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Dans son édito du 27/06/2023, Jérôme Béglé revient sur la ville de Marseille, alors qu'Emmanuel Macron y fait une visite de trois jours.

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Transcription
00:00 L'édito politique avec vous Jérôme Béglé.
00:02 Emmanuel Macron a entamé une visite de trois jours à Marseille,
00:05 une ville, Jérôme, qui a toujours entretenu des relations conflictuelles avec la capitale.
00:10 Depuis les années 50, le refrain est toujours le même.
00:12 Paris ne comprend pas Marseille et pire serait jalouse de son irrédentisme,
00:17 de sa beauté, de son équipe de football, de son littoral, de sa fierté, que sais-je encore.
00:22 Bref, quand Marseille, ses élus et ses habitants veulent critiquer une décision venue d'en haut,
00:27 on critique évidemment Paris qui n'en ferait jamais assez et qui voudrait toujours humilier sa rivale.
00:32 Évidemment on est dans le roman, dans le mensonge, dans la tragique comédie,
00:35 mais ces postures ont permis à bien des élus locaux de se faire une respectabilité
00:39 et de gagner leur galon de vrais Marseillais.
00:42 Ainsi Bernard Tapie, Parisien qui a grandi à la Courneuve,
00:46 est devenu Marseillais d'adoption très tardive en jouant en Paris
00:49 où pourtant il avait fait sa réputation, sa vie, sa fortune, contre la cité phocéenne.
00:54 Avant lui, Gaston Defer, maire de la ville pendant 34 ans,
00:57 pourtant né dans les Roses, d'une famille de protestants sévénoles, avait usé des mêmes armes.
01:02 Figurez-vous que ministre de l'Intérieur de François Mitterrand, il avait tricoté la fameuse loi PLM
01:06 qui appliquait un statut électoral particulier pour l'élection des maires des trois premières villes de France.
01:12 Résultat, en 1983, il est élu avec moins de voix que son adversaire Jean-Claude Godin.
01:18 Dans n'importe quelle autre ville, on aurait crié au scandale, pas à Marseille.
01:21 Pour cadenasser la ville, Defer avait passé un pacte de non-agression avec l'AFO, la CGT,
01:27 et en plus contrôlait le méridional et le provincial, les deux quotidiens de la ville.
01:32 De moyens efficaces de se couper des injonctions parisiennes,
01:36 partout ailleurs qu'à Marseille, cela ferait grimper au rideau.
01:39 Mais sur la Canbière, c'était vraiment accepté.
01:41 Mais dans les faits, Jérôme, est-ce qu'il est vrai que Marseille est moins gâtée que Lyon
01:45 ou que les autres grandes villes de France ?
01:47 Alors c'est en partie vrai.
01:48 Dans les années 60, environ 120 000 rapatriés venus d'Algérie et de Tunisie s'installent à Marseille.
01:53 On construit des quartiers pour les accueillir, comme la Rouvière ou la Panouse par exemple.
01:57 L'État a alors totalement sous-estimé l'impact social, économique, culturel de ces arrivées.
02:03 Au début, la ville a cru qu'elle pourrait gérer tout ça toute seule,
02:06 mais elle a très vite été dépassée par cette transformation.
02:10 Sans son suivi, une ségrégation entre la bourgeoisie et les classes populaires,
02:13 entre le secteur secondaire et le secteur tertiaire, entre la droite et la gauche,
02:17 entre la délinquance et les quartiers protégés.
02:20 Gaston Neufair n'a rien vu venir.
02:22 Et Jean-Claude Godin, maire pendant 25 ans, a fermé les yeux,
02:25 lâché tout ce qu'il pouvait pour se faire réélire et répéter inlassablement que non, Marseille n'était pas Chicago.
02:31 Benoît Payan, l'actuel Edil, né et grandit à Marseille, est lui-même pris entre deux feux.
02:37 Celui de continuer à clamer la spécificité de sa ville, mais également de faire la manche à l'État.
02:42 Localement, Edic Paris ne comprend rien à Marseille,
02:44 mais nationalement, il court la subvention et l'octroie de moyens supplémentaires pour l'aider dans sa mission.
02:50 Une schizophrénie qui a ses limites, mais qui n'est que l'éternel refrain d'une chanson
02:54 que les Marseillais ne se privent pas de seriner depuis au moins trois générations.
03:00 Et vous voulez que je vous dise, Romain, ça n'est pas fini et ça va continuer inlassablement, inlassablement, inlassablement.
03:06 [Musique]
03:10 [SILENCE]

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