L’artiste Clara Luciani est l’invitée de Totémic pour évoquer son parcours et son album "Cœur", onze chansons auxquelles elle aurait fixé une mission : faire danser, écrire la bande son d’une légèreté.
Retrouvez tous les invités de Totémic sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/totemic
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00:00 * Extrait de « La vie de Clara Luciani » de Claude Debussy *
00:13 Je me souviens d'une soirée de confinement, un soir d'avril 2020 précisément.
00:18 France Inter captait un concert depuis l'endroit où l'artiste se trouvait.
00:23 Et l'artiste c'était vous, Clara Luciani.
00:25 Vous étiez coincée en Écosse et vous avez chanté,
00:28 et vous avez joué de la guitare face au micro d'un téléphone portable posé sur un verre.
00:33 Et ce concert a eu lieu magiquement avec les moyens du bord.
00:37 Trois ans après ce concert de poche,
00:40 vous venez de terminer une tournée triomphale à Bercy
00:42 et ce soir vous êtes nommée aux Victoires de la Musique dans deux catégories
00:46 grâce à votre album « Chœur » 11 chansons
00:49 auxquelles vous auriez fixé une mission,
00:52 faire danser, écrire la bande-son d'une légèreté.
00:55 Bonjour, bienvenue, c'est Totemic en public avec Clara Luciani.
01:00 *Totemic, Rebecca Manzoni sur France Inter*
01:06 La semaine dernière dans Totemic, Aldebert a choisi de reprendre une chanson d'Yves Montand
01:10 et finalement avec vous, Clara Luciani, Yves Montand revient en deuxième semaine
01:14 puisque vous avez choisi l'un de ses tubes et c'est celui-ci.
01:18 *Totemic, Yves Montand*
01:23 Trois petites notes de musique
01:26 ont plié boutique au creux du souvenir
01:32 S'en est fini de leur tapage
01:35 elles tournent la page et vont s'endormir
01:40 Mais un jour sans crier gare
01:45 elles vous reviennent en mémoire
01:49 Toi, tu voulais oublier
01:55 Le micro est à vous Clara, pour parler de « Trois petites notes de musique » par Yves Montand.
02:01 Je crois que c'est la première fois que j'arrive à l'entendre sans pleurer,
02:05 donc je suis assez fière de moi.
02:08 C'est une chanson qui est...
02:11 C'est la chanson de mon grand-père.
02:12 Et quand je l'entends, j'ai presque l'impression de l'entendre lui parce que je crois que
02:16 vous savez comme c'est, quand on est vraiment fan de quelqu'un, on est dans une...
02:20 Parfois un certain mimétisme et je sais pas si c'est vraiment ce qui s'est passé, mais
02:24 je trouvais que mon grand-père avait des intonations comme ça dans la voix d'Yves Montand,
02:28 à force de l'écouter et à force de l'aimer autant.
02:30 Donc quand j'entends cette chanson-là, j'ai l'impression finalement d'entendre un peu mon grand-père.
02:34 Et c'était sa chanson préférée.
02:37 Et c'est une chanson que j'ai écoutée beaucoup avant de monter sur scène pour me donner un peu l'impression
02:42 qu'il était avec moi. On parlait tout à l'heure des années Covid, ces années qui ont été
02:48 difficiles aussi pour moi parce que je l'ai justement perdu, cette personne si précieuse
02:51 de cette maladie-là.
02:54 Et c'était l'ange gardien de mon enfance.
02:58 Et puis ma star, la star de ma vie, la star du documentaire qui vient de sortir,
03:04 qui retrace un petit peu l'histoire de l'album "Cœur" et de la tournée "De Respire Encore".
03:09 Et voilà, j'avais envie de la partager avec vous.
03:12 - Vous disiez parfois quand on aime énormément quelqu'un, on est tenté de l'imiter.
03:16 Vous, au départ, vous avez imité qui alors ?
03:18 - J'ai imité beaucoup de personnes.
03:20 Je crois que peut-être la personne que j'ai le plus imité, c'était Nico du Velvet en Organs.
03:25 Parce que j'avais une voix très grave avec laquelle je n'étais pas tout à fait à l'aise et je ne savais pas bien quoi en faire.
03:30 Et quand j'ai découvert Nico, ça a été une révélation.
03:34 Je me suis dit, on peut faire quelque chose de ce truc-là, de ce truc un peu profond.
03:38 - Ce truc vocal.
03:40 - Ce truc vocal.
03:42 Et quand j'étais petite fille, j'étais vraiment complexée d'avoir une voix grave parce que...
03:48 Je me rappelle d'une chose qui m'est arrivée quand j'avais peut-être 8 ans.
03:52 Il y avait le prof qui nous avait fait faire une activité chorale et qui avait fait mettre les filles d'un côté, les garçons de l'autre.
03:57 Et puis moi, quand j'avais chanté, il m'avait fait me déplacer avec les garçons,
04:00 en me disant que ma voix était beaucoup trop grave pour être avec les filles.
04:02 Alors aujourd'hui, ça me ferait beaucoup rire et ça me flatterait presque qu'on trouve ma voix originale.
04:08 Mais à l'époque, évidemment, quand on est petit, on a juste une seule envie, c'est d'être absolument comme tout le monde, de ne pas dépasser du moule.
04:16 Et donc, ça m'avait un peu vexée, cette histoire-là.
04:20 Et j'ai mis très longtemps à accepter ma voix.
04:22 Et en fait, Nico a vraiment une place importante dans la construction de ma voix.
