"Chasse à l'emploi public", "fuite des cerveaux", "mafias de l'eau" : l'Inde face à ses nombreux défis

  • l’année dernière
Christophe Jaffrelot, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'Inde, était l'invité du grand entretien de la matinale, dimanche 16 avril, pour évoquer les différents défis auxquels le pays est et va être confronté.

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00:00 France en Terre.
00:02 Karine Becker, Eric Delvaux, le 6/9 du week-end.
00:07 Et gros plan ce matin sur un pays parfois méconnu, l'Inde.
00:11 L'Inde qui est devenue ces derniers jours le plus peuplé au monde en supplantant la Chine.
00:16 1,4 milliard d'habitants, ce qui pose déjà de multiples défis à relever.
00:25 On va en parler avec vous ce matin. Bonjour Christophe Jaffrelot.
00:28 Bonjour. Vous êtes directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'Inde.
00:31 Alors comment résumer la situation en quelques chiffres ?
00:33 Donc je disais 1,4 milliard d'habitants, en majorité des jeunes et des hommes.
00:40 On résume ça comme ça ?
00:41 Oui, c'est une bonne façon d'entrer en matière.
00:45 Une population effectivement maintenant numéro 1 et pour longtemps.
00:49 Puisqu'en fait la Chine commence elle à baisser en termes démographiques, elle va continuer.
00:55 L'Inde va continuer à progresser probablement jusqu'au milieu de ce siècle.
01:00 Et en 2050 on aura 1,7 milliard d'Indiens et 1,3 milliard de Chinois.
01:07 Donc on aura un écart sans précédent dans l'histoire du monde.
01:10 Parce que la Chine décline pendant que l'Inde monte, mais lentement, mais sûrement.
01:14 Voilà, le taux d'accroissement naturel est tombé à 1%.
01:17 Bon bah 1% d'1,4 milliard, ça fait 14 millions.
01:21 Vous avez 14 millions d'Indiens de plus tous les ans.
01:25 Mais si on veut préciser encore un peu les choses,
01:28 on le dit, c'est un pays très jeune, évidemment, pays pauvre et pays rural.
01:34 On peut présenter des choses comme ça ?
01:35 Oui, ça c'est aussi vrai.
01:36 C'est-à-dire qu'en fait on a la moitié des Indiens qui ont moins de 25 ans.
01:42 Donc ça c'est un vrai atout, potentiellement en tout cas, population jeune.
01:48 Mais c'est vrai, une population qui reste rurale en majorité,
01:53 sachant que, et là on a un problème, définir ce quai rural et ce quai urbain n'est plus aussi facile qu'avant.
01:59 Vous avez une extension des villes dans les campagnes,
02:02 une "rurbanisation" comme on dit, qui rend les choses un peu floues parfois.
02:07 Rural pour moi, ça voulait dire quelqu'un qui travaille dans l'agriculture ?
02:10 Alors si on prend ce critère, on est sans doute à 50% de la société indienne qui est effectivement agricole.
02:17 Mais avec du coup des tas de gens qui sont à la campagne et qui travaillent à l'usine.
02:22 Et il y a donc un exode rural, on va en parler dans un instant avec les conséquences que ça pose.
02:27 L'Inde, pays jeune donc, des jeunes qui connaissent un chômage de masse ?
02:31 Oui, considérable.
02:32 Oui parce que, avoir une population jeune, c'est potentiellement bénéficier de ce qu'on appelle du "dividende démographique".
02:39 Vous savez ce fameux dividende démographique dont tous les pays émergents ont profité.
02:44 Vous avez une population qui est en âge de travailler, qui est supérieure à celle qui est plus jeune et pas en âge de travailler,
02:51 ou trop âgée et déjà à la retraite.
02:53 Sauf que si vous n'éduquez pas votre population, ce dividende reste très illusoire.
02:59 Et là il y a un déficit d'éducation qui est criant.
03:02 Le système public n'a pas été suffisamment développé.
03:06 Vous voulez dire qu'il manque des écoles en fait ?
03:08 Il manque énormément d'écoles.
03:09 Vous avez un problème dans les campagnes en particulier, mais pas seulement, d'instruction publique.
03:15 Le budget d'éducation c'est 6% du budget.
03:18 C'est rien.
03:19 Pour un pays comme ça qui a encore un tiers d'un alphabète.
03:22 C'est énorme.
03:23 Donc on va dans le privé mais avec des niveaux de qualité très très inégaux.
