Le président du groupe Les Républicains au Sénat Bruno Retailleau affirme que "l’avenir de l’Europe se joue" à Lampedusa, après l'afflux de migrants sur l'île italienne.
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00:00 Il est 7h48, Sonia De Villers, votre invitée, sénateur de Vendée, président du groupe
00:05 Les Républicains au Sénat.
00:06 Bonjour Bruno Rotaio, je vous ai aperçu lever les yeux au ciel pendant la chronique de Dominique
00:12 Seux, la vente à perte des carburants ?
00:13 Fausse bonne idée.
00:15 Fausse bonne idée ?
00:16 Très franchement, fausse bonne idée pour deux raisons.
00:17 La première raison c'est qu'on va tuer le petit commerce et on va désertifier une
00:22 fois de plus les zones rurales parce que les indépendants qui sont situés non pas dans
00:26 les grands centres urbains mais plutôt dans les zones rurales vont finalement trinquer.
00:30 Les indépendants, vous parlez des stations services indépendantes ?
00:33 Je parle des stations services indépendantes.
00:35 Elles vont être aidées par le gouvernement ?
00:36 Oui mais voyez, le système est complètement dingue.
00:39 D'un côté on crée les conditions de leur perte et ensuite il faut les subventionner.
00:42 Voilà le problème du modèle français tel que nous le vivons aujourd'hui.
00:47 Et la deuxième raison c'est que penser un seul instant que les grandes surfaces, la
00:51 grande distribution sont des philanthropes, c'est se tromper.
00:54 C'est-à-dire que ceux qu'ils vont perdre à la pompe, ils vont le gagner à la caisse.
00:59 C'est tout.
01:00 Ils feront une sorte de moyenne et d'autres prix augmenteront.
01:04 Le consommateur ne s'en apercevra pas mais il perdra en réalité.
01:07 Lampedusa, c'est le drame de ce week-end.
01:11 Qu'est-ce que selon vous la France doit faire ?
01:16 Est-ce qu'elle doit, comme l'a affirmé la ministre des Affaires étrangères, prendre
01:21 sa part ?
01:22 Je pense que Lampedusa c'est l'île où se joue l'avenir de l'Europe.
01:28 Je pense que le chaos migratoire, on le voit bien, irrite de plus en plus les peuples.
01:32 Et si on n'y apporte pas une réponse qui soit une réponse ferme, déterminée, il
01:36 y aura des insurrections électorales, comme on l'a déjà vu d'ailleurs en Europe.
01:41 Et même quelque part à Mayotte, puisque souvenez-vous, il y a 20 ans, Jean-Marie Le Pen,
01:46 au second tour de l'élection présidentielle, fait 11,8%.
01:50 20 ans plus tard, au second tour, dernière présidentielle, sa fille fait près de 60%.
01:55 Concrètement Bruno Le Payot ?
01:57 Concrètement.
01:58 Je pense que le pacte tel qu'il a été voté par le Conseil européen, par les Etats,
02:02 est une bonne chose, notamment pour avoir ces centres de rétention et pour que les
02:09 dépôts de demande d'asile soient faits aux frontières de l'Europe.
02:13 Je pense pour notre politique migratoire qu'il faut même envisager, pour ce qui
02:17 concerne la France, de pouvoir déposer des demandes d'asile dans des pays sûrs, de
02:21 transit par exemple, mais aussi à l'extérieur de nos frontières.
02:24 Le problème c'est que le droit d'asile aujourd'hui, et en tout cas le pacte européen,
02:28 a été approuvé en juin par le Conseil, c'est-à-dire par les Etats, mais il y a
02:33 une opposition au Parlement.
02:35 Mais je pense que la politique de la fermeté paiera, parce que si on n'est pas ferme,
02:40 le problème c'est que les filières, les mafias, ceux qui pratiquent la traite des
02:44 êtres humains, il y avait dans un grand journal du soir le témoignage de plusieurs femmes,
02:49 hier sans doute vous l'avez lu, qui montraient que pour ces femmes le viol était quasiment
02:59 systématique.
03:00 Et bien, plus on aura une politique laxiste, plus on nous coragera ces pratiques inhumaines.
03:05 Il faut absolument décourager, d'abord par ces moyens-là, le dépôt des demandes
03:11 d'asile aux frontières, la construction de centres de rétention, comme cela a été
03:14 fait en Grèce, sur l'île de Lesbos, dans des conditions humaines bien sûr, mais on
03:19 ne sort pas si, c'est-à-dire ce sont des vrais centres de rétention, si en réalité
03:24 on ne justifie pas par exemple le droit d'asile, le statut de réfugié.
03:28 Marine Le Pen a parlé de submersion migratoire.