04:33 - Nico et le disco, puisque "Coeur" c'est vraiment la colonne vertébrale de "Coeur".
04:38 Et dans la réédition du disque, vous faites des reprises de "Sister Sledge", de "Donna Summer", de "Cool & the Gang".
04:44 Quand soudain, la chanson "Bravo, tu as gagné".
04:49 Et l'interprète qui vient en tête, en France en tout cas, c'est Mireille Mathieu.
04:53 - Oui.
04:54 Je ne sais pas si...
04:56 Je ne peux pas vous dire que le disco m'est fondamentalement constituée ou modifiée au même point que Nico ou François Zardy.
05:10 Pour moi, le disco, tel que je l'ai voulu sur ce disque-là, c'est un vêtement, presque.
05:17 C'est quelque chose qui est venu vêtir des chansons.
05:22 Je ne crois pas que je resterai toujours dans cette dynamique-là.
05:27 Ça m'a beaucoup amusée de le faire.
05:29 Et au-delà de ça, ça ne m'a pas seulement amusée, ça m'a aussi guéri de beaucoup de choses.
05:33 J'avais besoin de ce style musical-là à ce moment-là de ma vie.
05:36 Et je crois que d'ailleurs, ça a été le cas de beaucoup de gens, puisqu'ensuite, c'est devenu un peu une tendance finalement.
05:42 Mais je ne crois pas pouvoir dire que le disco ait vraiment autant d'importance, par exemple, que ces personnages que je vous citais plus tôt.
05:49 C'est vraiment pour moi l'idée de vêtir quelque chose.
05:54 Et je trouve ça formidable, d'ailleurs, quand on est chanteur, de pouvoir se dire OK, le troisième album qui va arriver, qu'est-ce que je vais pouvoir me mettre ?
06:02 Un peu comme quand on est devant la penderie le matin et qu'on se dit que tout est possible.
06:07 Et c'est ça qui m'excite aussi tellement dans le métier que je fais.
06:11 Et c'est ce que j'admire aussi dans pas mal de carrières, notamment celle de Madonna ou de David Bowie.
06:18 C'est l'idée qu'il y a comme ça le personnage essentiel et puis ensuite, 1000 univers possibles, 1000 vêtements imaginables.
06:27 Alors, l'un de vos couturiers assez essentiels pour ce qui concerne la musique, c'est un garçon qui s'appelle Ambroise Villon,
06:33 qui se fait aussi appeler Sage, qui a signé des disques en solo, qui a fait partie du groupe des Revolvers.
06:39 Et on va écouter l'extrait d'une séance de travail en studio.
06:43 Génial. Vous êtes tous les deux.
06:45 C'est l'extrait précisément du documentaire de Philippe Lézyn que vous avez cité.
06:50 Et là, vous bossez sur la chanson "Respire encore".
06:53 On écoute.
06:54 Est-ce que ça te dit de faire plutôt que faire "Ah ah" de faire "Ah ah" ?
06:58 C'est-à-dire ?
07:00 Ah ah.
07:02 Ah ah.
07:04 Un "H" un peu quoi.
07:06 C'est rythmiquement que c'est un peu différent.
07:08 Ouais, c'est pas mal ça.
07:10 Tu vois, ça s'arrête avant.
07:12 Il faut qu'on le fasse maintenant parce que j'ai oublié.
07:14 Ok, tout de suite alors. On enregistre.
07:16 Un, deux, trois, quatre.
07:18 Ah ah.
07:20 Ah ah.
07:21 Je pense qu'il peut y avoir une vraie montée.
07:23 Je fais "Allez, allez, respire encore".
07:25 Tu sais, une montée à la batterie.
07:27 Allez, respire encore.
07:29 Allez.
07:31 Non ?
07:31 Si, si, si, à fond.
07:33 Il faut le penser tube. Pour moi, ce morceau, c'est un potentiel single de ouf.
07:37 Ah ouais ?
07:37 Ouais, franchement.
07:39 Le couplet, il a réécrit un peu, mais je pense que c'est un putain de potentiel single.
07:42 Donc toi, t'as espoir ?
07:43 J'ai plus qu'espoir. J'ai foi.
07:45 Allez, respire encore.
07:49 Allez, respire encore.
07:53 Allez, respire encore.
07:58 Oh, il faut que ça bouge.
08:00 Finalement, les chansons, elles naissent évidemment par hasard,
08:05 mais d'une envie comme ça, sur le moment, en disant "Bon, allez, j'ai envie d'une accélération de batterie en studio".
08:10 Ouais, c'est ça qui est marrant. Et on voit même d'ailleurs...
08:12 Moi, je me souviens que j'étais pas contente du refrain original que j'avais trouvé sur cette chanson-là.
08:18 Et puis, on me voit effectivement à un moment donné au piano qui dit...
08:22 J'entends un truc qui dit "Faut que ça respire encore".
08:25 Et c'est drôle, moi, j'avais oublié tous ces moments-là.
08:28 Je me souvenais plus exactement de comment cette chanson était née précisément,
08:32 parce que j'étais tellement la tête dans le guidon à essayer de trouver comment sauver cette chanson-là,
08:37 parce qu'on était, je crois, peut-être cinq jours de la fin de l'enregistrement de l'album.
08:42 Ah, donc elle a failli ne pas exister ?
08:43 Ah oui, totalement. Parce que j'étais pas contente de ce refrain.
08:45 Je m'en souviens même plus d'ailleurs comment il faisait, mais il n'était pas suffisamment bien.
