L'humoriste Gaspard Proust, pour la sortie de son livre "Mea Culpa"

  • l’année dernière
L'humoriste Gaspard Proust vient présenter son livre "Mea Culpa", chez Plon. Il revient avec son ouvrage sur l'année passée, avec un œil aiguisé. Surtout le droit. https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-jeudi-02-fevrier-2023-9397726

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Transcription
00:00 Léa Salamé, votre invitée ce matin est humoriste.
00:02 Bonjour Gaspard Proust.
00:03 Bonjour Léa Salamé.
00:04 Merci d'être avec nous ce matin.
00:06 Vous publiez « Mais accoule pas » chez Plon, florilège de vos meilleures chroniques dans
00:09 le JDD et chez vos confrères d'Europe 1, mais aussi avec des extraits de vos spectacles.
00:13 On y retrouve votre humour.
00:15 Noir, précis, féroce, brillant diront certains, trop méchant, trop réac diront les autres.
00:21 Mais en tout cas, tous peuvent reconnaître la qualité de votre écriture.
00:24 Très littéraire.
00:25 Rares sont les humoristes de stand-up qui passent le cap de l'écrit, dont les textes
00:29 restent drôles quand ils ne sont pas incarnés ou joués.
00:32 Et c'est votre cas.
00:33 En exergue du livre, vous ne citez pas « Nietzsche » ou « Dostoevsky » que vous adorez,
00:38 mais vous-même.
00:39 Au commencement…
00:40 Oui, en toute simplicité.
00:41 Oui, en toute simplicité.
00:42 Oui, oui.
00:43 Non, parce que ça aurait fait plus ronflant si je citais un autre.
00:46 « Ah, j'ai dédié, dédicacé à Nietzsche » ou un machin.
00:48 Alors que moi-même, vous voyez, je reste à un niveau plus bas.
00:51 En fait, c'est de la modestie en réalité.
00:53 Je n'avais pas vu ça comme ça, mais vous dites « Au commencement était le verbe,
00:57 vers la fin l'écriture inclusive, heureux l'homme moderne car il n'en a plus pour
01:02 très longtemps ». Tout est dit dans cette phrase.
01:04 C'est pas mal.
01:05 Tout Gaspard Pouste résumé.
01:06 Je trouve ça pas mal.
01:07 Quand j'ai trouvé, je dis « On la met, on la met pas, allez on la met ».
01:10 Alors le livre, j'avoue que moi j'ai beaucoup ri, même si c'est ultra violent à des
01:14 moments.
01:15 On se dit « Il ne va pas la faire », mais il l'a fait.
01:17 Vous allumez tout le monde ou presque.
01:19 La gauche, beaucoup, la droite, un peu.
01:20 Les corses, les basques, les islamistes, les vieux.
01:23 « Senior », c'est quand même la contraction de sénilité qui s'ignore.
01:26 Les gros, a-t-on vraiment le droit de se plaindre de la hausse des prix quand on est en surpoids
01:31 alors que l'inflation est un partenaire minceur ?
01:33 Il y a des pensées un peu mauvaises.
01:35 McKinsey, la Mélisse Wagner du « Cost-Killing ».
01:39 Volodemir Zelensky.
01:40 Macron qui console Mbappé sur la pelouse au Qatar.
01:44 J'avais l'impression de voir Fourniret qui venait de choper un minot sous GHB.
01:47 François Hollande, le trapéziste de la chatte.
01:49 Est-ce que les éditeurs ont l'image ce matin ?
01:53 Ils sont peut-être devant leur pare-brise et soudain, Hollande qui passe, accroché à un truc.
01:59 Et là, ils se disent « Ah ! Comme la journée commence bien ! ».
02:02 On voit chez vous qu'il y a une délétération totale à choquer, à provoquer.
02:05 Il y a un plaisir aristocratique à déplaire, comme disait Baudelaire chez vous.
02:10 Gaspard Pouces ?
02:11 Non, je vous assure que non.
02:12 Ah bon ?
02:13 Non, non.
02:14 Alors c'est une posture ?
02:15 Non, parce que vous avez vu Elephant Man, tout ça, quand il va aux toilettes et qu'il
02:18 dit « I'm a human being ».
02:19 Eh ben moi aussi, je suis vraiment un être humain.
02:22 Et je me suis rendu compte, c'est assez récent, que j'aime bien être aimé.
02:29 Qu'est-ce qui s'est passé ?
02:31 J'ai pas fini la phrase, mais le besoin d'être aimé est inférieur à mon besoin d'être
02:36 libre.
