'Robert Altman cartographe', cours de cinéma par Fabien Gaffez (directeur artistique du Forum des images).
1973. Le Privé adapte Chandler sous la forme d’une déambulation indolente à travers Los Angeles.
Analysons la cartographie altmanienne, reprise par David Robert Mitchell, Paul Thomas Anderson ou Quentin Tarantino.
Dans le cadre de la thématique 'Portrait de Los Angeles'.
https://www.forumdesimages.fr/les-programmes/portrait-de-los-angeles
---
Le Forum des images : au centre de Paris, bat le cœur du 7e art !
Rencontres exceptionnelles, cours de cinéma et conférences, festivals… un concentré du meilleur de ce qui se passe toute l’année au Forum des images.
Toute la programmation : http://www.forumdesimages.fr/
@forumdesimages et #forumdesimages
1973. Le Privé adapte Chandler sous la forme d’une déambulation indolente à travers Los Angeles.
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00:00:00 Je vais commencer tout de suite parce que vous allez voir, on va parler notamment d'état
00:00:09 cotonneux, d'état un petit peu presque sous hypnose ou somnambulique.
00:00:16 C'est un petit peu l'état dans lequel je me trouve là aujourd'hui, en me présentant
00:00:21 devant vous et en terminant sur le fil la présentation de ce cours.
00:00:26 On va voyager ensemble avec Robert Atman, cartographe.
00:00:30 On va comprendre assez vite pourquoi on parle d'Atman comme d'un cartographe.
00:00:37 L'idée et le concept de cartographie sera vraiment en sous-texte et même en sur-texte
00:00:45 parfois de ce cours.
00:00:47 Vous verrez que la méthode sera simple pour nous guider à travers non pas toute l'œuvre
00:00:55 d'Atman, parce que je n'aurai ni le temps ni même l'expertise pour traverser toute
00:01:01 l'œuvre d'Atman, mais notamment le privé et en verrage, on évoquera quelques autres
00:01:07 films.
00:01:08 Mais on va visiter plusieurs lieux et vous verrez apparaître à l'écran simplement
00:01:12 des noms et des dates, des noms propres qui vont nous guider également à travers la
00:01:19 théorie et la pratique de cette cartographie de Los Angeles.
00:01:24 Des noms propres qu'on considérera comme des lieux donnés à une époque précise.
00:01:29 Et le montage de toutes ces voix que je vais vous présenter sera un hommage lui-même
00:01:34 au travail de Robert Atman.
00:01:38 La préparation de ce cours où je suis allé un petit peu dans beaucoup de sens sans peut-être
00:01:45 tout ressaisir à la fin, me fait penser à une métaphore que justement Robert Atman
00:01:51 nous a donné de ce qu'est un tournage, de ce qu'est la préparation d'un film pour
00:01:55 lui.
00:01:56 Il comparait ça à un collier de perles qui se brise et qui se casse sur un sol de marbre
00:02:02 et on essaye de rattraper un petit peu, on ne sait pas par quelle perle commencer.
00:02:06 C'est un peu ça un tournage pour lui, c'était peut-être un peu ça de préparer un cours
00:02:10 en parlant d'Atman.
00:02:11 Je ne sais pas quelle perle j'ai pu rattraper, mais en tout cas je vous présente des rushs
00:02:16 et on fera le montage ensemble.
00:02:18 J'aimerais donc parler avec vous à travers ce cours de deux ou trois choses qui me paraissent
00:02:25 importantes.
00:02:26 L'œuvre de Robert Atman qui étrangement paraît encore être un continent trop méconnu.
00:02:35 Je ne dirais pas que c'est un cinéaste maudit, il ne faudrait pas abuser, mais il me semble
00:02:39 que son importance en tout cas n'est pas reconnue alors qu'il s'agit d'une des œuvres
00:02:44 les plus importantes du 20e siècle, en tout cas du cinéma du 20e siècle.
00:02:50 On le cite, pas si souvent que ça, certains cinéastes le citent, on va en parler maintenant.
00:02:56 Mais j'ai l'impression en tout cas et que dans le discours général, critique, en tout
00:03:03 cas en France, Atman n'est pas le nom qui revient ces derniers temps le plus souvent
00:03:07 alors que c'est très certainement, je le disais, l'une des œuvres les plus importantes
00:03:12 à mes yeux avec ses expérimentations, ses erreurs.
00:03:16 Enfin, c'était, on va le voir, quelqu'un qui était d'abord, qui expérimentait beaucoup
00:03:20 de choses.
00:03:21 Donc il y a eu plusieurs, pas des mauvais films, mais des films un peu moins bons et
00:03:26 plusieurs comebacks entre les années 60 et les années 2000.
00:03:29 Il est mort en 2006.
00:03:31 Et donc ça en fait un cinéaste cher à mes yeux.
00:03:35 On parlera également de la manière dont la mémoire des films circule sans entrer
00:03:41 dans les écueils de la citation, de l'hommage, du pastiche ou de la parodie.
00:03:45 Mais ce sera un petit peu aussi ce qui sera ici exploré, la manière dont les films se
00:03:51 parlent entre eux.
00:03:52 Également, comment les acteurs incarnent et constituent l'image primordiale du cinéma,
00:03:59 comment leur image est constitutive du cinéma et de manière plus large, on va commencer
00:04:04 très vite, comment nous vivons au milieu des ruines, des images, des cartes, des fictions
00:04:10 qui nous guident à travers les œuvres et à travers le monde de manière générale.
00:04:14 Donc ça s'inscrit parfaitement dans un portrait de ville.
00:04:17 Los Angeles, il commence, il a déjà bien commencé.
00:04:19 Los Angeles, en l'occurrence, donc, et faire le portrait d'une ville, comme le Forum
00:04:24 le fait pendant quelques mois, c'est en explorer les formes et en rencontrer les habitants.
00:04:29 Donc c'est ce qu'on va essayer de faire ici.
00:04:31 La méthode vous paraîtra peut-être un peu impressionniste, mais elle s'inscrit encore
00:04:34 une fois dans le paradigme et la méthode ouverte par Robert Altman lui-même.
00:04:38 Donc, il y a un petit PowerPoint qui va nous guider.
00:04:42 Donc, voyez, premier lieu, premier nom, Toledo 2023.
00:04:45 Camille de Toledo, dont je présente le film, le livre ici à la caméra, c'est écrivain,
00:04:56 essayiste.
00:04:57 Il publie, donc, il vient de publier en 2023, donc un livre essentiel, une histoire du vertige
00:05:05 chez Verdier et il y évoque le vertige que nous ressentons devant nos vies qui s'effondrent,
00:05:12 nos vies qui ne tiennent plus à terre, comme il le dit.
00:05:15 L'être humain s'est fabriqué un ensemble d'habitats narratifs, d'histoires qu'il
00:05:20 se raconte, de fictions qui encode le monde et le recouvre de couches de significations
00:05:27 successives.
00:05:28 Donc je vais être un peu théorique dans cette toute première partie avant de passer aux
00:05:32 extraits en tant que tel.
00:05:33 Il poursuit en disant que nous, représentants de l'espèce humaine, nous sommes des sapiens
00:05:39 de snarance, des êtres qui croient au récit et qui en sommes les produits.
00:05:45 Nous sommes les habitants fictionnels, selon lui, pris dans le tissu serré de nos envoûtements.
00:05:51 Je le cite.
00:05:53 Cette sédimentation fictionnelle nous éloigne de la vie terrestre.
00:05:57 Nous vivons dans une nature saturée d'encodage, un monde surécrit, réécrit, travaillé et
00:06:05 usé par toutes nos bifures.
00:06:06 Nous sommes les enfants de cette modernité et nous, les enfants de la modernité, nous
00:06:11 sommes enclos dans des villes et leurs forteresses de signes.
00:06:14 Des villes et leurs forteresses de signes, c'est son expression.
00:06:17 Et la ville, perçue comme une forteresse de signes, parle déjà de Los Angeles et
00:06:23 des films qui nous occupent aujourd'hui, des trois films qui vont nous occuper aujourd'hui,
00:06:27 qui nous préoccupent, serais-je tenté de dire, ou au sens propre, je me préoccupe
00:06:33 du privé en vous parlant de Toledo et depuis Toledo 2023.
00:06:37 Les cartes recouvrent le monde, selon Toledo, comme cette carte qu'il cite, il cite Borges,
00:06:48 il y a beaucoup de gens qu'il cite, il cite Borges qui imaginait une carte à l'échelle
00:06:55 1, c'est-à-dire à l'échelle exacte et qui remplace ce dont elle est le dessin.
00:07:00 Vous imaginez un planisphère, une carte à l'échelle 1 et la carte remplacerait ce
00:07:07 dont elle est la carte.
00:07:08 Et selon De Toledo, nous portons toutes et tous en nous des cartes auxquelles nous avons
00:07:13 cru, auxquelles notre espèce au fil du temps s'est attachée, des habitats narratifs qui
00:07:18 ont été détruits et remplacés.
00:07:20 Donc la vérité de nous dans cet écheveau de cartes réside dans ces multiples cartes
00:07:26 échouées, des cartes qui peuvent avoir pour nom la religion, le marxisme, la psychanalyse,
00:07:33 que sais-je.
00:07:34 Elles ont aussi une dimension historique et politique à mesure que le monde se découvre
00:07:40 ou que les frontières s'imposent et bougent.
00:07:42 On le vit encore et on le vivra toujours.
00:07:44 Le point de vue ne doit pas être unilatéralement critique devant ces fictions qui fabriquent
00:07:49 le monde habitable et nous séparent de la vie terrestre.
00:07:52 S'il est un ravissement de la vie par le roman, par les films, par les œuvres d'art
00:07:57 en général, il faut l'entendre à tous les sens du terme, c'est un rapt de l'être
00:08:02 authentique, un rapt de l'être authentique, mais aussi un transport de joie que ce ravissement,
00:08:07 un enthousiasme débarrassé des dieux.
00:08:09 Donc penser avec Toledo toutes ces fictions, ces cartes qui encodent le monde devant nous,
00:08:16 ce n'est pas un simple bovarisme, on va dire, c'est-à-dire une passivité insatisfaite,
00:08:21 s'imaginer une autre vie que la nôtre, mais c'est aussi un donquichottisme glorieux,
00:08:26 une imagination active.
00:08:27 Il cite Don Quichotte, il parle de Don Quichotte et de Cervantes comme fondamentalement cet
00:08:34 être qui s'imagine autre chose mais qui invente d'autres fictions et des fictions
00:08:37 plutôt positives.
00:08:38 Donc si la société se constitue de spectacles, elle demeure un socle sur lequel on vacille
00:08:45 et de ce vacillement pousse les branches auxquelles se rattraper.
00:08:47 Les cartes échouent, elles se décollent des territoires transformés mais leurs fantômes
00:08:51 subsistent et s'incrustent dans les raies du temps.
00:08:54 Dans l'histoire humaine, les œuvres d'art sont autant de cartes dissimulées.
00:08:58 Ce sont des cartes qui nous permettent de recomposer un espace, un territoire et une
00:09:03 frontière.
00:09:04 L'art du cinéaste en particulier est celui d'un cartographe donc qui propose une vision
00:09:09 du monde, c'est-à-dire son exploration au lieu de son exploitation, c'est-à-dire son
00:09:14 interprétation au lieu de son arrestation, comme le dessin interprète le réel.
00:09:19 Et mieux que personne, je sais qu'il y a une citation, en tout cas une description
00:09:26 dans un texte de Jean-Claude Biette que vous connaissez peut-être qui se posait la question
00:09:30 dans un texte resté fameux, je pense "Qu'est-ce qu'un cinéaste ?" et parmi ses développements
00:09:37 il disait "Cinéaste, celui qui à la fois a une vision du monde et une vision du cinéma",
00:09:43 c'est-à-dire qu'il explore à la fois son outil et il propose une vision du monde à
00:09:47 travers ça.
00:09:48 Dans ce cadre, c'est un cartographe et en l'occurrence Robert Atman est un grand cinéaste.
00:09:53 Donc cartographier, c'est autant révéler les cartes anciennes qu'en dessiner de nouvelles,
00:09:59 c'est créer une habitabilité on doit dire inédite, une habitabilité inédite et c'est
00:10:03 de manière particulière que Robert Atman s'inscrit dans ce mouvement général des
00:10:08 images et des fictions comme on va le voir.
00:10:11 Face à cette sédimentation des fictions et au surencodage du monde, il existe une
00:10:18 solution et une méthode selon Toledo, c'est l'enquête.
00:10:22 L'enquête qui est une rétrospection des faits, un retour en amont de ce qui est tenu
00:10:28 et donné pour des évidences.
00:10:29 Enquêter pour un détective, on va le voir, c'est venir après, évidemment après le
00:10:33 crime et reconstituer comment les choses se sont produites.
00:10:38 Et vers la fin de son livre, Camille de Toledo invoque Sebald, écrivain allemand, et décrit
00:10:46 l'enquête comme ce qui arrive après le crime et qui décrit ce qui reste.