08:49 Et ça, Ambroise était d'accord avec moi.
08:51 Et puis, à un moment donné, à une pause déjeuner, en fait,
08:54 je me dis "Bon, allez, essayons une dernière fois, peut-être qu'il y a quelque chose qui peut venir".
08:58 Et c'est ça qui est super beau.
09:01 C'est que Philippe, en fait, était caché dans la pièce.
09:03 Philippe ?
09:04 Pardon, Philippe qui a réalisé ce documentaire-là.
09:06 Philippe Lézun ?
09:07 Oui. Et que j'ai tellement aimé et avec qui je me suis sentie tellement à l'aise
09:11 que j'ai oublié sa présence en permanence.
09:14 Et surtout, ce jour-là, honnêtement, je savais même pas qu'il était présent dans la pièce.
09:18 Et c'est formidable, ça fait des souvenirs magnifiques.
09:21 Est-ce que vous-même, vous aimez entrer dans les coulisses de fabrication des chansons des autres ?
09:25 Ah oui, moi, j'ai adoré "Get Back" des Beatles, par exemple.
09:28 Je trouvais que c'était...
09:30 Le documentaire "Fleuve".
09:31 C'était fascinant.
09:33 Et puis, il y avait un côté presque, bon, ça, c'est un peu voyeuriste,
09:36 mais il y avait un côté presque télé-réalité, de les voir comme ça.
09:41 On n'a pas l'habitude d'avoir ce degré d'intimité-là avec des icônes comme ça des années 60-70,
09:46 parce qu'on n'a pas, comme on a aujourd'hui, les réseaux sociaux, tout ça.
09:49 Donc, il y a quand même une vraie part de mystère qui est conservée autour de ces personnages-là.
09:55 Et là, tout à coup, on les voit aller en studio...
09:58 Écrire "Get Back", qui est sous la guitare de McCartney, petit à petit.
10:01 Un degré d'intimité, presque de voyeurisme, qui est hyper perturbant, presque.
10:07 Vous parliez du couplet, du refrain, pardon, de "Respire encore", dont vous n'étiez pas satisfaites.
10:12 Comment vous choisissez les mots ?
10:13 Vous avez un registre de vocabulaire qui est assez particulier quand même,
10:17 qui est un peu suranné, si on peut dire.
10:19 - Il faut aller... En fait, je crois que je me demande toujours, est-ce que je dirais ça ?
10:24 Est-ce que...
10:25 - Est-ce que vous diriez "Instagram", par exemple ?
10:27 - Non.
10:28 Mais parce que j'en parle pas beaucoup, non plus, dans ma vie, quoi.
10:33 Mais j'aime pas ce mot, en plus, je trouve qu'il est pas...
10:35 Ma mère, elle dit "Amstramgram".
10:38 Elle le fait pas exprès, mais je trouve ça mignon. Peut-être que je devrais dire ça, plutôt.
10:42 Mais il faut que ce soit à la fois poétique, c'est vrai,
10:47 et à la fois, il faut que ça ressemble à la vie.
10:49 C'est un peu comme... Un peu comme la nouvelle vague, en fait.
10:53 Un peu comme... - Comme le cinéma ?
10:54 - Ouais, un peu la même démarche, je trouve.
10:57 Parce qu'à la fois, c'est très poétisé et à la fois, ça ressemble à la vie.
11:01 C'est un truc assez fidèle.
11:03 Et moi, c'est pareil.
11:05 C'est pour ça que j'aime bien quand les mots viennent avec la musique,
11:07 parce que je me dis, il y a quelque chose de spontané, d'assez peu travaillé.
11:10 Donc, je suis presque certaine d'être fidèle à la façon à laquelle je parle.
11:15 - Le fait que ce soit assez peu travaillé, finalement, est assez rassurant.
11:18 - C'est super important pour moi.
11:20 Je crois que c'est toujours assez mauvais signe quand on passe vraiment beaucoup de temps...
11:24 Enfin, en tout cas, chez moi.
11:25 Quand je commence à réécrire et réécrire et réécrire une chanson,
11:30 en principe, ça se finit pas super bien.
11:32 Je parle des paroles, surtout.
11:33 - Le titre "Tout le monde sauf toi", qu'on va écouter dans une poignée de minutes,
11:36 il s'est écrit vite ?
11:39 - Oui, très vite. En même temps que la musique.
11:41 Pour le coup, ça dépend.
11:43 Parfois, j'ai tout en même temps.
11:46 Puis j'arrive, je vais voir Ambroise, je lui dis "Regarde, j'ai cette chanson-là".
11:48 Là, pour le coup, je la dois vraiment à Ambroise,
11:52 parce qu'on était dans le sud de la France et il jouait un truc au piano.
11:55 Et puis, j'ai trouvé cette mélodie par-dessus.
11:57 Et en même temps que j'ai trouvé la mélodie, j'ai chanté "Tout le monde sauf toi",
12:00 les paroles du refrain, déjà.
12:02 - C'est qui, ce "toi" dans cette chanson, alors ?
12:03 - Alors, c'est beaucoup moins romantique que ça en a l'air.
12:06 Enfin, si, je sais pas.
12:08 C'est une amitié à la base, en fait.
12:10 En fait, je suis retournée dans le sud de la France pour écrire.
12:15 Et je me suis amusée à recontacter les personnes avec qui j'étais à la fac ou au lycée.
12:22 Et j'avais besoin de les retrouver.
