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Emmanuel Chiva, le délégué général pour l’Armement, était vendredi 14 juillet l'invité de la matinale de franceinfo. Il répondait aux questions de Victor Matet.

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00:00 Nous sommes le 14 juillet, jour de fête nationale, avec à partir de 10h ce matin,
00:04 le traditionnel défilé militaire sur les Champs-Elysées, en présence d'Emmanuel Macron.
00:09 Défilé auquel participera pour la toute première fois la Direction Générale de l'Armement.
00:14 Son délégué général est avec nous. Bonjour Emmanuel Kiva.
00:17 – Bonjour.
00:17 – Pourquoi la Direction Générale de l'Armement, qui a notamment pour mission d'équiper les armées
00:21 et de préparer le futur des systèmes de défense, n'a jamais participé au défilé par le passé ?
00:26 Et pourquoi y est-elle enfin cette année ?
00:28 – Je pense que justement c'est la bonne question.
00:30 J'ai souhaité réparer ce qui me semble être une injustice.
00:33 La Direction Générale de l'Armement, elle hérite de la DMA,
00:36 la Délégation Ministérielle pour l'Armement, qui a été fondée en 1961 par le général de Gaulle.
00:41 Elle est composée de 10 500 hommes et femmes, 80% de civils, 20% de militaires.
00:47 Il me semblait totalement anormal qu'elle ne participe pas à cette fête nationale
00:51 et que les militaires au sein de la DGA ne soient pas reconnus devant la nation.
00:54 – Sur les Champs-Elysées tout à l'heure, l'hélicoptère Guépard, le blindé léger Serval
00:59 qui font partie des nouveautés présentées cette année pour le défilé.
01:03 Ce sont un peu vos top modèles à vous, les nouvelles stars de l'équipement ?
01:06 – C'est ça, chaque année nous montrons que les armées françaises sont équipées,
01:11 sont équipées de matériel moderne.
01:13 Vous savez, les programmes d'armement sont des choses qui se conçoivent
01:16 sur plusieurs dizaines d'années et on en est très fiers.
01:18 Et vous verrez, je ne vais pas comme on dit au Québec,
01:21 divulguer ce que vous verrez tout à l'heure sur les Champs-Elysées,
01:25 mais c'est assez impressionnant en termes de matériel,
01:27 à la fois terrestre et de matériel volant.
01:29 – La loi de programmation militaire 2024-2030 a été votée enfin hier au Parlement.
01:34 413 milliards d'euros de crédits sur 7 ans, 40% d'augmentation.
01:39 Et pourtant il y a ce paradoxe, Emmanuel Kivan, on parlait de nouveaux équipements
01:44 mais il y aura moins de commandes, de rafales, de blindés ou encore de frégates,
01:47 comment est-ce que vous l'expliquez ?
01:48 – On l'explique très simplement et d'ailleurs le ministre des Armées
01:51 qui a porté finalement cette loi de programmation militaire
01:54 depuis maintenant presque un an, l'explique en disant
01:58 "on privilégie la cohérence plutôt que la masse".
02:01 Autrement dit, d'abord il y a des nouveaux besoins,
02:06 dans les lois de programmation militaire précédentes,
02:09 on ne considérait pas le fait que l'espace est devenu un champ de conflictualité,
02:12 que les grands fonds marins, où le cyber et l'influence
02:16 sont devenus des champs de conflictualité,
02:18 et donc il est nécessaire de nous équiper et de préparer
02:22 les affrontements dans ces nouveaux champs.
02:24 Et puis rien ne sert de délivrer trop tôt des rafales des Leclerc,
02:30 des Serval, des Griffon, des Jaguar, si on n'a pas non plus les infrastructures,
02:34 les personnels pour pouvoir les armer et les systèmes qui vont avec.
02:38 Et donc c'est un exercice assez subtil de calendrier, de réglage de curseur
02:44 pour que nous ayons les bons équipements au bon moment pour équiper les forces armées.
02:47 - Mais il y a l'invasion russe en Ukraine qui dure depuis près d'un an et demi maintenant,
02:51 cela veut dire qu'en cas de guerre nous serions tout de même prêts pour un conflit ?