02:37 C'est juste là où ça m'erdouille, vous voyez.
02:38 C'est-à-dire qu'avant, il n'y avait que la liberté et maintenant…
02:41 Et maintenant, j'ai pris conscience que j'étais un être humain comme les autres,
02:44 comme nous tous ici à cette table.
02:45 Et du coup, que j'ai aussi ce petit besoin.
02:47 Mais j'ai ma limite, elle est là.
02:49 Vous avez deux cibles préférées dans le livre.
02:51 Les militants écolos d'abord, notre ami Hugo Clément qui vous inspire beaucoup,
02:55 encore les militants qui jettent de la soupe sur les Van Gogh.
02:57 Ce qui peut paraître paradoxal, parce que vous vivez dans la nature, vous adorez la
03:01 nature, vous êtes un reclus, vous voulez être aimé mais vous n'aimez pas trop être
03:06 avec des gens, le collectif vous opprime.
03:08 Je vous avais tout bon jusque là.
03:09 Ça devrait vous interpeller la démarche de l'environnement.
03:13 Justement, je me suis enfui à un moment du studio et merci de me poser cette question
03:16 parce que j'ai la réponse.
03:18 Vous avez travaillé un peu.
03:19 Parce que c'est évidemment, qui aimerait souiller la planète, la terre, etc.
03:23 Enfin vraiment, moi je me sens la nature, je suis vraiment à moitié moi-même.
03:26 Donc j'ai vraiment besoin.
03:27 Et j'ai retrouvé, c'est vraiment un court extrait dans Les démons d'Ostoyevski,
03:31 parce que c'est une très belle idée la terre, la nature, etc.
03:33 Donc j'ai trouvé ça.
03:34 C'est un personnage des démons qui à l'époque parlait de la montée des idées
03:38 socialistes révolutionnaires.
03:39 Alors voilà, je vous lis.
03:40 « Quelle tristesse et quelle colère s'empare de toute votre âme quand une grande idée
03:46 que vous-même, saintement, vous vénérez depuis longtemps est reprise par des incapables
03:51 qui viennent l'exhiber à d'autres imbéciles comme eux, l'exhiber dans la rue et que
03:55 vous la retrouvez soudain dans un marché opus, méconnaissable, souillé, présenté
04:01 sous un jour absurde, de biais, sans proportion, sans harmonie, hochet d'enfants stupides.
04:07 » C'est votre réponse aux écolos.
04:09 C'est ma petite réponse.
04:10 D'accord.
04:11 Alors là on est passé de Hollande qui fait du trapèze.
04:15 Aïe au Clément.
04:17 Sandrine Rousseau.
04:18 Alors, il y a les femmes.
04:20 Autre cible préférée.
04:21 Deux préférences de gauche.
04:23 Sandrine Rousseau, la Josiane Spinoza, la Marie Curie de l'idée débile, Ursula
04:28 van der Leyen, la Sandrine Rousseau version Erasmus, Greta Thunberg, ce croisement improbable
04:33 entre Fifi Brindaci et la poupée Chucky, Anne Hidalgo, la baronne Haussmann de la
04:38 fulgurance végétale et du compas en mousse.
04:40 Pourquoi elles vous énervent tant les femmes de gauche ?
04:44 C'est plus l'écologie, mais ça rejoint ce que je viens de lire en fait.
04:47 Après vous avez peut-être vu cette séquence formidable puisque je suis sur Europe 1 du
04:52 mardi au jeudi à 8h30.
04:55 Très bonne station de radio pour une autre liberté de ton parfois.
04:59 Et très intéressant.
05:02 Et hier, le créateur, l'artiste a rencontré sa muse.
05:07 Vous avez rencontré Sandrine Rousseau.
05:08 Et vous lui avez fait une déclaration d'amour.
05:10 Et il faut dire qu'elle s'est marrée.
05:11 Alors que qu'est-ce que vous lui mettez dans le livre ?
05:13 C'est pas une page.
05:14 Pour vous c'est le droit à la paresse.
05:16 Dès que vous avez une panne d'inspiration, vous allez voir son fil Twitter.
05:18 Et là, il s'est passé un truc.
05:20 C'est ce que j'ai dit dans la chroniquière.
05:24 C'est-à-dire que vous rencontrez les êtres humains.
05:26 C'est des hommes politiques.
05:28 C'est toujours les idées qui peuvent m'agacer.
05:30 Moi, c'est jamais… Vous voyez même Hugo Clément qui est passé à la radio.
