30:02qui sont assez rapidement
30:04assez violentes.
30:06Et ça, moi,
30:06j'ai été assez choqué.
30:07C'est un des aspects
30:07du pontificat
30:08que j'ai le moins apprécié.
30:11C'est un homme
30:12qui sait
30:12où il veut aller,
30:14au point parfois
30:15même d'être
30:16très autoritaire,
30:17trop autoritaire.
30:19Dans plusieurs affaires,
30:22il a montré
30:23une autorité
30:24sans négociation possible.
30:27Cet autoritarisme
30:28s'est incarné
30:30notamment dans le fossé
30:32qu'il a créé
30:33avec la curie,
30:34une curie
30:35qu'il n'a pas ménagée,
30:36une curie
30:37qu'il a critiquée
30:38dès le départ.
30:41Cette opposition
30:42avec la curie
30:43atteint son paroxysme
30:44le 22 septembre 2014
30:46lors d'un discours du pape
30:47dans lequel il critique
30:48sévèrement ses troupes
30:49en dressant une liste
30:50de 15 maladies
30:51dont souffrerait
30:52le haut clergé.
31:00Parmi ces maladies,
31:02l'Alzheimer spirituel,
31:03la vanité,
31:04la médisance,
31:05la mondanité,
31:06la rivalité
31:07ou encore l'indifférence.
31:09Un ton brutal
31:09qui va choquer la curie.
31:11On n'avait jamais parlé
31:12à la curie de cette façon.
31:13C'est la douche froide,
31:14évidemment,
31:15les gens se regardent
31:16consternés
31:16et ensuite,
31:18quand ils se croisent
31:18dans les rues
31:19via de la conciliation
31:20devant le Vatican,
31:21ils se disent
31:21« Alors,
31:22t'as combien de maladies,
31:23toi ? »
31:24Mais franchement,
31:26pour eux,
31:27le pape François,
31:28en interne,
31:29c'est très difficile.
31:31Ce management
31:32de la curie romaine,
31:34il a été très brutal,
31:35très hostile
31:36de la part du pape François,
31:37qui est un homme autoritaire,
31:39qui est un homme intraitable
31:40et quand il n'aime pas,
31:41on le sent.
31:42Ce n'est pas un hypocrite,
31:43le pape François.
31:47Quand vous êtes manager
31:49de n'importe quelle institution,
31:50si vous voulez réformer,
31:52le meilleur moyen de réformer,
31:54c'est de ne pas prendre la tête
31:55de ces managers
31:57et de leur mettre sous l'eau.
31:59Et c'est de manière très prosaïque
32:00ce qu'il a fait,
32:01notamment à travers ce discours
32:03des 15 maladies de la curie.
32:04Il a un côté,
32:06c'est son caractère,
32:07très donneur de leçons,
32:08qui n'a pas été forcément apprécié.
32:11Et il leur a retiré
32:12des avantages,
32:13des privilèges,
32:14des appartements grandioses,
32:16des soldes,
32:17des voyages,
32:17etc.
32:21Il a dépouillé
32:22le Vatican
32:24d'un certain nombre de fastes.
32:26Et ça va du fait
32:27qu'on voit beaucoup moins
32:29de Mercedes noire
32:30dans le parc des voitures
32:31du Vatican
32:32et beaucoup plus
32:33de Twingo,
32:34de Fiat 500,
32:36de voitures assez communes.
32:37Et on est sortis
32:38d'une vision du Vatican
32:39qui était,
32:40comment dire,
32:40une petite forteresse dorée.
32:42Voilà, ce n'est plus ça
32:42avec le pape François.
32:43Clairement,
32:44il a voulu casser ça.
32:48Le souverain pontife,
32:49qui comptait réformer la curie,
32:51ne l'a pas ménagé.
32:52Et le pouvoir,
32:53il l'a exercé seul.
32:54Un paradoxe pour le pape,
32:56dont l'une des principales
32:57orientations du pontificat
32:58était la décentralisation
33:00de son pouvoir religieux.
33:01Le problème,
33:02c'est que la curie
33:03est là pour aider le pape.
33:05C'est comme si vous disiez
33:06aujourd'hui en France
33:07qu'il y a un fossé
33:08entre le gouvernement
33:09et le président de la République.
33:11Alors vous allez me dire,
33:12il peut y avoir
33:12cet état de fait
33:15à travers une cohabitation.
33:17Mais c'est toujours mauvais,
33:18en fait.
33:19Pourquoi ?
