Marie Buisson : "On ne joue pas impunément avec la colère des gens qui font tourner ce pays"

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Aujourd'hui dans la matinale de France Inter, l'invitée du grand entretien est Marie Buisson, secrétaire générale de la Fédération de l'éducation, de la recherche et de la culture (FERC - CGT), candidate présentée par la direction sortante à la succession de Philippe Martinez

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Transcript
00:00 L'invité du Grand Entretien à présent, bonjour Marie Buisson.
00:03 Bonjour.
00:04 Vous êtes secrétaire générale de la Fédération CGT de l'éducation, de la recherche et de
00:08 la culture.
00:09 Vous êtes aussi la candidate présentée par la direction de la Centrale pour succéder
00:13 bientôt à Philippe Martinez.
00:15 On va commencer avec la lettre d'Emmanuel Macron, celle qu'il a adressée hier au
00:20 syndicat.
00:21 Il reconnaît à la fois le mécontentement des Français et il réaffirme en même temps
00:25 sa volonté d'aller jusqu'au bout de la réforme des retraites, pour vous à quoi a servi cette
00:30 lettre ?
00:31 Elle a servi à montrer quelque chose, c'est qu'on peine à se faire entendre par ce gouvernement
00:34 y compris au plus haut niveau.
00:36 C'est-à-dire que le président, il y a des millions de Français qui manifestent, il
00:39 y a des chiffres de refus de cette réforme qui sont quand même très impressionnants.
00:43 Plus de 90% des actifs, plus des deux tiers de la population qui refusent ce recul de
00:48 l'âge de départ en retraite.
00:49 Et pour le président, c'est comme s'il ne se passait rien ou presque rien dans ce
00:53 pays.
00:54 Et voilà, le signal envoyé aux millions de gens qui sont en désaccord avec cette
00:59 réforme, il est délétère, voire méprisant.
01:02 Il ne dit pas qu'il ne se passe rien, il dit la porte est ouverte, mais allez voir
01:04 Matignon.
01:05 Est-ce que vous avez une perspective d'entrevue, d'entretien, de table ronde avec la première
01:11 ministre ?
01:12 Absolument aucune.
01:13 Philippe Martinez a eu l'occasion de le dire, il a eu Elisabeth Borne cinq minutes
01:16 au téléphone un dimanche.
01:17 C'est vraiment une vision de ce qu'est le dialogue, entre guillemets, le dialogue social,
01:23 en tout cas ce que peut être une négociation dans ce pays qui est catastrophique.
01:27 En plus, ça se passe, il renvoie à l'Assemblée et au Sénat, alors qu'ils ont choisi le
01:32 gouvernement de passer en force, y compris dans ces débats.
01:35 On l'a vu à l'Assemblée, c'était rapide, ça a mis de la tension dans les débats.
01:38 Là au Sénat, ils activent cet article dont le numéro m'échappe, 44.3, qui permet d'éviter
01:45 le vote sur les amendements.
01:46 C'est quand même une procédure exceptionnelle.
01:48 Je crois qu'elle n'avait pas été activée depuis 2010 par Nicolas Sarkozy.
01:52 2013 sous Michel Sapin, mais c'est un détail.
01:55 D'accord, mais vous voyez un peu l'ambiance, les manières dont on conçoit le débat et
02:01 le signal renvoyé aux gens qui se mobilisent.
02:03 Mais depuis qu'il est à l'Élysée, Emmanuel Macron, depuis six ans, donc, quelles sont
02:07 les relations qu'il a avec les différentes organisations syndicales ?
02:11 Eh bien, à ma connaissance, il a dû recevoir Philippe Martinez une fois, une semaine ou
02:15 deux après son élection et c'est tout.
02:17 Ensuite, il y a eu quelques réunions collectives au moment du Covid et puis c'est à peu près
02:22 tout, c'est-à-dire très peu, mais il le dit.