00:10:50 C'est la description de ce qui reste après les ruines et après le crime.
00:10:53 Il dit "l'enquête fait le chemin inverse, elle descend vers la matière, cherche le
00:10:58 restant, l'abandonner".
00:11:00 Derrière cette enquête se cache un monde, une profonde angoisse existentielle, un vertige
00:11:08 qui se transforme en élan chez les écrivains ou les cinéastes.
00:11:11 Le détective privé est l'incarnation populaire ou l'incarnation pop, pourrait-on dire, de
00:11:16 ce questionnement au monde, de ce retournement des situations toutes faites, d'une intégrité
00:11:20 de jugement face à la désintégration et aux ruines que nous traversons avec indifférence
00:11:25 dans le sens de l'histoire.
00:11:26 Les trois films qui vont nous intéresser ici sont des films enquête, c'est leur structure
00:11:30 propre, avec en leur centre un personnage principal qui reconstitue la scène de crime
00:11:36 et en remonte le temps.
00:11:37 L'intégrité, disais-je, de ce détective, en général, ce qui est le propre de Marleau,
00:11:43 on va le voir, de Philippe Marleau, l'intégrité face à la désintégration, c'est donc la
00:11:49 posture de Philippe Marleau.
00:11:51 Et dans sa préface au livre "Haltmann on Haltmann", à propos d'Haltmann, sur Haltmann,
00:11:57 je ne pense pas que le livre ait été traduit en français, c'est un livre d'entretien
00:12:00 qui retrace toute la carrière avec Robert Haltmann en compagnon.
00:12:04 Et la préface est écrite par Paul Thomas Anderson, épigone de Robert Haltmann s'il
00:12:11 en est, on va le voir.
00:12:13 Paul Thomas Anderson témoigne de l'ambiance sur le plateau du tournage d'un film d'Haltmann.
00:12:19 Et il est étonné de constater qu'il est difficile de savoir sur ce tournage quand
00:12:25 la conversation s'arrête et quand la scène commence, tellement les choses semblent être
00:12:29 mêlées, mélangées.
00:12:30 Et il écrit "on a l'impression d'une répétition générale et avant même d'avoir le temps
00:12:34 de réfléchir ou de se remettre en question, il est passé à autre chose".
00:12:38 Et donc il raconte une anecdote significative sur la méthode Haltmann, il dit "j'ai vu
00:12:45 Bob tourner une scène et il avait un grand sourire sur le visage et alors que la scène
00:12:49 se poursuivait encore et encore et que les acteurs s'éloignaient du scénario et s'amélioraient
00:12:54 de plus en plus, il s'est retourné et a dit "c'est comme ça qu'il faut faire, une bonne
00:12:58 désintégration".
00:12:59 Good disintegration, une bonne désintégration, on va y revenir, c'est la méthode d'Haltmann.
00:13:07 Bon, je poursuis l'aspect théorique mais vous allez comprendre pourquoi et ensuite
00:13:12 on arrive au film après Kundera parce qu'une carte, justement parmi les cartes que Toledo
00:13:19 lui porte en lui sans la nommer dans son livre, c'est Mélanne Kundera et un texte tiré
00:13:24 de l'art du roman.
00:13:25 On y trouve un même et un semblable éloge à Don Quichotte, devenu chevalier de la fiction,
00:13:31 celui qui produit d'autres fictions que celles que le monde lui impose.
00:13:35 Et dans ce beau texte intitulé "L'héritage décrié de Cervantes", dans ce texte qui
00:13:41 habité et sensible, Kundera commente Husserl et ses conférences sur la crise de l'humanité
00:13:45 européenne.
00:13:46 L'auteur de "L'insoutenable légèreté de l'être" démontre que le chemin du roman
00:13:52 est parallèle à celui des temps modernes.
00:13:53 Le romancier a une position d'arpenteur dans cette réappropriation capitaliste de
00:14:00 la liberté, dans cet arraisonnement économique des peuples.
00:14:03 A mon sens, les cinéastes seront ces mêmes arpenteurs de la modernité, pratiquant l'art
00:14:08 du XXe siècle au cinéma et Robert Haltmann en premier lieu.
00:14:11 Kundera pense que le roman participe, dit-il, de la conquête de l'être.
00:14:15 Et il évoque, je cite, "les termites de la réduction qui rongent la vie humaine",
00:14:20 et qui rongent même le roman, et qui rongent même la fiction, et qui rongent même l'art
00:14:23 en tant que tel.
00:14:24 Et il analyse alors l'esprit du roman, et selon lui, l'esprit de complexité face,
00:14:30 par exemple, à l'actualité des médias, dirait-on aujourd'hui, à la fureur de l'instantanéité
00:14:36 de la manière dont on vit avec ces médias.
00:14:38 L'esprit du roman, ensuite, est pour lui l'esprit de continuité.
00:14:42 Chaque oeuvre est la réponse aux oeuvres précédentes.
00:14:44 Chaque oeuvre contient toute expérience antérieure du roman.
00:14:48 Et face au slogan militant, aux feuilles de calcul, aux marchands de l'utile, le roman
00:14:53 est une oeuvre.
00:14:54 C'est-à-dire, une oeuvre, la définition de Kundera, c'est une chose destinée à
00:15:00 durer, à joindre le passé à l'avenir.
00:15:02 C'est ce qu'on va essayer de faire à travers ce cours, joindre le passé à l'avenir,
00:15:07 ce que le Forum des images fait de manière générale dans sa programmation, et c'est
00:15:10 ça le geste de programmation, joindre le passé à l'avenir et rendre hommage aux
00:15:15 oeuvres, et ce que chacun et chacune doit s'astreindre à faire dans la vie en général.
00:15:18 Un roman, ça ne change pas le monde, mais il ouvre un champ d'émotions et de temporalité.
00:15:23 Il donne du temps au sens propre.
00:15:25 Et la discordance, la discorde entre le passé et l'avenir, quand elle arrive, c'est
00:15:29 aussi l'un des sujets que l'on va voir, c'est l'un des sujets du privé de Robert
00:15:34 Eppman.
00:15:35 Quand même, les romans et les films sont des fictions qui nous envoûtent, selon le
00:15:39 terme de Toledo, ce sont des fictions qui nous envoûtent, qui sont parfois des opiums
00:15:44 du peuple, et la ville de Los Angeles, que l'on traverse pendant trois mois ici, est
00:15:48 la cité des fictions, le cœur des encodages du XXe siècle.
00:15:51 C'est à travers ce prisme que l'on peut revoir le privé, et la manière dont Robert
00:15:56 Eppman a proposé une nouvelle cartographie de la ville, son personnage de détective,
00:16:00 Philippe Marleau, relève et révèle les cartes déjà existantes, l'enquêteur fait
00:16:05 apparaître l'arrière-plan du monde, comme Neo dévoile la Matrice dans Matrix.
00:16:11 Nous passons donc à Robert Eppman en 1973.
00:16:15 Qui est Robert Eppman quand il s'attèle au projet d'adaptation du privé, à l'âge
00:16:23 de 48 ans ? Quelqu'un qui arrive assez tard, en tout cas, au cinéma.
00:16:26 Je ne vais pas faire toute sa biographie, mais je vais vous donner au moins quelques
00:16:32 éléments.
00:16:33 Robert Eppman est quelqu'un, et il va, je ne vais pas vous faire toute la biographie,
00:16:40 mais au moins vous donner ses éléments principaux.
00:16:42 Il a fait la guerre, la deuxième guerre mondiale, en tant que copilote de bombardier, avec plus
00:16:48 d'une soixantaine de missions, à un âge très jeune, il avait 19-20 ans.
00:16:54 Et ça c'est une expérience qui va le marquer très fort, comme beaucoup de...
00:16:58 Ce qui va d'ailleurs le rapprocher un peu de Chandler, qui lui-même avait fait la première
00:17:03 guerre mondiale.
00:17:04 Mais bon voilà, il a cette mémoire-là, dans ses films, et en tout cas, cette morale-là,
00:17:10 j'allais dire, quelqu'un qui a connu la guerre, qui a jeté des bombes, a priori tout ce
00:17:14 qui arrive après arrive en bonus.
00:17:17 Avant de... il s'essaie très vite à l'écriture de cinéma, enfin de scénario, ça ne marche
00:17:24 pas, il revient, donc il est né à Kansas City.
00:17:28 Il arrive en Californie, précisément pour son service militaire, en tout cas pour se
00:17:32 former au métier de pilote.
00:17:36 C'est à ce moment-là qu'il arrive en Californie.
00:17:39 Mais au retour de la guerre, il va faire tous les métiers possibles et imaginables.
00:17:44 Il a souvent raconté, il était notamment VRP en assistant son père qui lui-même était
00:17:52 un très très grand vendeur.
00:17:53 Bagou qu'il gardera justement auprès des producteurs qu'il fréquentera.
00:17:57 Il était tatoueur de chiens, voilà, pour retrouver les chiens.
00:18:00 Il avait inventé cette manière de tatouer les chiens que l'on pouvait retrouver, en
00:18:04 faisant déjà une cartographie des chiens de Californie.
00:18:08 Il a travaillé aussi beaucoup, se faisant passer pour déjà un cinéaste expérimenté,
00:18:17 pour une entreprise dont il a réalisé les films de promotion, de publicité.
00:18:23 Et c'est là qu'il a vraiment appris beaucoup de choses, et notamment déjà expérimenté
00:18:28 ce qu'il va faire l'une de ses marques, c'est-à-dire le son.
00:18:32 La manière dont il va enregistrer le son dans ses films d'entreprise, plutôt que
00:18:36 d'avoir une espèce de son multidirectionnel de tout de suite aller chercher le matériel
00:18:42 qui va chercher la parole de telle ou telle personne pour l'isoler justement d'un contexte
00:18:47 plus large, il va expérimenter au fil de ses…
00:18:50 Alors il y a quelques films que l'on peut voir, j'aurais pu vous en présenter mais
00:18:53 bon, on n'a pas le temps de ça.
00:18:55 Vous pouvez les voir par exemple sur Youtube, si vous tapez Robert Ackman, vous allez trouver
00:19:00 toute une série de ses films qui ont subsisté, de ses films dits d'entreprise.
00:19:04 Et pour ce qui est du son, c'est vrai que plus jeune, il adorait les dramatiques à
00:19:13 la radio, et voilà, il disait que sa vraie formation c'était ça, vraiment la radio
00:19:19 et le son.
00:19:20 Et ensuite il va finir par travailler à la télévision en tant que réalisateur, alors
00:19:26 sur un nombre pareil dans les années 60, là on est dans les années 60, un nombre
00:19:29 incroyable d'épisodes, il va travailler pour la série Alfred Hitchcock présente,
00:19:33 pour la série Bonanza, enfin bref.
00:19:35 Où il ne va pas forcément toujours pouvoir faire montre d'un grand style, parce qu'il
00:19:40 s'adapte vraiment à ce format, mais là c'est une vraie école pour lui de même.
00:19:49 Et avant d'arriver, donc ça c'était la situation, avant d'arriver au privé,
00:19:57 le privé donc, ils sont 7ème long métrage officiel, j'ai dit officiel parce qu'il
00:20:00 y a eu des petites choses aussi pour la télévision.
00:20:02 Donc vous voyez les 6 films qui précèdent le privé, donc je ne vais pas tous vous
00:20:09 les décrire, Countdown, That Cold Day in the Park, qui est un très beau film, que
00:20:13 l'on peut voir encore aujourd'hui, et arrive évidemment MASH qui est donc là le grand
00:20:20 succès, on va dire surprise à la fois pour Robert Atman et pour le studio qui le produit,
00:20:26 et qui donne vraiment, c'est le premier grand coup, le premier grand démarrage de
00:20:30 la carrière d'Atman, où il va expérimenter encore déjà pas mal de choses, toujours
00:20:38 du point de vue du son, dans les méthodes de tournage, dans cette méthode de critique
00:20:43 acerbe là du genre du film de guerre.
00:20:47 Je ne rentre pas dans le détail de tous ces films malheureusement, mais voilà, et l'un
00:20:52 des autres faits d'armes, donc Brewster McLeod était là, un film très complexe
00:20:56 à revoir aujourd'hui, où le désordre propre à ces films là prend plus le dessus que
00:21:03 sur ce qu'on peut en garder, et l'autre chef d'œuvre de cette période est certainement
00:21:07 John McCabe que vous connaissez j'imagine, où il s'attaque au western avec les chansons
00:21:14 de Leonard Cohen, et un film un peu plus méconnu peut-être qu'il a lui-même écrit,
00:21:20 images, images, où là on a vraiment l'aspect expérimental, dont je vais décrire encore
00:21:27 tout à l'heure, notamment dans la prise de vue, dans le montage où il s'attaque
00:21:33 simplement à un esprit dérangé, schizophrène d'une femme, et c'est le film lui-même
00:21:37 qui devient et qui épouse cette schizophrénie, c'est un film très étrange, très dérangeant
00:21:43 à plusieurs titres.