33:20Parce qu'il est important
33:22que le gouvernement
33:23et la tête
33:23travaillent de concert.
33:25Et cette curie,
33:26aujourd'hui,
33:27non seulement,
33:28elle n'a pas travaillé
33:29de concert
33:30avec le pape François,
33:31mais elle a aussi travaillé
33:32pour faire en sorte
33:33de ralentir au maximum
33:35la réforme de la curie.
33:40Au-delà de son pouvoir spirituel
33:42de chef de l'Église catholique,
33:44ce pape
33:44entend donc aussi
33:45exercer son pouvoir temporel,
33:47ce qu'il a fait immédiatement
33:48après son élection
33:49sur un dossier très sensible
33:50pour le Vatican.
33:51« Ça, ça met tout le monde d'accord.
33:53La banque du Vatican
33:54était larvée
33:56par les comptes
33:57de blanchiment d'argent.
33:59Il y avait des dizaines
34:00de milliers de comptes
34:00en banque
34:01anonymes
34:03avec des prêtres-noms,
34:04etc.
34:04C'est une catastrophe. »
34:05Le pape François a été élu
34:07pour nettoyer
34:08les ucurides d'Ogias
34:09de la banque du Vatican,
34:12ce qu'il a très bien fait,
34:14au point même
34:15de provoquer une menace
34:16pour sa propre vie
34:17puisqu'il y a un procureur italien
34:19qui a dit que le pape
34:20était menacé
34:21par la mafia
34:23parce que,
34:24de manière très prosaïque,
34:25il y a des milliers de comptes
34:27qui ont été fermés
34:27à la banque du Vatican
34:28parce qu'il s'agissait
34:30de comptes douteux.
34:31Le Vatican a ensuite réussi
34:33à obtenir
34:34toutes les normes internationales
34:35en termes de finances.
34:38Ça a permis au Saint-Siège
34:39d'être en symbiose
34:40avec le reste du monde
34:41sur le plan financier.
34:42Je dirais que
34:43c'était quasiment
34:45un des travaux d'Hercule
34:46nettoyer les écuries d'Ogias.
34:48Il y avait beaucoup
34:48de travail à faire.
34:49Il a beaucoup travaillé.
34:50Est-ce qu'il a terminé le travail ?
34:52Peut-être pas.
34:52Mais en tout cas,
34:52il a beaucoup peuvré pour ça.
34:54Est-ce qu'il a résolu
34:55toutes les questions du Vatican ?
34:56Probablement pas.
34:57Mais je pense
34:58qu'on s'en souviendra
35:00comme un pape
35:01qui a secoué la curie.
35:02Je crois qu'il fallait
35:03depuis des décennies
35:04nettoyer ces écuries d'Ogias.
35:07Le pape Benoît XVI
35:08n'a pas eu la force physique
35:10et intellectuelle
35:11de le faire.
35:12Ce que le pape François
35:13lui a fait
35:14de manière très autoritaire
35:16et il a bien eu raison
35:17de le faire.
35:20Pour mieux le comprendre,
35:22il ne faut pas lire
35:23un pontificat
35:23dans son unicité
35:24mais plutôt dans une continuité
35:26ou une rupture
35:27avec ce qu'il s'est passé auparavant.
35:29Et à l'heure de tirer le bilan
35:30de ce pontificat hors normes,
35:32la délicate question
35:33du progressisme du pape François
35:34est sur toutes les lèvres.
35:36Alors, le Saint-Père
35:36a-t-il réellement fait bouger
35:37les lignes de l'Église catholique ?
35:39C'est un point qui est extrêmement complexe
35:43puisque le pape François
35:45est un pape
35:46qui est autant progressiste
35:49qu'il peut être conservateur.
35:50Et donc, voilà,
35:51pour s'y retrouver,
35:52il faut vraiment prendre les sujets
35:53au cas par cas.
35:55Le pape François
35:56a par exemple offert
35:57une plus grande place
35:58aux femmes dans l'Église.
35:59Il en nomme plusieurs
36:00à des postes clés.
36:01Le Vatican est un univers
36:09très, très masculin,
36:12très misogyne.
36:14Et le pape François
36:15a souhaité véritablement
36:16ouvrir les choses
36:18aux femmes,
36:19notamment en nommant
36:20à la tête d'un dicaster.
36:22Le dicaster, c'est l'équivalent
36:23de notre ministère,
36:24une femme.
