• l’année dernière
Un adolescent de 15 ans s'est suicidé à Poissy dans sa chambre mardi 5 septembre. Il s'est avéré que l'élève était victime de harcèlement scolaire. Une cellule psychologique a été mise en place dans son lycée. Alors est-ce que le combat contre le harcèlement scolaire est perdu d'avance? 

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Transcription
00:00 ...
00:04 -On en parle avec Anne-Lise Debas, ancienne victime
00:06 de harcèlement scolaire, créatrice du podcast "Smile".
00:10 Vous êtes intervenante dans les établissements scolaires
00:13 contre le harcèlement. Merci d'être avec nous.
00:15 Face à Véronique Fèvre, la chef du service éducation de BFM TV,
00:19 après le suicide de ce lycéen de 15 ans à Poissy,
00:23 dans les Yvelines, il s'est donné la mort mardi,
00:26 le lendemain de la rentrée scolaire.
00:29 Il était scolarisé dans un lycée parisien
00:31 après avoir quitté l'établissement
00:33 dans lequel il était scolarisé l'année dernière
00:36 et où il avait été victime de harcèlement.
00:38 Son père a même déposé une main courante en avril dernier.
00:41 Sonia Carné-Raux, vous êtes aux abords
00:43 du lycée Adrienne Boland de Poissy,
00:45 où l'adolescent était scolarisé jusqu'en juin dernier.
00:48 Comment réagit-on là-bas, ce matin ?
00:51 -Les élèves avec qui nous avons échangé dans la matinée
00:56 avant qu'ils n'entrent en classe,
00:58 sont toujours sous le choc.
01:00 Très peu le connaissaient.
01:01 D'après nos informations, cet adolescent de 15 ans
01:04 était très discret, très solitaire.
01:06 Beaucoup nous disent qu'on ne le connaissait pas,
01:09 mais ils sont sous le choc.
01:11 Ce sont des affaires que l'on voit souvent,
01:13 que l'on voit de plus en plus en France,
01:16 des faits de harcèlement qui poussent parfois au suicide.
01:19 Mais quand ça arrive dans nos couloirs,
01:21 dans notre établissement, on est sous le choc.
01:24 On pense que ça ne peut jamais nous arriver.
01:26 -On se pose la question, pourquoi il ne s'est rien passé
01:29 alors qu'il y a eu, vous le disiez, cette main courante,
01:32 des faits signalés aux proviseurs, des jeunes filles émues,
01:36 qui viennent d'arriver dans ce lycée en classe de seconde
01:39 et qui nous disent pourquoi on a laissé cette affaire
01:42 aller jusqu'au suicide d'un jeune de 15 ans.
01:45 Alors, la police est présente ce matin.
01:47 Une présence policière est très discrète, évidemment,
01:50 pour éviter certains attroupements.
01:52 Les jeunes veulent bien expliquer,
01:55 parler de tout cela, mais ils se réveillent ce matin
01:58 en ne comprenant pas comment cela a pu arriver.
02:00 Alors, une cellule psychologique a été ouverte ce matin.
02:04 Les jeunes, les professeurs vont pouvoir aller parler,
02:07 s'expliquer, et plusieurs jeunes nous confiaient
02:10 qu'ils en auraient besoin et qu'ils comptaient y aller
02:13 pour avoir des réponses à leurs questions.
02:15 -Véronique, on a entendu Sonia Carnéro évoquer
02:18 le témoignage de ses camarades et dire qu'il ne s'est rien passé.
02:21 Quand on reprend la chronologie, il était scolarisé
02:25 et il avait un harcèlement signalé en décembre.
02:27 En mars, ses parents sont reçus par l'établissement.
02:30 Le harcèlement se poursuit. Son père dépose une main courante
02:34 en avril et donc le suicide au début du mois.
02:37 Il ne s'est rien passé, vraiment ?
02:39 -Ce n'est pas ce que dit l'Education nationale.
02:41 L'Education nationale dit qu'il a bien été suivi, ce garçon,
02:45 que les jeunes garçons, les deux jeunes garçons
02:48 qui le harcelaient ont été convoqués,
02:50 que leurs parents ont également été contactés,
02:53 que la CPE a accompagné.
02:55 -Convoqués, mais pas sortis de l'établissement.
02:58 -Absolument. Pour l'instant, ils sont toujours dans l'établissement.