03:29 Ceci dit, ça coûte très cher quand même.
03:32 Et les familles se saignent aux quatre veines pour éduquer leurs enfants, sans les résultats escomptés.
03:37 Et le secteur privé ne crée pas d'emplois.
03:40 Pourquoi ?
03:41 Il y a un déficit d'investissement en ce moment en Inde absolument criant.
03:46 Le taux d'investissement ne cesse de baisser depuis 15 ans.
03:50 Et un pays comme ça qui n'investit pas, ça se traduit par une érosion de la part de l'industrie dans le PNB.
03:56 C'est un pays qui n'a pas d'industrie, qui a 15% de son PNB relevant de l'industrie.
04:02 C'est les services qui sont le moteur de l'économie.
04:05 Mais les services n'embauchent pas suffisamment.
04:07 Et notamment pas ceux qui viennent des campagnes, qui n'ont pas de formation et qui cherchent un emploi.
04:11 Et du coup ce qui est très prisé en Inde, c'est de passer le concours de la fonction publique.
04:16 Devenir fonctionnaire en Inde, c'est l'assurance de grimper dans l'échelle sociale.
04:21 En tout cas c'est l'assurance d'avoir un emploi stable dans un secteur qui n'est pas informel.
04:27 Et qui vous donne droit à quelques avantages sociaux.
04:31 Une retraite, une sécurité sociale.
04:33 Toutes choses que vous n'avez pas dans la plupart des emplois du secteur informel.
04:39 Et 80% de l'économie indienne est informelle.
04:43 Donc c'est la chasse à l'emploi public.
04:45 Et vous le disiez, des parents de la classe moyenne qui se saignent pour payer des écoles quand on les trouve.
04:52 Ça crée des tensions sociales dans le pays, cette paupérisation de la classe moyenne ?
04:56 Bien sûr. Vous avez beaucoup de ressentiments, beaucoup de compétitions.
05:02 Notamment un sujet qui est très sensible aujourd'hui, c'est la discrimination positive.
05:07 L'Inde a inventé les quotas pour les basse-castes dans le secteur public.
05:13 Qui est le principal employeur du pays.
05:16 Et ces quotas pour les castes intouchables, pour les basse-castes en général,
05:20 les hautes castes les voient de moins en moins bien.
05:23 Parce qu'il y a tellement peu d'emplois à se partager que c'est autant de moins pour elles.
05:29 Comme il y a peu d'emplois à se partager, on observe, en tout cas je crois,
05:34 que les élèves, les quelques élèves qui ont été très bien formés,
05:37 souvent quittent le pays, s'expatrient.
05:40 Et donc pourquoi est-ce qu'ils ne restent pas dans leur pays ?
05:43 Pour essayer de le faire monter, de le permettre de progresser ?
05:47 Il y a effectivement un "brain drain" comme on disait, et comme on doit dire encore.
05:51 On les trouve beaucoup aux Etats-Unis en plus.
05:53 Beaucoup aux Etats-Unis, beaucoup au Canada,
05:55 beaucoup où l'anglais est pratiqué parce que tous ces gens sont éduqués en anglais.
05:59 Et ce sont des pays qui procèdent à de l'immigration sélective.
06:03 Donc la Silicon Valley parle toutes les langues de l'Inde, pour ne prendre qu'un exemple.
06:10 Toutes les firmes du secteur des technologies de l'information aux Etats-Unis
06:15 sont peuplées d'Indiens.
06:17 Le patron de Microsoft est un Indien.
06:19 - Exactement, je pense à lui.
06:21 - Il se démarre partout. - Ça s'appelle la fuite des cerveaux.
06:23 - Mais le pays n'arrive pas à retenir ses cerveaux.
06:26 - Il y arrivait. Là on est sur un retour à une situation antérieure.
06:31 Dans les années 2000, vous avez eu une fenêtre de 10 ans.
06:36 La première décennie du siècle où on a vu au contraire un retour des Indiens.
06:43 Et puis là c'est fini. - Pourquoi ?
06:45 - Une croissance qui est en berne. Contrairement à ce qu'on dit, la croissance n'est pas suffisante.
06:50 Elle est élevée pour nous 6%. Ça nous paraît beaucoup.
06:54 Elle n'est pas suffisante. Pas d'investissement.
06:57 Et pas d'investissement aussi parce que le marché n'est pas là.
07:00 Il n'y a pas assez de consommateurs, pas assez d'acheteurs.