12:24 Et j'avais besoin de retrouver aussi, je crois,
12:28 le regard de personnes qui me connaissaient avant que je sois médiatisée,
12:31 que je passe à la télévision.
12:33 Retrouver comme ça la neutralité, je crois, de leur regard sur moi.
12:36 - Pour quelle raison vous aviez besoin de ça ?
12:40 - Parce que je crois que j'aimais pas trop l'idée que...
12:46 Je trouve ça assez injuste le fait que maintenant...
12:48 Enfin, parfois, pas tout...
12:49 Évidemment, je suis pas Marie-Alain Carré,
12:51 il y a plein de gens qui me connaissent pas, bien sûr,
12:52 mais souvent, quand je rencontre de nouvelles personnes,
12:55 maintenant, c'est pas tout à fait équitable parce qu'elles, elles me connaissent un peu déjà.
12:59 Et ce truc-là, moi, ça me perturbe un petit peu.
13:03 L'idée qu'on puisse taper mon nom sur Internet et puis savoir ma taille,
13:07 quel âge j'ai, mon plat préféré et tout, c'est bizarre, non ?
13:11 - Et en même temps, vous êtes présente aussi sur les réseaux sociaux
13:13 et notamment sur Instagram, vous êtes très active.
13:15 - Oh, très active, je sais pas.
13:17 Moi, je trouve que par rapport aux gens de ma génération, franchement,
13:20 je mets assez peu de trucs intimes, par exemple.
13:23 Je parle beaucoup des concerts, tout ça,
13:25 parce que j'ai l'impression que c'est un outil pour promouvoir ma musique,
13:30 mais je mets vraiment pas beaucoup de choses personnelles.
13:32 Je suis très, très mal à l'aise avec ça, je suis très timide.
13:35 - On a perdu de vue la chanson "Tout le monde sauf toi".
13:38 - Oui, et donc, j'ai retrouvé un ami à moi qui s'appelle Séraphin.
13:43 Et je le trouvais super parce que moi,
13:48 j'étais en train d'entrer dans un univers qui me ressemblait sans me ressembler,
13:52 dans le sens où j'adore ma vie, attention, je veux pas du tout...
13:56 Je trouve ça formidable ce que je vis,
13:57 mais il y a aussi toute une partie un peu plus paillette et mondanité
14:01 qui me ressemble assez peu et dans laquelle je me sens pas tout à fait à l'aise
14:04 et ni tout à fait la bienvenue d'ailleurs.
14:08 Et je me disais, quand je suis partie dans le sud,
14:12 j'avais aussi espoir de retrouver un truc beaucoup plus authentique,
14:15 beaucoup plus réel, beaucoup plus moi.
14:18 Et j'ai retrouvé ce garçon qui s'appelle Séraphin.
14:21 Et ça m'a tellement rassurée de voir qu'il avait absolument pas changé
14:24 et il avait toujours pas de réseaux sociaux, il avait toujours pas de portable.
14:27 Il en a rien à foutre, en fait, de rien.
14:29 Et j'étais tellement admirative de sa vie à lui.
14:32 Je me suis dit, peut-être que je peux quand même un petit peu m'en inspirer,
14:35 parce que je crois qu'il y a beaucoup de sagesse dans ce personnage-là.
14:38 Et je trouvais qu'il ressemblait à personne.
14:39 Je connais personne d'autre qui vit avec ce niveau-là de liberté, en fait, et d'indépendance.
14:45 Alors on écoute son portrait en chanson.
14:46 Oui.
14:48 [Musique]
14:58 Tout le monde dit la même chose
15:01 Dans le même langage morose
15:04 Tout le monde adore parler de soi
15:08 Tout le monde s'embrasse sous les portiques
15:11 Tout le monde a soif d'exotisme
15:14 Et tout le monde reste au même endroit
15:18 Tout le monde se ressemble sauf toi
15:21 Tu ne fais rien de tout ça
15:24 Et ça me fait t'aimer comme personne
15:28 Tout le monde se ressemble sauf toi
15:32 Tu ne fais rien de tout ça
15:34 Et ça me fait t'aimer comme personne
15:38 Tout le monde se connaît un peu
15:41 Puis tout le monde s'oublie au milieu
15:44 D'une vie sans histoire et sans feu
15:48 Tout le monde ment sans sourcier
15:52 Tout le monde emporte ses secrets
15:54 Dans la tombe tout le monde tombe
15:58 Tout le monde se ressemble sauf toi
16:02 Tu ne fais rien de tout ça
16:04 Et ça me fait t'aimer comme personne
16:08 Tout le monde se ressemble sauf toi
16:12 Tu ne fais rien de tout ça
16:15 Et ça me fait t'aimer comme personne
16:19 Toi tu as ton style et tes manières
16:32 Et t'as toujours l'air d'arriver
16:35 D'un long voyage en mer
16:39 Toi tu as tes ombres et tes mystères
16:42 Tu vas le cœur en pendoulière
16:45 Et moi je veux juste te regarder faire
16:49 Tout le monde se ressemble sauf toi
16:52 Tu ne fais rien de tout ça
16:55 Et ça me fait t'aimer comme personne
16:59 Tout le monde se ressemble sauf toi
17:03 Tu ne fais rien de tout ça
17:05 Et ça me fait t'aimer comme personne
17:30 Clara Luciani en version chantée, Clara Luciani en version parlée, c'est Totemic en public.
17:35 L'ambition de Chœur c'était notamment de faire danser,
17:43 mais est-ce que quand on danse finalement on risque pas de perdre le texte de vue ?