00:21:45 Que dire d'autre sur Robert Atman, je vais vraiment très vite, sa réputation certainement,
00:21:52 il a la réputation d'être on va dire une bête noire, la bête noire de certains studios
00:21:57 avec des beaux hauts et des bas, et c'est quelqu'un qui est resté intransigeant, colérique
00:22:02 sur la manière de mener son film ou ses films, ce qui peut-être l'une des explications
00:22:09 qui fait qu'on ne parle pas assez de Robert Atman aujourd'hui, en tout cas il est
00:22:14 vraiment le joueur solitaire comme Bertrand Tavernier a pu le décrire dans ses Amis Américains
00:22:20 où il y a une interview d'Robert Atman, il n'était pas vraiment dans le Nouvel Hollywood
00:22:28 parce que trop vieux pour appartenir à la génération de Scorsese, Coppola ou Spielberg,
00:22:33 et en même temps déjà, j'allais dire, il commence ses succès dans les années 70,
00:22:39 il n'est pas vraiment dans le classicisme hollywoodien, il est toujours dans cet entre-deux,
00:22:43 je pense lui convenait, de tracer en tout cas sa route.
00:22:51 Et nous allons le vérifier avec certains aspects du privé, la méthode et le style
00:22:56 de Robert Atman repose sur certains aspects devenus avec le temps des lieux communs, attachés
00:23:01 à l'hépitète atmanien, ainsi dans la culture de l'honnête cinéphile ou dans l'esprit
00:23:06 de la critique ordinaire, un film est atmanien quand il est choral et polyphonique, on le
00:23:11 verra un petit peu dans le privé, mais le film choral, parmi les plus célèbres de
00:23:18 ce point de vue là, parce qu'il n'y a pas que des films choraux, je ne sais pas si on
00:23:22 le conjugue, parce qu'il y a comme images des films très intimistes, plutôt centrés
00:23:26 sur un ou deux personnages, mais parmi les films chorals, le chef d'oeuvre est Nashville,
00:23:32 qu'il tourne quelques années après, avec une trentaine de personnages que l'on suit
00:23:37 pendant 2h30, et évidemment il y en aura d'autres comme Shortcuts ou comme Mâche,
00:23:41 qui déjà était un film de ce type, où il privilégie une vision collective plutôt
00:23:46 qu'un personnage seul, et c'est l'un de ses apports, en tout cas c'est une vision
00:23:50 du monde aussi qu'il peut avoir, que de ne pas donner l'autorité de la narration à
00:23:55 un seul personnage.
00:23:57 C'est justement ce qui va changer un petit peu avec le privé, mais cette autorité de
00:24:03 Philippe Marleau va être altérée, on va le voir par d'autres choses.
00:24:06 Donc, et Altmanien, le film choral et polyphonique, le tout étant associé à une vision de la
00:24:11 société occidentale, sinon cynique, du moins critique.
00:24:15 C'est ce qui ressort, il n'y a aucun bon sentiment dans le cinéma de Robert Altman,
00:24:20 dans aucun de ses films, il faudrait tout vérifier, mais je pense que c'est un cinéma
00:24:25 qui peut être dur, très critique, mais il y a toujours, évidemment, on peut l'appeler
00:24:31 cynique dans certains films, on est plutôt dans une critique que l'on dira sociale,
00:24:36 qui va le rapprocher justement du roman noir à la Schindler dont on va parler.
00:24:41 Et on parle volontiers pour décrire son œuvre d'un chaos organisé ou d'un chaos fertile.
00:24:48 Nous verrons par ailleurs, et je reviendrai, qu'une figure de style, l'une des figures
00:24:55 de style qui lui colle à la peau, pour le meilleur et pour le pire, c'est le zoom,
00:25:00 et je reviendrai tout à l'heure pour analyser un zoom dans le privé.
00:25:04 Quand on dit altmanien, on veut également parler d'un dynamiteur de genre, c'est la
00:25:13 réputation qu'il a au moment d'attaquer le film noir, avec l'adaptation du roman
00:25:18 de Schindler, The Long Goodbye, qui viendra en français le privé.
00:25:22 Altman revisite souvent de manière irrespectueuse, par exemple, le soap opéra médical et le
00:25:31 film de guerre avec Mash, qui était plus une revisitation ou une critique de ce qu'était
00:25:37 un soap opéra médical, c'est-à-dire que Mash, c'est vraiment le moment des chirurgiens
00:25:41 dans l'armée, plus qu'un film de guerre à proprement parler.
00:25:44 Et à l'époque, on avait recensé déjà une soixantaine de ces séries télé, en gros,
00:25:49 soap opéra, où on suivait des chirurgiens, des médecins, etc.
00:25:52 Et c'est de ça vraiment dont il se moquait le plus.
00:25:55 Il revisite, il s'attaque au western avec John McCabe, ou même au film d'art européen,
00:26:02 on va dire qu'il prend comme un genre, le film d'auteur, le film d'art européen, avec
00:26:06 Images.
00:26:07 Donc en pleine préparation du privé, donc il n'a pas encore tourné, voici ce que Altman
00:26:14 déclarait à Bertrand Tavernier et Michel Ciment, justement dans une interview au moment
00:26:18 de Mash, je crois.
00:26:19 Ils venaient de faire Mash et John McCabe et Images, pardon.
00:26:24 Donc c'était vraiment juste avant The Long Goodbye.
00:26:26 Je le cite, "Nous sommes contaminés par ce qu'on nous a donné à voir, et il faut tenir
00:26:31 compte du fait que le public a vu maintenant des dizaines de films appartenant au genre
00:26:34 que vous illustrez, et vous devez jouer avec les connaissances qu'il a des clichés qu'on
00:26:38 lui a imposés.
00:26:39 Par exemple, quand j'ai commencé à adapter The Long Goodbye, j'ai non seulement revu
00:26:42 tous les films tirés de Chandler, mais j'ai demandé à Lee Brackett d'écrire l'adaptation."
00:26:48 Alors Lee Brackett était une scénariste qui avait co-écrit avec Chandler, notamment
00:26:53 Le Grand Sommeil d'Hobart Hawks.
00:26:55 Donc il y avait vraiment un geste de Chandler de revenir vraiment à la fois au cliché,
00:26:59 à la source même de ce qu'était l'adaptation du film noir des années 40.
00:27:04 Il poursuit, "Je veux faire un film sur Marlowe aujourd'hui, par rapport à la manière
00:27:08 dont on l'a montré dans les années 40.
00:27:10 Ce sera un film très triste."
00:27:12 On peut en juger qu'il y a de la tristesse dans le privé, mais il y a aussi un décalage
00:27:17 et une ironie qui font que le film n'est pas si triste qu'il l'avait peut-être envisagé.
00:27:22 Donc très ouvertement, son geste de cinéaste est critique.
00:27:25 Il ne méprise ni le dynamite des gens.
00:27:28 En réalité, il les reconfigure et en expose les artifices.
00:27:31 Il les démonte, il les remonte à l'aune de son époque, fuyant les bons sentiments.
00:27:36 Si l'on compare son travail à celui d'un Kubrick, d'ailleurs Kubrick qui admirait
00:27:40 Atman et qui l'avait interrogé très longtemps sur un plan très particulier de John McCabe,
00:27:46 ce plan au début quand John McCabe arrive, il traverse un pont de bois, etc. pour arriver
00:27:52 dans cette espèce de saloon en construction.
00:27:55 Il y a un plan avec une lumière, un couchant de soleil qui avait tellement fasciné Kubrick
00:27:59 qu'il lui demandait la fabrication, ce à quoi Atman a dit "Rien, il y avait la lumière,
00:28:04 on a filmé, c'était un seul plan."
00:28:06 Il avait ce côté un petit peu ironique par rapport à son travail qui captait les choses
00:28:11 plus qu'il ne les préparait, ce qui n'était pas du tout le cas de Kubrick.
00:28:15 On est moins chez Atman dans un désir autoritaire d'achever les genres, comme il peut y avoir
00:28:21 chez Kubrick dans certains films, d'achever les genres à tous les sens du terme, le film
00:28:24 d'horreur dans Shining, le film de guerre vietnamien avec Full Metal Jacket, etc.
00:28:29 Donc Atman, ce qu'il intéresse c'est de les décoder, ces genres, et d'en saisir
00:28:35 les chêmes qui vont permettre de mieux comprendre le contexte de leur naissance.
00:28:38 Les genres sont faits de codes, pour revenir à Toledo, les genres sont faits de codes
00:28:44 et les genres sont des encodages narratifs du monde, c'est ainsi que les aborde Atman
00:28:49 dans son travail.
00:28:50 Il les explore, il les expose, il les explose, c'est la bonne désintégration dont on parlait
00:28:55 tout à l'heure.
00:28:56 Et la mise en scène d'Atman va refuser la continuité dramatique au sens classique.
00:29:00 Chez lui, espaces et lignes dramatiques se rejoignent.
00:29:03 C'est pourquoi il est cartographe en explorant chaque fois un espace donné et son microcosme.
00:29:08 Par exemple, dans Mâche et John McCabe, il montre des villes en construction ou des espaces
00:29:14 qui reproduisent l'urbanité ou le fait d'habiter une ville.
00:29:17 Ce sont des espaces intermédiaires occupés par l'homme.
00:29:20 Des villes en construction, en tout cas des espaces intermédiaires, comme le saloon,
00:29:26 l'église dans John McCabe, qui sont en construction et qui sera recouvert par la neige en parallèle
00:29:31 de l'incendie de l'église qu'on va éteindre et la trappe de McCabe à la fin du film dans
00:29:36 ces mêmes espaces.
00:29:37 Ainsi, c'est une cartographie évolutive, un territoire métamorphe, des frontières
00:29:42 labiles.
00:29:43 Dans le Los Angeles du privé, c'est le déplacement de Marlowe, Elliot Gould, l'acteur, qui va
00:29:48 constituer l'espace et donc un Los Angeles alternatif.
00:29:51 Et comme le souligne Elliot Gould, Altman filme le cours de la vie, dit-il.
00:29:57 La liberté de sa mise en scène donne un sentiment de flux perpétuel, ce qui contrarie les codes
00:30:02 en place, ce qui redessine les cartes, qui cadre tout dans un Los Angeles sous influence
00:30:07 d'Hollywood, où tout semble mis en scène et sous-cellé.
00:30:10 Avant de passer directement à Altman, on fait un petit retour en arrière sur Chandler,
00:30:19 en 1953.
00:30:23 Le général vous attend, Mr Marlowe, c'est simplement la première réplique, l'apparition
00:30:29 de Marlowe dans le roman de Chandler.
00:30:32 C'est sa première réplique, c'est la première fois qu'on entend Marlowe et c'est donc dans
00:30:35 Le Grand Sommeil, traduit par Boris Vian, en France.
00:30:39 The Long Goodbye est donc publié en 1953 au Royaume-Uni et l'année suivante aux Etats-Unis.
00:30:44 Le roman est traduit en français, je vais être rapide sur Chandler, mais c'est important
00:30:48 de savoir d'où part le décalage altmanien par rapport à sa source chandlerienne.
00:30:55 Le roman est traduit en français dès 1954 pour la série Noir, numéro 221, sous le
00:31:00 titre Sur un air de Navarra.
00:31:02 On est très loin du privé ou du long goodbye, Sur un air de Navarra, le Navarra étant un
00:31:09 couteau espagnol.
00:31:11 C'est la sixième enquête du détective Philippe Marlowe dans une série de sept romans.
00:31:16 Pour mémoire, Chandler invente Marlowe pour The Big Sleep, donc Le Grand Sommeil, qui
00:31:20 sera adapté au cinéma par Howard Hawks.
00:31:22 Puis on le retrouve dans Farewell, My Lovely, Adieu, Ma Jolie, en 1940, High Window, La
00:31:27 Grande Fenêtre en 1942, The Lady in the Lake, La Dame du Lac en 1943, The Little Sister,
00:31:31 La Petite Soeur en 1949.
00:31:33 Et en 1958, il y en aura un dernier et moins bon, Playback, Charade pour écrouler, en
00:31:40 français.
00:31:41 Beaucoup ont crié au scandale, à la trahison, devant l'adaptation d'Altman en 1973.
00:31:45 Or, on peut considérer que Chandler a préparé le terrain du réalisateur et que son style
00:31:49 anticipe d'une certaine manière celui d'Altman.
00:31:51 Et on verra, il y aurait beaucoup à dire, je ne vais pas m'y attarder dessus.
00:31:56 Je vous renvoie à ce livre de Jean-Marc Gouenvic, Artball Fiction et Série Noire,
00:32:01 les Métamorphoses, du roman policier anglo-américain et français, 45-60.
00:32:06 C'est un livre un peu ardu, d'obédience bourdieusienne, on va dire, qui explore en
00:32:11 tout cas comment on a reçu, traduit la série Noire, et surtout l'Artball Fiction, le roman
00:32:18 noir américain, et la manière dont on l'a réadapté.
