La guerre au Windmill Theatre

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Dans Historiquement Vôtre, Clémentine Portier-Kaltenbach vous emmène au Windmill Theatre, un célèbre cabaret ouvert à Londres en 1931, où s’est joué le premier spectacle de femmes nues jamais présenté dans la capitale. Pendant la Seconde Guerre mondiale, malgré les bombardements, les portes de l'établissement restent ouvertes.
Retrouvez "Dans l'intimité de l'Histoire" sur : http://www.europe1.fr/emissions/dans-lintimite-de-lhistoire
Transcript
00:00 Europain, historiquement vôtre avec Stéphane Bern.
00:04 Tous les jours, vous le savez, historiquement vôtre vous raconte l'histoire, sans se la raconter,
00:08 avec Jean-Luc Lemoyne qui vient tout juste de mettre le point d'interrogation finale à son quiz à suivre.
00:13 Exactement, et aujourd'hui pour l'indice musical, je vous ai réservé un chanteur romantique,
00:17 je pense que ça va vous faire plaisir.
00:19 Bambino, harlequin, un parfum italien dans Venise,
00:24 Saint-Venise.
00:28 Hervé Villa.
00:30 Exactement, Hervé Villa.
00:32 Bravo Stéphane.
00:34 Comment avez-vous pu hésiter tous les deux sur Hervé Villa ?
00:36 Il m'a fallu une temps, il y a une intonation à un moment qui est...
00:40 Ça nous rappelle.
00:42 Et donc aujourd'hui, on va parler de Venise.
00:44 Juste avant cet affrontement, je vais lui laisser la parole, c'est gentil.
00:47 Clémentine Portier-Kaltenbach nous raconte des histoires dont elle seule a le secret.
00:52 Dans l'intimité de l'histoire.
00:54 Aujourd'hui Clémentine, on reste donc dans les cabarets, puisque vous nous racontez le seul cabaret resté ouvert
00:59 durant toute la guerre en Angleterre, y compris pendant que Londres était bombardée,
01:04 le Windmill Theatre, en version française c'est le théâtre du Moulin à Vent.
01:08 Oui, c'est amusant, surtout ce qui est amusant c'est la façon dont il a commencé ce cabaret,
01:12 parce qu'en fait c'était un cinéma qui s'appelait le Palais du Luxe,
01:15 et c'est en 1931, une dame qui s'appelle Laura Anderson,
01:19 qui est déjà un peu blanchie sous le harnais,
01:21 on imaginerait plutôt une Miss Marple en train de prendre du thé et des scones.
01:26 Il y a eu un film d'ailleurs, Mrs. Anderson, avec notre Judy Dench.
01:31 En 2005, tout à fait, c'était un film de Stephen Frears sur l'histoire de ce cabaret bien sûr.
01:35 Et donc cette dame, d'un certain âge, qui a l'air très honorable,
01:39 transforme ce cinéma en musical et elle le baptise le Windmill Theatre,
01:43 le théâtre du Moulin à Vent, évidemment parce que d'abord il y avait un Moulin à Vent à cet endroit,
01:49 et en même temps, évidemment c'est un clin d'œil au Moulin Rouge parisien,
01:53 et c'est un certain Viviane Van Damme qui crée un spectacle qui va durer fort longtemps,
01:58 qui s'appelle Revue de Ville, parce qu'évidemment avant la guerre,
02:03 l'imprimature française, le joyeux cabaret, c'est Paris.
02:06 Donc Revue de Ville, ça sonne de façon très appétissante,
02:10 et cette Revue de Ville va devenir très célèbre parce que les variétés y sont entrecoupées de tableaux vivants nus.
02:17 C'est le premier spectacle de filles nues de la capitale.
02:20 Les représentations ont lieu six jours par semaine jusqu'à cinq fois par jour,
02:25 sans pause entre les spectacles, c'est vraiment l'usine.
02:29 C'est un spectacle unique à l'époque, je ciais donc l'année de sa création, 1931,
02:33 parce que la censure impose des règles extrêmement strictes,
02:38 il est strictement interdit à des femmes nues de se mouvoir sur scène.
02:43 Alors comment est-ce que vous faites dans ces cas-là ?
02:45 En fait, le créateur du spectacle a été un grand malin,
02:48 il est parvenu à convaincre la censure que finalement un tableau vivant de femmes nues,
02:53 ce n'était pas très différent des nues célèbres exposées dans les théâtres.