07:03 Et du coup c'est un cercle vicieux. - Oui, donc pas d'avenir.
07:06 - Et donc on parlait de cet exode rural en Inde.
07:09 La population qui vient chercher du travail dans les villes.
07:13 Qui construit de trop grandes mégapoles surpeuplées elles aussi.
07:20 Avec quelles conséquences pour l'environnement ?
07:22 - Alors vous avez d'abord un problème dans ces villes qui est celui de l'eau.
07:27 Alors ce n'est pas que dans les villes.
07:29 Parce qu'en fait le problème de l'eau c'est le problème de l'Inde.
07:33 Alors on se projette dans le temps là.
07:36 Ce n'est pas le problème aujourd'hui le plus criant peut-être.
07:39 Ça va le devenir très rapidement.
07:42 Pour toute une série de raisons.
07:44 Vous parlez de climat, d'environnement.
07:46 La fonte des glaciers himalayens qui vont perdre un tiers de leur volume d'ici 2050.
07:53 - Va inonder les cultures.
07:55 - Alors inonder avant de rendre les fleuves de véritables oued.
08:00 C'est-à-dire que ces grands fleuves.
08:02 Le Gange, côté pakistanais l'Indus.
08:05 Le plateau tibétain qui est le château d'eau de toute l'Asie.
08:11 Puisque c'est le Mekong, c'est la Mordaria, c'est tous ces fleuves.
08:15 Et bien va perdre son potentiel hydraulique.
08:19 Et l'Inde va être l'une des victimes collatérales.
08:22 Mais à côté de ça et avant ça.
08:25 Pomper les nappes phréatiques comme l'Inde le fait pour la canne à sucre, pour le coton.
08:31 Et pour les villes.
08:33 Fait que vous avez maintenant besoin de puits qui vont jusqu'à 500 mètres de profondeur.
08:40 - Ça veut dire qu'au quotidien des millions de citadins indiens ne bénéficient pas d'eau potable.
08:46 Et ils dépendent donc de livraison d'eau par camion, par train.
08:50 C'est comme ça que le quotidien c'est ça ?
08:52 - Oui, vous n'avez pas d'eau tout le temps déjà, première chose.
08:54 Donc vous ouvrez le robinet et puis quand le seau est rempli, vous le remplacez par un autre.
08:59 Vous faites des stocks.
09:00 C'est un des grands problèmes de l'approvisionnement en eau dans les villes.
09:05 Et puis quand la situation devient encore plus critique, c'est ce qui se passe.
09:09 On attend que le train avec ses wagons-citerne amène de l'eau.
09:13 On a eu ça par exemple à Chennai, qui n'est pas une petite ville, un ancien madras.
09:17 Vous avez des moments où vous ne pouvez plus vous ravitailler qu'ainsi.
09:25 Et d'ailleurs il y a des mafias de l'eau.
09:28 A Bombay, il y a une mafia de l'eau bien connue.
09:30 - Bombay, Calcutta, toutes les villes menacées par la montée des niveaux de l'eau.
09:35 - Alors l'Inde est un pays qui concentre à peu près, alors on a commencé à en parler là,
09:38 mais à peu près tous les grands enjeux environnementaux,
09:41 tous les grands défis environnementaux qui nous attendent ces 30 prochaines années.
09:45 Pas simplement l'Inde, mais globalement sur toute la planète.
09:47 Vous avez parlé de l'Himalaya au nord, effectivement, avec la fonte des glaciers.
09:51 On peut parler aussi des 7500 kilomètres de côtes qui bordent l'océan Indien
09:55 et les niveaux de la mer vont monter.
09:58 Comment est-ce que l'Inde, malgré tout, a essayé de se préparer à tout ça ?
10:01 C'est pas préparé du tout ? Ou quand même essaye d'anticiper deux, trois petites choses ?
10:05 - Alors, il y a maintenant des politiques qui sont mises en œuvre,
10:10 notamment par rapport à ces questions d'eau.
10:14 Un des grands sujets, pour reprendre le point d'entrée urbain,
10:18 c'est de faire que la ville redevienne une éponge.
10:22 C'est un des grands thèmes d'ailleurs.
10:24 - Ça veut dire quoi ? - Eh bien, faire que... - Absorber l'eau ?
10:26 - Oui, plutôt que d'évacuer l'eau lorsqu'elle tombe du ciel,
10:31 et puis plutôt que d'avoir des inondations,
10:33 parce que vous avez lors des moussons des inondations,
10:36 eh bien qu'on rende la ville perméable pour que... - Enlever du béton, quoi.