00:32:22 Et notamment, The Long Goodbye, quand il est sorti, a été amputé d'un tiers parce
00:32:26 qu'il ne correspondait pas à la pagination très stricte de la série Noire.
00:32:33 Et donc, à la fois dans la langue et à la fois dans l'histoire, ces films, ces livres
00:32:38 ont été reçus ou mal reçus au tout début, en tout cas, mais ensuite d'autres traductions
00:32:43 ont été faites, intégrales, etc.
00:32:45 Mais tout ça pour dire que traduire, c'est trahir aussi, et que Altman a eu cette liberté
00:32:50 de le traduire à sa manière.
00:32:51 Ce qui est intéressant, plusieurs éléments d'analyse nous permettent de comprendre en
00:32:57 quoi Raymond Chandler, on pourrait dire a plagié Robert Altman par anticipation.
00:33:04 Cela témoigne de plusieurs décalages stylistiques, de variations narratives, en un mot, plusieurs
00:33:10 écarts de la carte chandlerienne.
00:33:12 Premièrement, il faut noter que The Long Goodbye, donc je parlerai maintenant, quand
00:33:17 je dirai The Long Goodbye, c'est le livre, et le privé, ce sera le film.
00:33:20 Il faut noter que The Long Goodbye est déjà pour Chandler une réécriture du Grand Sommeil,
00:33:24 de son roman Le Grand Sommeil.
00:33:26 C'est comme un auto-remake, si vous voulez, si l'on peut parler la langue du cinéma.
00:33:30 Chandler ré-encode son propre livre, Chandler adapte Chandler lui-même.
00:33:35 Ce geste de réécriture est une manière d'enquêter sur son propre personnage, sur
00:33:40 la ville qu'il habite, sur le style même du roman noir.
00:33:43 Ce premier décalage temporel, cet élan anachronique, annonce déjà le privé d'Altman.
00:33:48 Deuxièmement, on constate un autre décalage stylistique et temporel, non plus à l'intérieur
00:33:53 de l'œuvre chandlerienne, mais dans son rapport au monde culturel extérieur, au
00:33:57 champ noir, si l'on peut dire, au roman noir et au cinéma noir, au film noir.
00:34:02 Et donc, et plus particulièrement à l'encodage constitué par les adaptations de ses propres
00:34:07 œuvres au cinéma, qui ont toutes lieu, la plupart, dans les années 40 également, au
00:34:11 moment de l'âge d'or du film noir.
00:34:13 Quand il écrit The Long Goodbye, entre 1951 et 1953, l'apogée du film noir est passée.
00:34:19 C'est pourquoi le roman ne sera jamais adapté, ou pas adapté, sinon 30 ans après, par
00:34:25 Altman.
00:34:26 Surtout, les films des années 40 ont constitué des clichés dans la tête du lecteur spectateur,
00:34:32 une carte Marlowe, si vous voulez, avec le visage sourd de Bogart plutôt en tête, un
00:34:38 code Chandler auquel il doit lui-même se confronter, à ses propres clichés.
00:34:42 Avant Altman, Chandler a dû pratiquer la bonne désintégration.
00:34:46 Son expérience de scénariste à Hollywood lui a laissé un goût très très amer,
00:34:53 comme beaucoup d'écrivains de manière générale.
00:34:55 Il a travaillé pour Hawks, pour Billy Wilder, ou pour Alfred Hitchcock sur l'inconnu du
00:34:59 Nord Express.
00:35:00 Donc ça lui a laissé un goût très amer, dont on retrouve les traces ici, dans ce livre,
00:35:05 dans "The Long Goodbye", et qui feront le lit du privé d'Altman également.
00:35:08 Ce rapport à Hollywood, Altman le reprendra évidemment avec "The Player" quelques années
00:35:17 plus tard en 92, et là ça sera un règlement de compte radical qui évoque la condition
00:35:22 précisément de l'auteur à Hollywood, auteur qui veut se rebeller contre le producteur,
00:35:27 plus que se rebeller, simplement l'assassiner.
00:35:29 Donc quand on avait dans le privé la contamination de la ville et de Hollywood dans le roman
00:35:42 noir, c'est Hollywood et les codes hollywoodiens qui vont contaminer le roman noir, dans "The
00:35:47 Player" c'est l'inverse, on part de Hollywood et de la description du studio, et c'est le
00:35:52 film noir qui va le contaminer avec une histoire de meurtre.
00:35:54 Par ailleurs, le privé, ça sera l'une des renaissances d'Altman.
00:36:01 Troisièmement, pour revenir à Chandler, on remarque un décalage identitaire, on va
00:36:07 dire une embardée statistique.
00:36:08 "The Long Goodbye" est le dernier grand roman de Chandler, c'est également le plus
00:36:12 long de la série des Marlowe.
00:36:14 Il a d'abord tenté de l'écrire à la troisième personne, donc tous les Marlowe,
00:36:19 c'est le personnage narrateur de Philippe Marlowe qui prend en charge la narration.
00:36:22 Donc là il essaie cela à la troisième personne afin de changer la donne et de travailler
00:36:26 davantage le grand style qu'il envisageait.
00:36:28 Il est ensuite revenu à la première personne et au seul point de vue de Marlowe, échouant
00:36:34 à changer un petit peu de style.
00:36:36 Donc Marlowe qui va encore déterminer la perception des choses et du récit.
00:36:42 Il subsiste de cela, de loin en loin dans le texte, de soudain passage de la première
00:36:48 à la troisième personne du jeu au "il", comme un lapsus littéraire qui va ouvrir
00:36:53 un vaste champ d'angoisse pour le lecteur, c'est un changement qu'il va devoir relire
00:36:56 mais de qui parle-t-on et qui parle exactement.
00:36:58 Et par exemple au chapitre 6 de "The Long Goodbye", j'ai remarqué ça, et ce qui est
00:37:02 intéressant c'est qu'il parle d'une ville, de Tijuana.
00:37:05 Marlowe revient en voiture de Tijuana et du Mexique.
00:37:10 C'est dans l'histoire, je vais essayer de ne pas trop spoiler mais je vais vraiment
00:37:12 parler un petit peu de l'intrigue, même si ce n'est pas le plus important dans le
00:37:15 film, si jamais vous allez le voir après.
00:37:17 Donc je cite Chandler, je lis.
00:37:19 "Tijuana n'est pas Mexico.
00:37:21 Une ville frontière n'est jamais qu'une ville frontière, comme une ville côtière
00:37:24 n'est jamais qu'une ville côtière.
00:37:25 San Diego, l'un des ports les plus beaux du monde où l'on trouve exclusivement la
00:37:29 marine de guerre et quelques beaux bateaux de pêche.
00:37:31 La nuit, c'est féérique.
00:37:33 La houle, y est aussi douce qu'une berceuse chantée par une vieille nourrice.
00:37:36 Mais Marlowe doit rentrer chez lui et recompter les petites cuillères."
00:37:39 "Mais Marlowe doit rentrer chez lui."
00:37:41 Donc là, on était avant-jeu le narrateur Marlowe et d'un seul coup, on parle de Marlowe
00:37:47 à la troisième personne.
00:37:48 On continue.
00:37:49 "La route vers le nord est aussi monotone qu'une complainte de marin.
00:37:52 Vous traversez une ville, descendez une côte, suivez une plage, retraversez une ville, redescendez
00:37:57 une côte et ainsi de suite.
00:37:58 Vers deux heures de l'après-midi, j'arrivais chez moi.
00:38:00 On m'attendait dans une conduite intérieure sombre, sans plaque de police, pas de gyrophare."
00:38:04 Voilà une soudaine rupture entre la première et la troisième personne.
00:38:10 "Chandler tend un fil entre le jeu et le île, un fil au-dessus de l'abîme."
00:38:15 C'est cette zone blanche précisément, cet interstice, cette zone blanche de la carte
00:38:21 qu'Alkman va occuper de manière proprement géniale.
00:38:25 On va le voir en jouant des voix in et des voix off.
00:38:27 Nous avons affaire à des coquilles existentielles chez Chandler, un vertige de l'incarnation
00:38:32 comme si la voix survolait le corps, comme si le texte désincarnait le personnage en
00:38:37 lutte avec lui.
00:38:38 Quatrièmement, la marque de Chandler écrivain, c'est de privilégier le style à l'intrigue,
00:38:45 de faire tenir un livre non pas sur rien, comme le voulait Flaubert, qu'il admirait
00:38:49 par ailleurs, mais sur presque rien.
00:38:52 Ce presque rien étant les codes usés, les codes fantomatiques exposés dans une morgue
00:38:56 de signes que le personnage traverse avec détachement.
00:38:59 La marque du détective Marlowe, c'est son ironie et son détachement.
00:39:03 Contrairement, on va voir aux intrigues de Hamet, par exemple, qui était son modèle
00:39:08 et où il y avait beaucoup plus de dynamisme et d'action.
00:39:10 Le roman noir, Hard Boiled, le roman noir qui fit rupture avec le roman à énigmes,
00:39:17 est caractérisé précisément par la densité de ses intrigues, souvent incompréhensibles.
00:39:22 De même au cinéma, le grand sommeil de Hawks a gardé et a toujours et garde toujours cette
00:39:27 réputation presque mythologique d'obscurité de son intrigue.
00:39:30 Mais c'est normal, c'est on va dire le propre du genre.
00:39:34 Le style et les personnages, donc, au lieu de l'intrigue, on peut dire la même chose
00:39:39 du cinéma d'Alkman.
00:39:40 Autre trait qui les rapproche, c'est l'ironie, l'ironie qui se mue parfois en pastiche
00:39:45 chez Chandler.
00:39:46 Dès 53, on est quasiment dans un pastiche de ce que l'on attend et de ce qu'est le
00:39:51 roman noir.
00:39:52 Ses dialogues sont brillants, narquois et presque situationnistes avant l'heure.
00:39:56 Un exemple encore dans The Long Goodbye, au moment où deux flics viennent l'interroger.
00:40:00 Ils sont décrits comme un tandem classique.
00:40:03 Déjà, on est dans le tandem classique que tout le monde a en tête.
00:40:06 Et il dit "les deux compères, fagotés comme toujours, avec cette inévitable souplesse
00:40:11 de robots et cet air de croire le monde entier suspendu à leurs lèvres, attendant leurs
00:40:14 ordres".
00:40:15 Marlowe ensuite a cette réplique quand ils viennent l'interroger.
00:40:18 "C'est là que je vous demande moi de quoi s'agit-il et que vous me répondez, c'est
00:40:23 nous qui posons les questions".
00:40:24 Donc c'est un méta-roman qui s'écrit ainsi sous nos yeux avec cette réplique de
00:40:28 Marlowe.
00:40:29 Marlowe étant le porte-parole littéral de Chandler en train d'écrire le livre.
00:40:33 L'ironie, c'est la vérité qui avance masquée.
00:40:36 Et comme le disait, pour citer Jankelevic, "elle ne veut pas être crue mais comprise",
00:40:41 c'est-à-dire interprétée.
00:40:42 L'ironie avance toujours masquée.
00:40:44 L'ironie, c'est le combat du cartographe.
00:40:47 Et pour finir sur Chandler, je parlais du style de Chandler et de sa place dans l'histoire
00:40:55 du roman noir.
00:40:56 Benoît Tadier, que l'on recevra d'ailleurs dans quelques semaines pour un cours ici sur
00:41:01 le roman noir et le film noir classique.
00:41:03 Donc Benoît Tadier, spécialiste du roman noir, je vois que l'écran est en train de
00:41:09 vous me dire si ça revient parce qu'on va passer aux extraits.
00:41:11 Benoît Tadier dit de Chandler qu'il a déplacé le curseur du roman noir de l'action vers
00:41:20 l'observation, la méditation vers une vision poétique de la ville et du monde qui l'environne.
00:41:24 Donc cette vision poétique de la ville fait de lui l'un des premiers chroniqueurs majeurs
00:41:30 de la ville de Los Angeles.
00:41:31 Tadier précise qu'à travers la description du vide, la description des temps morts, on
00:41:36 perçoit la mélancolie de Chandler, notamment à travers son détective proustien.
00:41:40 On perçoit le sentiment, dit-il, du temps qui passe aussi bien dans les petits instants
00:41:44 qu'à l'échelle d'une ville qui se transforme sous ses yeux.
00:41:48 Ainsi de Los Angeles qu'il habitait, que Chandler habitait, transformation extraordinaire
00:41:54 en quelques décennies de cette ville.
00:41:56 Une ville bouleversée par l'immigration notamment et avant lui, avant Chandler, il
00:42:00 y avait peu de romans qui étaient consacrés à Los Angeles en tant que tel.
00:42:04 Il en devient donc le principal chroniqueur, chroniqueur de sa culture, de son évolution,
00:42:08 de ses transformations, notamment de ses transformations ethniques.