36:24Au début de son pontificat,
36:26il a nommé
36:27directrice des musées
36:28du Vatican,
36:28Barbara Iatta.
36:30Et ça, c'était énorme aussi.
36:31La première femme
36:32directrice des musées
36:34du Vatican,
36:35il y a une Française
36:35qui s'appelle
36:36la mère Yvonne Réungoat,
36:38qui est une bretonne,
36:39qui a un rôle de premier plan
36:40à la congrégation des évêques.
36:42Elle choisit
36:42les évêques du monde entier.
36:44C'est la première fois
36:45qu'une femme remplit
36:45ce genre de tâches.
36:47En effet,
36:48le pape François aime
36:49le discernement féminin,
36:51estime très important
36:53et complémentaire
36:54d'avoir des femmes
36:55dans leur ganigrame.
36:56C'est une vraie avancée.
36:58Le chef de l'Église catholique
37:00a également essayé
37:01de faire preuve d'ouverture
37:02sur plusieurs autres
37:03sujets sociétaux,
37:04des domaines
37:05dans lesquels
37:05il va rencontrer
37:06beaucoup plus de résistance.
37:07Si on prend par exemple
37:08la question
37:09des divorcés remariés,
37:11ça, ça a été par le biais
37:12de ce qu'on appelle
37:12une exhortation apostolique
37:14qui s'appelle
37:15Amoris Laetitia,
37:16où dans une note
37:17de bas de page,
37:19il ouvre la possibilité
37:20à ce que les divorcés remariés
37:22puissent accéder
37:24à la communion.
37:25C'est une révolution
37:26dans l'Église.
37:26On ne peut donner la communion
37:27qu'aux gens
37:28qui sont dans le cadre
37:29du dogme.
37:30Donc ça,
37:31ça a été quelque chose
37:31qui a été très mal accueilli,
37:33en particulier par la frange
37:34un peu conservatrice
37:35du Saint-Siège.
37:36Je me souviens
37:37du cardinal Brandenmuller,
37:38du cardinal Burke,
37:39un Américain,
37:40qui se sont associés
37:41pour faire une lettre
37:42de dubia,
37:43c'est une lettre
37:43de doute en latin,
37:45qui normalement
37:46exige une réponse
37:48de clarification du pape.
37:50Et le pape François
37:51n'y a jamais répondu.
37:52Mais le sujet
37:54qui, sous le règne de François,
37:55a créé le plus de troubles
37:56au sein de l'Église catholique,
37:58c'est celui qui concerne
37:59la bénédiction
37:59des couples homosexuels.
38:01On a pu avoir
38:01l'impression au début
38:03que Rome autorisait
38:04la bénédiction
38:04des couples homosexuels
38:06et ensuite,
38:06il y a eu un rétropédalage
38:07pour dire que finalement,
38:08ce n'étaient pas les unions
38:09qui étaient bénies,
38:10c'étaient les personnes
38:11prises séparément.
38:13Bref,
38:14ça a été un peu compliqué
38:16et le pape lui-même
38:17a tenu des propos
38:18assez complexes.
38:19Ça, c'est une des crises
38:21du pontificat.
38:22Je pense que c'est
38:23une des plus grosses crises
38:24du pontificat.
38:25Cela a créé
38:26un vent d'opposition
38:28au sein de l'Église.
38:30Comme on n'en avait jamais vu
38:32depuis des décennies
38:33et peut-être même jamais
38:34dans l'histoire de l'Église,
38:35puisque vous avez
38:36des conférences épiscopales
38:39nationales entières
38:40qui ont condamné
38:41ce texte
38:42et vous avez un continent entier
38:44qui est l'Afrique
38:45qui l'a dénoncé également.
38:48Mais pas que, en fait.
38:49Par exemple,
38:49l'Église bretonne
38:50a dit
38:51« Mais nous,
38:52on ne peut pas accepter
38:53de bénir
38:54des unions homosexuelles. »
38:56Alors,
38:56Rome a essayé
38:57de rattraper le coup
38:58dans un exercice complexe
39:00de sémantique
39:01où personne n'a rien compris.
39:03Mais aujourd'hui,
39:05à l'heure où je vous parle,
39:07des couples homosexuels
39:08peuvent se faire bénir
39:09en Allemagne
39:10et pas en Bretagne
39:11ou en Afrique.
39:12En fait,
39:13vous ne pouvez pas
39:14dans une Église
39:16catholique,
39:16catholique,
39:17ça veut dire universelle,
39:18avoir des règles différentes
39:20d'un pays
39:21à un autre.
