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Thierry Ardisson balance sur la télé : "Comment faire du talk-show si vos invités crèvent de peur à l’idée d’être repris sur les réseaux ?"
Musique est protégé des droits d'auteur par: https://www.ntmediastudio.com/
Musique de fond utilisée dans vidéo de cette chaîne: https://www.youtube.com/channel/UCIZ8_Xpxgn_lONAp32IEJqA
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00:00 À l'occasion de la diffusion du deuxième volet d'Hôtel du Temps, l'aventure continue,
00:13 consacrée à Coluche, le vendredi 23 juin 2023 à 21h10 sur France 3, Thierry Ardisson
00:19 a reçu télé Loisir pour un long entretien.
00:22 De son attachement à ce programme à son avenir dans le métier et un flashback sur
00:29 sa carrière, L'Homme en Noir nous dit tout.
00:31 C'est au restaurant de l'Hôtel Meurice, Palace parisien situé à proximité de son
00:39 domicile et où il a ses habitudes, que Thierry Ardisson nous a reçus.
00:43 Il y a un an, en mai 2022, l'animateur-producteur lançait une nouvelle émission, Hôtel du
00:53 Temps, basée sur un concept inédit, retrouvé pour un long échange des stars disparues
00:58 et ressuscité grâce au procédé du DPFX et de Face Retriever, qui recréent des visages
01:03 animés numériquement.
01:04 La première invitée de ce talk d'un nouveau genre était Dalida.
01:13 L'audience se révèle en décevante, 1,4 million de téléspectateurs pour 6,8% de part
01:20 d'audience, Ardisson a dû travailler longuement pour sortir ce deuxième rendez-vous, avec
01:25 Coluche.
01:26 Il nous en dévoile les enjeux puis répond à nos questions sur l'évolution des talk
01:33 show de divertissement et sur sa propre carrière, entamée à la télévision il y a 40 ans.
01:38 Télé-loisirs, un an s'est écoulé depuis la diffusion du premier Hôtel du Temps, consacré
01:46 à Dalida.
01:47 Que s'est-il passé, depuis ? Thierry Ardisson, on a réalisé trois émissions à ce jour.
01:55 La première, sur Jean Gabin.
02:02 Après l'avoir vue, la chaîne l'a trouvée de qualité, mais elle a estimé que, Gabin
02:09 étant assez loin dans l'esprit des gens, il valait mieux commencer par Dalida et Coluche.
02:16 J'aime beaucoup l'émission consacrée à Dalida mais l'émission sur Coluche est meilleure,
02:21 parce qu'on a appris des choses entre temps.
02:26 Et d'abord que j'avais eu tort de présenter ça comme une interview.
02:30 Les gens se sont dit que une heure trente d'interview de Dalida par Ardisson, ça allait
02:37 être long.
02:38 Par ailleurs, France 2 l'a diffusé un lundi soir alors que la case traditionnelle pour
02:43 ce genre de programme est le vendredi.
02:45 Il n'empêche, la presse et Twitter ont été très positifs, ceux qui l'ont vu l'ont aimé,
02:54 et nous avons gagné cinq cents.
02:56 000 téléspectateurs entre le début et la fin de l'émission.
03:03 Aujourd'hui, je préfère parler de biopic, de docu-fiction, parce qu'il y a beaucoup
03:11 d'archives, mais aussi tous les personnages de l'hôtel.
03:14 En fait, c'est une sorte de métavers, dans lequel il se passe autre chose qu'un entretien.
03:22 Pour en revenir à l'interview, celle de Coluche gagne en qualité, dans la mesure où à chaque
03:30 fois qu'il ouvre la bouche, c'est une punchline.
03:33 Sur le travail, les retraites, la police, il n'a pas pris une ride.
03:37 Si l'on n'était pas touché par le destin tragique de Dalida, il y avait moins d'intérêt
03:42 à regarder l'émission.
03:43 A-t-il été question qu'il n'y ait pas un deuxième épisode ? Quand j'ai vu les audiences
03:51 du Dalida, j'ai dit à la chaîne, si vous voulez, on arrête.
03:55 Ils m'ont répondu, pas question de s'arrêter.
04:00 Il n'y a pas que l'audience dans quel état d'esprit êtes-vous avant la diffusion de
04:04 ce Coluche ? À la fois inquiet et serein.
04:07 Inquiet parce que je pense que si Coluche ne marche pas, il n'y aura pas Johnny Hallyday
04:14 après, comme nous avons prévu de le faire.