00:42:12 Dans le signage de Chandler, d'autres écrivains chroniqueront la ville de Los Angeles, d'autres
00:42:18 écrivains de romans noirs notamment, où en empruntant les formes du hard-boiled et
00:42:23 du roman noir.
00:42:24 Très vite, on peut penser à James Ellroy évidemment ou à Bret Easton Ellis qui vient
00:42:28 de sortir un nouveau roman très los angelesien, je ne sais pas comment on le dit.
00:42:32 Et ce dernier, Bret Easton Ellis, est un grand lecteur de Chandler, qu'il compare d'ailleurs
00:42:35 à Albert Camus pour son existentialisme, dit-il, raccourci, mais bon, c'est ainsi.
00:42:40 Et surtout, il a découvert Chandler jeune en 1973 à travers le privé de Robert Atman,
00:42:47 qui ensuite le conduira vers la lecture des livres.
00:42:49 Donc en résumé, le Chandlerisme, si l'on peut dire, est un atmanisme.
00:42:53 L'esprit de son œuvre, la mise en œuvre de son esprit, correspond parfaitement à
00:42:57 l'approche de Robert Atman.
00:42:58 Et nous allons retrouver l'ensemble de tous ces décalages dont je viens de vous parler
00:43:01 à propos de Chandler dans l'extrait suivant qui est l'ouverture du film et que je vais
00:43:07 analyser si tout va bien.
00:43:08 Premier extrait, je crois que je vais le laisser sur la longueur parce que j'ai déjà
00:43:15 notamment assez parlé et je vais vraiment, on aurait pu analyser uniquement cet extrait
00:43:20 pour comprendre tout ce qu'apporte Atman dans le privé.
00:43:24 Donc je l'analyserai après de manière plus détaillée.
00:43:27 Voici donc l'ouverture du privé.
00:43:29 La longue goodbye.
00:43:32 La longue part du privé.
00:43:52 La longue part du privé.
00:44:21 La longue part du privé.
00:44:42 La longue part du privé.
00:45:06 La longue part du privé.
00:45:32 La longue part du privé.
00:46:01 La longue part du privé.
00:46:06 La longue part du privé.
00:46:12 La longue part du privé.
00:46:18 La longue part du privé.
00:46:24 La longue part du privé.
00:46:25 La longue part du privé.
00:46:26 La longue part du privé.
00:46:27 La longue part du privé.
00:46:28 La longue part du privé.
00:46:29 La longue part du privé.
00:46:30 La longue part du privé.
00:46:31 Je suis sûr que c'est un chien, mais je ne crois pas que le chien soit un chien.
00:46:35 Je ne sais pas pourquoi, mais je crois que c'est un chien.
00:46:37 Mais je ne suis pas sûr que c'est un chien.
00:46:39 Ça me fait mal à l'esprit.
00:46:42 Je suis sûr que c'est un chien.
00:46:44 Je ne suis pas sûr que c'est un chien.
00:46:46 Je suis sûr que c'est un chien.
00:46:48 Je ne suis pas sûr que c'est un chien.
00:46:50 Je suis sûr que c'est un chien.
00:46:52 Je suis sûr que c'est un chien.
00:46:54 Je suis sûr que c'est un chien.
00:46:57 Je suis sûr que c'est un chien.
00:46:59 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:01 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:03 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:05 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:07 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:09 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:11 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:13 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:15 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:17 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:19 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:21 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:23 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:25 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:27 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:29 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:31 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:33 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:35 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:37 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:39 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:41 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:43 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:45 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:47 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:49 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:51 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:53 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:55 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:57 Je suis sûr que c'est un chien.
00:47:59 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:01 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:03 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:05 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:07 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:09 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:11 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:13 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:15 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:17 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:19 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:21 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:23 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:25 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:26 Je ne comprends pas du tout.
00:48:28 Je n'ai jamais compris.
00:48:29 Walter, je ne comprends pas pourquoi.
00:48:31 Je ne comprends pas du tout.
00:48:33 - Tu vas bien.
00:48:35 - Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:37 Je suis sûr que c'est un chien.
00:48:39 Il y a un long au revoir
00:48:44 Et ça se passe tous les jours
00:48:49 Quand un passant
00:48:54 Invite ton regard
00:48:56 Pour venir se faire voir
00:49:00 Même quand il sourit
00:49:03 Un bonjour
00:49:05 Tu l'as laissé partir
00:49:07 Tu l'as laissé le moment s'éteindre
00:49:10 - Mr. Marlow, les lumières sont en train de fonctionner.
00:49:21 - Ah oui.
00:49:23 Excellent.
00:49:24 - Tu peux reconnaître le thème
00:49:29 Sur une autre rue
00:49:32 Deux gens se rencontrent
00:49:34 Comme dans un rêve
00:49:38 En courant pour un avion dans la pluie
00:49:41 - Deux pour le prix d'un.
00:49:46 Super-chèque.
00:49:48 Discount extra. 21 cents pour le macaroni.
00:49:51 - Ils pourraient être amoureux
00:49:54 Jusqu'à ce qu'ils meurent
00:49:59 C'est trop tard pour essayer
00:50:03 Quand un passant
00:50:07 Se fait se faire voir
00:50:11 -
00:50:13 Je n'ai jamais vu de catfood.
00:50:16 Excuse-moi, je n'ai jamais vu de catfood de la marque Curry.
00:50:20 - Quoi?
00:50:22 - Curry, marque de catfood.
00:50:24 - Tu ne me parles pas de la plume?
00:50:26 - C-O-U-R.
00:50:28 - Pourquoi tu me dis ça?
00:50:30 Tout est pareil.
00:50:32 - Tu n'as pas de catfood.
00:50:34 - J'ai une fille.
00:50:36 - Ah! Il a une fille et moi, un chat.
00:50:41 - Il y a un long au revoir
00:50:46 Et ça se passe tous les jours
00:50:50 Quand un passant
00:50:53 Invite ton oeil
00:50:56 Pour venir lui voir
00:50:59 Même quand elle sourit
00:51:02 Tu laisses partir
00:51:04 Tu laisses le moment voler
00:51:07 Trop tard, tu te lèves
00:51:11 - Voilà.
00:51:13 Je voulais laisser la longueur, le générique, etc.
00:51:16 C'est une entrée en matière magistrale.
00:51:20 Si vous n'avez pas vu le film, vous voulez le voir.
00:51:23 On va s'arrêter là.
00:51:25 J'aurais aimé revenir un peu sur cet extrait.
00:51:30 Un hibernatus californien, vous allez comprendre.
00:51:33 Premier plan.
00:51:35 Je vais essayer de revenir un peu.
00:51:38 Je vais juste remettre un peu le...
00:51:41 Voilà.
00:51:43 Vous voyez comment je fais pause.
00:51:46 Petite manip, tac.
00:51:48 (Bruit de son)
00:51:51 Premier plan, première image.
00:51:54 On voit cette gravure.
00:51:56 Je ne vais pas faire toutes les 8 minutes.
00:51:59 Je voulais que vous le regardiez en tête.
00:52:03 Une gravure en relief marquée Hollywood.
00:52:06 Autant de signes qui marquent la ville.
00:52:10 On voit un immeuble, les palmiers, la mer, etc.
00:52:14 Dès l'entame, on a une carte de Los Angeles.
00:52:18 Une image fixe, une ville fixée par l'époque.
00:52:22 Marlowe va se réveiller.
00:52:24 La musique change de ton, presque d'époque.
00:52:28 (Musique)
00:52:30 (Musique)
00:52:32 (Musique)
00:52:34 (Musique)
00:52:36 (Musique)
00:52:38 (Musique)
00:52:40 Comme si on ne voulait pas réveiller Marlowe.
00:52:44 Cette musique qu'on entend dès le premier plan,
00:52:48 c'est une citation aussi cryptée que géniale.
00:52:52 Une brèche ésotérique dans laquelle va s'engouffrer
00:52:56 un film comme "Under the Silver Lake"
00:52:59 qui sera peuplé de codes à déchiffrer.
00:53:02 La musique que vous avez entendue,
00:53:05 il s'agit du titre "Who Way for Hollywood"
00:53:08 tiré de la bande originale de "Hollywood Hotel",
00:53:11 une comédie musicale de Busby Berkeley, réalisée en 1937.
00:53:15 J'aurai l'affiche tout à l'heure que vous pourrez voir.
00:53:19 Au-delà de la référence au monde du spectacle,
00:53:22 c'est une comédie musicale qui est l'histoire d'un saxophoniste,
00:53:26 au-delà de la référence à Hollywood,
00:53:29 la vedette principale de "Hollywood Hotel"
00:53:32 est rien moins que Dick Powell.
00:53:34 Dick Powell, la première incarnation de Philippe Marlowe à l'écran
00:53:38 et l'incarnation préférée de Chandler lui-même à l'écran.
00:53:42 L'incarnation dans "Murder, My Sweet Adieu, Ma Jolie"
00:53:45 d'Edward Mitrick en 1944.
00:53:47 Altman crée la filiation implicite entre Dick Powell et Elliot Gould
00:53:52 dans ce plan syncrétique comme une source
00:53:55 d'où va couler la fiction.
00:53:57 Le héros apparaît endormi, un chat le réveille.
00:54:01 De quoi se réveille-t-il ?
00:54:03 On ne peut pas réellement identifier l'époque.
00:54:06 Ici, on peut se dire qu'on est dans les années 50.
00:54:09 Il y a peu de signes distinctifs, peut-être le luminaire et encore.
00:54:13 On ne peut pas réellement identifier l'époque,
00:54:16 mais le film nous le dit.
00:54:18 Il a dormi pendant 20 ans et est tombé du livre de Chandler.
00:54:22 Il tombe du livre comme on tombe du lit.
00:54:25 Le projet d'Altman est explicite.
00:54:27 On voulait qu'il se réveille après 20 ans
00:54:30 et il erre dans le film et dans le paysage.
00:54:33 C'est la grande idée du privé.
00:54:35 L'errance d'un hibernatus qui erre dans Los Angeles
00:54:38 et qui recouvre la ville après un sommeil de 20 ans.
00:54:41 Par la suite, tout va faire signe vers son anachronisme.
00:54:44 Ses vêtements, on a pu le voir dans l'extrait,
00:54:47 ses vêtements traditionnels et sa cravate qu'il ne retire jamais.
00:54:51 Il y a plusieurs gags dans le film,
00:54:53 même quand il sauve quelqu'un d'une hypothétique mode noyade.
00:54:57 Ses cigarettes sans filtre des années 40,
00:55:00 qu'il allume avec des allumettes à l'ancienne.
00:55:03 Sa vieille voiture, on l'a vu également,
00:55:06 la Continental modèle 48.
00:55:08 Dans le livre, il s'agissait du Oldsmobile.
00:55:11 Son air de zombie joyeux à travers tout ce film.
00:55:14 Quand on adapte Chandler longtemps après l'apparition des livres
00:55:18 ou qu'on se réfère à cet âge d'or du film noir,
00:55:21 soit on reconstitue, soit on transpose.
00:55:24 Là, c'est une transposition.
00:55:26 On a plusieurs couches temporelles dans le 1er plan.
00:55:29 1937, Hollywood Hotel,
00:55:32 la petite référence scriptée du 1er plan.
00:55:35 1944, Murder, My Sweet, Dick Powell,
00:55:38 premier mec Philippe Marleau.
00:55:40 1953, The Long Goodbye, le livre.
00:55:43 Et 1973, ici, le privé.
00:55:45 Cette séquence avec le chat, on l'a vu, est célèbre.
00:55:48 Elle présente Marleau dans un moment de quotidienneté pure,
00:55:52 d'intimité triviale.
00:55:54 Le rapport avec son chat et la manière dont on lui parle.
00:55:57 Donner à manger à son chat, son unique compagnon,
00:56:00 comme il le dit, il a une femme et moi, j'ai un chat.
00:56:03 Une animalité archaïque qui le ramène à la vie.
00:56:06 La fin d'un chat, la fin d'un chat,
00:56:09 qui va nous guider à travers cet appartement au perché,
00:56:12 comme on l'a pu le voir.
00:56:14 Surtout, cela pose d'emblée la familiarité du spectateur
00:56:17 avec Marleau, à qui on doit s'identifier
00:56:20 selon la tradition narrative de Chandler,
00:56:22 qui tenait beaucoup à ce qu'on s'identifie
00:56:24 au point de vue de Marleau.
00:56:26 C'est une manière brillante qu'a Altman de nous faire entrer
00:56:29 dans cette transposition anachronique, pas à pas.
00:56:32 Il se réveille dans le pré-générique,
00:56:34 ce qu'on peut appeler un pré-générique.
00:56:36 Hier, vous avez eu, pour ceux qui étaient là,
00:56:38 la nuit du générique ici même.
00:56:40 On va parler un peu du générique.
00:56:42 Il se réveille dans le pré-générique
00:56:44 afin d'entrer dans le film via le générique.
00:56:46 Le générique devient comme une passerelle
00:56:48 entre les formes et les époques.