02:25 Mais en même temps, est-ce que c'est au président de recevoir les syndicats ou est-ce
02:27 que c'est au gouvernement ?
02:28 En général, je ne sais pas, mais là, on est dans une situation particulière.
02:33 Vous avez quand même une mobilisation dont tout le monde s'accorde et on n'est pas
02:36 les seuls à le dire, à dire qu'elle est historique et forte.
02:38 Et le président, à un moment, il a été élu président de la République et à un
02:45 moment, c'est aussi prendre ses responsabilités.
02:48 Mais sincèrement, il vous a surprise, ça l'est ou pas ?
02:50 Vous avez été surprise par la réponse, par la teneur de la réponse, sincèrement ?
02:53 Peut-être pas forcément extrêmement surpris par le fait qu'il refuse son rendez-vous
02:57 parce que ça ressemble à la manière dont il gouverne depuis maintenant plus d'un
03:01 quinquennat.
03:02 Mais quand même, si on l'a fait, c'est parce qu'on est inquiet de la colère qui
03:07 monte et de l'espèce de retour comme s'il ne se passait rien.
03:13 C'est-à-dire qu'il y a une forme de mépris et pourtant, ce président le sait et ce gouvernement
03:18 aussi, le mépris en réponse à la colère de la rue, ce n'est pas la bonne réponse.
03:24 La colère, votre mécontentement à la CGT, ça passe par des coupures de courants ciblés
03:30 ou bien des gratuités d'électricité offertes.
03:33 Et selon la CGT mine énergie, les actions peuvent monter encore d'un cran.
03:39 Ça veut dire quoi ?
03:40 Ça veut dire que la colère est forte.
03:41 Je l'ai réuni il n'y a pas longtemps avec un certain nombre de responsables de secteur
03:46 et de fédération.
03:47 Tout le monde nous dit que la colère est forte.
03:49 Vous avez des gens qui commencent à accumuler des journées de grève, qui manifestent de
03:53 manière assez responsable, organisées, qui portent leurs revendications et qui ne sont
03:58 pas entendues.
03:59 Et oui, il y a de la colère.
04:00 Elle date pas de cette réforme.
04:02 Il y a de la colère.
04:03 Il y a des gens qui ont du mal à vivre dans ce pays malgré le fait qu'ils y travaillent.
04:06 Et là, la seule réponse, c'est de leur dire "vous avez travaillé deux ans de plus".
04:10 Oui, ils sont en colère, ils sont en grève reconductible et ils commencent à en avoir
04:13 marre.
04:14 Cette colère jusqu'où je me réfère aux propos du secrétaire fédéral de la CGT
04:19 nationale mine et énergie.
04:20 "Nous sommes capables de tout", dit-il.
04:23 Est-ce qu'il y a une forme de radicalisation d'une partie de la CGT ?
04:28 Non, il n'y a pas de radicalisation.
04:30 Le secrétaire général de la fédération, il porte la parole des syndiqués mobilisés.
04:36 Et il faut l'entendre comme ça.
04:38 C'est bien la parole des salariés de l'énergie qui sont en grève reconductible depuis plusieurs
04:43 jours et qui sont en colère, qui se sont battus pour leur salaire.
04:47 La colère, elle déborde.
04:51 Mais quand la colère de la CGT va au-delà du droit, par exemple en paralysant une partie
04:55 des aéroports, lorsque ça déborde un peu du cadre un petit peu "légal", on va y réfléchir
05:02 surtout, est-ce que vous cautionnez ça ?
05:04 L'histoire de notre mouvement social, elle est maillée de moments comme ça.
05:07 Parfois, aujourd'hui, on a une vision, on s'offusque très rapidement d'un certain
05:13 nombre de choses qui ont toujours été faites.
05:15 Bloquer l'entrée de l'usine quand on est en grève pour distribuer des tracts et inciter
05:20 à faire grève, ça existe depuis toujours.