39:21Donc,
39:22on voit bien
39:24que sur ces questions-là,
39:25les positions
39:26du pape François
39:27ont été des positions
39:28très solitaires
39:29et assez mal acceptées
39:31dans le reste de l'Église.
39:35Ce pape,
39:36que beaucoup ont voulu voir
39:36comme un réformateur,
39:38a, sur beaucoup de sujets,
39:39été en réalité
39:40dans la continuité
39:41de ses prédécesseurs,
39:42surtout en ce qui concerne
39:43la doctrine de l'Église.
39:46On dit que ce pape
39:47a été progressiste.
39:50Moi,
39:50je veux bien.
39:52Mais le pape,
39:53il se tient
39:54à l'Évangile,
39:55une fois de plus.
39:56Alors,
39:57c'est vrai
39:57qu'il a été ouvert
39:59à un certain nombre
40:00de sujets,
40:02comme les divorcés-remariés,
40:03comme la place des femmes
40:04dans l'Église,
40:05mais sur un plan
40:06pastoral,
40:08pas sur un plan dogmatique.
40:10c'est-à-dire de montrer
40:12sa sollicitude
40:13pour les gens,
40:14pour les blessures,
40:15quelles qu'elles soient,
40:16mais sans forcément
40:17révolutionner
40:19la doctrine de l'Église.
40:21En tout cas,
40:21s'il l'a souhaitée,
40:22et ça, pour le coup,
40:23ça lui appartient,
40:24le constat qu'on peut faire,
40:26c'est qu'il n'y est pas parvenu.
40:27Ça veut dire que quand il voit
40:29arriver à la messe
40:31une femme qui a avorté,
40:34il ne la rejette pas.
40:36C'est fondamental.
40:37Mais on est dans le pastoral,
40:39encore une fois.
40:40Dès qu'on touche
40:40au canonique,
40:41dès qu'on touche au dogme,
40:43ça ne colle plus.
40:44Ce pape,
40:45il a refusé énergiquement
40:47l'avortement,
40:50l'euthanasie.
40:51Il est férocement
40:52contre l'euthanasie.
40:53Le pape est sans doute
40:55le pape qui a retenu
40:56les propos les plus radicaux
40:58à la fois sur l'avortement
41:00et sur l'euthanasie.
41:01Le pape François
41:02a toujours condamné
41:03l'avortement très fortement
41:04en qualifiant ceux
41:06qui l'exerçaient,
41:07en particulier certains médecins,
41:10en les qualifiant de sicarios,
41:11de teur à gage.
41:12C'est un mot très, très lourd.
41:14Et pour ce qui est de l'euthanasie,
41:16il a parlé de culture du rejet
41:18en fustigeant l'euthanasie
41:21qui frappait les personnes âgées.
41:24Autre sujet fondamental
41:25sur lequel le pape François
41:26s'est inscrit dans la droite ligne
41:27de son prédécesseur,
41:29les abus sexuels dans l'Église.
41:32Les deux derniers papes,
41:33tant Benoît XVI
41:34que le pape François,
41:35ont pris ce sujet à bras-le-corps
41:36avec une volonté de transparence
41:39dans la mesure où on peut le faire
41:41et de vérité
41:42qui est vraiment à mettre à leur actif.
41:45Même si le pape François
41:47est allé plus loin
41:48dans le changement du droit.
41:50Et pour répondre à la question
42:07des abus,
42:08le pape François a apporté
42:10de nouveaux textes
42:12qui vont dans le sens
42:13de la tolérance,
42:15zéro.
42:16Je me souviens à Washington
42:17l'affaire du cardinal McCarick,
42:21qui est un...
42:21Imaginez,
42:22le cardinal de Washington,
42:23donc c'est un homme très prestigieux
42:24à qui on avait reproché
42:27d'avoir commis des abus sexuels
42:29sur des séminaristes.
42:31Il emmenait des séminaristes
42:32en week-end
42:32et il les abusait.
42:34Et lorsque le pape a appris ça,
42:37il l'a réduit à l'État laïque.
42:38Il l'a excommunié littéralement,
42:40il l'a banni de l'Église.
42:41Ça a été un geste très, très dur.
42:43Et en tant que jeune chrétien,
42:44ça, ça fait du bien, en fait.
42:45On voit l'Église,
42:47notre mère,
42:48on va dire,
42:48en quelque sorte,
42:49qui prend vraiment
42:51soin de son peuple.
42:52On veut la vérité.
