7 MINUTES POUR COMPRENDRE - Kenzo, 8 ans, agressé par des supporters

  • l’année dernière
Le "7 minutes pour comprendre" revient sur les violences entre les supporters lors du match entre Ajaccio et l'OM ce samedi. Un jeune garçon de 8 ans, atteint d'un cancer du cerveau, avait été agressé par des supporters corses alors qu'il avait été invité à voir le match. 
Transcript
00:00 8h20, retour sur le plateau de première édition, comme chaque matin, le 7 minutes pour comprendre pourquoi ce matin, les stades, enfin disons certains stades, paraissent devenus des exutoires.
00:09 On en parle avec Raphaël Bross, journaliste à SoFoot. Bonjour Raphaël, merci d'être là. Daniel Riolo, journaliste RMC Sport et auteur de KO Football Club, paru aux éditions UgoSport.
00:24 Merci Daniel d'être avec nous parce qu'on a touché le fond en fait ce week-end. Alors le week-end, il a commencé vendredi très tôt avec d'abord Bordeaux, l'arrêt du match au bout de 20 minutes,
00:35 quand un pseudo supporter des Girondins entre sur la pelouse pour frapper l'auteur du but de Rodez. C'était un match essentiel pour la remontée en Ligue 1 des Girondins.
00:43 Le match a été arrêté et la commission de discipline se réunit cet après-midi pour décider de ce qui va se passer maintenant.
00:49 Et puis ensuite, on a vraiment touché le fond du fond à Ajaccio samedi soir. Antoine Forestier, vous étiez dans le stade d'Ajaccio. Ajaccio Marseille, c'était le match.
00:58 Et ce qu'on retient, c'est le visage de ce petit garçon, Kenzo, 8 ans, pris à partie, agressé par des supporters corse. Racontez-nous ce qui s'est passé d'abord.
01:10 Oui, on va vous expliquer le contexte. Petit enfant de 8 ans atteint d'un cancer du cerveau. Il est fan de l'Olympique de Marseille. Il était déjà en Corse il y a un mois, invité par des associations avec d'autres enfants malades.
01:19 Et comme il était supporter de l'Olympique de Marseille, il a été invité de nouveau à assister à ce match. Lorsqu'il arrive au stade, ses parents sont bien conscients du contexte tendu entre les supporters marseillais et ajacciens.
01:28 Il a d'ailleurs des tensions qui sont en train de naître aux abords du stade lorsque les supporters marseillais sont en train de rentrer dans le stade François Cotti.
01:34 À ce moment-là, il est habillé "normalement". Une fois entré dans cette loge dans laquelle il avait eu des places, sa maman l'autorise à porter son maillot de l'Olympique de Marseille.
01:42 Il est repéré avec son père par des supporters de l'AC Ajaccio qui ensuite s'introduisent dans cette loge. Ils arrivent à l'intérieur, il leur demande de retirer les maillots.
01:51 Il bouscule le petit Kenzo, il frappe le père de Kenzo à plusieurs reprises, retire leur maillot, ressort de la loge et brûle ses maillots.
01:58 Le petit Kenzo a ensuite pu, à la fin du match, retrouver ses joueurs préférés et prendre notamment une photo avec Matteo Gendouzi.
02:04 Je vous propose d'écouter son témoignage recueilli par Élise Breto.
02:07 Ils me sont montés tout là-haut, parce qu'on était là. Ils ont pris nos maillots et ils nous ont brûlés.
02:18 Et en passage, ils ont poussé Kenzo qui a tapé la tête sur la barre du siège et ont mis deux coups de poing dans le visage à papa.
02:27 T'as eu peur Kenzo ?
02:30 Oui.
02:32 Quelques heures à peine après le coup de sifflet final, l'AC Ajaccio a publié un communiqué dans lequel il indiquait qu'il comptait déposer plainte contre les supporters qui avaient fait ça.
02:42 Depuis, les images de vidéosurveillance ont été visionnées. Quatre individus sont repérés sur ces images, images transmises à la justice.
02:48 Le parquet d'Ajaccio a ouvert une enquête pour violences en réunion.