05:22 Les étudiants, ils occupent les universités depuis des centaines d'années sans qu'on
05:26 leur envoie forcément la police ou les gendarmes pour les déloger.
05:30 Mais nous, il faut que ça reste dans le cadre de quelque chose qui est non-violent et qui
05:36 n'impacte pas négativement la vie, au-delà du fait que quand les gens s'arrêtent de
05:42 travailler, ça complique la vie de tout le monde dans ce pays.
05:45 Pour qu'il y ait des trains, il faut des conducteurs.
05:48 Voilà, ça c'est la grève.
05:50 Et nous, on est bien là-dessus, la grève généralisée et qui dure pour envoyer le
05:55 signal qu'il faut arrêter.
05:56 Justement, parlons-en, Marie Buisson, parce que quand même, est-ce qu'on a eu le pays
06:00 à l'arrêt annoncé cette semaine ? Comment est-ce que vous analysez à la CGT ce qui
06:04 s'est passé depuis mardi ?
06:05 Alors, le pays à l'arrêt, c'est le mot d'ordre de l'intersyndicale.
06:07 Il était quand même, encore une fois, assez inédit comme mot d'ordre.
06:12 Ce que j'ai vu mardi, c'est qu'en dehors des manifestants, qui étaient quand même
06:15 3,5 millions et qui eux ont pas mal bougé, ailleurs, c'était plus compliqué de prendre
06:20 le train, plus compliqué de mettre ses enfants à l'école, plus compliqué de prendre le
06:23 bus, de voir ses poubelles ramassées, etc.
06:25 Donc, l'arrêt, c'était bien ce qu'on voulait envoyer, c'est que c'était pour
06:29 tout le monde, y compris ceux qui ne sont pas salariés.
06:31 Mais ça a pris au niveau où vous l'espériez, là, ou pas, cette semaine ?
06:34 Oui, ça a pris.
06:35 Il y a une montée.
06:36 Franchement, moi j'entends, depuis le début, on dit "attention, peut-être ça va baisser,
06:41 attention l'intersyndicale".
06:42 Pour l'instant, c'est pas le cas.
06:44 On a une intersyndicale complète qui tient et on a des mobilisations qui montent.
06:47 C'était la première journée depuis 15 jours où on était sur des actions plus
06:51 locales et on a 3,5 millions de personnes qui manifestent dans ce pays.
06:56 Plus.
06:57 Et vous avez des grèves.
06:58 Mais les profs, par exemple, que vous connaissez bien, Marie Buisson, puisque vous êtes à
07:01 la tête de la FEDE, éducation, recherche, culture, merci d'y m'aider.
07:06 Les profs ne vous ont pas suivi, là, Marie Buisson ?
07:09 60% de grévistes, avec quand même pas mal de profs.
07:11 Ça, c'était mardi, mais sur la grève reconductible ?
07:13 Eh bien, ça discute.
07:14 Sur le pays à l'arrêt ?
07:15 Alors, ça discute.
07:16 Effectivement.
07:17 Mais à mon avis, il faut regarder ce mouvement, peut-être, comme il est et pas comme était
07:21 celui d'avant ou celui d'encore avant.
07:23 C'est-à-dire que vous n'avez pas ce qu'on a appelé parfois la grève par procuration
07:27 avec quelques secteurs qui feraient grève pour l'ensemble du pays, qui bloqueraient
07:30 et qui impacteraient l'économie.
07:31 Vous avez une grève qui est beaucoup plus large.
07:34 C'est-à-dire qu'effectivement, plusieurs fois, 50-60% de grévistes dans l'éducation.
07:39 C'est énorme.
07:40 C'est énorme quand on sait qu'un enseignant commence sa carrière à 1 600 euros net pour
07:45 vivre en région parisienne, tout seul.
07:47 On le sait.
07:48 C'est pas la grande vie, c'est pas la belle vie.