02:54 - Alors là aussi le ministre des armées a lancé ce qu'on appelle le chantier d'économie de guerre
02:59 suite à l'intervention du président de la République à Eurostory l'an dernier.
03:02 L'économie de guerre c'est, nous ne sommes pas en guerre,
03:05 mais nous faisons tout avec notamment nos industriels
03:08 pour arriver à accélérer, pour avoir une résilience
03:10 et pour pouvoir monter en cadence pour répondre aux besoins d'une opération de haute intensité.
03:15 - On est actuellement dans cette économie de guerre ?
03:17 - On est actuellement dans cette économie de guerre
03:19 et nous avons bien l'intention d'amplifier le mouvement.
03:21 - Vous l'avez dit, investissement dans le cyber, dans l'espace, dans la dissuasion nucléaire également,
03:27 est-ce que ce choix d'une armée que l'on peut qualifier d'échantillonnaire
03:30 où l'on investit un peu partout est efficace justement en cas de guerre ?
03:35 - Ce n'est pas une armée échantillonnaire, c'est un modèle d'armée complet
03:38 et c'est une armée qui est effective sur les théâtres d'opération.
03:42 Je rappelle que la France est une puissance dotée
03:45 et que nous nous consacrons d'abord à la modernisation de notre dissuasion nucléaire,
03:49 ça c'est extrêmement important, d'ailleurs c'est 30% des activités de la DGA aujourd'hui,
03:54 et puis nous souhaitons développer l'ensemble des moyens
03:59 qui permettront de remplir les contrats opérationnels
04:02 qui ont été fixés par le Président de la République.
04:04 En fait la loi de programmation militaire,
04:05 ce n'est pas on vous donne une enveloppe et derrière vous piochez des matériels,
04:10 c'est on établit le format que les armées doivent avoir
04:13 pour répondre aux missions qui leur sont confiées
04:16 et partant on va en déduire ce qu'il est nécessaire d'avoir comme équipement.
04:20 - Mais pour qu'on le comprenne bien, Emmanuel Kiva,
04:22 il y a le choix d'investir finalement beaucoup dans l'innovation,
04:25 dans la technologie, au détriment finalement de la quantité ?
04:29 - Non, pas du tout, je pense qu'il ne faut pas opposer les deux.
04:31 Et d'ailleurs c'est 10 milliards d'euros effectivement
04:33 que l'on va investir dans l'innovation,
04:36 les grands démonstrateurs, l'hypervélocité par exemple,
04:40 l'intelligence artificielle évidemment,
04:42 mais c'est également par exemple 5 milliards d'euros sur les drones,
04:47 tout milieu, qui vont équiper, doivent équiper nos forces armées
04:51 qu'il s'agisse d'être sur terre, dans les airs, sur ou sous les mers.
04:55 - On va en reparler de cette guerre du futur.
04:56 Autre sujet, les livraisons d'armes.
04:58 L'Inde dont le Premier ministre Narendra Modi
05:00 est l'invité d'honneur de ce défilé du 14 juillet cette année,
05:04 donne son accord de principe pour l'achat de 26 avions Rafale à la France.
05:08 Premièrement, est-ce que vous confirmez cette information ?
05:10 - Je confirme que le comité d'acquisition indien a effectivement
05:14 ouvert la voie à l'acquisition de 26 avions Rafale.
05:16 - Deuxième question, quel est le montant de cette commande ?
05:18 Est-ce qu'il y en aura d'autres ?
05:19 - Alors je ne vais pas vous répondre évidemment,
05:21 et de toute manière je ne veux pas préempter le cas échéant,
05:23 ce que pourrait dire le Président de la République.
05:26 Vous savez, ce sont des marchés sur lesquels on travaille pendant très longtemps,
05:29 et d'ailleurs on ne divulgue pas forcément les montants de ces marchés.
05:32 - Concernant l'Ukraine, cette fois la France a annoncé cette semaine
05:34 l'envoi de missiles long porté Scalp à Kiev.
05:37 Le Président Volodymyr Zelensky demande toujours plus d'armes
05:40 de la part des Occidentaux.
05:41 Est-ce que la France a les moyens de lui en fournir plus ?