02:50 Et en parallèle, une deuxième enquête est ouverte. Un peu plus tard, alors que nous aussi, nous étions en train de filmer les supporters de l'OM qui quittaient le stade pour regagner leur hôtel,
02:59 un confrère de France 3, un journaliste-reporteur d'images, a été agressé par une centaine de supporters marseillais cette fois-ci.
03:04 Alors qu'ils étaient en train de les filmer à une station-service. Ils ont cassé sa caméra, ils ont volé ses cartes mémoires.
03:09 Il a été également frappé, choqué. Il a été transporté à l'hôpital. Désormais, il va mieux.
03:13 Mais là, il y a une personne qui a été placée en garde à vue. Il y a une enquête, cette fois-ci, ouverte pour violences aggravées.
03:20 Daniel, vous suivez ce monde du foot depuis tant d'années. Daniel, comment peut-on en arriver à un tel niveau de connerie ?
03:27 Le seul point commun qu'il y a entre les différents endroits où se sont passés les choses, c'est la sauvagerie, véritablement.
03:35 Et ce qui s'est passé autour de ce petit garçon, alors là, ça dépasse l'entendement.
03:38 Des bagarres dans les stades, on en avait vu, entre supporters.
03:43 Les ultras qui disaient que, justement, ils avaient, même dans leur bêtise, une forme de code d'honneur à ne pas s'en prendre à des enfants ou à des femmes,
03:52 ou à rester dans une connerie circonstruite, à un affrontement entre eux. Là, on est allé au-delà de tout.
04:01 La passion ne peut pas faire sauter la barrière de l'enfance et de l'innocence.
04:06 Visiblement, si. On a cette rivalité avec pas mal d'antécédents entre les supporters corse, qu'ils soient ajacchiens ou bastiens, et les marseillais.
04:15 Un règlement de compte qui était attendu puisque, depuis 3-4 jours, nous, dans la rédaction à RMC, on a des spécialistes,
04:24 et notamment un du supporterisme bastien-corse, qui disait "il va se passer des choses, ça va péter à Marseille".
04:31 Visiblement, nous on le savait, mais d'autres ne le savaient pas, ou en tout cas n'ont pas voulu organiser.
04:35 Le maire le savait, puisqu'il avait demandé l'interdiction, et qu'il le préfère refuser.
04:38 Voilà, donc il n'y a pas eu d'interdiction de déplacement, parce qu'en règle générale, quand on demande une interdiction des déplacements des supporters,
04:45 c'est plutôt mal vu, libre circulation, on ne va pas tout casser, ne vous inquiétez pas, allez, on y va, on laisse faire.
04:53 À l'arrivée, regardez ce qui s'est passé. Et effectivement, moi, je n'arrive pas à expliquer ce qui s'est passé.
04:59 Le saccage de la station-service, c'est du déjà-vu. Le journaliste agressé, on a déjà vu ce genre de choses-là.
05:07 L'enfant, dans une tribune, avec son père, avec sa famille, les supporters montent,
05:13 supporters, je n'ai même pas envie de les appeler comme ça, des sauvages, quoi,
05:16 qui montent et qui l'agressent, qui lui enlèvent son maillot, qui le font brûler, ça, j'avais jamais entendu parler d'une histoire pareille.
05:22 Là, je pense qu'on a atteint un point assez fou, et effectivement, moi, j'attends réellement,
05:29 parce que tous les stades de Ligue 1 sont équipés de caméras. On doit pouvoir identifier,
05:34 en plus, c'est dans la règle, dans la charte de la LFP, un fauteur de trouble dans un stade,
05:40 il doit être identifié en cinq minutes.
05:43 Raphaël, est-ce qu'il faut interdire le déplacement sur les matchs à haut risque,
05:47 systématiser l'interdiction des déplacements de certains supporters ?
05:50 C'est difficile d'être aussi catégorique. Il faut savoir, bien sûr, évaluer les risques.
05:55 Là, en l'occurrence, il y en avait, et le problème, c'est qu'il y a eu les supporters marseillais
05:59 qui se sont déplacés, ceux qui avaient leur billet, et ceux aussi qui n'en avaient pas,
06:02 qui étaient venus uniquement pour essayer de créer du désordre et potentiellement de forcer l'entrée dans le stade également.
