• il y a 11 ans
Le 24 mai 2012, dans le cadre des « Jeudi d’Acrimed », nous recevions Laurent Bonelli, maître de conférences en science politique à l’Université de Paris Ouest Nanterre-La Défense. Laurent Bonelli est notamment l’auteur de La France a peur. Une histoire sociale de l’ « insécurité » [1], dont nous nous avons publié deux extraits [2]

En guise de présentation du débat

Les médias font volontiers leurs choux gras de l’« insécurité ». Le thème se prête aux raccourcis et aux amalgames ; il alimente régulièrement les pratiques journalistiques les plus douteuses et les commentaires les plus démagogiques. De manchettes racoleuses jusqu’aux dossiers en apparence sérieusement documentés, la décennie écoulée n’a pas été avare en accroches saisissantes déclarant ou prédisant l’explosion de l’ « insécurité », vantant la réussite ou (plus souvent) dénonçant l’échec des « politiques de sécurité », annonçant la publication des prétendus « vrais chiffres de l’insécurité »... Mais de quelle « insécurité » parle-t-on ? Quels sont les impensés véhiculés par l’usage générique, souvent simpliste et irréfléchi, de ce terme fortement équivoque ? Comment l’imaginaire sécuritaire imprègne-t-il les représentations communes ? Comment tâcher de se défaire de son emprise ?

L’ « insécurité » – ou plutôt son exploitation médiatique – fait vendre. Et ce, particulièrement en période de « crise ». La chose n’est pas nouvelle et les historiens ont bien décrit la façon dont des périodes de mutation sociales et politiques s’accompagnent d’une inflation des discours publics autour du « crime », de la « délinquance », de la « violence » ou de l’ « insécurité » ; autant de termes qui méritent des guillemets, tant ils renvoient à des phénomènes très divers tant par leurs formes que par leurs causes et leurs conséquences sociales et individuelles. Ces mêmes historiens ont en même temps montré combien les discours publics sur les diverses formes de déviance qui se manifestent dans la vie sociale ne sont pas neutres : ils reflètent, et souvent contribuent à reproduire, un état momentané des rapports de force sociaux. Ainsi, si les transgressions des nantis gagnent parfois à être placées sous les projecteurs, ce sont bien plus souvent les déviances populaires qui sont thématisées et dramatisées. De ce point de vue, le début du XXIe siècle n’est pas sans faire écho à des périodes passées, notamment la fin du XIXe siècle.

Or, pris dans l’urgence de l’actualité, le commentaire journalistique manque souvent du recul nécessaire à un traitement équilibré et raisonné de ces questions. En faisant l’économie d’une mise en perspective de la situation présente, il nourrit une certaine amnésie sociale. Lire la suite: http://www.acrimed.org/article3843.html

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