42:54Et dans un souci de vérité,
42:55on va creuser
42:56même là où ça fait mal.
42:57On ne fait pas de compromis
42:58avec la vérité, quoi.
42:59À toi, Seigneur, la glorie,
43:02à nous, la vergogne.
43:04C'est le moment de la vergogne.
43:06Par ailleurs,
43:08il a pu faire des erreurs
43:09dans l'appréciation notamment
43:11des scandales de pédophilie au Chili.
43:13Il s'en est excusé d'ailleurs
43:15parce qu'il a sous-estimé
43:17ce qui se passait au Chili.
43:18Il a tellement sous-estimé
43:20qu'il a demandé
43:20à l'ensemble des évêques
43:22de renoncer
43:23à leur charge épiscopale.
43:25Ce qui ne s'est jamais vu,
43:27je pense,
43:27dans l'histoire contemporaine
43:28de l'Église.
43:34Remontant au baptême de Clovis
43:35à la fin du Vème siècle,
43:37les liens entre la France
43:38et l'Église sont très anciens
43:39et leurs relations
43:40ont parfois été compliquées.
43:42Alors, comment ce pape du Sud
43:43s'est-il comporté
43:44vis-à-vis du pays
43:45que l'Église considère
43:46comme sa fille aînée ?
43:48Aujourd'hui,
43:49l'Église de France
43:50n'est plus dans cette position
43:51qui a été longtemps la sienne
43:53d'une Église puissante
43:54pendant très longtemps,
43:5660, 80% des Français
43:59qui étaient catholiques.
44:00Aujourd'hui,
44:01ce n'est plus ça.
44:02Du temps du pape François,
44:03tout ça,
44:04c'est du passé.
44:06Car en France,
44:07en 1905,
44:08entre en vigueur
44:09un texte d'une importance capitale,
44:11la loi de séparation
44:12de l'Église et de l'État,
44:13qui est considérée
44:14comme l'acte fondateur
44:15de la laïcité dans le pays
44:16et qui va avoir
44:17de lourdes conséquences
44:18pour l'Église française.
44:20Ça va être
44:20ce qui est aujourd'hui
44:22la clé des relations
44:23à la fois entre la France
44:25et le Vatican,
44:25entre l'Église et l'État,
44:27entre la République
44:27et la religion,
44:29c'est-à-dire cette fameuse laïcité
44:30qui, comme vous le savez,
44:32est intraduisible
44:33dans les autres langues.
44:34C'est vous dire
44:34si c'est un truc à nous.
44:36C'est quelque chose
44:37qui concerne la France.
44:41Aujourd'hui,
44:42quand le pape François
44:44considère la France,
44:45il voit d'abord
44:46un pays déchristianisé.
44:48D'ailleurs, déjà,
44:49Jean-Paul II lui-même
44:50avait dit aux Français,
44:52vous vous rappelez peut-être
44:53pendant son premier voyage,
44:55« France,
44:57fille aînée de l'Église,
44:58qu'as-tu fait
44:59des promesses
44:59de ton baptême ? »
45:01Ça, ça avait été
45:01un électrochoc
45:02chez les chrétiens français,
45:03quand même.
45:04C'est la première fois
45:04qu'un pape leur disait
45:05« Mais alors,
45:05qu'est-ce que vous faites ? »
45:08Et par certains de ses actes
45:09et quelques petites phrases,
45:11le pape François
45:12n'a pas hésité
45:12à piquer cette France
45:13et sa sacro-sainte laïcité
45:15que l'Église
45:16a bien du mal à appréhender.
45:18Les Français,
45:18évidemment,
45:19m'ont déploré
45:19qu'il ne s'arrête pas
45:21à Strasbourg,
45:22dans la cathédrale de la ville,
45:24quand il est allé au Parlement
45:25et au Conseil de l'Europe.
45:26Alors que c'était
45:27tellement évident,
45:29notamment pour tous
45:30les catholiques alsaciens
45:31qui l'attendaient,
45:32il ne s'arrête pas
45:33à la cathédrale,
45:34il va directement
45:34voir les députés
45:35et qu'est-ce qu'il dit
45:36aux députés européens ?
45:38« Vous êtes
45:39une grand-mère stérile. »
45:42Honnêtement,
45:42il y a des compliments
45:43plus sympathiques.
45:44C'est ça le pape
45:45à l'égard de la France.