04:17 Mais aussi serein, parce que je sais qu'on a fait du bon boulot.
04:23 Ça a été très long, on a beaucoup discuté avec les héritiers de Coluche sur le scénario.
04:31 Ils m'ont dit un jour, à ce propos, c'est ton bébé, mais c'est notre papa.
04:38 Au final, Romain et Mariusz Kolauczy, qui co-signe ce numéro, ont apporté beaucoup
04:46 de choses, dont cette séquence autour du frigo qui parle du rapport de leur père au
04:50 resto.
04:51 On peut trouver que ça n'est pas bien mais, franchement, les gens qui n'aimeront pas ce
04:58 Coluche, je me demande ce qu'ils trouveront grâce à leurs yeux, à la télévision.
05:03 Par rapport à ce que produit de nos jours la télé, Hôtel du Temps c'est très bien.
05:07 Rire.
05:08 Justement, comment prenez-vous la concurrence que vous envoie TF1 avec "Zwil", son nouveau
05:16 jeu de culture générale présenté par Arthur ? C'est la concurrence, c'est comme ça.
05:21 TF1 et M6 diffusent des programmes qu'ils espèrent voir cartonner.
05:28 C'est la dure loi du ring.
05:32 Mais, même si les journalistes se focalisent désormais trop dessus, il n'y a pas que l'audience.
05:38 Edgar Morin l'a dit, le jour où les chiffres ont pris le pouvoir, ça a été la fin du
05:46 monde.
05:47 Je trouve absurde de juger une émission du service public à l'aune de ses seuls résultats.
05:54 Combien de films ai-je aimé qui n'ont pas fait d'entrée ? De livres que j'ai dévoré
06:02 qui ne se sont pas vendus ? Fût un temps, à l'Ibé, où les critiques chamarrées qui
06:07 furent démolissés parfois un programme, mais ils le faisaient en analysant le contenu,
06:11 pas en se fondant sur les chiffres d'audience.
06:14 Vous savez, ma vraie satisfaction, c'est que Warner Bros a acheté le format pour le
06:22 monde.
06:23 Il y a, dans ce numéro, une allusion au grave problème de santé de Michel Drucker qui
06:28 a, selon vous, failli s'installer à l'hôtel du temps.
06:31 Vous l'en avez averti ? Je le lui ai dit, bien sûr.
06:37 Mais, vous savez, il a beaucoup d'humour.
06:42 Ça le fait marrer.
06:47 Qu'avez-vous voulu raconter sur Coluche, dans cet hôtel du temps ? Ce qui m'intéresse,
06:52 c'est l'amplitude du destin des gens dont je parle.
06:55 Quelqu'un qui commence comme un petit voyou de Montrouge et qui finit en saint laïque,
07:02 avec les restos du cœur.
07:04 Il faut que les gens que je racontais une vie intéressante.
07:07 Je ne pourrais pas faire Michel Berger ou Daniel Balavoine.
07:13 C'est leur mort prématurée qui a été spectaculaire, mais ils n'ont eu qu'une
07:20 vie d'artiste, vouée à leur art.
07:21 Rien à voir avec Gabin, qui a fait la guerre entre deux carrières.
07:29 Dalida, ce qui me fascine, c'est le fait que tous ces hommes se soient suicidés et
07:36 qu'elle n'ait jamais connu l'amour.
07:38 Mon ambition, après Coluche, c'est de faire Johnny, mais aussi des personnages tels que
07:46 de Golou Mitterrand.
07:47 Le procédé du face-retriever ouvre un champ de création incroyable.
07:54 J'ai d'ailleurs un projet cinéma avec cette technique.
07:59 C'est le paradoxe de votre démarche, avoir un coup d'avance avec un clin d'œil dans
08:07 le rétroviseur.
08:08 La résurrection, j'ai toujours fait cela.
08:14 Dans d'anciennes émissions, j'invitais déjà Victor Hugo, John Lennon et Charles Baudelaire
08:22 pour les interviewer.
08:23 Mais il s'agissait alors de comédiens grimés.
08:28 Ça faisait musical.
08:32 L'antenne ne me manque pas, affirme Thierry Hardy.
08:35 Son autre paradoxe apparent, vous dites ne pas souhaiter vous accrocher à la télé,
08:40 mais vouloir continuer d'y proposer des concepts.
08:43 Ce n'est pas la même chose.
08:44 Je ne m'accroche pas à ma gueule à l'image.
08:51 Je n'ai commencé à faire de l'antenne qu'à 35 ans, avec beaucoup de trac.