06:08 Ça a aussi suscité beaucoup de confusion autour de ce match.
06:11 Maintenant, les préfets prennent déjà beaucoup d'arrêtés pour restreindre les déplacements, voire les interdire.
06:18 Ça allait mieux cette saison, j'ai envie de dire, par rapport à la saison précédente,
06:22 où il y a eu énormément de débordements. C'était la première saison post-Covid.
06:25 Il y a eu beaucoup de matchs qui ont été arrêtés pour des jets de projectiles, de fumigènes,
06:29 des intrusions de spectateurs sur le terrain. Là, ça allait un peu mieux, cette saison.
06:32 Et là, ce week-end a été vraiment un coup de cœur.
06:34 Mais est-ce que les supporters, quand ils sont identifiés, pseudo supporters,
06:37 ils sont sanctionnés, et ils sont sanctionnés de façon suffisamment sévère ?
06:41 C'est là le problème, toute la limite. C'est-à-dire que la commission de discipline de la LFP, par exemple,
06:45 elle est compétente pour donner des sanctions collectives,
06:48 que ce soit des huit clous partiels, huit clous totaux, des retraits de points, par exemple,
06:51 ce qui devrait arriver à Bordeaux. Mais pour les sanctions individuelles, c'est plus compliqué.
06:55 Il peut y avoir des interdictions de stade, mais là, c'est à la justice de prendre le relais.
06:58 Le président d'Ajaccio a promis d'interdire à vie de stade les personnes qui s'en sont prises à Kenzo.
07:04 Mais lui ne pourra pas le faire.
07:05 Non, il n'a pas la compétence.
07:06 C'est la justice qui aura la compétence pour procéder à ces interdictions de stade,
07:11 qui en France ne dépasse pas cinq ans. Et encore, même cinq ans, c'est difficile.
07:15 Ce que font les Anglais dans ce domaine, c'est beaucoup plus fort.
07:19 Vous allez pointer le jour du match dans un commissariat à 200 km de chez vous,
07:24 je peux vous assurer que c'est très contraignant, très, très contraignant.
07:27 Vous n'avez plus envie de faire le con dans un stade après.
07:29 Daniel, mais il n'y a pas un problème de sécurité dans le stade ?
07:31 Parce que quand même, pouvoir s'introduire dans une loge...
07:34 L'année dernière, quand il y a eu les incidents auxquels faisait référence Raphaël,
07:39 ce qu'on avait beaucoup pointé du doigt, ce qui avait été dit notamment
07:42 autour des incidents à Nice, à Lyon, c'est que nous avons en France...
07:46 Et d'ailleurs, je me souviens parce que déjà à l'époque, on parlait de la crainte
07:50 de ce qui pouvait arriver lors des JO.
07:52 Donc je reviens en arrière. Quel était le problème qu'on pointait ?
07:55 C'était la difficulté à recruter des gens qui travaillent dans le service de sécurité.
08:02 On a de plus en plus de mal en France à avoir des services de sécurité performants
08:06 dans les stades, tout simplement parce qu'il n'y a pas le nombre et les compétences.
08:10 On en forme à la va-vite. Parfois, il y a des formations qui se font en 15 jours.
08:15 C'est impossible. C'est un vrai métier d'assurer la sécurité dans un stade.
08:18 Oui, d'ailleurs, il y a le même problème pour les Jeux olympiques
08:20 de recrutement des vigiles des Jeux olympiques.
08:22 Exactement. Et c'est pour ça que déjà, on s'inquiétait pour les JO 2024.
08:25 Bon, une arrestation à Bordeaux, on l'a vu. Le type sera jugé au mois de novembre.
08:30 Et puis un coup dur pour les Girondins parce que...
08:32 On attend. On attend la commission de discipline.
08:35 On attend aussi les arrestations.
08:36 Il y a Anne Cirodès et Bordeaux qui attendent cet après-midi.
08:39 L'ensauvagement de la société, vous en parlez tous les matins en actualité.
08:42 On le retrouve dans le foot et ça me paraît malheureusement logique.
08:45 C'est un reflet.

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