00:56:50 Une machine à remonter le temps,
00:56:52 ce qu'est le cinéma en tant que tel.
00:56:54 Le générique, il faut entendre au deux sens du terme,
00:56:57 comme ce qui appartient au genre
00:56:59 et cette partie du film qui annonce les crédits.
00:57:02 Vous aurez remarqué la musique et la chanson du film.
00:57:06 Composée par John Williams,
00:57:10 la chanson avec Johnny Mercer.
00:57:12 John Williams, le John Williams,
00:57:14 ensuite célébré et célèbre par les compositions pour Spielberg.
00:57:19 John Williams avait déjà travaillé auparavant
00:57:22 avec Altman sur Images.
00:57:24 C'est beaucoup moins flamboyant, beaucoup moins orchestral.
00:57:27 Mais c'est un travail génial justement sur la musique
00:57:31 car on a déjà ici quatre versions du même thème
00:57:35 juste dans ce générique, dans cet extrait.
00:57:39 On a évidemment la petite musique qui arrive ici
00:57:42 au moment où il va être réveillé.
00:57:44 Une petite, on va dire, dans l'appartement,
00:57:47 un petit tour de piano groovy.
00:57:49 Ensuite, on a la version masculine dans la voiture de Lennox,
00:57:52 le personnage blond que l'on voit arriver.
00:57:54 Donc une version chantée, "Not a long goodbye", le titre,
00:57:57 par un homme.
00:57:58 Ensuite, on a la version féminine
00:58:00 qui arrive dans la voiture de Marlowe.
00:58:02 Donc une autre version de la même chanson composée
00:58:05 mais chantée par une femme.
00:58:06 Ensuite, on arrive dans le supermarché.
00:58:08 Donc on a une version orchestrale de supermarché.
00:58:10 Et il y aura dans le film une multitude de variations
00:58:13 du même thème.
00:58:14 Une sonnette de porte qui va faire le thème de "Not a long goodbye".
00:58:18 Une fanfare mexicaine à la fin
00:58:20 qui va jouer pendant un enterrement
00:58:22 et qui va jouer le même thème.
00:58:23 Encore une idée de génie d'Altman.
00:58:25 Une variation sur le thème de Chandler.
00:58:27 Le film est une variation sur le thème de Chandler.
00:58:30 Une répétition des formes.
00:58:31 Tout change et rien ne change.
00:58:32 C'est aussi ça, le recyclage hollywoodien.
00:58:35 Donc on est dans une fureur, on va dire, herménotique.
00:58:38 Fureur d'interprétation
00:58:39 si on doit prendre toutes les signes que nous donne comme ça,
00:58:43 que nous saupoudre Altman dans son film.
00:58:46 Et enfin, on voit la découverte de la ville
00:58:49 avec la déambulation du personnage arpenteur de l'espace
00:58:54 au milieu de la nuit, à 3h du matin.
00:58:56 Et on voit Marlowe au supermarché
00:58:58 comme un personnage de roman face au monde devenu marchandise.
00:59:02 Donc voilà, ça, c'était l'affiche de Hollywood Hotel
00:59:06 avec Dick Powell.
00:59:08 Si j'avance un petit peu,
00:59:11 ce qui vient d'intéressant aussi dans cette séquence,
00:59:13 alors j'aurais aimé à chaque fois vous montrer
00:59:15 et reprendre le détail, mais je n'aurai pas le temps.
00:59:18 Mais il y a un phénomène intéressant que vous avez peut-être noté
00:59:20 et que vous renoterez quand vous reverrez le film.
00:59:23 C'est que Marlowe n'est pas réveillé,
00:59:25 en tout cas, il est mal réveillé.
00:59:27 Il parle à son chat, il marmonne de ses réponses
00:59:29 et souvent dans le livre,
00:59:31 Chandler nous parle d'un Marlowe qui a besoin d'un café
00:59:34 vraiment d'abord, avant de pouvoir répondre à l'interrogatoire
00:59:37 ou à diverses choses.
00:59:39 Et on a l'étrange impression d'une voix off,
00:59:41 notamment quand il parle aux filles, ses voisines
00:59:45 ou quand il parle un petit peu dans le supermarché.
00:59:47 Il a une drôle de manière et la prise de son est très étrange.
00:59:51 Donc l'impression d'une voix off et la prise de son particulière
00:59:56 et qui est l'un des soucis majeurs d'Ackman,
00:59:58 tout ça n'est évidemment pas laissé au hasard,
01:00:00 c'est de produire cet effet de dissonance, en tout cas de flou,
01:00:03 entre la voix in et la voix off.
01:00:05 Et la voix off dans le film, en tout cas, qui va petit à petit changer,
01:00:09 mais c'est vraiment le jeu choisi par Edgard Gould,
01:00:11 est comme une conscience narrative chandlerienne,
01:00:13 un roman qui se lit dans sa tête, un envoûtement qui infuse.
01:00:16 Donc on a toujours Chandler qui est là dans son personnage.
01:00:20 Et on retrouve le hiatus dont je parlais tout à l'heure
01:00:22 entre la première personne et la troisième personne
01:00:25 chez Chandler.
01:00:26 Ici, on a ce passage de voix off à voix in
01:00:28 sans qu'on puisse déterminer exactement ce que c'est.
01:00:31 La voix off étant par ailleurs, la voix narrative,
01:00:33 l'une des marques un peu, lieu commun du film noir.
01:00:38 Donc on a comme une machine qui se reboot là dans ce premier extrait,
01:00:42 un acteur qui intègre son personnage, un homme qui s'éclaircit la voix,
01:00:46 qui s'éclaircit l'être, pourrait-on dire,
01:00:48 en tant que la voix porte l'être tout entier.
01:00:51 On voit aussi dans cet extrait, le personnage,
01:00:54 la présentation du personnage de Terry Lennox, le blond, etc.,
01:00:57 qui va mener l'intrigue, ensuite, qui va être l'ami de Marlow,
01:01:01 qui va disparaître, et je ne vous raconte pas tout ce qui peut arriver.
01:01:04 Il croise donc le gardien de l'ensemble de propriétés,
01:01:09 qui va imiter Barbara Stanwyck.
01:01:12 Évidemment, c'est la Barbara Stanwyck de "Double Indemnity",
01:01:15 d'"Assurance sur la mort", de Billy Wilder, écrit et co-écrit
01:01:18 avec Chandler.
01:01:19 Encore un indice que l'on met ici.
01:01:21 On le croisera très souvent, régulièrement, ce personnage d'imitateur.
01:01:25 On le croise plusieurs fois.
01:01:26 Il nous proposera ses imitations, toujours vintage pour l'époque,
01:01:29 des imitations à peu près, en plus, de James Tiward, de Cary Grant
01:01:33 ou de Walter Brennan.
01:01:34 Et il rappelle que Los Angeles, ici, c'est Hollywood d'abord,
01:01:37 et qu'Hollywood est aussi une manufacture d'imitation du monde,
01:01:41 de remake, de répétition.
01:01:43 C'est une ville bègue, dans la manière dont Ackman la filme.
01:01:48 Ce personnage de gardien est comme le gardien d'un temple des fées.
01:01:52 Ce que l'on voit également, c'est les voisines,
01:01:56 célèbres également pour ceux qui connaissent le film,
01:01:59 des hippies qui marquent la différence d'époque.
01:02:02 On a vu déjà la manière dont il est présente,
01:02:04 dont petit à petit, on avance dans le temps et dans les années 70,
01:02:08 avec cette vitre.
01:02:11 On est dans le flou, et ensuite, il va zoomer vers...
01:02:14 pour nous faire comprendre qui sont ces voisines
01:02:16 qui chantent à 3h du matin.
01:02:17 Elles sont là comme un arrière-plan, un bruit de fond,
01:02:20 une capsule temporelle.
01:02:21 Marlowe ne les moque jamais dans le film.
01:02:23 Il vit en bon voisinage avec eux, comme on l'a vu.
01:02:26 Elles feront l'objet de certains gags, parfois,
01:02:28 quand d'autres les verront danser, notamment les policiers qui arriveront.
01:02:33 Mais elles ne font jamais l'objet d'une prédation sexuelle
01:02:36 de la part de Marlowe ni d'Ackman.
01:02:39 C'est quoi, donc, "voisiner", les voisins,
01:02:43 le voisinage du temps,
01:02:44 de différentes couches temporelles de la ville ?
01:02:46 C'est vraiment ce voisinage avec d'autres cartes,
01:02:49 fantômes, d'autres cartes que la ville renferme.
01:02:52 Leur présence est moins anodine qu'il n'y paraît.
01:02:55 Et cet arrière-plan dit quelque chose
01:02:57 de la transformation de Los Angeles
01:02:59 et du façonnage culturel de ces différents quartiers.
01:03:02 Prenons, puisqu'on parle de cartographie
01:03:05 et de cartes et de villes,
01:03:06 prenons quelque chose de simple, c'est-à-dire Google Maps,
01:03:10 avec une carte de Los Angeles, que vous reconnaissez ou pas,
01:03:13 mais voilà ce qu'est une carte.
01:03:15 Où habite Marlowe, lui, en 1973,
01:03:18 le Marlowe que l'on vient de voir ?
01:03:19 Il habite Hollywood Heights.
01:03:22 Et c'est intéressant de voir, d'ailleurs,
01:03:24 là, je vous fais simplement une capture d'écran,
01:03:26 j'aurais pu vous le faire en direct, Google Maps.
01:03:28 On voit, avec juste cet exemple simple de Google Maps,
01:03:31 l'idéologie qui se cache toujours derrière les cartes,
01:03:34 toujours derrière les cartographes,
01:03:36 qui impose une vision du monde.
01:03:38 Ici, c'est le tourisme roi, la vie automatique.
01:03:41 On nous propose d'abord les hôtels, le prix, les étoiles, voilà, etc.
01:03:45 Et ce que l'on peut visiter.
01:03:47 Donc c'est déjà se mettre dans la tête du cartographe
01:03:50 que de savoir ce que l'on veut montrer d'un territoire et d'un lieu.
01:03:55 Et c'est en cela que Robert Altman, on va voir,
01:03:58 est un contre-cartographe, on propose ses propres cartes de la ville.
01:04:01 Mais voilà, donc, Hollywood Heights.
01:04:03 Et sa High Tower célèbre, que l'on voit aujourd'hui.
01:04:07 Et vous reconnaissez, on voit bien à droite,
01:04:10 l'appartement de Marlowe, et à gauche, la résidence, en tout cas,
01:04:14 de ses voisines hippies.
01:04:17 Il y a évidemment à Los Angeles un parcours Chandler,
01:04:20 un parcours Marlowe, on peut visiter tout ça avec une visite guidée.
01:04:24 En revanche, où habite Marlowe en 1953, dans le livre ?
01:04:29 Lisons "The Long Goodbye".
01:04:31 "J'habitais cette année-là une petite maison sur Yucca Avenue
01:04:34 "dans le district de Laurel Canyon, à flanc de coteau dans une impasse.
01:04:38 "Un escalier de bois mené au perron abrité par un bouquet d'eucalyptus.
01:04:41 "La maison était meublée et appartenait à une dame
01:04:44 "qui était allée vivre pour l'Aïdao auprès de sa fille veuve.
01:04:46 "Le loyer était modeste, en partie parce que la propriétaire
01:04:49 "voulait pouvoir rentrer chez elle, avec le préavis le plus bref,
01:04:52 "en partie à cause des marches.
01:04:54 "Elles devenaient trop vieilles pour les affronter chaque fois qu'elles revenaient chez elles."
01:04:57 C'est bien d'entendre aussi un peu la voix traduite, en tout cas, de Chandler.
01:05:02 Donc, Laurel Canyon.
01:05:04 Et je me suis amusé à faire un petit itinéraire entre Marlowe 73
01:05:10 et le Marlowe de 1953.
01:05:13 On voit qu'on n'a que 17 000 de voitures, ce qui n'est rien,
01:05:15 en tout cas du point de vue de quand on habite Los Angeles.
01:05:19 Mais Laurel Canyon, où habite la version 53 de Marlowe,
01:05:24 Laurel Canyon en 73, qu'est-ce que c'est ?
01:05:27 C'est autre chose.
01:05:29 Et c'est cette autre chose que nous rappelle le voisinage de ces jolis hippies.
01:05:34 Allons donc leur rendre visite pour en savoir un peu plus
01:05:37 et laissons Marlowe aller au supermarché
01:05:40 pour faire une petite embardée, une petite parenthèse.
01:05:43 Morrison 1968.
01:05:45 Un peu de musique.
01:06:09 On va laisser le son.
01:06:10 On va juste le laisser un peu en fond, comme ça,
01:06:16 ça me fera un petit fond musical, encore un peu moins fort, s'il te plaît, Pierre.
01:06:21 Donc cette Love Street dont parlent Jim Morrison et les Doors,
01:06:26 c'est précisément Laurel Canyon.