07:50 Et chaque journée de grève, elle impacte la capacité à continuer à finir le mois.
07:55 Il y a une inflation énorme.
07:57 Donc, ça impacte.
07:58 Pourtant, il y a des discussions et il y a des grèves dans des secteurs du privé,
08:01 dans des entreprises moyennes, dans lesquelles il n'y en a pas.
08:04 Dans la maroquinerie, dans l'agroalimentaire, dans la métallurgie.
08:07 On a des chiffres de grève.
08:09 Alors, c'est pas forcément la reconduction comme on a l'habitude de le voir 24/24, mais
08:13 ça veut dire que dans ces entreprises, pas du tout.
08:16 - Vous n'êtes pas déçus de la forme que prend la reconduction ?
08:17 - Non, pour nous, on est dans un mouvement qui continue, qui s'élève, qui grandit.
08:22 - Vous souhaitez durcir le mouvement.
08:24 Un mot de ce qui se passe au Parlement, de ce que certains ont appelé la bordélisation
08:28 des débats au Parlement.
08:29 Comment la leader syndicale que vous êtes regarde ce qui se passe dans l'hémicycle
08:33 quand les codes sont chahutés ? Est-ce que vous vous en félicitez ?
08:37 - Vous voulez parler du bras d'honneur du ministre de la Justice ?
08:41 - Je mets tout dans le même sac.
08:43 C'est-à-dire les codes qui changent, bousculer un peu cette assemblée qu'on a trouvée parfois,
08:48 que certains ont trouvée parfois trop sage.
08:50 - Je précise quand même que Eric Dupond-Moretti fait effectivement 2, voire peut-être 3 bras
08:54 d'honneur, mais c'était pas du tout dans le cadre des débats sur les retraites.
08:57 - Non, mais ça fonctionne avec un...
08:58 - Je pense que la bordélisation c'est plus sur le débat sur les retraites.
09:00 - La bordélisation liée au débat des retraites.
09:01 - Ah d'accord.
09:02 - À l'Assemblée.
09:03 - D'accord.
09:04 Effectivement, il y a eu du débat.
09:06 En même temps, quand on voit, nous, en débat, beaucoup, autour de la réforme des retraites,
09:12 ça crée du débat, de la discussion.
09:13 C'est normal que l'Assemblée nationale, elle, soit traversée par les débats qui
09:19 traversent ce pays.
09:20 Parfois, les débats sont vifs.
09:21 Nous, on l'a dit, et le regret qu'on avait, c'est qu'on n'ait pas été au vote sur
09:25 l'article 7, parce qu'il nous semble qu'il y a un peu de fébrilité.
09:29 Il nous semble aussi qu'il y a des députés qui vont retourner dans leur circonscription
09:32 de droite, Renaissance, et qu'eux, ils vont forcément se retrouver devant des gens qui
09:37 ont voté pour eux et qui sont contre cette réforme.
09:39 Et nous, on est pour qu'il y ait cette discussion-là.
09:41 C'est-à-dire, il suffit pas de...
09:43 - Non, mais la discussion, la question, c'est la bordélisation, c'est-à-dire le fait de
09:46 vraiment...
09:47 - Franchement, franchement.
09:48 - Ça vous a choqué ou pas ? - Je ne suis pas députée et j'avoue que
09:51 les formes choisies collectivement par les députés pour porter le débat, je vous le
09:55 dis, le regret, c'est qu'on n'ait pas été au vote et qu'on n'ait pas pu avancer dans
09:58 les amendements parce que ça nous intéressait.
10:00 Bon, bah maintenant, ça avance au Sénat, mais c'est pas voté.
10:02 - Alors voilà, le gouvernement a décidé, pour avancer encore plus vite, d'utiliser
10:05 au Sénat la procédure du vote bloqué.
10:07 Résultat, le texte sera très, très probablement voté par les sénateurs avant dimanche soir
10:12 ou dimanche soir.
