• il y a 3 ans
« Ceci est notre post-partum » | Interview d'Illana Weizman

À l'occasion de la sortie de son livre « Ceci est notre post-partum », nous avons eu la chance de rencontrer Illana Weizman, militante féministe qui décortique les mythes et les tabous autour de la période du post-partum.

Retrouvez-là ici :
- Son livre : https://www.marabout.com/ceci-est-notre-post-partum-9782501154055
- Sa page FB : https://www.facebook.com/illana.attali
- Sa page IG : https://www.instagram.com/illanaweizman/
- Sa page Twitter : https://twitter.com/IllanaWeizman

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Transcription
00:00 Je reste persuadée qu'informer les femmes en amont, avant l'accouchement, avant le postpartum,
00:06 aura une incidence positive pour faire baisser les chiffres des dépressions postpartum.
00:10 Bonjour, je suis Ilana Weizmann, militante féministe et autrice de "Ceci est notre postpartum",
00:24 sortie le 20 janvier 2021 aux éditions Marabout.
00:27 Le postpartum, c'est la période qui suit un accouchement.
00:32 Donc en termes de changement identitaire, c'est l'entrée dans la maternité,
00:37 l'entrée dans cette identité, dans ce rôle de mère qui est assertie d'un tas d'injonctions,
00:43 d'un tas d'attentes sociétales.
00:45 C'est une espèce de transition vers un statut nouveau.
00:48 Quand on devient mère, on est dans une espèce de chaos identitaire
00:52 et malheureusement, on a beaucoup trop de pression et beaucoup de charge sur les épaules
00:56 pour le faire de façon sereine.
00:58 On a tout d'abord sur le plan physique,
01:06 principalement les pertes de sang qui s'appellent les loci,
01:09 qui surviennent après l'accouchement parce que le placenta s'est détaché de la paroithérine
01:14 et va laisser une plaie ouverte, dont du sang va s'écouler pendant de longues semaines pour certaines femmes.
01:20 Dans mon cas, ça a duré six semaines, pour d'autres, ça va durer deux semaines, ça dépend des femmes.
01:24 Il va y avoir les tranchées, qui sont les contractions post-accouchement,
01:28 puisque une fois le bébé expulsé, on va avoir un temps où l'utérus va être encore largement étendu,
01:35 encore une taille qui n'est pas sa taille initiale,
01:37 et il va se contracter doucement, doucement pour retrouver sa taille initiale.
01:41 On va avoir des petits désagréments de type hémorroïde, incontinence urinaire, perte de cheveux,
01:47 tout un panel de désagréments physiques plus ou moins anodins, mais en tout cas dont il faut avoir conscience
01:53 avant de le vivre, pour mieux le vivre justement.
01:57 L'inconfort périnéal, on peut avoir une épisiotomie, on peut avoir des déchirures,
02:01 donc toute la zone du périnée qui a été mise à mal pendant et la grossesse et l'accouchement.
02:05 Concernant les maux d'ordre psychologique, on a tout un spectre.
02:09 Le postpartum va revêtir des réalités psychologiques
02:14 qui peuvent passer par la chute d'hormones au début, qu'on appelle le "baby blues",
02:17 le burn-out parental, le burn-out maternel qui peut intervenir dans les premières années de la vie de l'enfant ou plus tard,
02:22 le syndrome de stress post-traumatique qui arrive pour 5% des femmes après un accouchement,
02:27 la dépression postpartum qui, je le rappelle, touche une femme sur cinq, ce qui est énorme,
02:32 sachant que c'est probablement sous-diagnostiqué.
02:34 Voilà, ça devrait être à peu près tout pour les symptômes principaux et c'est déjà pas mal.
02:38 Je reste persuadée qu'informer les femmes en amont, avant l'accouchement, avant le postpartum,
02:44 les informer de ce qui peut se produire, les accompagner beaucoup mieux,
02:48 de façon beaucoup plus proximale pendant que ça se produit, peut avoir une incidence,
02:53 aura une incidence positive pour faire baisser les chiffres des dépressions postpartum,
02:57 pour faire baisser les chiffres et les émotions de difficultés maternelles.
03:02 Ça va aussi avec plein de changements structurels et sociaux,
03:04 un congé co-parent conséquent où le père ou la conjointe, le deuxième parent,
03:08 soit avec la mère pour partager ces tâches-là.
03:11 Et ça aura une influence directe sur la santé mentale des femmes, des mères.
03:14 [Musique]
03:18 Malheureusement, de façon assez triste finalement, on s'est rendu compte au moment du lancement du hashtag
03:23 et je me rends compte aujourd'hui que ce sont les mêmes discours qui reviennent au moment de la sortie de mon livre.
03:28 Ce sont des réactions très virulentes, très agressives, souvent de mères.
03:33 "Vous êtes indignes, nos mères, nos grands-mères, ne parlez pas de ça, c'est des choses qui sont intimes
03:38 et puis d'abord il faut serrer les dents, on est des femmes, on est fortes."
03:40 Et ce que je dis c'est que non, la souffrance n'est pas normale,
03:43 la souffrance doit être accompagnée, doit être entendue.
03:46 Et j'en ai assez de l'essentialisation des femmes et de cette espèce d'idée que parce qu'on est des femmes,
03:50 parce qu'on est des mères, souffrir est normal et puis finalement on ne devrait pas s'en plaindre.
03:54 Non, on a le droit de se plaindre, on a le droit de demander de l'aide, on a le droit d'être accompagné.
03:57 [Musique]
04:02 Comme action concrète pour aborter des premiers changements,
04:05 je pense déjà à la prise de parole, demander de l'aide quand on souffre,
04:08 quand on sent qu'il y a des signaux avant-coureurs et ne pas attendre de tomber en dépression totalement,
04:14 d'être complètement submergée avant de chercher de l'aide auprès de ses proches,
04:19 auprès des professionnels de santé.
04:20 Ensuite, la responsabilité elle est politique principalement,
04:24 on a besoin de réformes de santé dans la santé publique,
04:28 on a besoin d'informations en amont, on a besoin d'une préparation post-partum
04:32 comme on a une préparation à l'accouchement par exemple.
04:35 On a besoin, une fois sortie de la maternité, d'un suivi qui soit proximal à 360 degrés, pluridisciplinaire.
04:42 Que ce soit simple de contacter les professionnels de santé, que ce soit simple de trouver de l'aide,
04:46 ce n'est pas le cas aujourd'hui.
04:47 Aujourd'hui, on est quand même largement lâchés dans le vide,
04:50 c'est ce qui revenait beaucoup au niveau des témoignages,
04:53 ce sentiment d'isolement que les mères ressentent.
04:55 On a besoin d'un congé co-parent qui soit important,
04:59 qui soit de durée égale à celui de la mère,
05:01 qui soit remboursé à la même hauteur que celui de la mère,
05:04 qui soit bien remboursé pour qu'il soit incitatif pour les co-parents.
05:08 À partir de là, on pourra partager la charge parentale
05:11 et du coup que ça pèse moins sur le mental et le physique des mères.
05:17 Et puis bien sûr, ça a une incidence sur leurs évolutions de carrière,
05:20 ça a une incidence sur leur évolution salariale,
05:23 sur, voilà, il y a tout un tas de disparités économiques et sociales
05:26 qui se mettent en place à partir du moment où les femmes deviennent mères
05:29 et ça, c'est intolérable.
05:31 [Musique]

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