Emile Lelouch
En terre inconnue … Je me suis toujours interrogé pour savoir à quel moment ma vie avait commencé ?. Fallait-il rechercher le souvenir le plus lointain, le plus extravagant, le plus représentatif, celui qui dit les choses d'une façon péremptoire
Fallait-il que je flatte mon orgueil ou que je déniche l'événement le plus misérable, celui qui vous éloigne des hommes et vous rapproche de Dieu. ? Dans tous les cas de figure, je ne trouvais rien qui puisse me convenir : plus je croyais m'approcher du but, plus la distance paraissait incertaine.
Seul, le passé devenait le refuge de mes émotions, : c'était le guide le plus sûr, mais en même temps le plus impitoyable !..
Toutes mes erreurs s'inscrivaient en lettres de feu,
Quand je passais la revue de détail de toutes mes déconvenues. :
Je m’insurgeais, fortement :
« Pourquoi cette révélation brutale et si tardive ? »
Pourquoi ne pas avoir été prévenu en temps opportun ?
Il fallait que je fasse un arrêt sur l'image, pour mieux comprendre la situation : comme un policier qui stoppe les effets de la caméra de surveillance, pour identifier un malfaiteur.
De toutes les manières, chaque trouvaille débouchait sur d'autres questions, qui engendraient encore et toujours des flots d'interrogations.
En fait, j'avais poussé comme un champignon, dans une période où la réflexion désertait continuellement mon esprit.
Je subissais, sans comprendre, les différentes turbulences infligées par des parents qui ne comprenaient pas que les événements qui ne sont pas enregistrés, au moment où ils se produisent, reviennent avec fracas, quand on ne les attend plus.
Mon père, artiste peintre de talent, aimé passionnément par ses amis et sa famille, offrait une attitude plus réservée pour ne pas dire hostile, quand il rentrait à la maison.
Nous redoutions le coup de sonnette, ma sœur et moi, comme un événement inapproprié, annonciateur de quelques malheurs….
Mais, c'était en même temps une délivrance comparable à celle d'un matador qui tremble avant un combat , mais qui affronte avec courage son adversaire,
en bombant le torse :Sous l'effet des cris , des applaudissements des huées et des couleurs chatoyantes.
Quand mon père arrivait, il cherchait toujours le défaut de la cuirasse ,
pour nous mettre en difficulté, en multipliant les reproches .
Ma mère pouvait facilement tout encaisser,
Je l'assimilais mentalement au tableau de Delacroix « Femmes d'Alger »
Sa nonchalance faisait d'elle une femme soumise, mais non dépossédée de réactions. Sa capacité de résistance dépassait toutes les normes habituelles attribuées au commun des mortels
Sa souffrance, rarement visible à l’œil nu, la propulsait dans un monde auquel personne ne pouvait avoir accès.
Quand le maître des lieux demandait sur un ton bourru , « Et alors il n'y a pas de vittel, » Ma mère partait en courant pour se précipiter, dans la cuisine en disant :
« Et un vittel un ! », tout en se dirigeant vers le robinet pour remplir une bouteille d'eau.
Mais il fallait donner un aspect vraisemblable à l'affaire et pour rendre son attitude plus crédible, il lui arrivait de dire parfois :
« j'ai oublié ! »
On devine aisément la colère de mon père qui vociférait « il ne faut plus jamais oublier ;. je sens que ça me fait du bien !»
Il ne connaissait, pourtant, que l'eau qui émanait du compteur.
A force d'utiliser la même bouteille, l'étiquette commençait à donner des signes de détresse et à se pencher douloureusement,
« N'ayant qu'une confiance relative,en son épouse, mon père ajoutait
« La prochaine fois , je veux une bouteille non débouchée »
Recroquevillé sur moi même, j'assistais sans comprendre à ces scènes journalières insoutenables,
Je choisissais toutefois des souvenirs qui ramènent à une réalité plus paisible,
en masquant les vrais problèmes,
j'étais devenu le prince de la pirouette.
Je me mentais continuellement, pour fuir cette vérité suffocante..
Ma sœur plus aguerrie à ce genre de combat, n'hésitait pas à « Ruer dans les brancards » pour faire face à ce ce déferlement de haine.
Il va sans dire que toute la pression s'exerçait sur moi et que je subissais, de plein fouet , toute la noirceur de son âme.
Mon univers cotonné me mettait un peu à l'abri de toutes ces meurtrissures :
La musique commençait à prendre d'énormes proportions, c'était un puissant réconfort.
J'avais remplacé le dialogue intérieur par une voix qui chantait perpétuellement en moi, avec une force invincible. Mais ,c'était une spécieuse ceinture :
Une fois que le mot est dit, il est toujours inférieur au trouble ressenti et je ne voulais pas amoindrir les premiers émois.