01:06:28 Et cette femme chantée, "She lives on Love Street",
01:06:31 cette femme chantée par Morrison, c'est Pamela Courson,
01:06:34 sa compagne d'alors.
01:06:37 Laurel Canyon abritait une communauté artistique, musicale,
01:06:40 tendance hippie, donc, pour le dire très vite,
01:06:43 et qui a pris le rock au sérieux.
01:06:45 Et on va voir simplement un documentaire qui était consacré à Laurel Canyon,
01:06:49 qui dira beaucoup plus vite ce qu'était Laurel Canyon en 1900,
01:06:52 fin des années 60, début des années 70.
01:06:54 Documentaire consacré à Laurel Canyon.
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01:28:53 J'arrête également la séquence parce que je vais vous prendre encore 10 minutes
01:28:57 pour essayer d'aller au fin de cette réflexion.
01:29:02 Donc on voit dans cette ouverture l'écran vitrine.
01:29:05 On est derrière, on a l'inscription à lire à l'envers, à décrypter.
01:29:09 On retourne le gant de la ville et ça va être tout le sujet de ce film
01:29:13 qui est un millefeuille de codes et c'est le sujet et à la fois
01:29:17 le film lui-même est rempli de codes.
01:29:21 On peut en profiter sans percevoir tous les codes.
01:29:25 On a la focalisation sur un être hébété très vite,
01:29:30 on a encore un niveau supérieur de stonitude, si on peut le dire,
01:29:33 qu'Andre Garfield dans ce film.
01:29:37 Et déjà on voit ici tout un mélange, on pourrait s'y attarder,
01:29:41 d'une grammaire Hitchcock, de Palma, Lynch,
01:29:45 mais qui ne sont pas un souci de pastiche mais par souci de transformer
01:29:49 le film et la ville elle-même en une forteresse de signes,
01:29:53 comme le disait Camille de Toledo.
01:29:58 On a aussi la sonnerie de téléphone, qui est édité par la mère,
01:30:01 qui va être un personnage récurrent, je parle de Janet Gaynor,
01:30:05 en tout cas sa tombe elle-même, etc.
01:30:09 La sonnerie de téléphone, alors là on est dans la guillitude absolue,
01:30:13 la sonnerie de téléphone que vous avez entendu et qu'on va entendre
01:30:17 très souvent dans le film, qui vient d'un musique composée
01:30:21 pour le jeu vidéo "The Last Ninja", sorti en 87 sur Commodore 64.
01:30:26 Et ici le mémage de Caldman à la sortie du Hollywood Hotel
01:30:29 et sa musique tout à l'heure.
01:30:33 Donc là on est dans le vertige des signes, et même analyser ces choses-là
01:30:37 nous conduit parfois à ce vertige, à essayer de trouver le moindre signe,
01:30:41 parfois en surinterprétant les choses.
01:30:45 Mais ce que cela veut dire "The Last Ninja" et le film, c'est simplement
01:30:49 un souvenir d'enfance que l'on met ici pour mettre une couche temporelle supplémentaire.
01:30:54 C'est une ancienne hippie apparemment, ou une néo-hippie,
01:30:57 comme si c'était le même personnage que dans le privé.
01:31:01 Peut-être quelques années après, on est dans une citation explicite
01:31:05 tout au long du film et dans la physionomie du lieu.
01:31:09 Le chat de Marlowe est ici extrapolé dans le film,
01:31:13 en un bestiaire riche et étrange, l'écureuil qu'on a bien vu ici.
01:31:17 Un putois qui va lui cracher dessus et il va se sentir mauvais
01:31:22 et il va se faire mal, et il va se faire mal.
01:31:25 On aura un perroquet, un coyote, des animaux empaillés, etc.
01:31:29 Puis un tueur de chiens, comme on a pu le voir.
01:31:33 Prenons garde aux tueurs de chiens.
01:31:37 C'est un quartier de Los Angeles précis, Silver Lake,
01:31:41 avec des lieux que le réalisateur et le personnage fréquentent,
01:31:45 des lieux qu'il aime, une librairie, un bar, etc.
01:31:50 Le réalisateur Michel disait "Under the Silver Lake"
01:31:53 est ma vision personnelle de l'histoire de Los Angeles,
01:31:57 une histoire qui se prête à être comptée au prisme du genre policier.
01:32:01 Piscine ensoleillée, ombres obscures, passage secret,
01:32:05 jeunes filles de bonne famille, meurtre mystérieux,
01:32:09 l'imagerie iconique d'une ville bâtie sur des rêves et des images animées.
01:32:13 Voilà ensuite, avant de vous laisser, quelque chose de gratuit,
01:32:18 il faut recomposer les cartes, on pourrait imaginer une géocritique de cinéma.
01:32:21 On voit juste l'itinéraire entre les trois films.
01:32:25 On constate que le privé, Hollywood Heights, au milieu,
01:32:29 est à distance quasi équilatérale de Hinney Run Vice,
01:32:33 de Paul Thomas Anderson et de Silver Lake.
01:32:37 Je ne sais pas ce qu'il faut en faire, mais c'est une information intéressante,
01:32:41 un signe cryptique pour recomposer une autre carte.
01:32:46 C'est un beau travail de David Onora, si vous connaissez ce livre,
01:32:49 Movie Land, où il a recomposé le cinéma sur une carte
01:32:53 où les noms des villes deviennent des films, les régions, les genres, etc.
01:32:57 J'aimerais, et je vais faire quelque chose qu'on ne doit pas faire,
01:33:01 c'est-à-dire parler au-dessus de l'extrait pour pouvoir vous libérer,
01:33:05 mais j'aimerais au moins qu'on voit des petites choses.
01:33:09 Revenir à Hachman, et un extrait assez beau également.
01:33:14 Je vais baisser le son, Pierre,
01:33:17 parce que c'est aussi le mouvement de caméra qui va m'intéresser par la suite.
01:33:21 Vous aurez reconnu, ou pas, le thème de The Long Goodbye,
01:33:25 une autre version d'un pianiste qui répète et qui rejoue encore et encore le même thème.
01:33:31 On voit que dans le film, Marlowe, contrairement aux autres Marlowe du cinéma,
01:33:38 n'a pas de bureau. Il est dans un bar où il vient prendre ses messages, etc.
01:33:43 Il est vraiment hors jeté dans une époque qui le rejette presque.
01:33:49 Et là, on va voir commencer le fameux zoom hachmanien.
01:33:56 Un zoom... il va arriver, parce que là, je parle au-dessus.
01:34:02 En tout cas, observez bien la manière dont Hachman traite la matière même de l'image.
01:34:10 Vous allez voir après que... je ne peux pas avancer rapide avec le powerpoint, donc désolé.
01:34:14 Mais vous allez voir que ce zoom a plusieurs fonctions dans l'oeuvre d'Hachman en général,
01:34:19 et dans ce plan en particulier ensuite.
01:34:22 C'est le glissement du premier à l'arrière-plan, comme une contre-cartographie.
01:34:27 Qu'est-ce qui se cache à l'arrière-plan ? Quels détails on veut vraiment nous donner à voir ?
01:34:31 Il permet de bien saisir que le cadre n'est pas définitif,
01:34:36 et qu'il faut toujours changer la donne de ce qu'on nous montre.
01:34:39 La mise en scène contrôle et en même temps donne le sentiment d'une matière brute, vivante, à explorer.
01:34:44 Un héritier actuel serait Aung San Suu, par exemple, pour cet usage du zoom.
01:34:50 Le zoom est une figure pas forcément bien vue, en tout cas à l'époque, ou au cinéma de manière générale,
01:34:55 qui est un héritage de la télévision, vous savez, quand on veut aller vite,
01:34:58 plutôt que de faire des plans de coupes, on zoom et ça va très vite.
01:35:01 Mais qui revient en force dans l'Hollywood des années 60,
01:35:05 et surtout qui revient dans la palette d'Altman,
01:35:09 et qui en fait quelque chose d'un modernisme assez fou.
01:35:12 Ça a plusieurs fonctions chez lui, dans les fresques plus chorales,
01:35:16 il permet de guider le spectateur et de sélectionner ce qu'il faut ou ce qu'il peut voir dans la scène.
01:35:21 Ici, ça la sert de passage entre l'intérieur et l'extérieur du personnage.
01:35:27 On accède quasiment à sa carte mentale, si j'ose dire.
01:35:32 On accède à la mindmap, et là on va lui demander l'adresse.
01:35:35 Le zoom permet également de laisser libre les acteurs sur un tournage,
01:35:40 et notamment sur le privé, aucune marque au sol.
01:35:43 C'était l'une des marques d'Altman, de vouloir cette liberté,
01:35:49 et parfois cette improvisation des acteurs, comme je le disais tout à l'heure.
01:35:53 Un petit mot peut-être aussi sur la photographie du film,
01:35:56 il y avait d'autres extraits, je ne pourrais pas vous les montrer,
01:35:59 mais la photographie signée "Vilmos, Seize monde",
01:36:02 qui avait déjà fait John McCabe ou "Images", ils ont fait trois films ensemble.
01:36:06 Donc Vilmos, je vais l'appeler comme ça, est l'un des plus grands chefs opérateurs que la Terre ait porté.
01:36:14 Quelques films, "Délivrance", "Obsession", "Rencontre du troisième type"
01:36:18 ou "Le Dali à Noir", c'était un film de Los Angeles qui est dans ce programme.
01:36:23 Dans "Images", par exemple, il y avait une séquence étrange de la folie,
01:36:29 qui signifiait la folie du personnage, avec des mouvements comme on l'a vu là,
01:36:32 un mouvement de caméra, un zoom vers le haut, vers le bas, sur les côtés, etc.
01:36:37 Quelque chose qui pouvait donner les hauts le cœur.
01:36:39 Et après cette expérience, Altman demande à son chef opérateur
01:36:43 "Et si on faisait tout un film comme ça, tout le film comme ça, le privé ?"
01:36:46 Et c'est vrai que la caméra se déplace sans cesse dans le film,
01:36:50 pour donner de la chair à l'histoire et pour maintenir le public en haleine.
01:36:53 Il y a toujours cet aspect expérimental qui intéresse Altman cinéaste.
01:36:57 Il disait vouloir éviter à tout prix d'avoir des images trop précises dans le privé,
01:37:02 et donc qu'on donne un sentiment d'image délavée, d'image intemporelle, presque onirique.
01:37:09 Ils ont expérimenté une technique sur ce film avec son chef opérateur,
01:37:13 ce qu'on appelle le "flashing" ou le "post-flashage",
01:37:18 c'est-à-dire d'exposer le négatif de la pellicule après tournage et avant même son développement.
01:37:22 Sismond disait "Cela renforce les teintes de gris et atténue les contrastes,
01:37:26 pour obtenir l'effet recherché", j'ai du filmer en légère sur l'exposition.
01:37:29 Bref, l'effet recherché, dit-il, c'était, dans les mots d'Altman,
01:37:33 "un voile doré Hollywood", un flou mental et artistique qui pèse sur le film tout entier.
01:37:39 Et pareil, là je vais commenter très vite, un extrait d'Ineren Weiss,
01:37:47 qui était justement pour parler de la comparaison...
01:37:50 Et on va avoir la citation, enfin, l'une des citations par Anderson
01:38:01 du fameux "zoom" altmanien, et qui va aboutir précisément à une carte de Los Angeles.
01:38:10 Là on a le détective dans le cadre de son... enfin le lieu commun du détective
01:38:16 qui interroge, qui prend des renseignements et qui va noter des mots,
01:38:18 mais avec un petit décalage chez ce détective un petit peu spécial.
01:38:22 Et il y a tout un travail chez Anderson, avec son chef-op Robert Hellsweet,
01:38:31 qui a fait quasiment tous ses films.
01:38:33 Ineren Weiss est tourné par ailleurs en 35mm, et pour la manière dont il avait de filmer Los Angeles,
01:38:39 Atman avait demandé notamment à Hellsweet de reproduire l'ambiance des films d'Atman,
01:38:47 et notamment The Long Goodbye, et également un autre film avec Elias Gould,
01:38:50 California Split, réalisé par Atman.
01:38:52 Et là va bientôt commencer le fameux "zoom" altmanien.
01:38:56 Il a dit que tu l'as aidé à sortir de la situation en 67.
01:38:59 La première fois que j'ai eu l'occasion, je crois que je suis allé à China.
01:39:02 Je pense que tu as une question assez évidente.
01:39:04 Tu sais où se trouve Glenn Sherlock, pourquoi ne pas aller là-bas et le voir directement ?
01:39:10 Parce que Wolfman aime se faire entourer de la Brotherhood, jour et nuit.
01:39:15 Je vois, à l'extérieur de Glenn, je n'ai jamais aimé la compagnie des nazis.
01:39:21 Donc, tu as dit que tu n'allais pas aller voir Atman ?
01:39:25 Plus ou moins.
01:39:27 Et quand tu es allé à l'intérieur, tu as vu un plan très intéressant.