03:31 Quelques heures après, Eric Ciotti a parlé lui aussi de submersion migratoire.
03:37 Marion Maréchal s'est rendue sur l'île de Lampedusa et ça a été en termes d'images,
03:44 des séquences abondantes avec les migrants derrière elle, filmées sur les quais de
03:48 l'île.
03:49 Marine Le Pen s'est rendue en Italie.
03:51 Est-ce que vous diriez que l'extrême droite a, on va dire, imprimé cette séquence en
03:56 termes d'images et l'a largement dominée ?
03:59 Madame Van der Leyen s'est aussi rendue aux côtés de Madame Mélanie, président
04:04 du conseil italien, sur place.
04:06 Simplement, on voit bien que cette petite île de 6 ou 7000 habitants qui reçoit un
04:12 afflux de presque 10 000 migrants, ça pose un problème.
04:16 Bien sûr qu'il y a une forme de submersion au sens propre du terme.
04:22 C'est un qualificatif qu'on doit pouvoir employer compte tenu des proportions.
04:26 Il y a un problème que je me pose quand même.
04:28 Il y a un problème avec la Tunisie.
04:29 Il y a un problème avec la Tunisie.
04:30 D'autres ont rappelé néanmoins que cette submersion, comme vous dites, c'est un afflux
04:35 qui a été massif et soudain, mais c'est un afflux qui a été très ramassé dans
04:40 le temps et que dans le même temps, l'Italie, ces derniers mois, a reçu presque 200 000
04:46 ukrainiens sans qu'on parle, par exemple, de submersion migratoire.
04:50 Que l'Europe a accueilli presque 4 millions d'ukrainiens sans qu'on parle de submersion
04:55 migratoire ou d'invasion migratoire.
04:56 Sur les 8 premiers mois de l'année, l'Italie a vu doubler en réalité ces flux de migration.
05:02 Et vous savez très, très bien l'irritation de tous les peuples européens de ce point
05:06 de vue là.
05:07 En France, c'est pratiquement un demi-million par an.
05:09 Quand on ajoute les demandes d'asile, les titres de séjour étudiants ou autres, le
05:15 regroupement familial, plus l'immigration illégale.
05:17 Eh bien, il y a ce sentiment des peuples qui sont dépossédés.
05:19 Ils sont dépossédés de ce droit qui leur est propre de pouvoir contrôler les frontières.
05:24 Et ce que je veux dire, c'est qu'il faudra une politique du donnant-donnant aussi avec
05:29 les pays notamment émetteurs, les pays d'origine.
05:33 J'ai quand même un doute, moi, parce que 200 bateaux, 199 très exactement bateaux,
05:39 en quelques jours, qui partent de Tunisie, les garde-côtes tunisiens n'ont pas pu ne
05:44 pas les voir.
05:45 Donc quelque chose s'est passé.
05:47 Il y a eu un accord, vous savez, avec des millions d'euros à la clé entre notamment
05:53 l'Europe, l'Italie et puis la Tunisie.
05:56 Mais quelque chose qui n'est pas normal s'est passé.
05:58 Et la clé, ce n'est pas seulement le traitement des demandes d'asile, c'est en même temps
06:03 la clé, elle se trouve dans les pays sources, dans les pays d'origine.
06:06 Je veux rappeler quand même que l'Europe est la première puissance humanitaire du
06:10 monde.
06:11 Donc le co-développement de l'Afrique, c'est essentiel.
06:13 Qu'est-ce qui vous différencie du Rassemblement national ? Qu'est-ce qui vous différencie
06:16 de l'extrême droite sur ce dossier ? Vous, les Républicains.
06:19 Je pense qu'on a une approche raisonnable des choses.
06:23 Quand je disais par exemple que le Conseil européen avait posé une première pierre,
06:29 notamment par le traitement des demandes d'asile, voilà une des différences.
06:33 Simplement, nous ne sommes pas laxistes.
06:35 Et je ne calque pas mes propos ni sur la droite ni sur la gauche, ni sur le Rassemblement
06:41 national, ni sur M.
06:42 Macron.
06:43 Je calque toujours mes propos, vous voyez, sur l'intérêt général.
06:46 C'est ma boussole, l'intérêt général.
06:47 Et l'intérêt général nous commande une politique de fermeté, de très grande détermination
06:52 contre l'immigration.
06:53 Dans un mois et demi arrive au Sénat, je rappelle que vous êtes sénateur, président
06:58 du groupe Lehler au Sénat, arrive la loi sur l'immigration proposée par le gouvernement.
07:04 Sacha Ollier, que vous connaissez bien, député de la majorité, président de la commission
07:10 des lois à l'Assemblée, était notre invité la semaine dernière.