08:57 Animateur n'était pas ma vocation, je ne suis pas un animateur né.
09:04 Mon vrai métier, c'est inventeur, concepteur.
09:10 J'ai fait de la pub, écrit quelques best-sellers, inventé des journaux.
09:17 Mais comme les gens m'ont vu à la télé, il est normal qu'ils me considèrent comme
09:23 un animateur.
09:24 Pour autant, l'antenne ne me manque pas.
09:30 Quand on m'a viré, je ne suis pas allé voir Delphine Ernotte pour lui demander de remplacer
09:38 Rucki.
09:39 Je lui ai dit, je viens pour ressusciter les morts, ce à quoi elle a répondu, c'est
09:43 miraculeux.
09:44 Sur le fait d'avoir des idées et l'envie de les réaliser, c'est vrai, je ne décrocherai
09:49 jamais.
09:50 Je ne vais pas me retirer sur une plage en Corse, en Grèce ou au Seychelles alors que
09:55 j'ai encore un cerveau qui tourne à 100 km/h.
09:58 Est-ce qu'un jeune Thierry Hardisson pourrait, aujourd'hui, faire carrière à la télévision?
10:03 Non.
10:05 Parce que les chaînes sont beaucoup plus frileuses qu'avant.
10:09 Si je débutais avec mon temps et ma liberté d'être, j'aurais beaucoup de mal.
10:17 J'imaginerais des émissions pour Cyril Ferrot.
10:22 Rire.
10:23 Lequel Cyril Ferrot est considéré, par Michel Drucker, comme l'un de ses héritiers en
10:30 tant qu'animateur.
10:31 Pensez-vous en avoir?
10:36 J'aimerais bien.
10:37 Quand Léa Salamé dit s'être inspirée de mon émission, je dis bravo, bon choix.
10:42 Moi-même, en tant qu'enfant de l'ortief, je me suis inspiré de bouvards, de chalets,
10:48 d'avertis ou de glazères.
10:49 Pour en revenir à Léa, elle a du culot.
10:55 J'en ai aussi.
10:58 Elle laisse deviner sa sensibilité politique.
11:01 Pas vous.
11:04 Je ne pense pas qu'un animateur soit là pour donner son opinion politique.
11:09 Quand Rukié Danon n'est pas couché a prix fait et cause pour Ségolène Royal, on a
11:17 perdu 10% de parts de marché en 6 mois.
11:19 Tout ce qu'on peut imaginer à mon sujet, c'est que je ne suis ni hérène, ni éléphie.
11:27 Il y a 30 ans, les stars venaient sur vos plateaux, vous n'aviez pas besoin de les
11:35 ressusciter.
11:36 Que s'est-il passé depuis?
11:40 Je ne sais pas s'il y a toujours des stars, mais je dirais que celles d'aujourd'hui
11:44 m'intéressent moins.
11:45 Quand vous avez eu la chance d'interviewer Serge Gainsbourg, Jean Dormaisson, Brayston
11:54 Ellis ou Brad Pitt, c'est beaucoup moins drôle d'interroger Amel Bent, Amir ou M.
12:02 Pocorin.
12:03 Une autre chose a changé, les américains ne se déplacent que pour des presse-jinquettes
12:08 et ne viennent plus sur les plateaux.
12:10 A voir, comme je les ai eu, Matt Damon, Robert De Niro, Angelina Jolie ou Jane Fonda, ça
12:19 donnait du cachet.
12:20 Ce n'est plus possible.
12:25 Imaginez que pour interviewer Pamela Anderson, ma femme, la journaliste Audrey Crespo-Mara,
12:31 NDR, a dû se rendre à Los Angeles.
12:34 La troisième raison est liée aux réseaux sociaux.
12:37 Les rares fois où des stars se rendent dans des émissions, elles ne disent rien.
12:43 Je me souviens avoir reçu Franck Dubosc à salut l'éthérien sur C8 avec, au préalable,
12:52 cette mise en garde de son attaché de presse me demandant de ne pas lui parler des gilets
12:57 jaunes.
12:58 Bien sûr, je lui en ai parlé et, immédiatement après, son attaché de presse m'a dit que
13:06 je ne recevrai plus jamais Dubosc.
13:09 Ce à quoi j'ai répondu que je n'en mourrais pas.
13:13 Mais comment voulez-vous continuer à faire du talk show si vos invités crèvent de peur
13:20 à l'idée d'être repris sur les réseaux sociaux ? Cela n'a plus d'intérêt.
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