Irlande 0-1 France : Dugarry s'est ennuyé devant le match et les "limites offensives" des Bleus

  • l’année dernière
"Deschamps a été mon coéquipier, il a été ton entraineur, on connait les limites de ses capacités offensives pour créer du jeu. Ce n'est pas dans sa culture"
Même s'il a aimé l'état d'esprit, Duga s'est ennuyé devant Irlande-France.
Transcript
00:00 Le match d'hier a-t-il douché votre enthousiasme de vendredi soir, 32-16 ?
00:04 Vous pouvez nous appeler bien sûr pour débattre.
00:05 Jérôme ?
00:06 - Écoute, moi, il n'a rien douché du tout, parce que je vais te dire la vérité,
00:10 on a mis en avant cette belle victoire contre les Pays-Bas,
00:13 mais on a été efficaces parce qu'on l'a connu avec Duga.
00:16 Quand tu marques un but au bout de deux minutes et un autre au bout de sept minutes,
00:20 c'est plus facile de jouer au football, de te libérer,
00:24 d'être un petit peu spectaculaire et encore que l'équipe de France,
00:28 qui était au Stade de France, on s'est bien embêtés en deuxième mi-temps.
00:32 Et tout ce qu'on a vu pendant la Coupe du Monde,
00:36 par moment, on l'a vu sur la deuxième mi-temps contre les Pays-Bas,
00:38 même une partie de la première mi-temps aussi,
00:40 et surtout, on l'a vu sur l'intégralité de la rencontre hier.
00:43 Donc, il n'y a aucune progression dans le jeu.
00:46 En effet, moi, ce qui est inquiétant, plus que le résultat,
00:50 parce que le résultat, de toute façon, même si on avait fait match nul,
00:53 on va se qualifier pour l'Euro dans ce groupe, il ne faut pas se voiler la face.
00:57 Donc là, bien sûr que c'est important de gagner les matchs
01:01 parce qu'on reste des compétiteurs, mais tu as le droit aussi d'attendre
01:05 beaucoup mieux, tu t'es fait bouger, mais bouger plus que bouger
01:09 par des Irlandais vaillants, rigoureux, tactiquement,
01:15 mais bien sûr, avec beaucoup de faiblesse technique.
01:18 Mais c'est normal, vu le niveau des joueurs.
01:20 Et nous, de l'autre côté, normalement, libérés,
01:23 si on peut parler de libération après cette victoire contre les Pays-Bas,
01:27 qui est un peu le deuxième favori de ce groupe,
01:30 normalement, tu dois arriver en Irlande en proposant des choses,
01:33 ce qu'ils ont fait pendant dix minutes au début.
01:35 Alors pourquoi tu n'es pas dans la continuité ?
01:37 Parce que, encore une fois, je pense que
01:39 Didier Deschamps n'apporte pas les solutions nécessaires dans le jeu
01:42 quand c'est compliqué, quand l'adversaire, c'est un adversaire,
01:45 il te pose des problèmes physiquement, qu'il gagne tous les duels quasiment,
01:50 qu'il y a une débauche d'énergie qui est inhabituelle chez eux,
01:53 parce que dans l'engouement, ils font plus d'efforts que d'habitude,
01:57 plus concentrés que d'habitude,
01:58 mais ça, c'est le lot des petites équipes qui rencontrent les grosses.
02:01 Et quand tu es une grosse équipe comme l'équipe de France,
02:03 tu es habitué aussi à jouer ce genre d'équipe.
02:05 Mais là, tu dois trouver des solutions.
02:07 Alors déjà, les joueurs individuellement,
02:08 mais quand tu perds les duels que tu es pris dans le 1 contre 1,
02:11 à l'image de Kylian Mbappé, hier, il n'a pas fait un bon match,
02:14 parce qu'il perd des duels, parce que Coleman était sur lui la plupart du temps.
02:18 C'est un joueur de première ligue, lui.
02:20 Donc, il a su le prendre, il a su gagner des duels,
02:23 il a su le contrer, ça lui a posé des problèmes.
02:25 Mais après, collectivement,
02:27 tu n'apportes rien pour voir les petites carences individuelles sur ce match.
02:31 Et Didier Deschamps, à la mi-temps,
02:33 et c'est pour ça que je suis un peu surpris de sa réaction à la fin du match.
02:36 Alors, je veux bien qu'il botte un peu en touche et qu'il nous retienne
02:39 l'ensemble des deux matchs et les deux victoires.
