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L'appel à l'aide des Restos du coeur du Calvados, confrontés à une double hausse : du nombre de bénéficiaires mais aussi des dépenses (achats alimentaires, frais de fonctionnement)

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00:00 - Il est 8h17, bienvenue, si vous nous rejoignez sur France 3 Normandie et France Bleu.
00:03 Notre invité ce matin, Nidé Cherpin, est Philippe Mary, président des Restos du coeur du Calvados.
00:07 - Philippe Mary, bonjour. - Bonjour.
00:09 - Radio France se mobilise pour essayer d'aider votre association après ce cri d'alarme lancé dimanche par votre président national, Patrice Dourais.
00:17 Les restos étranglés financièrement parmi les causes, une explosion du nombre de bénéficiaires, c'est le cas ?
00:23 Ça se vérifie dans les chiffres dans le Calvados ?
00:25 - Oui, c'est le cas dans le Calvados, au même titre qu'au plan national, puisque effectivement nous enregistrons, nous, pour cette campagne d'été, 18% de plus de personnes accueillies,
00:37 mais au travers de ça, 32% de repas distribués en plus. Donc c'est une augmentation très importante.
00:44 - On peut l'expliquer cette augmentation ? La précarité ?
00:47 - La précarité, l'inflation, les crises successives, il y a eu évidemment la Covid, il y a eu l'Ukraine, la guerre d'Ukraine, et maintenant l'inflation galopante.
00:59 Donc voilà, tout s'explique et ça fait des mois que nous, les Restos du coeur, on le ressent.
01:04 - La rentrée universitaire, ce profil, est-ce qu'il y a beaucoup d'étudiants également ?
01:08 - Oui, oui, oui, la rentrée universitaire déjà, nous avions fini juste avant les vacances avec un grand nombre d'étudiants,
01:16 mais là, ça présage une forte augmentation d'étudiants, mais pas que. Nous avons aussi des travailleurs pauvres, des familles monoparentales, etc.
01:27 - Plus de bénéficiaires d'une part, mais également des dépenses plus lourdes pour vous, parce que l'inflation, vous la subissez également ?
01:32 - Bien sûr, donc les achats qui sont effectués par le National et auxquels nous, les associations départementales, nous commandons,
01:39 effectivement, nous achetons un tiers de ce que nous redonnons derrière, qui subit de plein fouet l'inflation, tout a augmenté.
01:47 Et puis aussi, nos budgets de fonctionnement, nous avons des camions pour aller chercher nos ramasses, etc.
01:53 L'énergie dans nos centres, donc tout ça a flambé, et aujourd'hui, voilà, on est très, très inquiets.
01:59 - On a entendu le gouvernement annoncer une aide de 15 millions d'euros, on a entendu le milliardaire Bernard Arnault annoncer 10 millions d'euros, ça va suffire ou pas ?
02:08 - Non, évidemment, ça ne suffira pas, c'est très bien, c'est très bien que les gens se mobilisent, mais ça ne suffira pas.
02:17 - De la part du gouvernement, il faut en mettre davantage ?
02:19 - Je pense, et puis, il faut que le gouvernement comprenne enfin que la précarité augmente d'une façon importante, en France ou ailleurs, même en Europe en général.
02:32 Donc, la partie européenne, il va falloir qu'ils avancent sur justement le FID, le produit que nous donne l'Europe pour l'aide alimentaire.
02:43 - Est-ce que vous avez l'impression que les politiques se déchargent sur vous depuis tant d'années, en vous disant "c'est à vous d'aider les gens en grande difficulté" ?
02:50 - Alors, cette impression, je dirais oui et non, puisque nous, là je vais parler localement, on est quand même aidés,
02:57 que ce soit le conseil départemental, le conseil régional, le maire de Caen, etc.
03:03 On est quand même là des DETS aussi, donc on est vraiment compris et aidés, mais c'est vrai qu'on se repie toujours un petit peu sur les associations pour aider les gens dans la précarité, malheureusement.
