Cédric Klapisch et Lola Doillon répondent à nos questions
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00:06 Je pense que je n'avais plus rien à dire sur Xavier.
00:10 J'avais l'impression au bout de trois films que j'avais un peu épuisé ce personnage.
00:14 Et je me suis dit que c'est beaucoup plus intéressant de suivre ses enfants.
00:18 C'est vraiment la nouvelle génération, le fait que ses enfants ont 22 et 26 ans,
00:23 Tom et Mia dans ce nouveau chapitre.
00:26 Et là, je trouvais que c'était intéressant de montrer deux jeunes qui ont le même âge que Xavier
00:34 quand il avait 25 ans et qu'il partait à Barcelone en Erasmus.
00:37 De voir, de comparer en fait les deux générations et de voir que
00:42 c'est quelque chose qu'on ne connaît pas au cinéma d'avoir vu le père au même âge.
00:47 Et donc du coup, là je trouvais que c'était intéressant de fabriquer des images
00:50 alors qu'on a vu le père sortir en boîte, sortir avec Wendy,
00:53 puis ensuite il a eu des enfants avec Wendy,
00:55 puis ensuite voilà, c'est ces enfants-là.
00:56 Et donc tout ce côté saga, c'était intéressant pour moi.
00:59 En fait, c'est le temps.
01:06 C'est huit fois 52 minutes, c'est qu'on a plus d'histoires à raconter,
01:11 plus de rebondissements parce que du coup, ça nous met dans quelque chose qui est plus dramatique,
01:14 je pense que pour un long métrage.
01:16 Et les personnages qui du coup sont plus approfondis.
01:20 C'est ça, le temps d'approfondir et plusieurs personnages,
01:23 pas seulement un ou deux personnages, mais d'avoir vraiment le temps de s'imprégner de toutes ces différences.
01:28 Et je pense que comme la série raconte aussi ça,
01:30 comment cohabiter avec autant de différences ?
01:32 C'était important d'avoir le temps de poser ces différences,
01:35 ces différentes personnes qui viennent avec leurs différentes cultures.
01:38 On se dit que les années 2000, c'est une espèce de bulle de savon.
01:46 C'est-à-dire que les gens étaient enthousiastes, c'était la création de l'Europe,
01:50 il n'y avait pas encore l'euro, la monnaie européenne,
01:53 et les gens étaient beaucoup moins engagés sur plein de causes.
01:56 Donc aujourd'hui, on voit quand même que les jeunes d'aujourd'hui,
01:59 ils sont plus engagés dans l'écologie, dans le féminisme, l'antiracisme.
02:04 Là, sur les histoires de retraite en ce moment,
02:06 on voit beaucoup de jeunes, lycéens ou étudiants qui sont dans la rue
02:09 pour parler de leur avenir et du rapport au travail.
02:12 Donc on sent qu'ils sont quand même beaucoup plus concernés que des générations précédentes.
02:16 Et qu'il y a une société qui…
02:18 Voilà, il y a une urgence aujourd'hui à réagir,
02:20 et c'est vrai que les jeunes d'aujourd'hui le savent et réagissent énormément.
02:26 Dans tous les projets que je fais,
02:27 il y a une notion de documentation qui est très forte.
02:30 J'ai su dès le départ qu'il fallait que je travaille avec des jeunes scénaristes justement,
02:33 parce que moi j'ai 61 ans,
02:36 et pour parler de gens de 20-25 ans, il valait mieux que je demandais d'autres gens.
02:41 Et donc j'ai fait un casting de jeunes scénaristes,
02:45 j'en ai choisi cinq, j'ai commencé à travailler avec eux.
02:48 Ensuite Lola a repris…
02:50 Moi j'ai commencé à travailler sur le film encore,
02:52 et donc du coup j'étais sur les deux projets.
02:55 Et donc c'est elle qui a chapoté l'équipe de scénaristes au bout d'un moment.
02:59 Mais c'était beaucoup un travail de documentation,
03:02 pas seulement avec ces scénaristes-là,
03:03 mais on a beaucoup interviewé les acteurs aussi.
03:05 Les acteurs, ça vient…
03:07 Effectivement, au départ, les problématiques viennent des scénaristes,
03:11 des jeunes scénaristes qui ont ressorti les problématiques
03:13 qui leur paraissaient très importants aujourd'hui.