45:46Son absence
45:47à la réouverture
45:48de la cathédrale Notre-Dame
45:49à Paris,
45:50bien qu'elle se justifie,
45:51a pu faire également
45:52grincer quelques dents,
45:53d'autant plus
45:54qu'il s'est rendu officiellement
45:55à Ajaccio en Corse
45:56quelques jours après.
45:57C'est vraiment logique
45:59qu'il refuse
46:00d'aller à Notre-Dame
46:02où le risque pour lui
46:03est de se faire
46:04instrumentaliser
46:05dans une célébration
46:09qui est de nature
46:10politique, évidemment.
46:12Ce n'était absolument
46:13pas sa place
46:13parce qu'effectivement
46:16il s'agissait
46:16de mondanité.
46:18C'est-à-dire,
46:18vous aurez remarqué
46:19que dans Notre-Dame
46:19de Paris,
46:20ce n'était pas le peuple
46:21des chrétiens
46:21qui étaient là,
46:22c'était des invitations.
46:23On aurait pu croire
46:24que c'était le CAC 40
46:26qui était réuni
46:26pour une soirée.
46:27Donc il y avait
46:28quelque chose d'incongru
46:29à espérer.
46:31La présence du pape,
46:32il n'était pas là
46:33pour ça.
46:33Il était bien mieux
46:34au milieu de son peuple
46:35une semaine après
46:36avec les Corses
46:37à Ajaccio.
46:40Notre-Dame
46:41à Ajaccio,
46:42on a fait
46:43de ce choix
46:44du pape François
46:45tout un conflit,
46:47une mini-polémique.
46:48Non,
46:49il n'avait pas sa place
46:49à Notre-Dame de Paris.
46:50Le pape a été
46:51complètement cohérent
46:52sur cette question.
46:57Et l'un des voyages
46:58qui symbolise le mieux
46:59le pontificat du pape François
47:00est sûrement
47:01sa visite officielle
47:02à Marseille
47:02en septembre 2023.
47:04Un voyage
47:05qui va commencer
47:06par une petite polémique
47:07qui va froisser
47:08quelque peu
47:08les catholiques français.
47:12C'était très intéressant
47:13parce que nous,
47:14Français,
47:15on avait un petit peu
47:15de réserve
47:16par rapport à ce pape
47:17qui disait
47:17« Je viens à Marseille,
47:18je ne viens pas en France ».
47:19On était tous un petit peu
47:21comment dire,
47:23on se sentait
47:23un petit peu méprisés.
47:25Mais en fait,
47:26voilà,
47:26il voulait par là
47:28manifester
47:29qu'il allait encore une fois
47:30visiter des périphéries,
47:33des périphéries méditerranéennes
47:35qui sont donc
47:36au centre
47:37de son pontificat.
47:39Alors c'est vrai
47:40que quand il vient
47:41à Marseille,
47:42il vient dans une
47:43des grandes capitales
47:44de la Méditerranée.
47:45C'est cette ville
47:46au cœur
47:47de la Méditerranée,
47:49au cœur
47:49de tous les destins
47:50de la migration
47:51qui est construite
47:53par des migrants.
47:58Nous arrivons
47:59à Notre-Dame-de-la-Garde.
48:00Elle domine
48:01toute la ville
48:02de Marseille.
48:04Et là,
48:05nous arrivons
48:05vraiment
48:05au pied
48:07de la basilique
48:08qui est
48:08le symbole
48:10je dirais
48:11incontesté
48:12et incontestable
48:13de la cité
48:14phocéenne.
48:20Cela
48:21sans distinction
48:22d'origine
48:23ou de religion.
48:24C'est vraiment
48:25un lieu
48:26pour tous.
48:27Ce voyage
48:27à Marseille
48:28va se révéler
48:29extraordinaire
48:30pour le pape.
48:31Il va,
48:31si c'était réellement
48:32nécessaire,
48:33le réconcilier
48:33avec le peuple français.
48:35Cette visite,
48:36le père Xavier Manzano
48:38qui l'a vécu
48:38de l'intérieur
48:39nous la raconte.
48:41Voilà,
48:41qu'on arrive
48:42ici
48:42à un petit
48:44souvenir
48:44bien sûr
48:45de la visite
48:46à Marseille
48:47qui est une
48:47des villes
48:48les plus pauvres
48:48d'Europe.
48:48L'attention
48:49aux plus fragiles
48:50aux moins chanceux
48:51c'est quelque chose
48:52qui depuis
48:52de nombreux siècles
48:54parle au cœur
48:55des Marseillais.
