Le tunnel Lyon-Turin, nouvelle ligne de front pour les activistes écologistes

LeHuffPost

Ils sont prêts à stopper un chantier pharaonique. Samedi 17 juin, environ 3000 personnes ont manifesté dans la vallée de la Maurienne, en Savoie, contre la construction de la ligne grande vitesse Lyon-Turin, un projet ferroviaire chiffré à près de 30 milliards d’euros qui ne fait pourtant pas rêver certains militants écologistes.  Comme vous pouvez le voir dans notre reportage vidéo en tête d’article, Le HuffPost a suivi sur le terrain ce weekend de mobilisation, qui a donné lieu à des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre en fin de journée, samedi. À notre micro, opposants et soutiens de ce projet particulièrement complexe, lancé il y a une trentaine d’années, détaillent leurs arguments.

Transcript

00:00 Le plus long tunnel du monde commence ici.

00:03 Dans la vallée de la Maurienne, on creuse à travers les Alpes jour et nuit

00:06 pour raccourcir le trajet en train entre la France et l'Italie.

00:09 Cette galerie de 57,5 km est la pièce maîtresse du projet Lyon-Turin.

00:14 Cette ligne ferroviaire permettra de gagner d'ici une dizaine d'années

00:18 deux heures entre les deux villes.

00:20 Mais ce projet pharaonique ne fait pas rêver tout le monde.

00:22 Ce week-end, des activistes inspirés par la lutte contre les bassines

00:26 manifestent contre ce chantier qu'ils jugent inutile et mégalomane.

00:30 Il y a deux jours de cela, les partisans du Lyon-Turin se sont réunis.

00:35 Ils étaient seulement 100 et nous sommes des milliers et des milliers

00:39 à dire que nous voulons la réinédiation de ce projet inutile.

00:43 Ce n'est pas tous les jours qu'on voit les écologistes manifester

00:46 contre un projet ferroviaire.

00:47 Le train est de loin le moyen de transport le moins polluant pour voyager.

00:51 Mais ces activistes considèrent tout de même que ce projet

00:54 est contre-productif pour l'environnement.

00:56 Ce n'est pas surprenant de voir les écologistes s'opposer à un projet ferroviaire ?

00:58 Complètement oui.

01:00 Mais ce n'est pas n'importe quel projet.

01:02 Là, c'est un projet qui est complètement démesuré, qui est d'une autre époque.

01:05 Moi j'habite juste au-dessus du chantier du Bourget.

01:08 Ce que je vois, c'est le carnage qu'ils ont fait, la déforestation,

01:12 ces amas de terre qui sont en train de sortir.

01:14 Ce qui nous fend le cœur, c'est de voir cette transformation des paysages

01:18 et de voir qu'ils sont en train d'assécher aussi nos nappes phréatiques.

01:22 Selon un rapport publié par la Commission européenne,

01:24 l'eau drainée par les tunnels du projet est considérable,

01:27 comparable à l'alimentation en eau d'une ville d'un million d'habitants.

01:30 Cela influencera le cycle de l'eau.

01:32 Il pourrait avoir des conséquences pour les agriculteurs

01:35 et les particuliers en amont du tunnel.

01:37 Depuis le début du chantier, certaines communes

01:39 ont même vu des sources d'eau se tarir.

01:41 [Musique]

01:57 Ce ne sont pas forcément les gaz d'échappement qui nous asphyxient,

02:00 c'est tout ce qui est micro-particules.

02:02 Et c'est quand les camions freinent,

02:04 les plaquettes de frein, les tambours de frein,

02:07 les pneus qui se désagrègent,

02:08 c'est tout ce qui est le roulement en fait.

02:11 Le principal argument en faveur du projet, il est là-haut.

02:14 La vallée de la Maurienne, comme d'autres endroits dans les Alpes,

02:17 est très polluée par le trafic routier.

02:19 Or, le projet Lyon-Turin inclut aussi le fret ferroviaire,

02:22 le transport de marchandises.

02:24 Les promoteurs ambitionnent donc de reporter

02:26 l'équivalent d'un million de poids lourds par année sur le rail.

02:29 Si on fait Lyon-Turin pour faire gagner

02:31 à quelques hommes d'affaires

02:33 une demi-heure, une heure entre Lyon et Turin,

02:35 on n'en a rien à cirer.

02:36 Non mais, il faut être clair.

02:37 L'essence même du sujet Lyon-Turin,

02:40 c'est le report modal des camions sur des trains.

02:44 Aujourd'hui, il y a 800 000 camions par an au Fréjus,

02:47 600 000 au Mont-Blanc,

02:49 et 1 400 000 à Vintimille.

02:51 C'est pas rien.

02:52 Et pendant que ces camions y passent,

02:54 on ne fait pas autre chose en fait.

02:56 Et on brûle du fuel,

02:57 on augmente l'effet de serre, les gaz à effet de serre.

03:00 [Musique]

03:11 En tant que cheminot,

03:13 on a une ligne existante,

03:15 qui est largement sous-utilisée.

03:17 Aujourd'hui, il y a une vingtaine de trains qui passent.

03:19 On peut multiplier par 5 ou par 6.

03:21 Même si cette ancienne ligne,

03:23 elle est très abrupte et sénueuse ?

03:25 Évidemment que c'est possible.

03:26 Dans les années 2000,

03:27 on a des systèmes de locomotives

03:30 qui permettent de transporter des trains lourds jusqu'à la frontière.

03:33 On défend un report modal immédiat,

03:36 et pas une stratégie qui pourrait arriver à la conclusion

03:39 que seule la ligne non-turin peut répondre à cette attente

03:42 d'ici une quinzaine d'années.

03:44 La mobilisation est organisée par les soulèvements de la terre,

03:47 mouvement menacé de dissolution par le gouvernement

03:49 après les événements de Seine-Solenne.

03:51 Il y a aussi des militants du mouvement italien Notav,

03:54 qui mènent une lutte acharnée contre le projet

03:56 de l'autre côté de la frontière depuis plusieurs années.

03:58 [Musique]

04:27 Ils nous le vendent comme un truc écolo,

04:28 alors qu'en fait leur but c'est toujours de faire circuler

04:30 plus de marchandises pour plus de profits, plus de consommation.

04:32 Nous ce qu'on veut c'est des projets qui soient au clair

04:35 avec les choses qui existent déjà.

04:37 Pas construire des trucs nouveaux pour dire

04:39 "Ah regardez, on a dépensé tout ce fric parce qu'on est super écolo."

04:41 Leur truc c'est pas la décroissance.

04:43 J'ai déjà entamé ce tunnel, est-ce que c'est pas trop tard ?

04:45 Il est encore temps de stopper ce truc-là,

04:47 de remettre les financements ailleurs.

04:49 Et le problème c'est que là pour le moment,

04:51 ils nous font foncer dans le mur.

04:53 [Musique]

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