03:15 Et après, il y a eu effectivement tous les acteurs,
03:18 mais dans tous les pays différents aussi.
03:21 Ce qui est intéressant, ce n'était pas juste en France,
03:23 c'était comment tous les jeunes acteurs de différents pays…
03:27 - Avaient les mêmes problèmes. - Voilà, avaient les mêmes problèmes,
03:29 se regroupaient sur ces mêmes problématiques.
03:31 - C'était fou, c'était dingue. - Un gros bordel.
03:39 - Un bordel sympathique. - Mais très, très sympathique.
03:42 En fait, il y a eu quelque chose qui nous a beaucoup impressionné.
03:45 Donc, on a été trois réalisateurs avec Antoine Garceau et Lola.
03:48 On a fait le casting ensemble.
03:49 Et puis, quand on a choisi les gens de tous les pays d'Europe,
03:52 et même plus puisqu'il y a des Africains ou des Syriens,
03:56 quand on les a mis dans la même pièce, ils étaient plus de 20,
04:00 on a vu à quel point ça fabriquait une espèce d'effervescence
04:03 et d'enthousiasme qui était dingue.
04:06 Ensuite, il y a eu six mois de tournage.
04:09 Donc, pendant ces six mois, ils ont vécu en communauté.
04:11 L'Italienne, elle dit "J'ai fait mon Erasmus".
04:14 C'est-à-dire qu'elle a eu l'impression de vivre comme un étudiant Erasmus
04:18 quand il part à l'étranger et qu'il vit avec d'autres gens d'autres pays.
04:21 Il y a eu ça, il y a eu cette espèce de voyage que eux ont fait et qui a été très fort.
04:26 Et que nous, on a aussi fait.
04:27 C'est vrai que ce qui était sympathique, c'était qu'en dehors du plateau,
04:31 ou quoi du plateau ? Des acteurs et de l'histoire,
04:35 on vivait la même chose au sein de l'équipe, avec les Grecs,
04:39 avec les différentes personnes des différentes cultures sur le tournage.
04:42 Et que ça faisait une sorte de gros partage, de gros mélange
04:49 de tout ça qui était très sympathique et qui était nécessaire, je pense aussi,
04:54 à pouvoir faire exister ce qui se passait devant aussi.
04:58 Parce qu'on vivait pas avec le même âge, évidemment, on vivait pas ce qu'ils vivaient.
05:02 Mais ce mélange-là, il était important sur le tournage aussi.
05:07 Oui, j'étais étonné parce que je me suis dit qu'ils allaient peut-être être réticents
05:10 à ne plus être les personnages devant, mais à être les personnages clairement derrière.
05:14 Et en fait, Romain Duris, il a dit oui tout de suite.
05:17 Kelly Raleigh, elle a dit oui tout de suite. Cécile Defrance aussi.
05:19 Je crois que pour nous tous, et Kevin Bishop, même chose,
05:25 c'est tellement une histoire de notre vie
05:29 que ça dépasse le fait d'accepter de faire un film.
05:31 Je crois qu'après coup, ils n'auraient pas pu dire non.
05:35 En tout cas, Kelly Raleigh, qui était en train de faire Yellowstone aux États-Unis,
05:39 c'était compliqué pour elle d'accepter de faire ça, de venir en Europe
05:42 et de faire des allers-retours avec ce qu'elle faisait aux États-Unis.
05:46 En fait, son agent ne voulait pas qu'elle le fasse et elle a dit
05:50 "Je veux le faire parce que vous ne pouvez pas comprendre, moi, il faut que je le fasse."
05:53 C'est une histoire de vie, oui.
05:55 C'est une histoire de vie, oui.
05:57 C'est une histoire de vie, oui.
06:01 Maintenant, avec Romain, c'est 30 ans de notre vie.
06:05 On se connaît depuis le périle jeune qu'on a fait il y a 30 ans.
06:08 Et l'Auberge espagnole, c'est il y a 20 ans et c'est 20 ans de notre vie, vraiment.
06:11 Ce personnage de Xavier, on va le rencontrer régulièrement,
06:16 et lui et moi, à travers notre vie.
06:20 C'est une expérience de vie, vraiment.
06:22 [Musique]