03:02 On sait que le décret qui a été paru le 29 août dernier,
03:05 qui impose, qui permet de déplacer un élève,
03:10 il vaut pour le premier degré.
03:12 Pour le second, c'est possible depuis des années.
03:15 La grande question qui se pose,
03:17 et ça va être l'objet de l'enquête,
03:19 c'est quelles sont les sanctions graduées
03:21 qui ont été prises ?
03:23 -Est-ce qu'il y a eu des exclusions de quelques jours ?
03:26 -Oui. Quelles sont les sanctions ?
03:28 -On se posait avec Adeline,
03:30 est-ce que cet enfant harcelé, scolarisé à Poissy,
03:33 qu'il était depuis quelques jours dans le 14e arrondissement...
03:37 -Dans un CFA.
03:38 -Il a été transféré dans cet établissement
03:41 à cause du harcèlement
03:42 ou parce que sa formation justifiait qu'il le soit ?
03:45 -Il était dans le 3e prépa pro, donc il a choisi une spécialité.
03:49 Il a été très accompagné par la CPO dans son projet d'orientation.
03:52 Il était très motivé. Il tournait une nouvelle page de sa vie.
03:56 Probablement que le changement d'établissement
03:59 était sans doute salutaire pour lui,
04:01 même si on dit que...
04:02 On nous dit qu'apparemment,
04:04 les choses s'étaient calmées sur le plan du harcèlement.
04:07 -Pourquoi la justice dit-elle qu'il faut faire très attention
04:11 sur les motivations de ce geste ?
04:14 -Parce que, déjà, c'est un principe.
04:16 Quand on se suicide, il y a souvent de multiples causes.
04:20 C'est un principe de prudence.
04:22 On a cette information que les choses s'étaient plutôt calmées.
04:26 Mais on a toujours beaucoup de mal à faire le lien
04:29 entre le suicide et le harcèlement.
04:31 -Anis Debas, ce qui nous frappe,
04:33 c'est que ce suicide est intervenu
04:35 le lendemain de la rentrée scolaire.
04:38 On se dit, comme le dit Véronique,
04:40 qu'il tournait une page,
04:41 qu'il arrivait dans un nouvel établissement,
04:44 ça veut dire que les vacances ne sont pas salutaires
04:47 pour les élèves harcelés ?
04:48 -Tout à fait. Le fait que le harcèlement ait pris fin
04:51 à la fin de l'année scolaire 2022-2023,
04:54 ça ne veut pas dire que le harcèlement psychologique
04:57 ait fini également.
04:58 Parce que le mal-être que cet enfant,
05:00 que cet adolescent ressent
05:02 et a continué à ressentir jusqu'à son suicide,
05:05 est présent. Donc, même si il a changé d'établissement,
05:08 le mal-être qui ressent potentiellement sa dépression
05:11 est toujours présent.
05:12 C'est là qu'il a pu passer à l'acte.
05:14 Peut-être même que, je pense, ça peut être vu comme ça,
05:17 il y a une certaine importance sur la date des faits
05:22 commis par cet enfant. -Pourquoi vous dites ça ?
05:25 -Juste après la rentrée, ça prouve que cet enfant était mal.
05:28 Certes, il y a eu le suivi par la CPE,
05:30 mais il n'y a pas eu de suivi psychologique.
05:33 Potentiellement, là, on n'en sait pas.
05:35 On ne sait pas encore,
05:36 mais ça prouve que cet enfant est très mal.
05:39 Et juste après la rentrée,
05:41 ça nous permet de sonner une clochette,
05:44 la sonnette d'alerte pour dire,
05:46 "OK, maintenant, il faut vraiment prendre au sérieux
05:49 "la parole des enfants, des jeunes,
05:51 "et les situations de harcèlement scolaire."
05:53 -Il y a des mesures, des engagements politiques très forts,
05:57 notamment de Gabriel Attal, le nouveau ministre.
05:59 Vous allez peut-être me corriger
06:01 que rien ne décourage les harceleurs.
06:04 Ils n'ont pas peur. -Tout à fait.
06:06 -C'est le cas ? -Bien sûr.
06:07 Les harceleurs n'ont pas peur.
06:09 Il y a une question d'éducation.
06:11 À la maison, potentiellement, ils sont victimes de violences
06:14 ou bien leur mal-être qu'ils ressentent au quotidien,
06:18 ils vont le transmettre aux élèves à l'école.