02:58 Or des nues célèbres, il y en a plein les théâtres londoniens,
03:00 donc pourquoi ? D'accord, on veut bien, elles ne vont pas bouger,
03:03 mais enfin on peut mettre des femmes nues sur une scène.
03:05 Tout ça évidemment d'une parfaite hypocrisie.
03:08 Immobile c'est bon, ok, vous pouvez mettre des femmes à poil,
03:11 mais si vous bougez, c'est érotique, donc c'est interdit.
03:14 Alors le créateur du spectacle, je le disais, est un petit malin,
03:17 puisque ces danseuses nues ne peuvent pas bouger,
03:20 il va faire bouger les décors, il va faire bouger les supports
03:23 sur lesquels les jeunes femmes posaient de manière à ce qu'on puisse les voir
03:27 sous toutes les coutures sans qu'elles fassent le moindre geste.
03:30 Donc vous avez des espèces de plots, elles sont posées là-dessus,
03:33 elles prennent une pose suggestive et puis on fait bouger les plots,
03:36 ça doit être un truc assez rigolo.
03:38 Et puis il y a aussi une autre technique pour faire un spectacle quand même
03:41 très très érotique pour les messieurs, c'est d'avoir d'immenses éventails
03:45 et on cache les dames et on bouge les éventails là encore
03:49 de façon à pouvoir découvrir progressivement
03:53 telle ou telle partie de l'anatomie de ces dames.
03:55 Donc voilà comment ça a fonctionné finalement ce Windmill,
03:58 et ces jeunes femmes sont devenues légendaires
04:02 sous le nom de Windmill's Girls.
04:04 La particularité de ce théâtre qui était dans l'Ouest End de la ville,
04:07 c'est que, je le disais, il n'a pas fermé pendant toute la guerre.
04:10 Madame Anderson a refusé de fermer son cabaret pendant le Blitz.
04:14 Le Blitz c'est de septembre 40 à mai 41.
04:17 Le Blitz ça fait quand même 30 000 morts en Angleterre.
04:21 C'était pas de la rigolade, les bombardements, non, Donia,
04:24 ben non, elle a pas voulu fermer.
04:26 Et il a gagné avec sa détermination à ne pas fermer son surnom
04:31 et surtout le slogan populaire "Nous n'avons jamais fermé"
04:34 que les clients ont adapté avec humour,
04:36 "En nous ne nous sommes jamais habillés".
04:38 En anglais c'est beaucoup plus amusant, évidemment.
04:41 Alors en fait, en plus, c'est devenu une aventure très familiale
04:44 ce Windmill's Theatre,
04:46 parce que pour ne pas avoir à courir de risques en venant là-bas,
04:50 la plupart des danseuses sont venues y habiter.
04:53 Toute la troupe en fait habitait sur place,
04:55 c'était une sorte de camping,
04:56 avec une atmosphère sans doute très joyeuse
04:59 et en même temps d'autant plus chaleureuse
05:01 que tout le monde avait la trouille en étant en temps de guerre.
05:05 Et en fait cet établissement a été géré un peu comme un pensionnat
05:08 par cette Madame Anderson,
05:09 avec des règles très strictes en matière de consommation d'alcool,
05:13 de couvre-feu,
05:14 les danseurs et hommes et les femmes logé évidemment dans des zones séparées
05:18 et on s'en doute, évidemment, c'est auprès des soldats en permission
05:22 que le revue de ville du moulin avant avait le plus de succès.
05:27 Et parfois les soldats restaient toutes ou partie de la journée.
05:32 C'était du non-stop.
05:33 Donc on pouvait venir le matin et on restait toute la journée au cabaret
05:37 et ça donnait lieu à des mouvements de foule assez comiques.
05:40 Les spectateurs qui étaient assis à l'arrière
05:42 attendaient chaque pause et à la pause
05:44 ils se précipitaient en passant par-dessus les fauteuils pour être devant,
05:48 pour être le mieux placé possible devant les dames nues
05:51 et cet exercice est entré dans l'histoire
05:54 sous le nom de "Stipple Chase" du moulin avant.
05:57 Alors surtout, avis aux auditeurs d'Europe 1,
06:00 à ne pas confondre le "Stipple Chase" du moulin avant
06:03 avec les courses hippies auxquelles assiste la famille royale.
06:07 C'est évidemment un truc d'un genre totalement différent.
06:10 Merci beaucoup Clémentine.
06:12 Et maintenant c'est le moment de l'émission où vous le savez,
06:14 je ne contrôle plus rien puisque c'est Jean-Luc qui prend la main
06:17 pour le quiz "Burn to be Alive".

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