10:40 - Voilà. Désartificialiser les îles. - Les sols.
10:44 - Et pour recharger les nappes phréatiques.
10:46 - Alors, je parlais aussi des 7500 km de côtes et de la montée de la mer, des eaux.
10:52 Ça veut dire que ce territoire, qui est certes vaste, va quand même se réduire,
10:56 avec une population qui va augmenter.
10:58 Qu'est-ce qui va se passer à ce moment-là ?
10:59 - Et va se réduire dans des zones qui sont très densément peuplées.
11:02 Parce qu'en fait, tous les deltas, ou presque, sont des zones risicoles,
11:06 très densément peuplées, où vous avez des mille habitants au kilomètre carré, très souvent.
11:10 Là, vous avez des réfugiés climatiques.
11:13 Alors, on parle de l'Inde, mais ça va être vrai ailleurs.
11:16 Le Bangladesh voisin est déjà dans cette situation.
11:19 - Et là, c'est pas du tout anticipé. Le gouvernement, pour l'instant, ne travaille pas sur ça.
11:22 - À ma connaissance.
11:23 - Pour répondre justement à tous ces défis, l'homme fort du moment en Inde,
11:28 c'est le Premier ministre, Narendra Modi, avec sa politique inspirée du national-populisme,
11:34 la religion comme vecteur identitaire.
11:37 Ça veut dire que pour ce Premier ministre hindouiste,
11:40 toutes les autres religions sont des menaces, et principalement les musulmans.
11:44 - Principalement les musulmans. C'est-à-dire qu'effectivement, vous avez une vision de la nation
11:49 comme étant résumée par la majorité hindoue.
11:53 L'identité nationale doit être hindouisée,
11:58 et les minorités, les musulmans, les chrétiens, doivent prêter allégeance aux symboles d'identité hindoue.
12:04 Ils peuvent rester chrétiens, musulmans, dans la sphère privée,
12:08 mais en public, leur allégeance doit aller à cette identité-là.
12:15 Et ça, c'est effectivement une idéologie qu'on peut dire nationale-populiste,
12:20 ethno-nationaliste, et qui est devenue dominante.
12:24 - Et est-ce qu'il répond, cet homme, ce Premier ministre, aux défis que nous avons énumérés dans la première partie ?
12:29 - Alors, il a mené une politique de transition énergétique assez énergique du côté du solaire.
12:38 Il y a beaucoup d'investissements dans ce domaine.
12:42 Là, il promet de mieux distribuer l'eau,
12:46 parce que l'une des façons aussi de donner de l'eau aux Indiens, c'était de la gaspiller.
12:52 Il y a des gaspillages, des fuites inimaginables.
12:57 On évalue parfois, dans une ville, à un tiers l'eau perdue,
13:02 simplement faute de maintenance dans les réseaux en question.
13:06 Mais je dirais que les politiques publiques ne sont pas son point fort.
13:11 C'est la politique tout court son point fort.
13:13 C'est un homme qui a réussi à mobiliser les électeurs sur des enjeux identitaires,
13:19 sur des enjeux qu'on peut faire relever de la peur et de la colère,
13:26 l'émotion et sa grande force.
13:29 - Un grand classique pour le nationalisme et pour le populisme, on est d'accord.
13:32 - Exactement. - Avec le culte de la personnalité.
13:35 - Il apparaît comme le sauveur.
13:36 Il est celui qui protège les hindous contre les musulmans,
13:41 et contre les pakistanais, et contre les islamistes.
13:44 - C'est la pression pakistanaise qui est toute proche qui l'a créée ?
13:48 - Il y a une dialectique très intéressante.
13:51 Ils ont su utiliser les attaques venues du Pakistan.
13:56 Vous vous souvenez peut-être dans les années 2000-2008, par exemple,
13:59 l'attaque contre Bombay pendant 72 heures, un commando tient en haleine tout le pays.
14:06 Ils ont instrumentalisé cette peur.
14:08 Aujourd'hui, ce n'est pas que le Pakistan, c'est les musulmans.
14:11 Ce sont les musulmans en général qui apparaissent comme des menaces.
14:14 On est dans une situation où, pour survivre à une crise sociale profonde,
14:22 c'est l'idéologie, l'identité qui est la carte maîtresse du politique.
14:29 - On l'a dit, c'est un nationaliste de plus en plus autoritaire,
14:32 à la tête de la cinquième puissance économique mondiale.