05:44 - Alors de toute manière, d'abord il ne m'appartient pas de commenter
05:48 d'un point de vue opérationnel ce qui se passe en Ukraine,
05:50 en fonction des demandes qui nous sont faites,
05:53 et les demandes qui nous sont faites sont faites de telle manière
05:55 à ce qu'on n'affaiblisse pas les capacités de l'armée française,
05:59 tant on ne dit pas parce qu'on livre des Scalp qu'on n'a plus les stocks
06:01 nécessaires pour nous-mêmes,
06:02 et bien en fonction de ça on a un dosage,
06:04 le cas échéant on recomplète des équipements,
06:06 c'est ce qui va arriver par exemple avec les Césars qui ont été livrés à l'Ukraine.
06:10 - Ça veut dire qu'on pourrait fournir plus ?
06:12 - Ça veut dire qu'en fonction des équipements, à chaque fois,
06:14 le Président de la République et le Ministre des Armées
06:16 décident ou non de pouvoir livrer des équipements.
06:18 - On évoquait tout à l'heure Emmanuel Kiva, les domaines du cyber et de l'espace,
06:22 je vous cite, l'armée s'est imaginé les guerres des dix prochaines années,
06:25 mais ensuite a du mal à penser autrement que par le biais des conflits d'aujourd'hui,
06:30 comment est-ce que l'on peut faire pour avancer, pour faire bouger les choses ?
06:33 - Alors vous êtes un peu...
06:34 Vous avez sorti la phrase du contexte,
06:36 c'est parce que nous savons parfaitement,
06:39 je l'espère en tout cas,
06:40 anticiper à court terme et à moyen terme,
06:43 qu'on doit se poser la question de savoir
06:45 quelles sont les menaces à très long terme.
06:47 - Est-ce qu'on cesse à les anticiper ?
06:49 - Nous avons par exemple lancé cette opération qui s'appelle Red Team,
06:53 et qui vise à utiliser des auteurs, dessinateurs, scénaristes de science-fiction,
06:57 qui eux pensent hors du cadre et différemment de nous,
06:59 pour nous aider à anticiper l'évolution des sociétés
07:02 et les menaces qui pourraient en découler.
07:03 - Ça veut dire que vous vous aidez de la science-fiction aujourd'hui
07:05 pour anticiper les guerres de demain, vous avez des exemples ?
07:07 - Tout à fait, c'est très très...
07:09 D'abord c'est public, vous pouvez aller sur le site redteamdefencetoutattaché.org,
07:15 vous allez voir les scénarii,
07:16 nous avons une équipe, c'est une expérimentation qui a duré trois ans
07:19 et qui s'achève aujourd'hui,
07:20 une équipe d'auteurs, de dessinateurs de science-fiction,
07:22 qui travaille avec les militaires, avec les ingénieurs de la DGA,
07:25 pour essayer d'imaginer, pour essayer finalement de faire en sorte qu'on ne dorme pas la nuit.
07:29 Et notre rôle à nous, c'est d'imaginer la riposte à ces menaces,
07:33 je vous donne un exemple, ils ont prévu le métavers
07:36 avant que Mark Zuckerberg ne l'annonce,
07:38 et toutes les menaces qui en découlent avec cette balkanisation du réel, autrement dit,
07:42 chacun voit le réel de manière différente en fonction de ses intérêts.
07:44 - La science-fiction pour prévoir les guerres de demain.
07:46 Un dernier mot sur la coopération,
07:48 est-ce qu'on verra un jour sur pied l'avion de combat européen,
07:51 SCAF, Projet Français, Allemand, Espagnol et maintenant Belge ?
07:54 - De toute manière, les travaux ont débuté entre les différents industriels,
07:58 vous savez que c'est la France qui est leader sur ce système de combat aérien du futur,
08:01 qui n'est pas juste un avion,
08:02 c'est un avion avec des ailiers dronisés,
08:05 et puis un cloud de combat, c'est-à-dire les moyens de communication qui sont associés,
08:09 et le programme suit nominalement son cours pour l'instant.
08:13 - Merci Emmanuel Kiva d'être passé dans le studio de France Info,
08:17 délégué général pour l'armement,
08:19 troupes qui vont défiler pour la toute première fois ce matin sur les Champs-Elysées.

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