10:13 Comment est-ce que vous pouvez lutter contre ça à la Suisseté ?
10:17 Le texte va être voté.
10:19 - Nous, on lutte, on continue à débattre.
10:22 Le gouvernement peut faire semblant qu'il n'y a pas de débat, il n'y a pas de vote.
10:24 Il avance en procédure accélérée avec l'aide de la droite.
10:29 Eh bien, ils avancent et nous, on continue à débattre et à lutter.
10:34 - Non mais la question, c'est qu'est-ce qui peut encore empêcher la réforme des retraites
10:38 d'être adoptée ?
10:39 - Eh bien, que tout à coup, le gouvernement réalise que quand il y a des millions de
10:43 Français qui sont en train de se mobiliser, eh bien, ce serait peut-être mieux de les
10:46 entendre et on ne joue pas un punaiment avec la colère de la majorité des gens qui font
10:52 tourner ce pays.
10:53 Il y a des moments où on n'a pas besoin que de ministres et d'actionnaires.
10:57 Pour que ça marche, on a besoin de gens qui sèvent le matin, qui vont tenir les caisses
11:00 dans les magasins, qui vont faire le ménage dans les bureaux.
11:02 Et à un moment, il faut les entendre.
11:03 Moi, j'avoue que je ne conçois pas qu'on puisse diriger un pays sans avoir cette oreille-là.
11:09 Il est en train de se passer quelque chose, vous le dites.
11:11 Il n'y a pas que la CGT qui le dit, tout le monde le voit.
11:14 Et je suis très inquiète du fait qu'on n'entende pas ça.
11:17 - Mais là, il ne reste plus qu'une semaine pour se mobiliser.
11:19 Qu'est-ce qui se passe la semaine prochaine ?
11:20 Parce qu'après, c'est commission mixte paritaire, c'est vote solennel à l'Assemblée et au
11:23 Sénat.
11:24 Donc, qu'est-ce qui se passe ?
11:25 - Nous, on continue à se mobiliser, plutôt à monter en puissance, etc. avec des grèves
11:28 reconductibles, avec des secteurs qui sont engagés dans la grève.
11:30 Pour nous, l'accord intersyndical, c'est le refus des 64 ans, du recul de l'âge de
11:36 la retraite à 64 ans.
11:37 Donc, quel que soit ce qui se passe, on reste contre cette mesure et on en discutera.
11:42 On va continuer à en discuter parce qu'on a une intersyndicale qui a un vrai point d'appui,
11:46 qui est large et solide, parce qu'elle est entièrement d'accord sur le refus du recul
11:52 de l'âge de départ en retraite.
11:53 - Mais la CFDT va vous lâcher si jamais la réforme est adoptée, si j'ai bien compris.
11:56 - Ah ben alors, vous avez vu Laurent Berger récemment.
12:00 - Vous avez des informations qu'on n'a pas ?
12:01 - Pas du tout, pas du tout.
12:02 Mais on discute et pour l'instant, ce n'est pas du tout à l'ordre du jour.
12:05 On reste d'accord.
12:06 On s'est mis d'accord sur le fait qu'on refusait ce recul de l'âge de départ en retraite.
12:10 Maintenant, on s'est engagé à aller au bout de cette mobilisation.
12:17 Bien sûr, on va se revoir.
12:18 On va se revoir après ces mobilisations et on va faire des propositions pour continuer.
12:23 - Marie Buisson, l'avenir de la CGT passera par un congrès de la CGT à la fin du mois.
12:29 Ce sera la fin de l'époque Philippe Martinez.
12:31 Et vous êtes, Marie Buisson, sa dauphine désignée pour lui succéder.
12:36 Or, depuis plusieurs semaines, plusieurs mois, une autre sérieuse candidate est poussée
12:41 par d'autres fédérations.