02:42 OK, c'est son rôle, mais tu peux aussi, comme tu l'as dit, Duga,
02:46 tu peux aussi expliquer pourquoi ça n'a pas été,
02:50 que toi aussi, tu as failli dans ta mission, que à la mi-temps,
02:53 au lieu de passer dans l'axe parce que tu es bien pris,
02:55 eh bien, développe le jeu sur les côtés.
02:57 Même dans ses changements, il ne fait pas ces changements-là.
03:00 Donc, en fait, tu es satisfait de quoi ?
03:02 Hier, tu retiens que la victoire et c'est grâce à la magie de Ménihan.
03:09 Mais c'est quand même insuffisant.
03:11 Et Didier Deschamps est aujourd'hui en position de force,
03:14 vraiment, parce qu'il a été prolongé quatre ans
03:17 après une finale de Coupe du Monde,
03:19 après avoir gagné le premier match contre les Pays-Bas.
03:21 Tu es aussi en position de force pour
03:24 taper un peu sur des joueurs qui t'ont déçu ou même taper sur toi,
03:27 parce que tu peux te dire "je n'ai pas été à la hauteur".
03:30 Alors, Duga, tu es d'accord avec Jérôme ? Tu fais le même constat ?
03:32 Oui, il y a plein de constats que je fais comme Jérôme.
03:36 Après, moi, je voudrais commencer, pour une fois,
03:38 par ce qui m'a plu dans ce match.
03:40 Moi, notamment, cette grosse solidarité défensive
03:44 avec beaucoup d'efforts pour conserver ce but d'avance.
03:46 J'ai trouvé des joueurs concernés,
03:49 j'ai vu des joueurs taclés, j'ai vu Colomani,
03:51 j'ai vu, comme souvent, Griezmann, les défenseurs centraux.
03:55 J'ai aimé cette solidarité qui se dégage de cette équipe.
03:59 Il y a quelque chose.
04:00 Il y a beaucoup d'efforts pour conserver ce but.
04:02 Je trouve qu'il y a un vrai état d'esprit dans cette équipe, dans ce groupe.
04:05 Après, une fois que j'ai dit ça,
04:07 le reste a été très, très pauvre.
04:10 Très pauvre offensivement, avec énormément, énormément de déchets techniques,
04:14 très peu de prise de risque, très peu de créativité offensive.
04:19 Ça m'a fait penser sincèrement à un match Coupe du Monde,
04:22 qu'on gagne sans proposer grand chose.
04:24 Une nouvelle fois.
04:25 Alors après, après l'excellente,
04:27 bien évidemment, l'excellente prestation face aux Pays-Bas,
04:30 on est retombé dans une forme de suffisance, je trouve, en jouant,
04:35 encore une fois, sur un rythme de sénateur.
04:37 Ça joue à la balle, j'en ai marre de ce football.
04:40 On l'a vu à la Coupe du Monde, les Espagnols, les Allemands,
04:43 par moments les Français, c'est mou, ça se regarde joué, ça prend pas de risque.
04:46 - Dugas, c'est pas parce qu'on n'est pas habitué à ça ?
04:49 - Je sais pas, sincèrement, je sais pas.
04:51 Mais ce football là, où on respecte une espèce d'équilibre,
04:55 où on prend un minimum de risque,
04:56 il y a de moins en moins de dépassement de fonction,
04:57 sincèrement, ça m'a ennuyé.
04:59 Alors, sincèrement, ce genre de match, Jérôme, est-ce que c'est une surprise ?
05:03 - Non, non, c'est pas une surprise.
05:05 - Non, mais il faut pas se mentir, des matchs gagnés sans proposer grand chose,
05:07 on en a vu déjà beaucoup, énormément, sous l'air des champs.
05:10 Surtout en plus face à des adversaires plus faibles sur le papier,
05:13 qui nous proposent essentiellement de l'envie et de l'intensité.
05:16 On est trop souvent décevant face à ce genre d'adversaires.
05:20 Heureusement qu'ils sont pas capables de nous opposer un petit peu plus de qualité.
05:23 Autrement, on aurait beaucoup, beaucoup, beaucoup moins de victoires au compteur.
05:27 Sincèrement, c'est à chaque fois le même constat.
05:30 Alors après, tu vas me dire, Deschamps a prolongé 4 ans en connaissance de cause.
05:34 Ça fait combien d'années qu'il est là ?
05:36 Moi, j'en lui rappelle, moi, 10 ans.
05:37 - Plus de 10 ans.