17:48 Est-ce que vous n'avez pas peur de ça ?
17:49 Si bien sûr, c'était un pari, mais c'était déjà le pari de la grenade de toute façon.
17:55 C'est très compliqué ça, surtout je crois en France,
17:59 j'ai l'impression que c'est très français de se dire "oh ça fait danser"
18:03 du coup c'est forcément léger, voire un peu "concon".
18:07 Tu devrais dire "concon" !
18:10 Ah bah oui, vous dites "cul" dans une chanson, vous pouvez dire "concon" mais tout est permis en fait.
18:15 C'est vrai, la décadence.
18:17 Mais ouais, moi ça m'a embêtée parce que
18:23 je me suis vraiment donné du mal quand même sur les paroles de ces chansons-là,
18:26 et j'ai pas aimé qu'elles soient parfois un petit peu décrédibilisées.
18:30 Vous avez eu cette sensation ?
18:31 Un petit peu, mais vous savez il y a ce truc,
18:34 je sais pas si c'est français ou si c'est juste humain, j'en sais rien,
18:37 mais dès que des chansons deviennent un peu trop populaires,
18:40 elles commencent à être snobées par une certaine tranche de population.
18:46 J'ai eu cette impression.
18:47 Par snobisme un peu ?
18:48 Ouais, complète.
18:50 Vous avez parlé de la nouvelle vague, j'aimerais bien qu'on parle de littérature,
18:53 parce que finalement, est-ce que la littérature vous influence plus pour écrire que la musique ?
18:59 Oh, un peu les deux.
19:01 En tout cas, je sais qu'il y a des femmes qui m'ont guidée.
19:08 Je parlais tout à l'heure de Nico qui m'a aidée à trouver ma voix, Vox.
19:16 J'ai aussi des femmes qui m'ont aidée à trouver mon ton, quelque part.
19:22 Je pense beaucoup à Agnès Hernand et je pense à la musicalité, presque percussive,
19:29 Marguerite Duras.
19:31 Quand j'ai découvert Duras, c'était quelque chose.
19:33 Déjà pour le rythme, le ton, mais aussi la sensualité.
19:39 C'était la première femme que je lisais qui parlait de sensualité.
19:43 Et en plus, j'ai fait cette lecture de Laman assez tôt dans ma vie,
19:46 peut-être vers 14 ans, 15 ans.
19:48 J'avais l'impression aussi d'entrevoir une porte vers un univers que je ne connaissais pas du tout.
19:53 Et puis, évidemment, qui me moustillait beaucoup.
19:57 Et je crois que ces femmes m'ont donné du courage, d'une part pour raconter peut-être le quotidien,
20:06 la quotidienneté de certains jazz, me dire "bon, on s'en fiche, parfois,
20:11 je n'ai pas de grands sujets pour mes chansons, mais j'ai quand même le droit d'écrire sur ma vie, tout simplement".
20:18 Ça, je crois que je dois vraiment cette révélation à Annie Ernaud.
20:22 Et puis, je crois qu'en osant en parler, si je me suis permis de placer ce mot "cul" dans le reste,
20:30 je crois que je le dois un peu à Duras aussi, parce que je la trouvais comme ça un peu irrévérencieuse parfois.
20:39 Je trouvais ça trop bien. Un peu punk.
20:42 - Vous le décririez comment, le ton d'Annie Ernaud, vous ?
20:46 - Je le compare souvent à la voix de François Zardy.
20:53 Pour moi, c'est une écriture blanche, une voix blanche, la pureté, la flèche qui va au chœur sans prendre de détour inutile.
21:01 - Mais d'ailleurs, il y a une des chansons de l'album "Chœur" qui porte le titre d'un des romans d'Annie Ernaud.
21:06 - Oui, "La place".
21:08 Oui, parce que je me suis un petit peu reconnue dans ce récit-là, dans le retour aux origines,
21:14 dans le fait parfois de revenir là où on a grandi et de sentir que les choses ont changé, le regard sur nous a changé.
21:24 On n'est plus tout à fait chez soi là où on est né. On n'est pas tout à fait non plus chez soi là où on vit.
21:30 Je me sentais ballotée entre deux univers.
21:34 - Mais tout à l'heure, vous disiez que vous aviez eu la sensation de ne pas être la bienvenue.
21:38 - À Paris ? - Oui.
21:39 - Un petit peu, parfois.
21:41 - Qu'est-ce qui vous fait dire ça ?
21:44 - Je ne sais pas, probablement mon manque de confiance en moi plus qu'autre chose, pour être tout à fait honnête.
21:48 Mais j'avais l'impression, en tout cas dans les premières années, que je n'avais pas les codes,
21:52 que je ne savais pas trop comment il fallait que je me comporte.
21:57 Quand je suis allée dans les premiers cocktails, les premiers trucs, le Fashion Week, tout ça.
22:01 - Donnez-nous votre mode d'emploi.
22:02 - Moi, je me cherche encore.
22:04 Mais moi, j'ai pris une décision assez radicale à un moment donné.
22:09 Je me suis dit "merde".
22:11 Voilà, ça c'est devenu mon mode d'emploi. Je me suis dit en fait, je serai moi.
22:15 Et c'est vrai que je ne m'encombre plus du tout de l'idée de créer un personnage mondain ou même scénique.
22:22 D'ailleurs, je suis tout le temps très fidèle à ce que je suis.
22:28 Et je suis contente parce que je crois que c'est quelque chose qui se voit beaucoup, notamment dans le documentaire.