12:43 Pourquoi n'êtes-vous pas parvenue à créer cet élan majoritaire au sein de la centrale
12:48 puisque les autres fédérations veulent pousser d'autres candidates ?
12:50 - Alors, il y a deux réponses.
12:52 Dauphine, ce n'est pas vraiment le terme puisque j'ai été proposée par Philippe
12:57 Martinez et puis validée par un vote de la direction de la CGT pour proposer cette candidature
13:04 parce que vous imaginez bien que dans une organisation de plus de 600 000 adhérents
13:08 et qu'une trentaine de fédérations, des dizaines d'unions départementales, ça
13:13 se prépare.
13:14 Ça se prépare un congrès.
13:15 Ça se prépare un changement d'équipe et ça se prépare dans la continuité parce
13:19 qu'après notre congrès, le lundi 3 avril, je pense que tout le monde aura besoin qu'il
13:22 y ait la CGT présente et prête à poursuivre le combat ou à fêter la victoire selon ce
13:29 qui va se passer.
13:30 Mais voilà, après…
13:31 - L'autre aspect de la question, c'est pourquoi semblez-vous en difficulté ?
13:35 - Je me rappelais de cette deuxième partie.
13:37 Effectivement, c'est pas du tout…
13:41 On a toujours des débats très forts au moment de nos débats.
13:43 Je vous l'ai dit, on est une grosse organisation.
13:45 Un congrès de la CGT, c'est un moment de débat dans lequel se confrontent.
13:49 On n'est pas d'accord sur tout.
13:50 On a des discussions et c'est le congrès, c'est le moment de faire le point là-dessus
13:54 et de se réunir.
13:55 - Vous ne répondez pas à la question.
13:57 - Si, parce que pendant qu'on est Philippe Martinez, il a autour de lui une CGT rassemblée,
14:03 réunie, qui est à l'œuvre en ce moment.
14:05 - Mais Philippe Martinez, il a cherché à vous imposer.
14:08 Or manifestement, il est contesté.
14:10 - Pas du tout, il n'a pas cherché à m'imposer.
14:11 Ce sont les procédures totalement habituelles dans l'ensemble de nos organisations.
14:15 - En tout cas, c'est son choix et vous êtes son choix.
14:16 L'autre candidate, Céline Verzeletti, elle ne s'est pas encore officiellement déclarée
14:21 d'ailleurs.
14:22 Elle a le soutien de ce qui semblent être les plus grosses fédérations de la CGT.
14:26 La Santé, les services publics, les cheminots, l'énergie, les fonctionnaires de l'État
14:30 dont elle est elle-même issue.
14:32 C'est tout de même un sérieux handicap pour vous, non ?
14:34 - Non, c'est la question.
14:36 Franchement, je sais que ça peut paraître, parce que ce n'est pas très connu comment
14:40 ça fonctionne, mais nous, notre objectif à un congrès, c'est d'avoir un texte, un
14:44 texte qui donne nos orientations, c'est-à-dire ce qu'on va vouloir porter avec la CGT pour
14:49 la CGT dans les trois ans qui viennent.
14:50 Et on a une direction collective de 60 à 70 membres.
14:54 Et l'enjeu du congrès, c'est de les lire et dedans, d'avoir une secrétaire générale,
14:59 ce qui serait quand même un moment historique pour la CGT.
15:02 - Dans les deux cas, ce sera une femme, puisque votre concurrente est une femme aussi.
15:04 - Voilà, donc c'est pour ça que j'ai dit un moment historique pour la CGT.
15:07 Mais l'enjeu n'est pas autour du nom de la personne, mais bien autour du projet qui va
15:11 être porté.
15:12 Et le but d'un congrès, c'est toujours de rassembler un maximum de militants et d'organisations
15:16 de la CGT autour d'un projet.
15:17 - Mais vous ne craignez pas de ne pas avoir la majorité, justement, avec l'autre candidate
15:21 qui a tout de même de grosses fédérations ?
15:22 - Non, c'est tout le monde.
