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00:00 Survivant du génocide arménien, apatride, militant communiste et poète,
00:04 le héros de la résistance, Misak Manouchian, célébré par Aragon et Léo Ferré,
00:09 incarne la contribution des étrangers dans la lutte contre l'occupant nazi.
00:13 Misak Manouchian naît en 1906 à Adiyaman, au sein de l'Empire Ottoman.
00:18 A 9 ans, il perd ses parents durant le génocide des Arméniens perpétré entre 1915 et 1916.
00:24 En fuite avec son frère, il rejoint la France en 1925 après être passé par un orphelinat au Liban.
00:30 Menuisier puis ouvrier à Citroën lorsqu'il arrive à Paris, il aide son frère malade qui meurt en 1927.
00:36 Il suit des cours à la Sorbonne et montre sa passion pour la poésie en écrivant pour Tchank,
00:41 une revue écrite en arménien.
00:43 Il y propose des traductions de poèmes célèbres ainsi que ses propres créations.
00:47 Quant à ses convictions politiques, elles se construisent
00:50 avec les références du pays qu'il accueille, c'est à dire les références à la révolution française,
00:57 aux Lumières, qui vont le marquer tout au long de son engagement, jusqu'à sa mort.
01:00 A partir de 1934, cet engagement se développe au sein du Parti Communiste Français
01:05 et du Comité de secours pour l'Arménie.
01:07 Il a été manifestement très rapidement sensible aux dangers fascistes,
01:13 dangers nazis et son premier vrai engagement politique est de 1934-1935.
01:21 C'est au moment où se fait une mobilisation antifasciste après l'accession au pouvoir d'Hitler
01:26 et alors qu'il y a Mussolini en Italie bien sûr depuis le début des années 1920.
01:29 A partir de là, il va s'engager dans l'immigration arménienne.
01:32 Il soutient aussi les républicains espagnols et dirige un journal hebdomadaire,
01:36 le Zangou, rédigé en Arménie.
01:38 Il s'engage dans la main d'œuvre immigrée, un organe syndical du PCF
01:42 servant de vecteur d'intégration face à la xénophobie des années 1930.
01:46 Au début de la guerre, il est mobilisé jusqu'à la défaite de la France.
01:50 Durant l'occupation allemande, il rentre dans la lutte clandestine avec ses camarades de la MOI.
01:55 Il rejoint le groupe de lutte armée d'un autre mouvement du PCF,
01:59 les Francs-Tireurs Partisans,
02:00 devenant ainsi la FTP MOI parisienne qui se fera appeler le groupe Manouchian.
02:05 En 1943, plusieurs dizaines d'attentats sont orchestrés par le groupe.
02:09 Leur résistance entraîne une véritable traque par la police française,
02:13 une filature méticuleusement organisée se solde par l'arrestation de Missak
02:17 et d'autres membres du groupe en novembre 1943.
02:20 Manouchian et 21 d'entre eux sont torturés,
02:23 aucun ne parle afin de protéger leurs camarades,
02:26 dont Méliné Manouchian, l'épouse de Missak.
02:28 Il aimait beaucoup tous ses camarades et tous ses camarades le respectaient.
02:34 Ils sont fusillés le 21 février 1944 au Mont-Valérien,
02:38 une colline où sont exécutés plus d'un millier de résistants et otages pendant l'occupation.
02:42 S'ensuit une campagne de propagande orchestrée par les nazis, discréditant le groupe.
02:47 Celles sont les œuvres de terroristes étrangers et presque tous juifs.
02:51 Arméniens,
02:52 juifs polonais,
02:54 espagnols rouges,
02:56 juifs polonais,
02:57 encore un juif polonais.
02:59 Des tracts soulignant leur statut d'étranger ou de juif sont distribués,
03:02 puis une affiche rouge les qualifiant d'armées du crime et placardées dans les rues.
03:06 Manouchian, lui, est représenté comme le chef de bande des terroristes étrangers.
03:10 Mais l'affiche n'a pas l'effet escompté.
03:12 Dans les faits, tous les rapports de police,
03:15 les rapports du préfet, les rapports des renseignements généraux en particulier,
03:20 nous montrent finalement que ça s'inverse.
03:22 Ils ont voulu faire de ces combattants des terroristes,
03:27 ils en ont fait des héros.
03:29 Ils les ont présentés comme le fer de lance de la résistance en France.
03:33 La mémoire du groupe est ravivée par Louis Aragon,
03:36 qui lui consacre un poème en 1955,
03:39 strophe pour se souvenir,
03:41 inspiré de la dernière lettre de Missach
03:43 adressée à Méliné le jour de sa mort.
03:45 C'est ce poème que chante Léo Ferré dans l'affiche rouge en 1961,
03:49 plaçant définitivement Manouchian parmi les figures reconnues de la résistance.
03:53 Ils étaient 23 quand les fusils fleurirent.
03:58 Est-il un héros qui pourrait entrer au Panthéon
04:01 dans la lignée de Jean Moulin et de Josephine Baker ?
04:03 Si certains se félicitent de voir un résistant étranger rejoindre la nécropole,
04:07 d'autres y voient une récupération par l'État français
04:10 d'un militant mort moins par patriotisme que pour un idéal, la liberté.
04:15 Mais au-delà des convictions politiques,
04:17 certains estiment que tous les membres de la FTP-MOI
04:20 devraient l'accompagner dans cet hommage.
04:21 Les soutiens à cette panthéonisation le voient d'un autre oeil.
04:24 Une étape nouvelle dans la centralité de ce personnage
04:28 comme symbolisant la résistance des étrangers,
04:31 parce que derrière, c'est toute la résistance étrangère,
04:34 tous les résistants étrangers en France qui rentrent au Panthéon avec lui.
04:38 [Musique]