48:56C'est un leitmotiv
48:57si je puis dire
48:58de sa prédication
48:59et de son message
49:00et ce n'est pas un hasard
49:02s'il est venu
49:03à Marseille
49:03ici.
49:04On pourra
49:05l'évoquer.
49:05Il est d'ailleurs
49:06allé dans un des quartiers
49:07de Marseille
49:08qui est un des plus pauvres
49:08de la ville
49:09et donc du coup d'Europe
49:10pour rencontrer
49:11les personnes
49:12en situation de précarité
49:13et les associations
49:14qui essayent
49:15de leur venir en aide
49:16et de les accompagner.
49:18Pour lui,
49:18c'était quelque chose
49:19d'inévitable
49:21et qu'il tenait
49:22beaucoup à faire.
49:23Il a une attention
49:30très profonde
49:31et pour nous
49:31ça nous est aussi
49:33très très important
49:33à la Méditerranée
49:35et à une Méditerranée
49:37qui est à la fois
49:37un pont entre les peuples
49:38mais aussi
49:39dans l'actualité
49:40qui est la nôtre
49:41un cimetière.
49:43Et donc
49:43le fait de venir ici
49:45on le verra aussi
49:46encore mieux
49:46à la Croix
49:47était pour lui
49:48une chose très importante.
49:53Après avoir rencontré
49:54les prêtres
49:55les religieux
49:56et religieuses
49:56le Saint-Père
49:57s'est rendu
49:58dans le lieu
49:58où nous sommes
49:59et là
50:01il s'agissait
50:01de faire
50:02une prière
50:03s'agissant ici
50:05d'un sanctuaire marin
50:06pour tous ceux
50:08et celles
50:09qui ont péri en mer
50:11mais malheureusement
50:12dans un itinéraire
50:13de migration.
50:16On sait que c'est
50:17quelque chose
50:17qui tient très à cœur
50:18au Saint-Père.
50:23Le pape a ensuite
50:25adressé
50:25lui aussi
50:27un message
50:27très vigoureux
50:28pour qu'on puisse
50:29justement
50:30par devoir d'humanité
50:31et par devoir évangélique
50:33accueillir
50:33ceux qui sont
50:34en danger de mort
50:35sur les flots
50:36et la mer.
50:39Chers frères et sœurs
50:41je vous remercie
50:44d'être présent
50:44je pense à tant
50:46de frères et de sœurs
50:47noyés
50:48dans la peur
50:49avec des espérances
50:52qui portaient
50:53dans leur cœur.
50:59L'après-midi
51:00se poursuit
51:01avec une messe géante
51:02dans le stade Vélodrome
51:03et ses 57 000 places.
51:06Qui n'étaient pas prévues
51:08mais le cardinal Aveline
51:10avait dit au pape
51:11c'est difficile quand même
51:13si vous venez
51:13et qu'on n'organise pas
51:14quelque chose
51:15où les gens
51:15peuvent venir vous voir
51:16les gens ont envie
51:18de venir prier avec vous
51:19vous accueillir
51:20etc.
51:20et le pape avait dit
51:22bon d'accord
51:22mais discreto, discreto.
51:24Une messe magnifique
51:25bien que pas très discrète
51:26le stade sera plein
51:28à craquer
51:28ce qui va prendre de court
51:29les organisateurs.
51:31Alors une autre chose
51:32qui n'était pas prévue
51:33c'était que le pape
51:34remonte l'avenue du Prado
51:35c'est-à-dire que le pape
51:36il devait arriver au stade
51:37pour la messe
51:38et c'est tout quoi.
51:40Et en fait
51:40il y avait une telle demande
51:41une telle attente
51:42parce que le stade
51:43il y a 57 000 places
51:44donc ça a été vite rempli
51:47et donc ce qui s'est organisé
51:49vraiment peut-être 15 jours avant
51:51ça a été le fait
51:53que le pape puisse remonter
51:55l'avenue du Prado
51:55avec plein d'écrans géants
51:58qui ont été mis
51:58tout au long de l'avenue
51:59ce qui a permis
52:00à plein de gens
52:00qui n'avaient pas pu avoir
52:02de place au stade
52:03de quand même participer
52:04à l'événement
52:05et de pouvoir accueillir le pape.
