Jean-François Di Meglio: "On peut dérisquer la Chine, c'est-à-dire qu'on peut diluer la dépendance vis-à-vis de la Chine, mais on ne peut pas découpler"

  • l’année dernière
Jean-François Di Meglio, président d'Asia Centre, est l'invité de Good morning business en direct depuis Taïwan. 
Transcript
00:00 Si on sent que ces positions par rapport à la Chine vont être au cœur du G7,
00:04 on essaie aussi de diminuer la dépendance par rapport à ce pays,
00:07 de construire de nouvelles routes d'approvisionnement.
00:09 Vous pensez que là, tous les partenaires du G7 vont trouver plus d'accord,
00:13 vont être peut-être plus en phase que vis-à-vis de la position pure face à la Chine ?
00:18 Oui, là encore, il faut être réaliste.
00:20 C'est-à-dire qu'on peut dérisquer la Chine,
00:24 c'est-à-dire qu'on peut diluer la dépendance vis-à-vis de la Chine,
00:28 mais on ne peut pas découpler.
00:30 C'est le grand débat, entre autres,
00:32 que le président Macron a eu avec Ursula von der Leyen.
00:36 On a aujourd'hui, que ce soit les États-Unis, que ce soit l'Europe,
00:40 ce qu'on pourrait appeler une réelle dépendance,
00:42 en tout cas une interconnection extrêmement forte.
00:45 Donc, quelles que soient les directions qui sont lancées par le G7,
00:48 ce sont certainement des directions qui sont, on va dire brutalement, anti-Chine,
00:53 du fait des positions aussi qui sont prises par la Chine dans le risque de conflit
00:59 dans cette région du monde où je me trouve précisément.
01:02 Du fait de la position dure qui est prise par la Chine,
01:05 il est nécessaire naturellement de dérisquer.
01:07 On ne peut pas rester en risque plein vis-à-vis de la Chine en termes de chaîne de valeur.
01:13 Néanmoins, on ne peut pas totalement découpler.
01:16 Il faudrait des efforts, il faudrait des investissements,
01:18 il faudrait prendre d'autres risques qui sont aujourd'hui extrêmement difficiles à prendre.
01:22 – Jean-François de Miglio, on a pris quelques minutes cet accord
01:25 sur les négociations commerciales entre justement Taïwan et les États-Unis.
01:30 Sans doute le prélude à un accord commercial, un accord de libre-échange.
01:35 Est-ce qu'à un moment donné, c'est peut-être très naïf comme question
01:39 et c'est peut-être pas très courageux,
01:40 mais est-ce que là on n'est pas en train d'excéder les Chinois ?
01:44 Et est-ce que quelque part, il n'y a pas un risque de susciter l'envie de la Chine d'en découdre ?
01:53 – La question est à la fois simple et compliquée,
01:58 si vous voulez qu'on parle comme le capitaine Haddock.
02:00 C'est-à-dire qu'elle est compliquée parce qu'il n'y a pas de situation noire et blanche.
02:06 Il ne s'agit pas de faire attention à irriter la Chine,
02:09 les interconnexions entre Taïwan et la Chine elles-mêmes sont très fortes.
02:13 Et c'est d'ailleurs l'une des protections en faveur de Taïwan,
02:17 c'est que la Chine est tellement dépendante de Taïwan
02:20 qu'aujourd'hui un clash, quelque chose de violent
02:25 est quelque chose que l'on ne peut envisager qu'avec énormément de prudence.
02:29 Et donc il faut que nous, Occidentaux, nous prenions conscience de ça.
02:33 Faire quelque chose en faveur de Taïwan,
02:35 comme les États-Unis ont très bien fait de le faire
02:37 avec ce geste qui était attendu depuis très longtemps,
02:41 d'une part, et c'est la partie simple de l'affaire,
02:44 montre à quel point cet endroit du monde est important pour nous,
02:47 et ça c'est simple, il faut le faire,
02:49 mais c'est aussi compliqué parce qu'on n'irrite pas la Chine si on fait ça,
02:55 parce que la Chine a aussi intérêt à ce qu'il y ait une certaine prospérité à Taïwan
02:59 et qu'il y ait une certaine présence, une empreinte de Taïwan dans le monde.
03:05 Les interconnexions sont très fortes et il ne faut pas raisonner
03:09 en termes aussi simples que si on fait ça, on va irriter la Chine.
03:12 La Chine sait parfaitement aussi où est son intérêt,
03:15 il est dans de bonnes relations avec l'Occident
03:18 et c'est effectivement ce que l'on peut observer dans les derniers mois,
03:21 dans le retournement de position d'un certain nombre de dirigeants chinois,
03:25 et aussi, on peut dire, la cour qui a été faite au président Xi
03:29 lorsqu'il est venu en Chine.
03:30 Ce n'est pas par hasard, c'est bien sûr parce que la Chine a besoin d'alliés,
03:34 ou en tout cas d'appuis,
03:36 qui n'ont pas d'allié probablement, mais d'appui et de soutien international en Europe.

Recommandée