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Xerfi Canal a reçu Faouzi Bensebaa, professeur des universités à l'Université Paris-Nanterre, pour parler du marché de la mort. Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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Transcription
00:00 Bonjour Faouzi Benzeba.
00:10 Bonjour Jean-Philippe Denis.
00:11 Faouzi Benzeba, vous êtes professeur de sciences de gestion à Paris-Nanterre Université.
00:15 Faouzi Benzeba, collection de rôles de marché qui est absolument incroyable,
00:21 voilà, qui est une véritable innovation éditoriale, puisque vous parlez « Miroir,
00:26 mon beau miroir », la musique change de disque, la nouvelle jeunesse de l'occasion,
00:30 enfin vous n'êtes pas l'auteur de tous les ouvrages, mais co-directeur de la collection,
00:36 et un ouvrage particulièrement intéressant consacré au business de la mort.
00:41 Et particulièrement intéressant parce que l'ouvrage dote un petit peu,
00:45 mais finalement il prend une actualité aujourd'hui absolument redoutable.
00:50 Alors d'abord le business de la mort, quelques mots sur le business de la mort.
00:53 Alors c'est un ouvrage que j'ai écrit avec Fabien Emas, qui est sorti en 2022,
01:00 donc il n'est pas si vieux que ça, il est toujours d'actualité.
01:03 Et pourquoi on est allé vers la mort ?
01:08 Bon c'est toujours comme pour les autres sujets,
01:11 on cherche un peu les sujets iconoclastes, mais qui sont là, qui sont pas là.
01:15 Et on s'est dit, est-ce que ça fonctionne comme un marché classique ?
01:18 D'autant plus que c'est un marché au combien captif ?
01:21 A ma connaissance, il y aura toujours des morts.
01:24 Donc il y aura toujours des demandeurs, des demandeurs pas de morts.
01:31 C'est un business modèle récurrent.
01:33 Absolument.
01:33 Et des demandeurs, pas de morts, mais d'obstacles.
01:39 Et bien qu'il y ait des différences selon l'espace religieux,
01:45 donc on ne meurt pas de la même manière.
01:46 On va rappeler que c'est un marché réglementé aussi, très réglementé.
01:50 Ou qui devrait fonctionner de manière réglementée,
01:54 parce qu'il y a toujours des gens qui arrivent à contourner la réglementation,
01:59 comme pour tous les marchés, bien entendu.
02:01 Donc on s'est intéressé à ce marché-là.
02:03 On a une demande d'obstacles et là-bas, nous avons des offreurs.
02:09 Les offreurs tenaient le marché de manière ferme pendant des années,
02:13 en tenue, parce que c'est un marché réglementé,
02:16 notamment en France.
02:17 Réglementé, c'est-à-dire que l'État impose une manière de faire,
02:21 une manière de fonctionner.
02:22 Et puis on a creusé.
02:24 Et bien cette réglementation n'est pas si réglementée que ça,
02:28 parce qu'on joue un peu sur les émotions, sur les moments, etc.
02:33 Et là, on voit que ça se passe de manière un peu différente.
02:38 Ensuite, les choses ont évolué.
02:41 Aujourd'hui, on a des...
02:42 Incinération 40 %, c'est incroyable.
02:44 Absolument, parce qu'on ne veut plus l'inhumation traditionnelle.
02:50 Moi, j'ai assisté par exemple à beaucoup d'obstacles.
02:52 Je les trouve très tristes.
02:54 Et donc on a essayé d'imaginer,
02:57 ou des offreurs ont essayé d'imaginer des obstacles plus joyeux,
03:01 un peu à l'africain, vous voyez, ou bien écologiques,
03:04 ou bien on va chercher à enterrer son chien ou son chat
03:09 de manière tout à fait agréable,
03:11 ou bien on va récupérer les cendres qu'on va mettre dans un bijou
03:14 et qu'on va mettre autour du cou.
03:15 Et bien, ça existe.
03:18 On a aussi des cimetières splendides,
03:20 par exemple, le cimetière d'Anières-sur-Seine,
03:24 qui est très connu.
03:25 C'est un cimetière pour animaux.
03:28 D'autres qui croient en l'éternité,
03:30 alors, dis-nous, je meurs, attention,
03:32 je voudrais que mon corps soit préservé.