01:39:33 Et tu as dit que tu as fait un zoom très lent.
01:39:38 Et ensuite, il va lui donner une adresse, et on va déboucher littéralement sur un plan que je voulais vous montrer,
01:39:45 qui est la carte littéralement de Los Angeles, et on a un commentaire en haut.
01:39:50 Qui nous parle de l'évolution de Los Angeles.
01:39:54 En fait, il y a une vieille gang de rue, les Autistes de la Crips.
01:40:00 Quand je suis arrivé à la maison de Chino, je me suis cherché et j'ai trouvé que ce n'était pas seulement eux qui étaient partis, mais l'ensemble de la Turquie.
01:40:07 Où est-ce qu'ils sont partis ?
01:40:09 Je ne parle pas de ça.
01:40:11 Ils se sont rassemblés en petits morceaux, les cigales se sont déchirés partout.
01:40:15 Je pensais que je me tromperais.
01:40:17 J'ai pris mon carton, je me suis tourné, je suis revenu, et ils sont toujours partis.
01:40:21 Rien, personne, seulement une ville fantôme.
01:40:24 Avec un grand signe qui disait "Je vais bientôt venir ici"
01:40:28 Avec des images de plus grosses, plus grosses mais des maisons.
01:40:32 Et regardez qui est le bâtiment.
01:40:34 Ouf, je me suis mis à l'esprit.
01:40:36 Je ne te fais pas la tête, montre-moi si tu es sur le map.
01:40:41 Une longue et triste histoire de L.A. Lanthius.
01:40:46 Des familles mexicaines se sont bouchées dans un ravignon de Chavez pour construire le stade de Dodger.
01:40:51 Des Indiens américains se sont faits sortir de la montagne de bunker pour le centre de musique.
01:40:55 Et maintenant, la village de Tariq.
01:40:57 Les vieux, à côté.
01:40:59 Les États-Unis, en face.
01:41:01 Je vais l'arrêter là.
01:41:08 Je vais faire en 5 minutes une accélération sans vous montrer trop d'images.
01:41:12 Mais voilà, j'ai mal calculé le temps dont je disposais.
01:41:17 Je voulais simplement vous montrer une séquence d'E.M. Michel et Under the Silver Lake
01:41:27 où il va découvrir précisément la carte après sur une revue.
01:41:32 C'était encore une histoire de cartes et de codes à décoder qui était très intéressante.
01:41:41 Je voulais vous montrer quelques petits extraits.
01:41:46 Juste sur le code, ça c'est l'affiche d'Under the Silver Lake.
01:41:50 Et cette affiche, vous voyez les bulles, etc.
01:41:53 Tout ça avait déjà 1000 codes dès l'affiche.
01:41:57 Vous en percevez peut-être certains ici dans les bulles.
01:42:00 Une tête de pirate, il y a plusieurs figurines, etc.
01:42:03 Et en bas à droite, le visage dans les palmiers d'Andrew Garfield.
01:42:08 Donc voilà, dès l'affiche, il y avait déjà ces codes qui se créent,
01:42:12 qui étaient déjà le sujet du film.
01:42:15 Je voulais vous emmener de nouveau vers Altman et un autre extrait,
01:42:19 mais on n'a pas le temps non plus,
01:42:22 afin de partir vers Dmitryk.
01:42:25 Voilà, bon, je n'en ai pas le temps.
01:42:28 Simplement une petite chose.
01:42:31 Simplement, il y a dans Chandler,
01:42:36 je parlais des décalages subtils, etc.,
01:42:39 des chroniques d'une ville qui change.
01:42:41 Il y a précisément une description chez Chandler qui est assez belle,
01:42:45 de la nouvelle perception de l'alcoolique repenti ou de la gueule de bois.
01:42:50 On a vu, si on faisait une étude actorale,
01:42:52 de ces transmissions entre ces trois acteurs,
01:42:55 qu'il y a quelque chose vraiment d'un acteur Stone en pleine gueule de bois.
01:42:59 Et dans le roman de Chandler, il nous dit,
01:43:02 "Il revint la tête et me fit un sourire là.
01:43:04 Enfin, je m'arrêterais bien de boire un de ces jours."
01:43:06 On dit tout ça, non. Il faut environ trois ans.
01:43:08 Trois ans, il parut choqué.
01:43:10 En général, oui, le monde change.
01:43:12 Il faut s'habituer à des couleurs plus effacées,
01:43:14 à des sons plus amortis.
01:43:16 Il faut accepter les rechutes.
01:43:19 Il faut être même pas sympathique et réciproquement.
01:43:20 Donc ça, c'est vraiment la perception altérée
01:43:22 qui va être la perception même des films adaptés de Chandler en particulier
01:43:27 et surtout de ces trois films-là.
01:43:29 D'un côté, ça sera l'embûment d'un hipernatus.
01:43:34 Là, ça sera les joints, etc.
01:43:37 Ou des scènes de drogue.
01:43:39 Les trois personnages, systématiquement, tombent dans les vapes et se réveillent.
01:43:42 Tout comme dans les extraits que je ne vous ai pas montrés,
01:43:45 mais que je voulais vous montrer,
01:43:48 c'est le film d'Edouard Dmitric,
01:43:49 où on voit Dick Powell, le premier Philippe Marleau,
01:43:52 précisément tomber dans un moment où on le drogue pour le faire parler.
01:43:58 Il y a toute une séquence complètement baroque,
01:44:00 héritée évidemment de l'expressionnisme allemand,
01:44:03 qui était vraiment l'une des références du film noir.
01:44:06 Et c'est assez fou de le voir déjà ici,
01:44:08 cette altération de la perception dans le film de Dmitric.
01:44:12 Il y avait d'autres jeux sur les reflets, etc.,
01:44:15 que je voulais comparer.
01:44:17 Mais ça sera dans un deuxième tome, peut-être, de ce cours.
01:44:21 Et pour finir, il y avait plein de choses sur lesquelles je voulais revenir de manière théorique.
01:44:27 On allait repasser encore par Gilles Deleuze,
01:44:30 qui nous parle justement des clichés et de la crise de l'image-action
01:44:35 au moment du Nouvel Hollywood,
01:44:37 où il cite explicitement Atman comme un cinéaste
01:44:41 qui essaie de traverser, de décoller des clichés
01:44:46 que l'on nous donne dans la modernité,
01:44:48 et qui fait la modernité d'une manière ou d'une autre.
01:44:52 Et Deleuze décrivait justement ce que l'on pouvait opposer aux clichés et aux cartes,
01:44:57 parce qu'il parle également des cartes, qu'il compare au calque.
01:45:00 La différence de la carte, c'est qu'on peut précisément,
01:45:04 comme je vous disais tout à l'heure, lui, non pas lui faire dire ce qu'on veut,
01:45:07 mais faire dire ce qu'on veut au territoire à travers la carte,
01:45:09 alors que le calque, lui, ne fait que tout reproduire.
01:45:13 Et il opposait donc à ça la balade contre le cliché.
01:45:16 Le cliché commence à se balader,
01:45:18 et les trois films épousent cette forme dont parlait Deleuze,
01:45:23 même si on peut être réservé aussi ensuite sur certains développements de Deleuze en tant que tel.
01:45:28 En tout cas, la cartographie comme expérimentation,
01:45:31 comme une définition de nouvelles lignes et de nouveaux territoires.
01:45:38 Je vous reporte, du coup, sans pouvoir vous le décrire ici,
01:45:41 un article paru à l'époque de Pauline Kahl,
01:45:44 qui pouvait avoir la dent dure sur beaucoup de cinéastes,
01:45:46 mais qui en 1973 a fait un magnifique article.
01:45:49 Altman était l'un de ses cinéastes favoris.
01:45:52 Un article qui s'appelle "Cinéma Land" ou "Le paradis des clochards",
01:45:55 où elle parle de la ville de Los Angeles précisément comme d'une maladie,
01:46:00 comme d'un imaginaire contaminé par le cinéma.
01:46:04 Et tout son développement repose sur ce que j'essayais de vous dire également,
01:46:07 que le film d'Altman est contaminé par ces codes hollywoodiens
01:46:11 contre lesquels il va, non pas se rebeller, mais essayer de transformer.
01:46:16 Elle parle du privé comme d'une rêverie sur les mensonges des vieux films, etc.
01:46:21 Et elle analyse ce qu'est la culture populaire.
01:46:24 Je vous rapporte vraiment à cet article qui est paru dans ses chroniques américaines,
01:46:27 si vous pouvez le lire.
01:46:29 Et ensuite, on avait évidemment juste une petite citation en parenthèse
01:46:35 de "Invasion Los Angeles" qu'on pourra voir également.
01:46:37 Là, quand on parle de codes d'une ville,
01:46:39 là on est dans un...
01:46:41 Carpenter est beaucoup plus direct et littéral, lui.
01:46:44 Il s'attaque à ces codes sous forme de SF,
01:46:47 au monde encodé par le capitalisme.
01:46:49 Et évidemment, si vous avez vu le film,
01:46:51 quand on chose des lunettes spéciales, on voit que tous les...
01:46:54 En tout cas, certains...
01:46:56 Voilà, le film passe en noir et blanc,
01:46:58 et ce sont les extraterrestres vraiment qui sont les "youppies".
01:47:02 Et enfin, on avait évidemment à citer...
01:47:05 Vous avez peut-être pu voir le film ici, en partie.
01:47:08 Donc, 20 ans plus tard encore, on passe en 1993,
01:47:12 et on a le "Shortcuts", évidemment, film incroyable,
01:47:15 où là, encore une transposition de Los Angeles,
01:47:18 à travers les nouvelles de Raymond Carver.
01:47:21 Donc, une construction assez fabuleuse.
01:47:23 Cela devait s'appeler "Los Angeles Shortcuts",
01:47:26 donc le "Short Los Angeles" de Altman, vu à travers ses écrivains.
01:47:31 Et enfin, j'arrête vraiment avec ça,
01:47:34 pour juste vous conseiller un livre,
01:47:36 et je remercie Laurence Briot, qui est encore dans la salle,
01:47:39 qui m'a orienté vers cette...
01:47:41 Alors là, ça m'ouvre une boîte de pendeur,
01:47:43 mais sur les concepts de cartographie critique
01:47:45 ou de cartographie radicale,
01:47:48 où on fait de la géographie, on va dire, engagée,
01:47:51 à partir des cartes, comment on montre les cartes,
01:47:53 ce que je vous disais, ce que l'on peut faire dire aux cartes,
01:47:55 de manière politique, économique, etc.
01:47:57 Et comment on peut contre-cartographier les choses,
01:48:00 de faire une cartographie radicale.
01:48:01 Et pour moi, Altman est précisément,
01:48:03 on peut le considérer comme ce cinéaste,
01:48:06 un cartographe critique,
01:48:08 c'est-à-dire qu'il nous donne à voir
01:48:10 et à vivre autrement le monde qui nous entoure,
01:48:12 dans un geste qui relève de la critique sociale,
01:48:14 dans la plus pure tradition du roman noir, par exemple.
01:48:16 Donc, maintenir toutes les cartes visibles et en éveil,
01:48:19 c'est un geste de traduction des œuvres,
01:48:21 comme le dirait Toledo.
01:48:23 Les formes esthétiques circulent d'un film à l'autre,
01:48:25 comme on a presque pu le voir ici,
01:48:27 et c'est ce territoire essentiel qu'il faut maintenir
01:48:29 sous nos pieds.
01:48:30 Et en post-scriptum, j'avais pu parler de ce film,
01:48:34 à la fois pour dire qu'il hérite beaucoup d'Altman,
01:48:37 qu'il essaie de filmer, justement,
01:48:39 ce moment un petit peu suspendu,
01:48:41 avant l'arrivée de Charmaine Son,
01:48:43 et pour ceux qui n'ont pas vu le film,
01:48:45 on sait ce qu'il en fait.
01:48:47 Et c'est un film d'une visite décousue,
01:48:51 également de Los Angeles,
01:48:53 et je le cite précisément parce que
01:48:55 Tarantino vient de publier un livre sur
01:48:58 Altman, et il ne rend pas du tout hommage à Altman,
01:49:01 à tort, je pense, et qualifiant
01:49:03 Brewster-McLeod de l'un des pires films
01:49:05 à avoir jamais porté le logo d'un studio.
01:49:07 Donc c'est intéressant parce qu'on voit quand même
01:49:10 que Tarantino n'aurait jamais existé,
01:49:12 en tout cas sans la carte et sans la forme Altman.
01:49:15 Voilà, j'aurais dû en dire plus,
01:49:17 là je caricature un peu, mais à Paris en 2023,
01:49:19 vous pouvez très vite maintenant voir
01:49:21 The Long Goodbye.
01:49:23 Donc merci à vous, et désolé d'avoir dû passer très vite
01:49:25 sur des moments un petit peu importants
01:49:27 de ce développement, mais voilà.
01:49:28 Merci beaucoup.
01:49:30 [Applaudissements]
01:49:35 [Musique]