14:36 Je précise parce qu'on ne l'a pas encore dit.
14:38 Et qui dirige cette année le G20.
14:41 Est-ce que Modi réussit à faire de l'Inde un pays de plus en plus influent ?
14:45 - Oui. De ce point de vue-là, il a été très actif, hyperactif,
14:51 faisant le tour du monde dès qu'il a pris le pouvoir en 2014.
14:56 Alors que c'était un homme qui n'avait jamais eu de fonction nationale.
15:00 C'est une première.
15:02 Un chef de gouvernement régional devient Premier ministre de l'Inde
15:05 et immédiatement s'embarque pour, d'abord, Tokyo et puis Brasilia.
15:13 Enfin bon, il a fait le tour du monde.
15:16 Et il a réussi à se rendre indispensable aux yeux des Occidentaux face à la Chine.
15:23 Les Occidentaux, les États-Unis, les Européens,
15:26 misent sur l'Inde pour faire contrepoids à la Chine.
15:30 Et aussi pour être, dans l'Indo-Pacifique, l'une des pièces maîtresses du dispositif du Quad.
15:38 C'est l'une des quatre parties prenantes du Quad.
15:42 - Redoutes-nous ce que c'est que le Quad.
15:44 - Le Quad, c'est ce fameux quadrangulaire qui réunit États-Unis, Australie, Japon et Inde.
15:49 Et c'est eux qui mènent la danse du point de vue occidental, on pourrait le dire,
15:56 dans l'Indo-Pacifique, face à la Chine.
15:58 Donc, il est courtisé par les Occidentaux, mais il reste un ami des Russes.
16:03 - Voilà, j'allais dire, en fait, comment il fait ?
16:05 Il s'entend très bien avec tous les dirigeants de la planète.
16:08 Aussi bien Biden que Xi Jinping et effectivement les Poutines.
16:13 - Alors, Xi Jinping, c'est plus compliqué quand même, parce que la Chine reste la grande menace.
16:17 - Le grand concurrent.
16:19 - Oui, même une menace, parce que les Chinois, quand même, mènent des incursions dans l'Himalaya
16:24 qui font qu'aujourd'hui, une partie du territoire indien est sous contrôle chinois, littéralement.
16:29 Et c'est un énorme problème.
16:31 Mais la Russie, oui, la Russie reste un partenaire très fort.
16:34 C'est lié à un héritage. L'URSS et l'Inde étaient deux partenaires importants.
16:40 La Russie est le premier fournisseur d'armes de l'Inde, et de très loin.
16:45 Même si ça change, même s'il diversifie.
16:47 Et donc, pour l'instant, il joue sur tous ces tableaux.
16:50 C'est l'héritage aussi du non-alignement.
16:52 Jusqu'à quand ? Et c'est ça la vraie question aujourd'hui pour ceux qui étudient la politique étrangère de l'Inde.
16:57 C'est que si le monde devient de plus en plus bipolaire,
17:00 si Russie et Chine se rapprochent, comme on le voit, de manière à ne former plus qu'un Dium vira, en quelque sorte,
17:08 l'Inde aura beaucoup de mal à ne pas être forcée à se tourner vers l'Occident davantage encore.
17:16 Ce qu'elle n'aimerait pas faire.
17:18 Elle préfère être comme ça, dans un monde multipolaire.
17:20 Je vais vous presser parce qu'il reste 30 secondes.
17:22 Narendra Modi est en poste depuis 9 ans.
17:25 Pourquoi reste-t-il le favori pour ce qui serait son 3ème mandat dans les élections de l'année prochaine ?
17:32 D'abord, dans ces régimes-là, être dans l'opposition n'est pas de tout repos.
17:36 Vous n'avez pas l'argent des grands oligarques, vous n'avez pas la couverture des médias,
17:42 et vous avez en permanence des contrôles fiscaux ou autres.
17:46 Raoul Gandhi, le leader de l'opposition, vient d'être disqualifié de son siège de parlementaire.
17:52 C'est une des bonnes raisons pour lesquelles on reste au pouvoir.
17:55 Merci Christophe Jaffrelot.
17:57 Je signale que France Inter va prolonger cette immersion dans l'Inde,
18:01 chaque matin de la semaine prochaine à 7h15, dès demain, avec une série de Zoom,
18:07 5 reportages qui seront signés, Béatrice Duguay.
18:10 Merci beaucoup Christophe Jaffrelot.
18:12 Merci à vous.

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