22:34 Je l'ai vu et je me suis dit "ouais, c'est moi".
22:37 - Pour revenir sur "La Place" et sur son texte, à un moment, vous dites, vous chantez "je me suis un peu abîmée".
22:46 Qu'est-ce qui se serait abîmé ?
22:49 - Oh, une certaine part d'innocence, peut-être.
22:57 Ce ne sont pas non plus les illusions perdues, mais c'est vrai que dans l'arrivée à Paris et dans la...
23:05 Je me suis heurtée à certaines réalités, peut-être que je n'envisageais pas.
23:09 J'ai passé beaucoup de temps à travailler, à avoir beaucoup de petits boulots
23:15 dans lesquels j'avais l'impression de perdre beaucoup d'énergie et de vieillir un peu prématurément, je crois.
23:21 Par rapport à d'autres amies qui venaient de familles plus bourgeoises.
23:25 Et j'avais l'impression qu'elles étaient peut-être plus épargnées par la vie, certains aspects.
23:30 - En tout cas, plus on avance dans un parcours, et notamment dans le parcours de chanteuse, autrice, compositrice,
23:37 l'enjeu, c'est finalement de garder, je ne sais pas si on peut appeler ça de l'innocence,
23:42 mais la spontanéité d'un geste, quoi.
23:45 D'écrire des chansons sans calcul, sans arrière-pensée, de se délester un peu.
23:52 - Oui, ça, c'est très compliqué.
23:53 Notamment, moi, je sais qu'après le petit succès de "La Grenade", ça a été très compliqué.
24:00 Enfin, le petit succès, ça a mis du temps à décoller, mais c'est devenu un hymne, quand même.
24:06 - Ça a pris beaucoup d'ampleur.
24:10 Et après ça, c'était presque une chanson qui m'encombrait un peu parce que j'y pensais tout le temps.
24:16 On m'arrêtait dans la rue pour ne parler que de cette chanson-là.
24:19 On m'appelait même "La Grenade".
24:20 On ne connaissait pas mon prénom.
24:22 Et je me disais, bon, d'accord, qu'est-ce que je fais après ça, en fait ?
24:28 Et c'est là où il a fallu un peu que je retrouve ce que vous décrivez, qui est un espèce de premier élan.
24:38 Moi, j'ai écrit ces chansons-là comme un journal intime.
24:41 Donc, comment est-ce que je fais pour en écrire d'autres en me disant "cette fois-ci, elles seront entendues, elles vont peut-être passer à la radio" ?
24:47 Et le piège, surtout, dans lequel il ne faut absolument pas tomber, mais c'est très difficile, c'est de se dire "si je fais ça, est-ce que les gens vont aimer ?
24:54 Est-ce qu'ils ont envie d'entendre ça ?
24:56 Est-ce qu'il faut absolument se dégager de ça ?"
25:00 Et c'est très difficile parce qu'évidemment, quand on a reçu de l'amour, on a encore envie d'en avoir et on a envie de plaire.
25:08 - Toujours plus, quoi. - Oui. Et ça, c'est très difficile.
25:11 - Ce matin, vous avez voulu écouter la voix d'une femme qui chante ses propres chansons depuis très peu de temps, finalement, parce qu'elle a surtout chanté celle de Gainsbourg.
25:21 C'est Jane Birkin.
25:22 On va l'écouter dans un extrait de l'émission Pop & Co de novembre 2020, où elle parle d'un moment précis de son parcours, où elle jouait au Bataclan.
25:29 Elle était sur la scène du Bataclan et elle avait décidé de totalement changer de silhouette, de se couper les cheveux.
25:39 Et voici la suite.
25:40 - Je suis allée à Western House et j'ai trouvé une paire de pantalons trop grands et une petite ceinture, une chemise de Agnès Bédom et mes tennis où j'avais enlevé mes lacets.
25:53 Et je pense que c'est... Je pensais que c'était un risque, que si j'avais pas d'accent et si j'avais pas de cette...
26:01 J'aime pas utiliser le mot "look", mais je ne sais pas comment dire.
26:05 Si je n'étais plus ça, je pense qu'il avait peur pour moi.
26:08 Et moi, j'étais un garçon et c'était quelque chose que je rêvais de redevenir.
26:13 En fait, je me sentais aussi libre que l'enfance, en fait.
26:18 Débarrassée de cette côté femme.
26:23 Est-ce que vous dites femme quand vous parlez de vous?
26:26 Jamais. J'étais fille, vieille fille même.
26:34 - Génial. J'adore Jane Birkin.
26:38 J'ai regardé pendant les dernières dates de la tournée, le documentaire de Didier Vareau, que j'ai trouvé formidable.
26:43 Et je pensais pas que je pouvais l'aimer plus, mais je l'aime encore plus maintenant.
26:47 Et c'est drôle que vous ayez choisi cet extrait, parce que évidemment, ça me touche beaucoup parce que.
26:55 C'est quelqu'un qui m'a beaucoup aidé à accepter le fait que j'aurais toujours comme ça un peu l'impression d'être un garçon manqué.
27:05 J'ai toujours été assez androgyne. Je n'ai jamais mis une robe sur scène.
27:10 C'est pas mon truc, quoi. Et. Je sais pas quand j'ai regardé ce documentaire là, je me suis sentie particulièrement touchée aussi parce que.
27:21 Je crois qu'on partage aussi cette blessure de l'enfance, de l'histoire un peu du vilain petit canard.
27:28 Et je crois qu'on se libère jamais tout à fait de ça.
