La réforme des retraites continue d'attiser la colère des syndicats, qui ne se sentent pas écoutés depuis son annonce le 10 janvier dernier. C'est ce qu'assure Pierre Ferracci, le président et fondateur du groupe Alpha, ce lundi dans Europe Matin. Pour l'expert en politique sociale, l'exacerbation de ce conflit "favorise le populisme d'extrême droite".
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00:00 qui connaissez très bien ce milieu, ce que vous dites, vos avertissements, et justement à ce micro Pierre Ferracci il y a quelques jours,
00:06 Laurent Berger, leader de la CFDT, s'est inquiété d'un gouvernement qui voit la réforme des retraites et la contestation dans la rue comme une simple phase
00:13 qui finira par passer ne se doutant pas d'une éventuelle crise plus profonde. Pourquoi cette forme d'avaglement ?
00:20 Est-ce qu'elle est consubstantielle à tous les gouvernements ?
00:22 - Disons que le fait que le gouvernement n'ait pas une majorité absolue à l'Assemblée le contraint à aller chercher plutôt à droite
00:29 c'est un gouvernement de centre droit aujourd'hui auquel on a affaire, plutôt à droite avec les Républicains un accord sur l'ensemble du quinquennat
00:36 et le terrain des retraites était sans doute un terrain privilégié pour trouver cet accord compte tenu des positions prises par les Républicains pendant la campagne présidentielle.
00:45 Le seul problème c'est qu'en allant chercher les Républicains on oublie complètement les syndicats qui sont pour une fois très unis et très déterminés
00:53 et le spectacle qui a été donné à l'Assemblée ne va faire que renforcer leur colère. Je crois que c'est un spectacle lamentable
01:00 malheureusement qui n'a même pas permis, pourtant les syndicats le demandaient, aussi bien la CGT que la CFDT et les six autres syndicats,
01:07 qu'il y ait un vote sur l'article 7. Ce vote n'a pas pu intervenir
01:11 la réforme va peut-être passer au Parlement mais la colère derrière sera très forte. Alors il y a deux façons pour cette colère de s'exprimer
01:18 soit sur le plan social, il peut y avoir des tensions qui vont au delà du problème d'inflation qu'on a évoqué
01:24 soit en 2027 sur le terrain politique et là on voit bien à qui profite aujourd'hui cette situation
01:29 quand on exacerbe un conflit et qu'on n'entend pas la colère exprimée par les syndicats
01:35 on favorise le populisme et sans doute le populisme d'extrême droite. - Mais qui est arrivé tranquillement finalement par une position
01:42 raisonnable à l'Assemblée nationale. Qui favorise la respectabilité aujourd'hui du Rassemblement national ?
01:48 - Je crois malheureusement que le spectacle
01:51 affligeant à l'Assemblée avec la position de Nupes, de la France Insoumise d'ailleurs, parce que les autres composantes de Nupes ont commencé à prendre
01:58 leur distance
01:59 insuffisamment de mon point de vue et puis même à l'intérieur de la France Insoumise on voit bien qu'il y a quelques voix dissonantes qui commencent
02:05 à s'exprimer mais que Philippe Martinez et Laurent Berger fassent remarquer que ce
02:10 spectacle désolant ne sert pas la lutte sociale qui est en cours
02:13 montre bien qu'on fait fausse route du côté d'une certaine gauche à l'Assemblée
02:18 et oui effectivement ça donne beaucoup de respectabilité au Rassemblement national qui joue de façon très fine depuis quelques mois et dont il ne faut pas
02:26 sous-estimer la présence sur le terrain électoral. Les ouvriers ont basculé majoritairement du côté du Rassemblement national depuis un moment
02:34 mais regardez les dernières élections, les employés, les enseignants même sont maintenant sensibles
02:38 minoritairement pour les enseignants mais à
02:41 certaines voix qui s'expriment à l'extrême droite et ça je pense que c'est extrêmement inquiétant pour l'échéance de 2027.
02:47 Paysage politique et paysage aussi syndical que vous connaissez parfaitement bien Pierre Ferracci et en particulier les deux têtes
02:54 syndicales Philippe Martinez et Laurent Berger dont on dit d'ailleurs que l'un a rejoint l'autre dans la contestation que Laurent Berger est allé sur les
03:01 lignes de Philippe
03:02 Martinez dans une forme entre guillemets bien sûr de radicalité. Est-ce qu'il faut le voir ainsi vraiment ?
03:07 Non je crois que on n'arrête pas de dire que Laurent Berger est prisonnier à la fois de certaines fractions radicales ou de son congrès
03:13 bon d'abord son congrès je pense qu'il a manifesté beaucoup d'unité et de cohérence
03:17 la base de la CFDT est d'accord avec Laurent Berger, Laurent Berger est d'accord avec sa base
03:21 et puis dans le rapprochement entre les syndicats il faut voir d'abord l'unanimité syndicale au lieu de se demander qui
03:27 qui domine dans le paysage. Il se trouve que la CGT et la CFDT et les autres organisations syndicales sont aujourd'hui
03:34 fermement décidées à faire échouer cette réforme en tout cas telle qu'elle est présentée.
03:38 Et moi je souligne que les syndicats ne nient pas qu'il y a un problème de déficit des retraites
03:42 c'est simplement la façon dont il est traité avec le déport de l'âge légal
03:46 qu'ils contestent et notamment le fait que cette réforme n'a même pas été préparée du côté des seniors comme l'ont fait
03:53 de façon très habile et très intelligente certains pays de l'Europe du Nord où ils ont demandé aux partenaires sociaux pendant des années
03:59 de travailler sur la pénibilité, sur la charge de travail des seniors.
04:02 Ils ont essayé de donner envie en tout cas dans certains métiers, pas dans tous,
04:06 aux seniors de continuer à travailler. Dans certains métiers il vaut mieux qu'ils s'arrêtent plus tôt, dans d'autres ils peuvent continuer à condition qu'on
04:12 s'intéresse à leurs conditions de travail. On n'a pas fait ça du tout depuis quelques années.
04:15 Le gouvernement qui a abandonné sa réforme systémique,
04:18 le système à points, est passé brutalement à ce que demandait d'ailleurs à l'époque déjà Édouard Philippe, le premier ministre, une réforme totalement paramétrée.