Lucky Luke, Astérix, Black et Mortimer… Ces personnages de BD reprennent vie après la mort de leurs créateurs. Exception, Tintin qui n'a pas trouvé repreneur, son auteur n'ayant pas voulu qu'il lui survive.
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00:00Nicolas, ce matin, on parle de ces BD cultes qui survivent à leurs auteurs d'origine.
00:04On a appris que Largo Winch revenait, ça sera en novembre, mais récemment on a eu un album de Lucky Luke, Black & Mortimer, bientôt Asterix Obélix.
00:11On peut continuer comme ça longtemps.
00:13Oui, c'est des BD qui sont éternels. D'ailleurs, je vous ai mis un petit monument à chacun d'entre vous.
00:18Les Strumphs.
00:19Les Strumphs, voilà. Le retour de Gaston Lagaffe, c'est Gaston Lagaffe, c'est Asterix. Moi, j'ai du boule et bile.
00:24Tous les titres qu'on vient de citer, les ventes, elles sont faramineuses.
00:27Le dernier album d'Asterix, par exemple, ça avait dépassé quand même le million de ventes en France.
00:32Le dernier, Lucky Luke, c'était 300 000 ventes. Le dernier, Black & Mortimer, c'était 200 000.
00:37C'est pas mal quand même pour des bandes dessinées qui ont été créées il y a presque 80 ans.
00:41Mais pour les faire vivre, toutes ces bandes dessinées, il faut bien quelqu'un pour continuer l'aventure.
00:46Dans le jargon, dans le métier, on appelle ça un repreneur. Prenez par exemple HD.
00:51Lui, c'est le premier à l'avoir fait. Il a repris Lucky Luke, juste après la mort de Maurice.
00:55C'est lui qu'on a choisi pour reprendre le flambeau. Il connaissait bien Maurice parce qu'il avait travaillé longtemps avec lui,
01:00parce qu'il avait dessiné rente en plan.
01:02Ça crée pression quand même.
01:04Énorme pression parce que Maurice, c'est quand même juste un dieu.
01:06Mais la femme de Maurice connaissait bien HD. Elle pense à lui.
01:09Elle sait que le style d'HD peut coller à celui de Maurice.
01:12Alors Banco, en 2002, s'est décidé. Il reprend Lucky Luke. Quel honneur, mais quelle trouille.
01:16Je peux vous dire qu'un premier coup de fil, je n'en réalise pas.
01:22La confirmation, j'ai demandé de faire un essai parce que je ne savais pas si je serais capable.
01:27Et moi, j'étais terrorisé. Ah oui, j'ai fait un essai. C'est moi qui ai demandé.
01:30J'ai fait l'essai. Et puis quand on m'a confirmé que c'était moi,
01:34je peux vous dire que c'était l'incréduité, une peur panique,
01:37de me dire bon ben voilà, c'est moi qui le dessine.
01:40Il m'a fallu quand même trois albums pour oser un jour dire je suis dessinateur de Lucky Luke.
01:45Parce que quand même, c'est une énorme pression pour ces repreneurs, comme on dit.
01:49Ils doivent vraiment dessiner à l'identique, quoi.
01:51Ah oui, un cahier des charges. Il faut garder la charte graphique.
01:54Il ne faut pas qu'on soit perdus.
01:56Et puis quand tu passes derrière les plus grands talentueux des dessinateurs de la BD franco-belge,
02:01il y a de quoi faire des complexes parce que Uderzo, Maurice Franquin, Payot,
02:05c'est l'âge d'or de la BD franco-belge.
02:07C'est-à-dire que les enfants, avant eux, ils avaient Bécassine.
02:10D'un coup, ils sont passés à Astérix, Lucky Luke, Leschtronf, Spirou.
02:12Ou Boulébile, par exemple, qui a été créé et dessiné par Robat,
02:16qui, lui, nous a quittés en 2006.
02:18Depuis dix ans, son successeur, c'est lui.
02:20C'est le très talentueux Jean Bastide.
02:22Lui, à la base, il vient du dessin réaliste, pas du gros nez, comme on dit dans le jargon.
02:27Alors, pour reprendre le trait de Robat, il a fallu, encore une fois, beaucoup d'humilité,
02:31mais aussi un brin de psychologie parce qu'ils ont un petit truc en plus, ces auteurs.
02:34Je suis toujours dans une position où j'apprends, en fait.
02:39Et j'essaye de retranscrire au mieux en fonction de mes qualités.
02:42Et j'essaye toujours de progresser pour donner le meilleur de moi-même par rapport à ces albums-là.
02:46Dans le style de Robat, ce qui est singulier, c'est cette douceur, cette rondeur.
02:49Dans le regard des personnages, il y avait une espèce de tendresse.
02:52Et ça ressort énormément quand tu regardes le travail de Robat.
02:57Et ce que j'essaye de capter, c'est ça, en fait.
03:00– Mais Nicolas, encore faut-il que l'auteur de son vivant ait donné son accord
03:05pour que la bande dessinée lui survive ?
03:07On se souvient notamment que la reprise de Gaston Lagaffe, elle a failli jamais se faire.
03:11– Oui, ça avait été extrêmement problématique.
03:14C'était le cas, c'était l'auteur de l'AF qui avait commencé à plancher sur la suite de Gaston Lagaffe.
03:20Ça s'appelait « Le retour de Lagaffe ».
03:21Les éditions Dupuis, les endroits de Franquin, ils n'étaient pas d'accord.
03:24La fille de Franquin affirmait qu'il n'avait jamais voulu que son héros lui survive.
03:28Ils ont fini par trouver un accord.
03:29L'album a échappé au pilon et ça a été un succès en librairie.
03:33Moi, ce que je trouve ça, c'est que nos héros, ils restent éternels, vous voyez.
03:38Et que ça passe de main en main, au moins, c'est encore dans tous les foyers.
03:41Spirou, par exemple, lui, depuis le début, il est passé dans plein de mains différentes.
03:45Il est passé par les mains de Robval, Gigi évidemment, Fournier, Franquin.
03:49Astérix, aujourd'hui, il est dans les mains de Jean-Yves Conrad.
03:53Ça, c'est un ancien scénariste.
03:54Maintenant, c'est Fab Carreau.
03:55Il y a Conrad au dessin qui fait un travail vraiment fabuleux.
03:58Il n'y en a qu'un qui fait de la résistance.
04:00Vous savez qui c'est ?
04:01C'est Tintin.
04:01C'est Tintin.
04:02Il n'y a aucun nouveau Tintin.
04:04Pourquoi ? Parce que très protégé par les éditions.
04:06Très protégé par les éditions, effectivement.
04:08Et puis, encore une fois, l'auteur n'a jamais été très clair.
04:11Il y a un petit débat dans la profession.
04:12Mais l'auteur n'a jamais dit formellement qu'il voulait que son héros lui survive.
04:16Donc, Tintin, il finira, je pense, au musée.