27:33 J'ai l'impression de. Alors même qu'en plus de ça, pour le coup, Jane Mirkin est une femme sublime et que voilà, elle a derrière elle une carrière immense.
27:43 J'ai encore l'impression de. De voir ces blessures là dont elle parle, ces années d'internat ou.
27:52 Ouais, je crois que c'est ce qui me touche particulièrement chez cette femme là, c'est de voir comment elle s'est construite autour de ces blessures de l'enfance et de son identité.
28:02 Mais elle parle, elle parle du costume et j'aimerais bien revenir un tout petit peu sur les vôtres.
28:08 Quand vous avez sorti votre première chanson sous le titre Monstre d'amour, vous aviez le regard, les yeux charbonneux, une cape, un sombrero avec une lanière autour du cou.
28:20 Et alors quoi? Je sais pas. Trois ans plus tard, réédition de chœur, le costume à paillettes.
28:28 Changement total. Oui, c'est vrai. Le premier EP, c'était vraiment, c'était plus une armure qu'un costume.
28:39 A vrai dire, c'était un apparat de superhéroïne pour me donner un petit peu de courage.
28:45 J'avais comme ça un déguisement, presque plus qu'un costume, je trouve, de scène.
28:49 C'était vraiment un déguisement et j'en avais besoin, je pense, pour me donner de la consistance et du courage.
28:55 Et il y a eu un peu un effeuillage d'année en année. Et ce costume que j'ai porté dernièrement sur scène, ce que j'aime, c'est qu'il est couvert de cœur.
29:05 Donc, en fait, finalement, la ligne conductrice à travers ces années et ces disques qui se ressemblent, sans se ressembler, c'est toujours le sentiment, l'amour.
29:18 Depuis, pas mal de rêves se sont réalisés. Finalement, oui, ça, ça peut être un souci.
29:23 Oui, parce que parce qu'ils ne sont pas censés se réaliser.
29:26 En fait, c'est un truc que j'ai appris en thérapie.
29:34 C'est pas censé se réaliser. Un rêve, on n'est pas, on n'est pas préparé.
29:38 On n'est pas préparé à ça. C'est un peu la carotte pour avancer dans la vie, mais on n'est pas censé en réaliser.
29:44 En tout cas, autant que j'en ai réalisé. C'est vrai que je ne veux pas du tout me plaindre.
29:47 Encore une fois, je suis tellement, tellement heureuse de la vie que j'ai, mais j'ai dû faire quelque part une forme de deuil.
29:53 Parce que quand on réalise un rêve, eh bien, on le tue.
29:57 On doit s'en séparer. On doit s'en trouver des nouveaux.
29:59 Et moi, ça a été un vrai choc quand on a fait la pause pendant le confinement.
30:04 Je me suis dit mais ça, j'ai coché ces cases là.
30:07 Qu'est ce que je fais maintenant? Ça, c'est ça qui s'est passé, en fait.
30:11 Alors après, après cette tournée, après ce succès, après CITUB et notamment Bercy, le prochain rêve, ce serait quoi?
30:18 Mais j'ai réalisé qu'il était tout simple. En fait, ça m'a mis un peu de temps, mais j'ai réalisé que mon rêve, c'est que le rêve continue.
30:27 Dans le sens où c'est pas facile.
30:33 Attention, je suis. J'ai bien conscience que d'en être là où j'en suis aujourd'hui, c'est déjà fantastique.
30:41 Mais ce qui serait encore plus fantastique, c'est que ça puisse durer.
30:44 Je veux dire, c'est quand même rare. Les carrières comme ça qui durent.
30:48 On parlait de Jane Birkin. Moi, c'est mon rêve d'avoir une carrière aussi longue que Jane Birkin et d'être, de chanter comme ça pendant des décennies.
30:56 C'est formidable. Mais une réalité, c'est que je crois de plus en plus rare et encore plus rare, peut être quand on est une femme, parce qu'il y a une forme aussi d'injustice.
31:07 Parce que j'ai l'impression qu'on devient un peu plus invisible quand on quand on vieillit que les hommes.
31:12 J'ai l'impression qu'il y a pas mal de chanteurs hommes qui sont encore sous les projecteurs jusqu'à très tard et qu'on trouve très sexy quand ils ont les cheveux grisonnants.
31:21 Et j'ai l'impression que c'est beaucoup plus compliqué en tant que femme de rester.
31:26 Et j'adorerais pouvoir me battre pour cette injustice là et rester.
31:32 Je vous fais confiance. Dans la suite de l'émission, ce n'est plus moi qui pose les questions, mais le public de Totemic.
31:39 France Inter, Totemic. C'est à vous. Allez-y.
31:48 On lève le doigt comme en classe, c'est super. Bonjour, Clara. Bonjour.
31:52 Bonjour. J'avais une question tout à l'heure. Vous nous avez indiqué que la chanson Respire avait failli ne pas avoir le jour sur l'album.
31:59 Dans ce cas là, y a t il des chansons pour lesquelles vous êtes autocensuré et que vous avez gardé un peu de côté et vous vous dites tiens,
32:04 celle ci pourra remplacer une autre qui ne convient pas ou est ce que vous fixez vraiment un nombre de chansons bien précis et puis après advienne que pourra.
32:14 C'est une bonne question. Je crois que rien n'est vraiment précis.
32:20 Non, je crois que rien n'est préétabli et que j'arrive en studio en ayant en principe le nombre exact de chansons que je veux.