En terre inconnue … Je me suis toujours interrogé pour savoir à quel moment ma vie avait commencé ?. Fallait-il rechercher le souvenir le plus lointain, le plus extravagant, le plus représentatif, celui qui dit les choses d'une façon péremptoire
Fallait-il que je flatte mon orgueil ou que je déniche l'événement le plus misérable, celui qui vous éloigne des hommes et vous rapproche de Dieu. ? Dans tous les cas de figure, je ne trouvais rien qui puisse me convenir : plus je croyais m'approcher du but, plus la distance paraissait incertaine.
Seul, le passé devenait le refuge de mes émotions, : c'était le guide le plus sûr, mais en même temps le plus impitoyable !..
Toutes mes erreurs s'inscrivaient en lettres de feu,
Quand je passais la revue de détail de toutes mes déconvenues. :
Je m’insurgeais, fortement :
« Pourquoi cette révélation brutale et si tardive ? »
Pourquoi ne pas avoir été prévenu en temps opportun ?
Il fallait que je fasse un arrêt sur l'image, pour mieux comprendre la situation : comme un policier qui stoppe les effets de la caméra de surveillance, pour identifier un malfaiteur.
De toutes les manières, chaque trouvaille débouchait sur d'autres questions, qui engendraient encore et toujours des flots d'interrogations.
En fait, j'avais poussé comme un champignon, dans une période où la réflexion désertait continuellement mon esprit.
Je subissais, sans comprendre, les différentes turbulences infligées par des parents qui ne comprenaient pas que les événements qui ne sont pas enregistrés, au moment où ils se produisent, reviennent avec fracas, quand on ne les attend plus.
Mon père, artiste peintre de talent, aimé passionnément par ses amis et sa famille, offrait une attitude plus réservée pour ne pas dire hostile, quand il rentrait à la maison.
Nous redoutions le coup de sonnette, ma sœur et moi, comme un événement inapproprié, annonciateur de quelques malheurs….
Mais, c'était en même temps une délivrance comparable à celle d'un matador qui tremble avant un combat , mais qui affronte avec courage son adversaire,
en bombant le torse :Sous l'effet des cris , des applaudissements des huées et des couleurs chatoyantes.
Quand mon père arrivait, il cherchait toujours le défaut de la cuirasse ,
pour nous mettre en difficulté, en multipliant les reproches .
Ma mère pouvait facilement tout encaisser,
Je l'assimilais mentalement au tableau de Delacroix « Femmes d'Alger »
Sa nonchalance faisait d'elle une femme soumise, mais non dépossédée de réactions. Sa capacité de résistance dépassait toutes les normes habituelles attribuées au commun des mortels
Sa souffrance, rarement visible à l’œil nu, la propulsait dans un monde auquel personne ne pouvait avoir accès.
Quand le maître des lieux demandait sur un ton bourru , « Et alors il n'y a pas de vittel, » Ma mère partait en courant pour se précipiter, dans la cuisine en disant :
« Et un vittel un ! », tout en se dirigeant vers le robinet pour remplir une bouteille d'eau.
Mais il fallait donner un aspect vraisemblable à l'affaire et pour rendre son attitude plus crédible, il lui arrivait de dire parfois :
« j'ai oublié ! »
On devine aisément la colère de mon père qui vociférait « il ne faut plus jamais oublier ;. je sens que ça me fait du bien !»
Il ne connaissait, pourtant, que l'eau qui émanait du compteur.
A force d'utiliser la même bouteille, l'étiquette commençait à donner des signes de détresse et à se pencher douloureusement,
« N'ayant qu'une confiance relative,en son épouse, mon père ajoutait
« La prochaine fois , je veux une bouteille non débouchée »
Recroquevillé sur moi même, j'assistais sans comprendre à ces scènes journalières insoutenables,
Je choisissais toutefois des souvenirs qui ramènent à une réalité plus paisible,
en masquant les vrais problèmes,
j'étais devenu le prince de la pirouette.
Je me mentais continuellement, pour fuir cette vérité suffocante..
Ma sœur plus aguerrie à ce genre de combat, n'hésitait pas à « Ruer dans les brancards » pour faire face à ce ce déferlement de haine.
Il va sans dire que toute la pression s'exerçait sur moi et que je subissais, de plein fouet , toute la noirceur de son âme.
Mon univers cotonné me mettait un peu à l'abri de toutes ces meurtrissures :
La musique commençait à prendre d'énormes proportions, c'était un puissant réconfort.
J'avais remplacé le dialogue intérieur par une voix qui chantait perpétuellement en moi, avec une force invincible. Mais ,c'était une spécieuse ceinture :
Une fois que le mot est dit, il est toujours inférieur au trouble ressenti et je ne voulais pas amoindrir les premiers émois.
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