03:19 - Donc, on l'a dit au début de cet entretien, de plus en plus de bénéficiaires, vous êtes en difficulté financière,
03:26 quelles sont les décisions qui vont être prises pour la campagne hivernale qui va débuter au mois de novembre ?
03:30 - Alors, les décisions, évidemment, elles sont très difficiles à prendre, parce que c'est à contrario, je dirais, de la politique des Restos du Coeur,
03:40 mais elles sont très difficiles à prendre déjà par les bénévoles.
03:43 - Est-ce qu'il faudra dire non, clairement, à certaines personnes qui viendront ?
03:47 - Oui, il faudra dire non, c'est-à-dire qu'on va prendre les deux principales décisions, c'est qu'on va geler notre barème d'acceptation à l'aide alimentaire.
03:55 - C'est le montant minimum ?
03:57 - Le montant minimum, le reste à vivre, si vous voulez.
04:00 Donc, si vous voulez, on va geler ce barème, et le barème d'hiver qui augmentait,
04:07 qui pouvait permettre à d'autres personnes, bénéficiaires des restos, d'accéder à l'aide alimentaire,
04:12 ne pourront plus l'être, puisqu'on va geler sur le barème d'été.
04:15 Donc, ça, ça va forcément restreindre le nombre de bénéficiaires,
04:19 et au-delà de ça, nous allons diminuer le nombre de repas distribués par semaine.
04:23 Donc, forcément, nous allons faire beaucoup de mécontents,
04:27 et ça va être un crève-cœur pour les bénévoles.
04:29 Je suis en train, actuellement, de passer dans tous nos 21 centres,
04:33 et les bénévoles, même s'ils le comprennent, pour eux c'est compliqué,
04:37 d'autant qu'avec ces crises successives, ils sont très très fatigués, les bénévoles.
04:41 - Ce sera à eux qu'incombera cette tâche difficile, douloureuse de dire non à quelqu'un ?
04:45 - Bien sûr !
04:46 - Ça demande une préparation mentale ?
04:47 - Bien sûr, puisque ce sont forcément, nous, le siège, nous serons là pour les aider,
04:51 mais c'est eux qui sont en direct avec les bénéficiaires,
04:54 c'est eux qui inscrivent les bénéficiaires,
04:56 et aller dire non à une personne qui avait, malgré tout, l'habitude d'ouvrir droit l'hiver,
05:02 lui dire "ben non, là, vous n'aurez plus le droit d'accéder à l'aide alimentaire,
05:06 vous aurez toujours le droit, bien sûr, au reste, à l'aide à la personne,
05:10 si vous avez besoin de vêtements, si vous avez besoin de faire des papiers, etc.
05:13 mais l'aide alimentaire, vous n'y avez plus le droit,
05:15 là, pour les bénévoles, ça va être effectivement très très très compliqué.
05:18 - Quel message vous lancez à tous ceux qui nous écoutent ce matin, le grand public ?
05:21 - Eh bien, le message, c'est d'aider les restos,
05:24 puisque aider les restos, c'est diminuer la précarité, tout simplement.
05:27 - Donc, malgré l'inflation, si possible, faire le petit effort supplémentaire
05:31 lors des prochaines collectes, par exemple ?
05:33 - Voilà, je sais que c'est dur, c'est dur pour tout le monde,
05:35 parce que tout le monde subit de l'inflation,
05:37 mais tous les petits gestes, voilà, les petits ruisseaux font les grandes rivières, comme on dit,
05:42 et tous les petits gestes sont bons à prendre,
05:44 et évidemment, j'appelle alors les personnes,
05:48 mais aussi les grandes entreprises,
05:50 pour augmenter nos ramasses dans les magasins, etc., à nous aider.
05:55 - Voilà, le message est lancé ce matin, Philippe Mary,
05:57 président des Restos du Cœur, dans lequel l'ado s'invite,
05:59 et France Bleu et France 3, bonne journée.

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