• l’année dernière
Anissa Allek est ostéopathe et reçoit depuis 6 ans des patientes à la Maison des femmes en Seine-Saint-Denis. En suivant un parcours de soin ciblé, elles ont l’opportunité de bénéficier de ces séances pour se reconnecter avec leur corps. « Quand les patientes ne peuvent pas exprimer par les mots ce qu’elles ont traversé, c’est la douleur physique qui prend le relais », résume parfaitement Anissa Allek. Ostéopathe exerçant en libéral, elle a, il y a six ans de cela, croisé la route de celles qui ont créé la Maison des femmes à Saint-Denis, la gynécologue Ghada Hatem et la sage-femme Mathilde Delespine. « J’ai été très impressionnée par ces femmes et leur capacité à penser une unité de soin à guichet unique, où les patientes sont prises en charge tout au long du parcours », se rappelle Anissa Allek. Elle leur propose alors des séances d’ostéopathie au sein de l’unité de soin. C’est ainsi que l’aventure a commencé. 

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Transcription
00:00 Les patientes me décrivent souvent que le fait que moi je puisse attester
00:03 qu'il y a des tensions musculaires,
00:05 ça matérialise le fait que oui, elles ne sont pas folles,
00:07 elles ont vraiment vécu ces violences.
00:10 Je m'appelle Anissa Alec, ostéopathe, j'ai 34 ans
00:13 et je partage mon exercice professionnel
00:16 entre le cabinet libéral et la Maison des Femmes à Saint-Denis.
00:19 À la Maison des Femmes, je propose des séances d'ostéopathie
00:23 qui sont intégrées dans le parcours unité-violence.
00:26 Les patientes me sont adressées par mes collègues coordonnatrices de soins
00:30 quand elles estiment que la patiente souffre de douleurs physiques
00:33 ou bien qu'elle a une difficulté à envisager l'image de son corps,
00:36 qu'il y a une altération de l'image du corps.
00:37 En ostéopathie, le symptôme c'est la porte d'entrée dans le soin,
00:41 ce n'est pas forcément dans cette zone-là qu'on va manipuler ou traiter,
00:44 mais l'idée c'est plutôt, comme un enquêteur, d'aller chercher
00:48 où est la source du déséquilibre.
00:50 À la Maison des Femmes, la spécificité des séances que je propose,
00:53 c'est que déjà, ce sont des patientes qui, soit elles sont très douloureuses,
00:56 elles ont des douleurs physiques très invalidantes,
00:59 soit elles ont une image du corps très altérée
01:01 et où le contact corporel n'est pas forcément évident de prime abord.
01:05 Petit à petit, l'idée c'est d'arriver à remobiliser le corps,
01:09 à ce qu'elle puisse reprendre confiance dans leurs sensations corporelles.
01:12 Ça abaisse le niveau de stress, ça abaisse le niveau d'anxiété
01:16 que peuvent occasionner les douleurs.
01:17 Lorsqu'il y a une exposition à des violences, ça occasionne des traumatismes
01:22 et en fait, le corps est en première ligne,
01:24 c'est lui qui va emmagasiner le choc traumatique.
01:27 Quand les patientes ne peuvent pas exprimer par les mots ce qu'elles ont traversé,
01:31 c'est la douleur physique qui prend le relais.
01:33 Il y a de nombreuses études scientifiques qui montrent le fait que
01:37 l'exposition à des violences altère l'état de santé
01:40 et prédispose à l'apparition de certaines maladies
01:42 comme des pathologies cardiovasculaires,
01:45 des maladies auto-immune, des pathologies inflammatoires.
01:47 Lorsqu'il y a des violences sexuelles, des agressions viols,
01:51 en fait, le corps, au même moment où il se défend,
01:54 la souffrance est telle que pour pouvoir survivre,
01:56 c'est un mécanisme réflexe de survie,
01:58 le cerveau se déconnecte du corps.
02:00 Et c'est à ce moment-là que les patientes peuvent exprimer
02:03 la sensation d'un vide intérieur.
02:05 Elles parlent aussi de blessures invisibles.
02:08 On participe à réconcilier cerveau et corps, esprit et corps.
02:11 Les patientes me décrivent souvent que, en fait, finalement,
02:14 le fait que moi, je puisse attester que, effectivement,
02:17 certaines zones du corps sont très contractées,
02:19 qu'il y a des tensions musculaires,
02:22 ça objectif, ça matérialise le fait que, oui, elles ne sont pas folles,
02:25 elles ont vraiment vécu ces violences.
02:28 Et cette phase d'acceptation, même si ça peut paraître un peu douloureux,
02:31 ça leur permet de rendre tangible ce qui n'est pas traçable directement,
02:36 parce que toutes les violences ne laissent pas de traces tangibles.
02:40 Mais par contre, elles, elles ressentent dans leur équilibre psychique,
02:44 dans leur quotidien, à quel point ça peut les rendre hyper-vigilantes,
02:48 à quel point ça peut leur rendre un sommeil difficile.
02:51 Et le fait, justement, que ça s'inscrive dans le corps,
02:53 ça leur permet de matérialiser ça.
02:56 Et le fait de reprendre connaissance de ces sensations,
02:58 ça leur permet de mieux élaborer les émotions.
03:01 Et elles le retravaillent en psychothérapie.
03:03 Donc, il y a un vrai relais entre le travail psychologique et le travail corporel.
03:07 Plus le corps peut s'exprimer et peut être entendu,
03:11 plus l'élaboration des émotions et la capacité à comprendre l'histoire
03:15 et le vécu traumatique est simple.
03:17 C'est important aussi de pouvoir se dire que,
03:20 peu importe les consultations ou les soignants que vous rencontrez,
03:24 c'est important qu'ils vous replacent en place de sujet.
03:28 Parce que le principal problème, en tout cas, qu'on rencontre au sujet des violences,
03:33 c'est que ça rend la femme objet.
03:35 Mon principal objectif au cours des soins en ostéopathie,
03:39 c'est de rendre la patiente à nouveau sujet,
03:41 qu'elle puisse elle-même se saisir et être actrice du soin.
03:44 Et pour moi, c'est un point d'honneur
03:47 et c'est le point d'honneur aussi qui est donné au sein des parcours à la Maison des Femmes.
03:50 [Musique]

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