06:21 Maude Velazquez, une deuxième question,
06:23 c'est la question de la prévention.
06:25 Dans les écoles, que ce soit dans les écoles primaires,
06:29 collèges ou lycées, notamment, il n'y a pas de prévention.
06:32 Je demande solennellement au ministre de l'Éducation nationale
06:35 de rendre obligatoire la prévention
06:38 à l'école à l'automne et notamment dès le CP.
06:40 -Il faudrait faire quoi, concrètement ?
06:43 Il faudrait organiser une forme de cours liée à la prévention ?
06:46 -Ca existe déjà. -Oui.
06:48 -Il y a déjà des... -Sensibilisation.
06:50 -Il y a des jeux de rôles organisés par les professeurs,
06:53 par les enseignants, avec les enfants
06:56 qui sont tantôt dans le rôle du harcelé,
06:58 tantôt dans le rôle du harceleur.
07:00 Ca existe déjà. -Ce n'est pas fait partout.
07:03 -On est à 10 heures d'apprentissage
07:05 aux compétences psychosociales
07:07 dans le programme phare de la maternelle à la terminale.
07:10 -Il y a aussi un peu d'observation à avoir
07:12 dans les établissements scolaires.
07:14 Allez ce midi dans tous les réfectoires,
07:17 dans tous les selfs, et allez voir le gamin
07:19 qui mange tout seul à une table.
07:21 Ce gamin, c'est peut-être pas du harcèlement,
07:24 mais il y a un mal-être.
07:26 Il faut aller le voir.
07:27 Dans beaucoup d'établissements, ce midi,
07:30 un gamin mangera seul ou qui, à la cour de récréation,
07:33 sera tout seul à 10 heures dans son coin.
07:35 -L'enfant seul, c'est une proie, comme dit Marc.
07:38 -C'est important de le rappeler.
07:40 Comme la jeune fille qui a été interviewée,
07:42 elle disait bien que cet enfant ne parlait à personne,
07:45 il était souvent seul et discret.
07:47 Ca, c'est un signe d'un mal-être.
07:50 C'est bien pour cela qu'un enfant qui est seul,
07:52 qui est discret, qui est silencieux,
07:54 on doit aller le voir.
07:56 -Il y a ce qui se passe dans les cours d'école,
07:59 mais il y a ce qui se passe en dehors de l'école,
08:01 sur les réseaux sociaux.
08:03 Là, il y a aussi, encore une fois, la partie parentale.
08:06 Les parents doivent prendre en considération
08:09 l'utilisation de leurs enfants.
08:11 Si un enfant est victime de harcèlement,
08:13 de cyberharcèlement, en l'occurrence,
08:15 les parents peuvent se former sur la question du cyberharcèlement.
08:19 Beaucoup ne savent pas ce que c'est que le cyberharcèlement.
08:23 Ils peuvent être formés par l'Association nationale
08:26 e-enfance.
08:27 Un enfant qui est victime de cyberharcèlement,
08:29 il faut qu'il sache qu'il peut appeler le numéro 3018
08:33 pour être aidé, mais également, il peut télécharger
08:36 l'application 3018 sur son téléphone
08:38 pour échanger avec les écoutants de e-enfance.
08:41 -Ce qui est important aussi,
08:42 si on est à la rentrée, il y a des réunions avec les parents.
08:46 Les parents imaginent tous que leur enfant peut être victime,
08:49 mais on a beaucoup plus de chances d'avoir un enfant
08:52 qui suit le groupe.
08:53 C'est un phénomène de groupe.
08:55 Qui harcèle ?
08:56 C'est important d'en prendre conscience
08:59 parce qu'il faut en parler avec ses enfants
09:02 avant que les choses se produisent.
09:04 -Vous savez que les parents sont hélas absents.
09:06 Parfois absents.
09:07 -Trop sur leur téléphone. -Oui, oui.
09:10 Les enfants laissés...
09:12 -Et peut-être aussi autre chose par rapport aux parents.
09:15 Si votre enfant a été harcelé, ne vous en voulez pas.
09:18 Si votre enfant ne vous a rien dit,
09:20 c'est parce que c'est un choix.
09:22 Il voulait vous protéger et il vous aimait.
09:25 Beaucoup de parents se rendront compte plus tard.
09:28 -Merci infiniment à tous les quatre.

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