15:23 - On a l'impression que ce n'est pas grave si vous perdez ? Si je vous entends bien ce
15:26 matin ?
15:27 - Moi, je me prépare...
15:28 - Vous ne pensez même pas perdre ?
15:29 - Je me prépare depuis plusieurs mois, parce que ça ne s'improvise pas de diriger une
15:34 organisation comme la CGT avec une équipe qui prépare ce congrès.
15:38 C'est ça l'enjeu.
15:39 - Est-ce qu'il n'y a pas deux familles à la CGT ? Une qui serait peut-être plus radicale,
15:44 on le voit avec les retraites, et une autre que vous incarnez un peu moins jusqu'au boutiste.
15:48 Est-ce que ce ne sont pas ces deux courants qui s'opposent en ce moment à la CGT ?
15:51 - Il y a des débats autour de ces questions-là.
15:52 Mais là, vous le voyez bien, depuis un mois et demi, il n'y a pas deux CGT.
15:56 Il y a une CGT qui se bat.
15:58 - Vous n'êtes pas trop écolo à la CGT, Marie Buissot ?
16:01 - Si on pense que l'écologie n'a pas de rapport avec le travail, peut-être, mais
16:06 moi...
16:07 - Est-ce que toutes les fédérations sont d'accord avec votre écologie ?
16:08 - Que la question de l'écologie est centrale dans notre rapport au travail, aujourd'hui
16:12 et dans les années qui viennent, on est tous d'accord là-dessus, et heureusement.
16:15 - Marie Buissot, vous êtes aussi, on va changer de sujet, secrétaire général de la fédération
16:19 CGT de l'éducation, de la recherche et de la culture.
16:22 À propos de l'éducation, le gouvernement propose d'augmenter les salaires des enseignants.
16:26 Cet impact a un peu donnant-donnant des rémunérations en plus, en échange de nouvelles missions
16:32 pour les enseignants.
16:33 Ça va du suivi d'élèves à du remplacement de courte durée.
16:36 Pourquoi la CGT ? Êtes-vous contre ?
16:38 - Parce qu'on est pour le dégel du point d'indice, on est pour l'augmentation générale
16:41 des salaires.
16:42 C'est pas possible d'avoir des enseignants qui sont passés à Bac +5, on leur demande
16:46 un Bac +5, on les paye 1600 euros en entrée de métier à Bac +5, moi j'ai passé 20 ans
16:52 en dessous de 2000 euros net.
16:53 C'est pas reconnu à la hauteur avec un travail qui n'est pas le plus simple et des conditions
17:02 qui se détériorent.
17:03 Donc on est contre les missions supplémentaires.
17:05 - Mais dans ce cas précis, les missions supplémentaires, ce pacte, c'est sur la base du volontariat.
17:09 Ça pourrait intéresser des enseignants qui veulent travailler plus pour gagner plus,
17:13 pour reprendre la formule.
17:14 - Ah bah ça, ça va forcément intéresser.
17:15 - Ça va être un rejet sûrement si je prends cette formule-là.
17:17 Mais à la fin du mois, ça va compter aussi pour ceux qui veulent être volontaires.
17:21 - Évidemment, c'est la pression aux heures sub qu'on connaît.
17:23 Mais il y a aussi un autre facteur, c'est qu'on est dans des métiers très féminisés.
17:26 Toutes ces parts variables de rémunération, tout ce qui est les primes, les heures supplémentaires,
17:30 les missions supplémentaires, ce sont des choses qui creusent les inégalités de salaire.
17:37 Or, on a quand même un sacré problème dans ce pays d'inégalités de salaire entre les
17:40 femmes et les hommes.
17:41 - Eh bien merci d'être venue le rappeler ce matin sur France Inter.
17:43 Marie Buisson, secrétaire générale de la Fédération CGT de l'Éducation, de la Recherche
17:47 et de la Culture.

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