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74.237 détenus pour 60.629 places de prison. C'est la situation de la population carcérale, ou plutôt de la surpopulation carcérale, en France au 1er août. Un niveau record, qui inquiète la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot. Elle a pu observer les conditions d'incarcération des détenus, elle nous raconte ce qu'elle a vu dans les maisons d'arrêt.

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00:00 "Les détenus vivent 21h/24 à 3/4 dans des cellules avec des matelas au sol,
00:05 il y a de la vermine qui court partout, c'est une vision d'enfer."
00:09 74 237 détenus pour 60 629 places de prison.
00:15 C'est la situation de la population carcérale,
00:17 ou plutôt de la surpopulation carcérale en France au 1er août.
00:21 Un niveau record qui inquiète la contrôle générale des lieux de privation de liberté Dominique Simono.
00:27 Elle a pu observer les conditions d'incarcération des détenus, elle nous raconte.
00:31 "Moi j'ai visité des endroits surpeuplés jusqu'à 245%.
00:35 Dans ces conditions, les détenus vivent 21h/24 à 3/4 dans des cellules avec des matelas au sol,
00:43 il y a de la vermine qui court partout,
00:45 ils sont obligés de se mettre du papier toilette dans les oreilles et dans le nez pour pas que les cafards rentrent.
00:51 On y voit des souriants qui vous disent "moi détenu, je refuserai de rentrer dans ces cellules".
00:55 On y voit des détenus qui vous disent "les souriants, pardon, ils pètent les plombes mais c'est normal,
01:02 il y a des violences, c'est normal, on est trop".
01:04 Dans ces cellules, vous entrez, les détenus disent "asseyez-vous" puis ils disent "non,
01:08 vous asseyez-vous, c'est surtout pas un bon conseil, vous n'asseyez pas parce que vous allez rentrer avec des punaises de lit".
01:12 Vous voyez trois grands gaillards avec moins d'un mètre carré par personne pour se mouvoir,
01:18 obligés d'aller aux toilettes devant les autres,
01:21 souvent les portes sont battantes ou n'existent plus,
01:23 elles ont été dégondées pour servir de table parce que dans ces cellules prévues pour un,
01:28 la table est minuscule, donc pour trois ou quatre,
01:32 ils servent de la porte comme d'une table pour pouvoir manger dessus.
01:36 Leurs affaires sont roulées en boule sous des lits superposés.
01:40 Il y a des caillebottis, vous savez, ces grillages très très serrés aux fenêtres qui empêchent la vue,
01:45 qui empêchent l'air et les détenus, ils n'ont d'autre solution que quand il y a la canicule,
01:50 de mettre des serviettes ou des draps mouillés pour se rafraîchir un peu.
01:53 C'est une vision d'enfer.
01:55 Il y a plein d'activités en prison qui se développent,
01:58 seulement un nombre infime de détenus, il y a accès parce qu'il y a trop de monde
02:02 et même pas assez de surveillants pour les y accompagner.
02:05 Parfois ils doivent choisir entre le parloir et la promenade,
02:07 entre la promenade et un cours dispensé par un professeur.
02:14 La prison, moi je suis tout à fait d'accord, elle est là pour punir.
02:17 C'est normal de punir des gens qui ont commis des infractions, des délits,
02:22 mais ce n'est pas normal, la forme que ça prend c'est celle d'une vengeance
02:26 et souvent je le dis, de châtiment corporel.
02:29 Or, la façon dont les gens sont détenus et enfermés,
02:32 forcément elle rejaillira sur la façon dont ils vont se conduire dehors.
02:36 Je veux bien qu'une partie de la population dise que les détenus c'est bien fait pour eux.
02:40 Bon, peu importe ça, ce n'est pas ça le problème.
02:44 Le problème c'est que toute la société va payer ça.
02:47 On paye déjà 110 euros par jour par détenu.
02:50 Combien nous coûte la récidive quand ils sortent ?
02:52 Combien nous coûte l'état dans lequel ils sortent ?
02:54 Ça, ce n'est pas calculé et ça j'aimerais bien qu'on y réfléchisse.
02:58 C'est quelque chose de pragmatique.
02:59 On dirait qu'il n'y a que la prison qui vaille, que seule la prison compte.
03:03 Il faut mettre en place des mécanismes,
03:05 comme ça a été fait pendant la crise sanitaire,
03:07 que quelqu'un sorte 15 jours, 2 mois, 1 mois avant sa fin de peine,
03:12 ce n'est pas un drame, c'est une sortie contrôlée,
03:14 aidée par le juge d'application des peines.
03:16 Le but c'est d'atteindre 100%.
03:18 Ce serait déjà un immense progrès par rapport à 140, 180, 190, 200%.
03:24 Voilà, et c'est arrivé comme ça,
03:27 à desserrer les taux et à faire sortir des gens.
03:30 Le garde des Sceaux nous dit,
03:31 il y a déjà un mécanisme comme ça, d'accord, mais ça ne marche pas.
03:34 Pourquoi ? Parce que ça n'est pas contraignant, parce que ce n'est pas la loi.
03:37 Il dévide tout ce qu'il a fait.
03:39 Mais finalement tout ce qu'il a fait,
03:41 des circulaires, des directives, des incantations,
03:44 des… ça ne servait à rien, la preuve, ça sert grave.
03:48 Je dirais que ni pour lui ni pour moi, c'est un grand succès.
03:51 Moi je l'ai entendu plaider, Eric Dupond-Moretti,
03:54 avec son talent qu'on lui connaît, les conditions indignes de détention,
03:59 c'est paradoxal, n'est-ce pas ?
04:02 Et puis il nous répond, il y aura un grand plan de construction de prison.
04:06 Moi je veux bien, mais en 2010, depuis 2010,
04:10 il y a eu 4 annonces successives par différents gouvernements
04:14 de la création de 15 000 places de prison.
04:16 Vous savez à combien on en est aujourd'hui, en 2023 ?
04:19 De ces annonces successives, si je compte bien, ça fait 60 000 places annoncées.
04:24 On en est à 3 000.
04:25 Je ne comprends pas pourquoi la France rate,
04:27 là où nos voisins européens comme l'Allemagne, l'Espagne, la Hollande,
04:31 je ne vais même pas parler des pays du Nord, parce que réussissent.
04:36 L'Allemagne, ils ont 20 millions d'habitants de plus que nous
04:39 et 15 000 détenus de moins.
04:41 Là, c'est la route des États-Unis, c'est-à-dire plus on punit,
04:43 plus on est content et vous avez vu la catastrophe aux États-Unis.
04:48 C'est un pays qui est rongé par la délinquance et la criminalité.
04:52 [Générique]
04:55 [SILENCE]

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