Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses télescopages. Ce mercredi, il revient sur la vidéo de mise à mort d'un prisonnier ukrainien filmée par un soldat russe.
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00:00 mais d'abord c'est l'heure des télescopages de Bruno Donnet. Bonjour Bruno.
00:03 Bonjour Philippe.
00:03 Tous les jours Bruno, vous interrogez ici la portée des épisodes médiatiques les plus retentissants.
00:07 Et ce matin, vous avez choisi de vous arrêter sur une image, une image de guerre.
00:11 Oui, une image arrêtée précisément Philippe, arrêtée pudiquement hier soir dans le journal de 20h
00:17 par l'une des envoyées spéciales de France 2 sur le front ukrainien. Elle s'appelle Agnès Varamian.
00:21 Cette image est extraite d'une vidéo dont nous dévoilons les cinq premières secondes.
00:27 Alors que voit-on précisément durant ces cinq petites secondes ?
00:32 Eh bien on y découvre un homme, un soldat, un soldat ukrainien.
00:35 Il est totalement désarmé dans tous les sens du terme car il a visiblement été fait prisonnier par les militaires russes.
00:42 Il est jeune, il regarde l'objectif du téléphone portable de son geôlier qui est en train de le filmer
00:47 et il a le regard agarre.
00:49 Sur la manche de son uniforme, il porte un insigne, un insigne de l'armée ukrainienne.
00:53 Mais l'un des soldats russes lui demande de l'arracher.
00:56 « Retire-le ! »
00:57 Le prisonnier tire alors une bouffée de la cigarette qu'il porte au coin de la bouche
01:01 et il lance d'un ton bravache à son interlocuteur.
01:04 « Gloire à l'Ukraine ! »
01:06 Et sur France 2, la séquence s'arrête là.
01:09 Elle n'a duré que cinq petites secondes parce que ce qui se passe ensuite est tout simplement immontrable.
01:14 Timofy Mikheilovich Adoura, c'est le nom de cet homme, est abattu,
01:22 froidement exécuté d'une rafale d'armes automatiques.
01:25 Alors si ces images ont été arrêtées hier soir très opportunément par le 20h de France 2,
01:30 elles ont en revanche été largement diffusées in extenso
01:34 sur les réseaux sociaux par les combattants russes qui les ont enregistrées.
01:37 Au point qu'elles sont devenues virales.
01:41 Au point que sur le front, ces images-là constituent désormais un fait de guerre.
01:46 « La vidéo a été postée depuis un compte russe hier soir.
01:50 Et ce matin, nous étions avec des artilleurs sur le front, près de Barmont.
01:55 Ils avaient tous vu la vidéo de leurs camarades. »
01:58 Voilà, alors la mise à mort de sang-froid d'un prisonnier désarmé est un crime de guerre.
02:02 Cela contrevient à l'éthique de la guerre car aussi paradoxal que ça puisse paraître, il y en a une.
02:07 Mais la diffusion instantanée, virale, par les réseaux sociaux interposés d'un tel crime
02:12 est à la fois un avatar de cette guerre moderne où les téléphones portables sont devenus des armes,
02:17 mais c'est également pour la Russie une erreur grossière, une de plus.
02:21 Car des crimes de guerre, des prisonniers exécutés, il y en a très probablement des deux côtés du front.
02:27 En mars dernier, par exemple, le quotidien britannique Guardian avait révélé qu'un prisonnier russe
02:32 avait été abattu par l'armée ukrainienne.
02:34 Seulement voilà, c'était le fruit d'une enquête d'un travail journalistique,
02:37 pas une exhibition, pas une ventardise délibérée de combattants de réseaux sociaux.
02:43 Car cette image-là, celle de la mise à mort d'un si jeune prisonnier, est instantanément devenue un symbole
02:48 parce qu'elle raconte non pas la guerre, mais bel et bien les dérives de la guerre, de cette guerre-là,
02:54 celle dans laquelle, croyant pouvoir écraser un peuple à grands coups de roquettes et de vidéos humiliantes,
02:59 l'armée russe n'aura finalement réussi qu'à nourrir le ressentiment et la résistance de toute la nation ukrainienne.
03:06 Merci beaucoup Bruno Donnet, à demain !