Le discours sur l’identité européenne sonnera creux tant qu’il ne parviendra pas à s’articuler autour d’un contenu identifiable. Or aucun des traits substantiels qu’on a pu retenir pour définir cette identité n’échappe à l’objection de figer une réalité essentiellement mouvante. Aussi faut-il se rendre à l’évidence que l’Europe n’est pas une réalité donnée, inscrite dans l’ordre naturel des choses, mais une création humaine, réalisée par les habitants, autochtones ou immigrés, du minuscule promontoire de l’immense continent asiatique, qui a reçu le nom d’Europe. Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas de réalités européennes, mais celles-ci sont toutes des réalisations historiques, soumises aux vicissitudes du temps, se trouvant tantôt abandonnées (les vestiges), tantôt conservées en l’état (le patrimoine), tantôt assumées et prolongées, d’époque en époque, comme gages d’un avenir à inventer (les traditions). Quand on les relie entre elles, c’est un certain esprit, à la fois principe de pensée et principe d’action, dont il convient de cerner la spécificité, afin de déterminer ce qu’il y a d’européen dans les réalités européennes. Pour le dire autrement, l’Europe n’est pas issue d’un gène naturel, mais née d’un geste intentionnel. Ce geste est celui de la séparation (« krisis » en grec ancien, dont dérivent les notions de crise et de critique), qui trouve son expression symbolique dans la légende du rapt d’Europe, fille d’un roi d’Asie mineure, que Zeus, transformé en taureau, emmène dans l’île de Crète pour y engendrer les premiers « Européens ».
En partant de ce constat, on peut tenter de repérer les principales ruptures dont l’enchaînement constitue comme la trame d’une identité en perpétuel devenir.
En partant de ce constat, on peut tenter de repérer les principales ruptures dont l’enchaînement constitue comme la trame d’une identité en perpétuel devenir.
Category
📚
Éducation