Claire Hédon, défenseure des droits

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00:00 Et les 8h moins le quart, aujourd'hui et demain se déroule le festival "Me parle pas d'âge"
00:04 organisé par le conseil départemental de la Gironde, au Rocher de Palmeur à ce nom.
00:08 La défenseur des droits Claire Hédon participe ce matin à une table ronde sur le sujet "a-t-on
00:13 encore le droit d'être jeune ? La jeunesse est-elle discriminée ?" On lui pose la question ce matin,
00:19 Marie Roarch. Bonjour Claire Hédon. Bonjour. Avant de vous la poser cette question, peut-être un
00:23 petit rappel pour nos auditeurs sur votre rôle, qu'est-ce que c'est qu'être défenseur des droits ?
00:28 Oui tout à fait, c'est une institution qui est inscrite en fait dans la constitution,
00:31 donc qui lui donne du poids dans la réforme de 2008 et qui a deux missions principales. La
00:36 première c'est vraiment de traiter les réclamations qu'on reçoit de personnes qui considèrent qu'elles
00:40 ont des atteintes à leurs droits et promouvoir les droits et les libertés dans cinq domaines de
00:45 compétences que sont la lutte contre les discriminations, et c'est vraiment à ce titre-là
00:49 que j'interviens aujourd'hui, la protection des droits des enfants, la protection de l'orientation
00:54 des lanceurs d'alerte, nous sommes aussi l'organe externe de contrôle de la déontologie des forces
00:59 de sécurité, on en a pas mal parlé récemment, et le dernier point très important qui sont en fait
01:03 80% de nos réclamations, c'est les droits des usagers de services publics, c'est-à-dire en gros
01:07 vous avez des difficultés pour recevoir certaines aides, que ce soit les aides au logement, le RSA,
01:12 pour des remboursements de la caisse primaire d'assurance maladie, pour faire valoir vos droits
01:17 à la retraite, dans tous ces domaines des problèmes avec la préfecture. Et d'ailleurs,
01:21 les jeunes sur toutes ces aides sont massivement en non-recours. On a tout de suite été frappé du
01:27 fait qu'on peut dire qu'à peu près 50% des jeunes ne demandent pas des aides auxquelles
01:31 ils auraient droit, et moi c'est une des priorités de mon mandat d'essayer justement d'aller au plus
01:35 près des jeunes. - Vous les appelez aujourd'hui à faire appel à vous. - Oui, il ne faut pas hésiter,
01:39 il ne faut pas hésiter à essayer de se comprendre quels sont les droits auxquels on a accès. On sait
01:43 bien que les démarches administratives sont parfois compliquées, mais vraiment c'est important de
01:48 demander des aides, et entre autres par exemple pour les étudiants, les aides au logement. - Alors
01:51 justement, venons-en à cette question de la discrimination envers les jeunes, qui est la
01:55 raison pour laquelle vous êtes en Gironde aujourd'hui, et c'est une catégorie de la
01:58 population qui est particulièrement fragile à ce niveau-là. - Oui, on avait fait une enquête qu'on
02:02 fait tous les ans, d'ailleurs avec l'Organisation internationale du travail, il y a deux ans,
02:05 on l'orientait spécialement justement sur les jeunes. Et le chiffre qui nous a vraiment
02:10 impressionné, c'est que un jeune sur trois dit avoir été victime de discrimination dans les cinq
02:15 dernières années. En population générale, c'est un sur cinq. Donc une fréquence plus importante,
02:20 qui peut être liée à l'âge, à l'origine, au sexe, si c'est une femme par exemple, à l'orientation
02:26 sexuelle. Et là-dessus, l'autre chiffre important, c'est qu'ils sont massivement en non-recours,
02:31 c'est-à-dire que quatre jeunes sur dix disent n'avoir rien fait. Quand je dis rien fait,
02:35 c'est même pas aller devant une institution comme la nôtre, ou devant les tribunaux,
02:38 c'est même en parler à quelqu'un. Et donc, ce qui est effectivement, et ce n'est pas un reproche
02:42 que je fais aux jeunes de rien faire, c'est pas pour rien. C'est un manque de connaissance,
02:45 des recours. C'est un manque de connaissance, c'est une peur, une peur des représailles,
02:48 le côté "ça va servir à rien", je n'ai pas les preuves. Je sens bien qu'a priori j'ai été victime
02:52 de discrimination, mais je n'ai pas les preuves. Et ce que nous disons nous beaucoup, laisser nos
02:57 juristes faire le travail. Et donc entre autres, appeler la plateforme le 3928, vous aurez au
03:01 téléphone des personnes qui sont formées juridiquement, qui passeront le temps qu'il
03:05 faut. Pour une plateforme téléphonique, on a des écoutants qui passent trois quarts d'heure
03:08 au téléphone et qui vous diront "mais attendez, là peut-être qu'on a des éléments qui nous
03:12 permettraient de dire que c'est une discrimination et de pouvoir vous aider, entre autres par exemple,
03:16 de vous aider en médiation sur l'accès à un logement, sur l'accès à l'emploi". C'est
03:20 beaucoup, les jeunes le disent beaucoup, dans l'accès à l'emploi. - C'est des procédures
03:23 qui ne vont pas forcément loin en termes de justice, en termes de procédure administrative.