05:32 C'est un mec plutôt sympathique.
05:34 Alors son documentaire, bon, objectivement c'est de la merde.
05:37 Ça, je retire pas un mot.
05:38 Je suis pas d'accord, mais bon.
05:39 Oui, enfin bon, vous travaillez sur France 2.
05:41 J'imagine que vous défendez le truc.
05:43 Ou peut-être pas.
05:44 Mais bon, peu importe.
05:45 Mais voilà, les gens, naturellement, moi je suis pas contre les gens.
05:49 Et Rousseau était plutôt sympathique.
05:50 Et j'avais pas de raison.
05:52 Vous voyez, ça reste des phrases, des mots, un jeu aussi.
05:55 Vous vous êtes dit, si je la taille devant elle, ça le fait pas.
05:58 Donc je lui fais une déclaration d'amour.
06:00 Je viens agressif, elle va être là.
06:01 Enfin, pfff, après, ça veut pas dire que je suis d'accord avec ce qu'elle dit.
06:04 Non, ça on a compris.
06:05 Mais bon, on est des êtres civilisés.
06:06 L'actualité de cette rentrée vous inspire la réforme des retraites.
06:08 À vos yeux de slovéno-suisse, vous les trouvez étranges les Français à se mobiliser ?
06:15 Bah, chez nous c'est 65, en Suisse c'est 65, en Slovénie c'est 65.
06:18 Vous les trouvez paresseux, comme dirait Gérald Darmanin ?
06:20 Les Français ?
06:21 Pfff, y'en a.
06:22 Pas tous.
06:23 Mais j'imagine.
06:24 Non mais en fait c'est pas…
06:27 Mais je suis pas un syndicaliste que vous recevez ce matin.
06:33 Vous parlez de votre dégoût viscéral de tout ce qui ressemble à une injonction morale
06:37 de la modernité.
06:38 J'ai beaucoup de peine avec ça.
06:39 Oui.
06:40 Au fond, quand on lit vos chroniques, on pense à Fabrice Luchini quand il dit « j'aimerais
06:42 être de gauche mais il faut des qualités supérieures, morales et psychiques que je
06:46 n'ai pas ».
06:47 Oui mais ça veut dire que lui il en attribue des spécifiques à la gauche, alors que pour
06:51 moi c'est pareil.
06:52 Y'a des imbéciles à gauche comme à droite, y'a des gens très bien à gauche comme
06:55 à droite.
06:56 Donc, je pense certainement… enfin Giscard a dit ça il y a très longtemps, mais je
07:00 pense pas que la gauche est le monopole du cœur.
07:02 Y'a des gens très sales comme des gens très propres.
07:03 Ce côté anti-moderne, individualiste, misanthrope, vous le dites vous-même, le collectif mauprime,
07:09 d'où vient-il ? Est-ce qu'il vient de l'enfance ? Le fait d'être né en Slovénie,
07:13 un pays qui était communiste quand vous êtes né, d'avoir grandi en Algérie pendant
07:16 les années noires, est-ce que c'est de là que vient votre rapport distancié on
07:19 va dire ?
07:20 Ça n'a pas aidé parce que…
07:21 Aux autres ?
07:22 Oui, ça n'a pas aidé.
07:23 J'étais à l'école en Yougoslavie à l'époque et j'avais une prof d'histoire
07:26 qui était extrêmement sympathique.
07:27 C'était en 5e, 4e, mais qui nous expliquait qu'une fois qu'on allait traverser la
07:31 frontière, on allait se faire manger par des grands méchants capitalistes, qu'il
07:35 y avait une pauvreté extrême, que les gens étaient très malheureux.
07:37 Et puis quand on a traversé la frontière, on s'est rendu compte que les pouilleux
07:40 c'était nous.
07:41 Et que là que pour les boulangeries c'était à Moscou, c'était pas à Paris.
07:44 Donc à un moment vous vous dites « Ah, bon, on prend un peu de recul par rapport à ça ».
07:48 Pour vous comprendre, pour essayer de percer votre mystère, parce que vous êtes assez
07:52 énigmatique, Gaspard Proust.
07:53 Il faut aller dans l'enfance, c'est l'enfance qui décide.
07:56 Il y a quelque chose dans le grandir dans un pays communiste.
07:59 Ensuite, en Algérie, où vous avez vécu des choses…
08:02 C'est plus basique que ça, Alia Salamé.
08:03 C'est juste qu'à 45 ans, j'ai pas envie qu'on m'éduque.
08:07 On fait ça à l'école ou mes parents.