32:26 Celle là, elle a vraiment un destin particulier. Ça ne m'est pas arrivé souvent d'avoir envie de sauver une chanson.
32:31 Je sais pas, j'avais l'impression qu'elle méritait une place dans l'album et c'est un peu inexplicable ce qui s'est passé.
32:39 Il y a eu, par contre, des chansons effectivement qui ont failli exister, puis qui sont un peu mortes nées.
32:45 Il y en a que je regrette peut être d'avoir enlevé du premier album.
32:48 Il y en a une notamment que je trouvais un petit peu trop radicale dans le titre parce qu'elle s'appelait "Folle" et je me trouvais un petit peu sévère envers moi-même.
32:58 Et ça parlait de mon hypersensibilité.
33:02 Et parfois, c'est intéressant parce qu'on jette une chanson et puis on se rend compte qu'on fait un petit peu.
33:07 On la fait évoluer et elle devient une autre chanson.
33:10 Je pense que par exemple, "Folle" est devenu mon nombre quelque part, même si elles n'ont plus rien en commun.
33:15 Mais en tout cas, il y a un fil qui s'étend, une réflexion.
33:20 C'est marrant. Pardon, j'espère que ça répond à votre question.
33:24 Une autre.
33:27 Bonjour. En 2017, il me semble, vous écrivez "La Grenade" qui est après devenu un véritable hymne pour les mouvements de la vague #MeToo.
33:36 En 2021, alors que les confinements se succèdent, vous écrivez "Respire encore".
33:41 On a l'impression que vous avez une boule de cristal entre les mains ou du moins un véritable talent du timing.
33:49 Alors la question que j'ai envie de vous poser, c'est quel sera votre prochain titre pour qu'on sache de quoi l'avenir sera fait ?
33:55 C'est une très bonne question.
33:57 Eh bien, c'est une très, très bonne question. Je ne sais pas.
34:00 Pour l'instant, j'ai... Alors la vérité, c'est que pour l'instant, je n'ai pas encore tellement commencé à écrire.
34:05 Mais je vous communiquerai ce que je vois dans ma boule de cristal.
34:11 Mais c'est vrai que c'était fou ce timing, effectivement, notamment pour "Respire encore".
34:15 Je crois qu'il est sorti deux jours avant qu'on ait le droit d'enlever le masque.
34:18 J'étais là. Wow. J'avais tellement peur qu'elle tombe en plus comme un cheveu sur la soupe, cette chanson, comme un espèce de truc de "je m'en foutisme" au milieu de "catastrophe".
34:26 Et en fait, effectivement, c'est vrai que les planètes se sont alignées.
34:30 Est-ce que de ne pas encore avoir écrit les prochaines chansons vous inquiète ?
34:33 Absolument. Ah bah oui.
34:36 Ah bah en plus, tout m'inquiète alors bon.
34:40 Oui, oui, oui. Mais j'apprends à me laisser du temps aussi et à me dire que peut être j'ai besoin de vivre d'autres trucs.
34:48 Parce que là, c'est vrai que depuis deux ans, depuis la sortie du disque, je n'ai rien vécu d'autre que la tournée.
34:56 Et puis parler du disque et tout ça. Mais j'ai peut être besoin de voyager, de rencontrer des nouveaux visages.
35:03 Je ne sais pas. Une dernière question.
35:07 Bonjour. Bonjour. Je voulais savoir, parmi toutes les chansons que vous avez faites, laquelle est votre préférée et que signifie-t-elle pour vous ?
35:17 Eh bien, j'ai parlé tout à l'heure de mon ombre. Il est possible que ce soit ma préférée.
35:25 Je ne sais pas si c'est la meilleure, mais c'est un peu ma... C'est celle qui me raconte le mieux, je crois.
35:36 Vous pourriez en citer un vers ?
35:43 Je ne saurais pas quoi choisir. Allez, le début.
35:59 Mais je trouve ça très difficile comme exercice. Vous ne pouvez pas lui dire vous ?
36:05 Je ne connais pas le texte par cœur. Vous me le dites à l'oreille, je le dis, d'accord ?
36:09 Non, non, mais je vais le dire. Mais alors, ça dit "Mon drame, c'est mon ombre. Une ombre, une géante voilée qui grimpe et qui pousse le long de mon corps,
36:22 comme du mauvais lierre, comme un mauvais sort. Mon drame, c'est mon ombre."
36:27 Merci beaucoup, Clara Luciani, d'être passée dans Totemic ce matin et merci à toutes et tous d'être venues.
36:33 Ça commence comme ça. C'est le sous-titre du documentaire.
36:36 Et c'est beaucoup plus joyeux que ce que je viens de citer.
36:39 Non, parce que l'idée, c'est quand même qu'on passe tous une belle journée sur France Inter.
36:42 Et puis voilà. Je crois que ça a pas trop trop mal commencé.
36:45 Ça commence comme ça, en tout cas. C'est le sous-titre du documentaire que Philippe Lézin vous a consacré et qui est visible sur la plateforme Prime Vidéo.
36:54 Et ce soir, vous serez aux victoires de la musique puisque vous êtes nommé dans les catégories concert et chanson originale de l'année.
37:00 Alors je vous dis merde. C'est toujours agréable.
37:04 Lola Constantini réalise Totemic et c'était avec Mathias Saléon, Laurent Baudouin et Julien Dumont ce matin.
37:18 Périne Malin, je programme l'émission. Ilinkan et Goulesko assurent la documentation avec Marius Series et JB Audibert signe la bande-son toute la semaine.