03:27 C'est de la médiation souvent. - On essaie majoritairement d'agir en médiation, ce n'est
03:30 pas toujours possible parce que la médiation, ça veut quand même dire que l'organisme mis en
03:33 cause, que ce soit le loueur ou que ce soit l'employeur, est d'accord pour une médiation,
03:39 donc reconnaît qu'il a a priori été dans un domaine de discrimination. - Il est 7h49 sur France
03:43 Bleu, Géron, notre invité Claire Hédon, défenseur des droits sur France Bleu, sur France 3, qui t'aime.
03:47 - Alors aujourd'hui, SOS Homophobie publie son rapport annuel avec un constat alarmant,
03:51 c'est l'association qui le dit, ce week-end, des footballeurs ont refusé de porter des
03:55 maillots arc-en-ciel dans le cadre d'un week-end de lutte contre l'homophobie. Est-ce que c'est
03:58 révélateur d'une société qui a du mal à avancer sur ces thématiques pour la défenseur des droits
04:03 que vous êtes ? - D'abord, c'est important de rappeler que l'homophobie est un délit,
04:05 c'est pas une opinion, c'est un délit, donc c'est important de le rappeler. Ce que j'observe,
04:10 nous, c'est encore des discriminations fortes des personnes suivant leur orientation sexuelle. Oui,
04:16 nous avons régulièrement des situations, je pense à deux personnes qui étaient employées dans la
04:21 grande distribution et qui, d'un seul coup, quand l'employeur découvre qu'ils vivent ensemble,
04:24 les met sur des horaires totalement différents, incompatibles avec la vie privée. Voilà ce genre
04:29 d'histoire qu'on a. Il faut comprendre que c'est discrimination. La discrimination, c'est vraiment
04:35 une différence de traitement dans un des domaines prévus par la loi, l'emploi, l'accès aux biens et
04:39 services, et dans un des critères, et justement l'orientation sexuelle est un des critères. Il
04:44 faut comprendre à quel point c'est délétère pour les personnes. C'est une perte de confiance en soi.
04:49 Ça a un impact à la fois sur la santé physique, psychique. Dans l'enquête qu'on a menée sur les
04:54 jeunes, ça a évidemment un impact sur leur carrière professionnelle après, en perte de
04:58 confiance en soi. Et évidemment, ça ronde complètement un de nos grands principes
05:03 républicains qui est l'égalité. C'est écrit sur les frontons de nos mairies,
05:07 liberté, égalité, fraternité, et l'égalité, c'est justement une égalité de traitement.
05:11 Donc c'est vraiment important de dire et de continuer à dire que oui, il y a de la discrimination
05:17 qui existe encore aujourd'hui sur l'orientation sexuelle et SOS homophobie, avec le travail qu'ils
05:21 font aujourd'hui, justement le rappel et c'est important d'en parler.
05:25 Dans un tout autre domaine, Claire Hédon, le Conseil d'État se penche aujourd'hui sur le recours
05:30 d'une association contre le recours aux drones pour surveiller les manifestations. Vous l'avez
05:34 dit, les forces de l'ordre, en tout cas les procédures des forces de l'ordre, ça fait
05:38 partie de vos motifs de saisine. Est-ce que ça vous inquiète ce recours aux drones ? Est-ce que
05:43 vous pouvez être saisie de ce genre de choses également ?
05:44 On peut tout à fait être saisie de ce genre de situations. Ce qui est important de rappeler,
05:48 c'est que la liberté de manifester est un des grands principes de notre démocratie. Et donc
05:53 c'est cette liberté de manifester qu'il faut absolument préserver. Et d'ailleurs, dans le
05:58 maintien de l'ordre, le premier objectif du maintien de l'ordre dans une manifestation,
06:02 c'est de préserver cette liberté de manifester et donc préserver l'intégrité physique à la
06:06 fois des manifestants, mais aussi des forces de l'ordre qui les protègent. Donc c'est absolument
06:10 un. Évidemment, l'inquiétude qu'on peut avoir sur les drones, c'est cette question de la liberté
06:14 de manifester. C'est-à-dire, est-ce que je vais être surveillée, repérée, parce que je fais
06:18 telle manifestation, parce que je participe à telle manifestation ? Et donc oui, on peut avoir
06:22 des inquiétudes sur le fait, entre guillemets, de risquer d'être fichée et repérée pour certaines
06:27 manifestations. Et donc le côté anonyme quand on manifeste, c'est absolument indispensable. Et
06:32 vraiment, ce qu'il faut vraiment comprendre, c'est que cette liberté de manifester, c'est un
06:35 défendement de la démocratie. - Merci beaucoup, Claire Hédon, défenseur des droits. - Et le 3928,
06:40 si vous êtes victime de discrimination, n'hésitez pas à composer ce numéro. Merci beaucoup Claire
06:45 Hédon d'avoir été avec nous aujourd'hui.

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