05:39 - Oui, ça fait plus de 10 ans maintenant, depuis 2012.
05:40 - Voilà, ça fait 10 ans que l'on a ce genre de match et que les décideurs
05:45 ont décidé qu'il était plus important de gagner les matchs que de bien les jouer.
05:50 Donc, on est sur la même formule.
05:51 On est sur le même constat.
05:53 On est sur le même rendu.
05:54 - Non, mais tu peux...
05:56 - Il n'y a aucune surprise.
05:58 On les connaît, mais on les connaît.
06:00 Jérôme, tu le connais aussi bien que moi, Dédé.
06:01 On les connaît, ces limites à Deschamps.
06:03 On connaît ces énormes qualités parce qu'il y en a.
06:05 - Oui, oui, bien sûr.
06:07 - Il y en a, c'est certain.
06:08 Mais on sait que ces capacités offensives pour créer du jeu,
06:12 pour ramener des solutions offensives, il n'y en a pas.
06:15 Ça a été ton entraîneur.
06:16 Moi, ça a été mon coéquipier.
06:18 Ce n'est pas dans ses gènes, ce n'est pas dans sa culture.
06:22 - Je reconnais ce que tu dis et je l'ai même dit hier à Jean-Louis.
06:26 Et c'est là que je lui en voulais dans ces changements,
06:28 parce que les changements qu'il a faits sur le match hier,
06:31 ce n'est pas une question de fatigue.
06:32 Les joueurs, ils sont habitués à jouer tous les trois jours, les quatre jours.
06:36 Et arrêtez de me parler du fait que c'est au mois de mars,
06:39 que les organismes y tirent.
06:40 Ça, c'est complètement faux.
06:42 Par contre... - Les changements, juste pour ceux qui ne les ont pas en tête,
06:45 c'est Diaby qui a remplacé Giroud,
06:46 en replaçant Colomoni dans l'axe.
06:48 - Oui, mais même les changements d'entrée.
06:50 - Donc Giroud titulaire en pointe.
06:52 - Voilà, Colomoni, tu le passes à droite alors qu'il jouait dans l'axe.
06:55 - Exactement. Pavard à la place de Koundé et donc Kamavinga à la place de Chouameni.
06:59 - Et bien oui, après, le milieu terrain, je ne vais même pas toucher
07:01 parce que Kamavinga, Chouameni, Ravio...
07:05 - C'est un bon match. - Ravio, Griezmann,
07:07 même s'il était en droit d'attendre un peu plus.
07:10 Mais je trouve que dans la créativité, comme tu le dis, Duga,
07:14 c'est surtout lié à ce qu'on a montré devant individuellement,
07:18 où là, on a perdu des duels.
07:21 Et surtout, face à un bloc qui est très défensif,
07:24 qui joue en 5-4-1,
07:26 je suis désolé, mais ça doit passer sur les côtés.
07:29 C'était très axial hier, le jeu d'Irzirlandia.
07:31 - Ça joue à la baba, là.
07:33 - Mais c'est pour ça que moi, j'en veux à Didier là-dessus,
07:37 parce que je te rejoins sur le fait que ce ne soit pas un magicien
07:41 pour te mettre un dispositif offensif en place dans la créativité.
07:47 Non, par contre, il est très fort dans la complémentarité,
07:51 la complicité des mecs.
07:52 Et c'est là que je ne comprends pas que sur un match comme hier,
07:55 où tu sais qu'il faut être très fort sur les côtés,
07:59 que tes latéraux vont peut-être apporter un plus,
08:01 dire "je suis déçu de l'apport de Théo Hernandez,
08:04 qui a beaucoup de qualité, mais il ne le libère pas assez".
08:07 De l'autre côté, on va parler de Pavard,
08:09 mais tu mets Pavard ou Koundé, je ne suis pas sûr.
08:13 Et on en a eu l'exemple hier sur la qualité des centres de Pavard,
08:16 que ce soit des joueurs comme ça pour placer des bons centres,
08:19 pour un Giroud, parce que là,
08:20 je ne m'en prends même pas à Giroud pour une fois, Jean-Louis,
08:22 tu vois, je te dis, c'est "j'en veux même pas à Giroud".
08:24 Parce que Giroud, qu'est-ce tu veux qu'il foute dans un match comme ça ?
08:27 Il n'y a pas un ballon qui arrive sur lui.
08:29 Il n'y a pas un centre potable, pas un centre potable.
08:32 Et ne me dis pas que Didier Deschamps, il ne le voit pas tout ça.

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