03:35 Donc, on va congeler la dépouille.
03:38 La cryogénisation.
03:40 Tout à fait.
03:41 Alors, il y a des offrandes, il y a des entreprises qui le font, ça.
03:44 Alors, il y a des argumentations selon les pays, bien sûr.
03:47 Peut-être que demain, la technologie, la science vont évoluer.
03:50 Alors, c'est là que je veux qu'on creuse.
03:54 Business plein d'avenir.
03:55 Vous évoquez Elon Musk, vous évoquez Neuralink,
03:57 vous évoquez le transhumanisme,
04:00 parce que l'avenir du business de la mort,
04:02 c'est finalement la vie éternelle.
04:04 Et vous nous rappelez que c'est,
04:05 voilà, depuis la nuit des temps, le rêve d'éternité.
04:09 Et c'est fascinant,
04:10 vous nous rapportez des cas de robots conversationnels.
04:13 Qui permettent de continuer à faire vivre les morts.
04:18 Exact.
04:19 Par le passé, la chose était, je veux dire, simple.
04:22 On meurt, objecte religieux,
04:24 et puis on promet donc la vie éternelle
04:27 pour ceux qui auraient respecté plus ou moins les préceptes religieux.
04:32 Mais ceux qui n'y croient pas,
04:35 ceux qui ont envie malgré tout d'avoir la vie éternelle,
04:38 comment font-ils ?
04:39 Eh bien, la technologie est arrivée.
04:41 Eh bien, on va parler avec le mort.
04:43 D'abord, on a commencé d'une manière un peu artisanale,
04:46 avec des vidéos qui ont été proposées par des entreprises,
04:51 du vivant, du temps du vivant, donc du défunt.
04:55 Et ensuite, on peut parler avec son papa, avec sa maman,
04:58 avec sa chérie, avec sa soeur, avec qui on veut.
05:01 À Noël, par exemple, la personne est là, il y a une vidéo.
05:04 Quand on regarde ça aujourd'hui,
05:07 ça relève un peu de l'artisanat,
05:10 ou même du Moyen Âge, façon de parler.
05:14 Ensuite, alors la technologie avec l'intelligence artificielle
05:17 a commencé à arriver petit à petit.
05:18 Et là, c'est un robot.
05:20 On va parler avec un robot.
05:22 - Qui a des visages...
05:23 - Un avatar, un avatar, qui va prendre les traits du défunt,
05:28 surtout quand le défunt était jeune,
05:33 était très proche de nous, etc.
05:35 On va lui parler, on va discuter avec lui.
05:38 Eh bien, ça rassure d'une certaine manière les vivants.
05:44 Mais ça pose aussi un problème.
05:45 Pourquoi ça pose un problème ?
05:47 Et comment on fait le deuil ?
05:49 Sur le plan psychologique, là aussi, il y a un marché qui s'ouvre.
05:52 Pour les psychologues, comment aider les gens à l'heure,
05:57 et à l'air, donc de l'intelligence artificielle, à faire le deuil ?
06:01 Puisque le défunt est toujours là, est toujours parmi nous.
06:04 Et ça nous empêche peut-être, non pas de refaire sa vie,
06:08 j'ai horreur de cette expression, mais de continuer la vie autrement.
06:13 Et disons que c'est un vrai challenge pour nous, chercheurs,
06:17 et pour la société dans son ensemble.
06:19 - C'est absolument fascinant.
06:21 Rappelons qu'on peut léguer, enfin, c'est pas qu'on peut,
06:24 Facebook permet de léguer son compte.
06:26 On désigne son héritier ou son héritière de son compte Facebook.
06:30 C'est-à-dire que voilà, on est rentré dans la vie éternelle.
06:34 Et avec ChatGPT, la vie éternelle,
06:36 ça va être la capacité à converser éternellement, potentiellement.
06:41 - Je dirais que les pharaons ont rêvé de ça.
06:44 L'intelligence artificielle a trouvé la réponse.
06:47 - Donc affaire à suivre avec la plus grande attention,
06:50 la mort un business plein, plein, plein d'avenir.
06:54 - L'éternité peut être à moindre coût.
06:56 - Merci Faouzi Benzeba.
06:57 - Je vous en prie, cher Jean-Philippe Denis.
07:00 (Générique)
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