08:09 Mais après, si c'est un pays libre, si c'est un endroit libre, les gens vont à gauche,
08:13 à droite, au centre, dans le respect évidemment du cadre juridique du pays.
08:18 Mais à un moment, je n'ai pas les injonctions morales, je choisis mes références morales.
08:22 Vous n'aimez pas qu'on vous éduque ? Vous n'aimez pas qu'on vous catalogue non plus ?
08:25 Qu'on dise « il est humoriste de droite, anardeux ? »
08:27 Je n'écris pas des trucs pour dire « ah, je veux que les autres réagissent comme si… »
08:32 ou machin comme ça.
08:33 Je m'en fiche de tout ça, vous voyez ?
08:34 Oui, mais alors du coup, est-ce que vous n'êtes pas sorti de l'ambiguïté en allant à la
08:37 soirée de Valeurs Actuelles où intervenaient Éric Zemmour, Valérie Pécresse et Marion
08:41 Maréchal pendant la présidentielle ?
08:43 Vous mettez le texte dans le livre, c'est pour ça que je vous le cite.
08:45 On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment, vous connaissez la formule.
08:48 Je serais sorti de l'ambiguïté si j'étais monté à la tribune en disant « faut voter
08:51 pour un tel ou pour un autre ».
08:53 Je me suis foutu de la gueule, c'est pour ça que j'ai publié le texte.
08:55 Pendant 20 minutes, je me moque des gens qui sont dans la salle et je prends le risque
08:59 en plus, évidemment de me mettre à dos tous les autres, etc.
09:02 Donc c'est un acte pour moi de liberté.
09:04 Je me suis dit « j'y vais, j'y vais pas », je savais très bien les conséquences.
09:08 Mais à un moment, je me dis « mais je ne vis pas pour avoir un bon article dans Télérama
09:11 quand même, la vie c'est autre chose, c'est plus grand, vous êtes d'accord ? »
09:15 Je veux dire, on ne vit pas.
09:17 Vous imaginez la personne sur son lit de mort qui est là et qui dit « j'ai tout raté
09:23 mais j'ai un bon article dans le monde ».
09:25 Vous vous censurez jamais ?
09:27 Est-ce que par exemple vous pourriez écrire une chronique sur Vincent Volloré ?
09:32 Là c'est devenu l'alpha et l'oméga de l'expression.
09:36 Peut-être que vous avez une tradition ici de cracher sur les mecs à qui vous envoyez
09:43 une facture à la fin du mois.
09:44 Moi en fait je travaille d'abord plutôt avec le privé parce que je suis mal à l'aise
09:50 si je devais travailler dans le public, je ne veux pas être financé par une partie
09:53 de gens qui potentiellement ne m'aiment pas.
09:56 Et je travaille avec des privés, peu importe ce qu'ils font, pour moi ce qui compte c'est
10:00 qu'ils me laissent la liberté et qu'ils me payent bien.
10:03 C'est à peu près tout.
10:04 Une fois que j'ai ça, il y a ça à l'aise.
10:06 Vous n'écrirez pas donc une chronique contre Vincent Volloré ?
10:08 Pourquoi pas, si j'ai envie de le dire.
10:11 Mais en fait c'est pas le sujet.
10:12 Pour vous c'est ça la liberté d'expression ?
10:14 Non, c'est bien plus que ça.
10:16 Dernière question, parce qu'il faut qu'on arrête.
10:17 Est-ce que vous pensez que c'est lui qui tient mon stylo ?
10:19 Non, bien évidemment pas.
10:20 Dernière question, j'ai lu dans le Figaro que vous écoutiez France Inter en secret.
10:28 Non.
10:29 J'écoute Wagner pour me détendre et France Inter pour m'énerver.
10:33 Donc on est content de savoir que vous écoutez Inter et pas votre radio.
10:36 Je ne dis pas toujours.
10:38 Je dis seulement quand je fais de la route.
10:40 Qu'est-ce qui vous énerve ?
10:41 Non, mais je suis tombé sur la fameuse chronique éco-anxiété.
10:45 C'est des trucs qui incitent à la haine parfois.
10:50 Vous avez envie de tamponner la voiture devant vous, je vous assure.
10:52 Je suis un cartésien désabusé, je pense donc.
10:54 Je pense donc, je suis, mais je m'en fous.
10:57 C'est le sous-titre de votre livre.
11:01 « Mea culpa, gesparprus ».
11:03 Moi, en tout cas, j'ai beaucoup ri.
11:04 Merci et belle journée.

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