52:06Et il y a eu pour moi
52:24un petit miracle marseillais
52:25c'est-à-dire que
52:26quand il est arrivé
52:26à Marseille
52:28qu'il a remonté
52:29l'avenue du Prado
52:31où il y avait
52:32énormément de monde
52:34il a vu finalement
52:35ce peuple de France
52:36qu'il attendait
52:37et qu'il accueillait
52:38et là ce pape
52:39a été touché
52:40et quand il est arrivé
52:41au stade Vélodrome
52:42on a vraiment vu
52:43un Saint-Père
52:44touché par l'accueil
52:46que lui réservaient
52:47la France et les Français
52:48d'ailleurs il s'est adressé
53:00en français
53:00ce qui n'était pas
53:01forcément prévu
53:02bonjour Marseille
53:05bonjour la France
53:08bonjour Marseille
53:13bonjour la France
53:14et ça a été un triomphe
53:15et je crois qu'on pouvait dire
53:17qu'il venait à Marseille
53:18rencontrer la France
53:19et c'était magnifique
53:21ça a été vraiment
53:21un moment de
53:23il l'a dit d'ailleurs
53:24dans son homélie
53:25il a utilisé le mot
53:26de tressaillement
53:27et moi je garde ça
53:28ça a été un moment
53:29de tressaillement
53:30une ferveur
53:31une joie
53:32et en même temps
53:32c'était très simple
53:33c'était une explosion
53:35de joie
53:35vraiment
53:36dans le voyage de retour
53:48il a dit
53:48felicissimo
53:49je suis très heureux
53:51et ensuite
53:52quand on allait le revoir
53:53on a fait plusieurs voyages
53:54et plusieurs rencontres
53:55avec lui
53:55il nous a dit
53:56à quel point
53:56il avait été heureux
53:57de découvrir cette ville
53:58et à quel point
53:59ça l'avait marqué
53:59et il le gardait
54:00dans sa mémoire
54:01si on devait tirer
54:16un bilan très rapide
54:17du pontificat
54:18du pape François
54:19je reviendrai
54:21sur cette idée
54:22que c'est le premier
54:23pape du sud
54:24c'est le pape
54:26qui aura
54:26mondialisé l'église
54:28avec des thèmes
54:30avec des thèmes nouveaux
54:30l'écologie
54:31c'est le premier pape
54:33vraiment écolo
54:35il suffit de relire
54:37son encyclique
54:38la haute date aussi
54:39pour s'en convaincre
54:41c'est quand même pas rien
54:42et par ailleurs
54:43c'est vrai qu'il a plaidé
54:44pour les pauvres
54:45pour les migrants
54:46enfin c'est quand même
54:46le coeur de l'évangile
54:48il aura été
54:49l'homme
54:49qui a porté
54:50ce coeur de l'évangile
54:52aux périphéries
54:53comme il dit
54:54c'est à dire
54:54aux quatre coins
54:55de la planète
54:55cet amour des périphéries
54:57mais pas au sens
54:58où on l'entend
54:58politiquement parlant
55:00ce pape
55:01qui serait de gauche
55:02mais le pape
55:03c'est le pape
55:03donc il est ni de droite
55:04ni de gauche
55:05c'est avant tout
55:06un pasteur
55:06pour son église
55:07c'est un pontificat
55:09qui se sera focalisé
55:10sur la notion
55:11de miséricorde
55:12c'est quelque chose
55:13que le pape
55:14aura rappelé
55:15sans relâche
55:16c'est à dire
55:16la faculté infinie
55:18de pardon
55:18que Dieu a pour les hommes
55:19avec le pape François
55:20on est allé
55:21dans tellement de directions
55:22avec ce souci
55:23de rejoindre les gens
55:24que je pense
55:26que l'église
55:27aura besoin
55:27de réconcilier
55:29aussi ceux
55:30qui auront été
55:31heurtés
55:32par ce pontificat
55:34c'est à dire
55:34que c'est pas
55:35parce qu'effectivement
55:36on veut rejoindre
55:37les gens
55:37qu'on doit
55:39jeter par-dessus bord
55:40tout l'enseignement
55:41de l'église
55:41donc comment concilier
55:42les deux
55:42c'est pas toujours facile
55:43il n'a pas chamboulé
55:44tant l'église que ça
55:45il a beaucoup prêché
55:46sur l'eucharistie
55:47sur la présence réelle
55:49du Christ
55:49à la messe
55:50il incite en permanence
55:52à retourner à l'église
55:53à retourner au sacrement
55:55donc toutes les histoires
55:56de progressisme
55:57croyez-moi
55:57on en reparlera encore
55:58dans 2000 ans
55:59on en reparlera encore
56:04on en reparlera encore