07:13 Il s'est affiché, dans Libération, avec le PS, avec l'Ever, avec le Modem, pour
07:17 insister.
07:18 Pas de loi sur l'immigration sans un volet de régularisation des travailleurs dans les
07:23 métiers dits en tension.
07:24 Est-ce que vous campez sur vos positions ? Est-ce que vous refusez toujours de voter
07:28 cette loi si elle maintient ce volet de régularisation ?
07:31 Oui, je voudrais vous expliquer pourquoi nous refaisons.
07:33 D'abord parce qu'on voit bien ce qui est important vis-à-vis des mafias, des filières.
07:37 C'est le signal qu'on émet.
07:39 Or la France, ce n'est pas moi qui le dis, c'est Didier Leschi dans un très bon ouvrage,
07:43 Le Grand Dérangement, et le pays européen le plus avantageux, qui donne le plus d'avantages.
07:47 Bref, les pompes aspirantes, on va en ajouter une.
07:49 Or ce qui est grave, c'est que, en droit français, normalement, on ne doit pas donner
07:54 une prime à la fraude.
07:55 Mais si demain, on régularise massivement, y compris pour des motifs de travail, des
08:00 gens qui sont arrivés clandestinement, alors, alors, on contrevient ce principe.
08:04 Et donc là, on donne une prime à la fraude.
08:06 Par ailleurs, 500 000, 1,5 million d'immigrés aujourd'hui pointent à l'assurance chômage.
08:12 Et l'hôtellerie La Restauration cherche 300 000 travailleurs manquants.
08:17 Juste un instant, Sacha O'Leary a dit à ce micro, a dû à ce micro, a pointé l'hypocrisie
08:23 des parlementaires de droite, députés et sénateurs, qui dans leur circonscription,
08:29 à tour de bras, poussent des demandes de régularisation.
08:35 Pourquoi ? Parce que des patrons de PME viennent leur supplier des travailleurs.
08:39 Pourquoi ? Parce que des patrons de restaurants et d'hôtellerie viennent leur supplier.
08:43 Parce que des patrons d'hôpitaux viennent leur demander de la main-d'œuvre.
08:46 Écoutez, la main-d'œuvre, elle est là, elle est en France.
08:48 Qu'est-ce que vous faites des 1,4 million de jeunes, au moment où je vous parle, qui
08:52 sont ni à l'école, ni en stage, ni en emploi ? Qu'est-ce que vous faites des près de
08:56 2 millions de Françaises et de Français qui sont au RSA ? Qu'est-ce que vous faites
09:00 des près de 3 millions de Français qui pointent au chômage en catégorie A ?
09:04 Alors, je comprends, moi, qu'il y a un certain nombre de patrons qui aimeraient bien avoir
09:08 une main-d'œuvre qui soit peu chère, qui fasse une pression, si j'ose dire, sur les
09:12 salaires en France.
09:13 Mais il faut rester raisonnable.
09:15 Je ne veux pas d'une capitulation.
09:16 Il faut d'abord remettre au travail ceux qui en sont privés.
09:20 Et par ailleurs, il existe bien sûr des procédures à la main des préfets, de régularisation,
09:25 ponctuelles, en s'assurant qu'il y ait bien un contrat de travail, en s'assurant
09:30 qu'il y ait bien une vraie assimilation.
09:31 Vous êtes catholique et pratiquant ?
09:34 Ça, c'est mon domaine réservé, si j'ose dire.
09:37 J'avais, avec Léa Salamé, l'habitude de questions…
09:42 Vendredi, le pape François prévoit de se recueillir au mémorial dédié aux migrants
09:49 disparus en mer.
09:51 Il rencontrera le président de la République française et il abordera ce sujet des migrations
09:56 et de l'immigration.
09:57 Est-ce que vous considérez, comme Marion Maréchal, que le pape en fait trop sur les
10:00 migrants ?
10:01 Non, moi, je considère que le pape est dans son rôle et qu'il nous donne un idéal
10:06 de vie.
10:07 Mais vous voyez bien que…
10:09 Engageons-nous à être des portes toujours plus ouvertes, a dit le pape au mois d'avril.
10:14 Mais si cet idéal consistait à faire venir en France toute la misère du monde, qu'est-ce
10:18 qui se passerait ? Il y aurait une insurrection civile, il y aurait de la violence.
10:22 Donc le pape n'est pas réaliste ?
10:23 Mais je veux dire qu'il y a deux ordres.
10:25 C'est marrant parce que vous êtes très attachés à la laïcité.
10:28 Il y a un ordre spirituel, religieux, et puis il y a un ordre temporel.
10:32 Et mélanger les deux, c'est ce qu'on appelle, dans une expression populaire, « paver l'enfer
10:37 de bonnes intentions ». Mais tout ça mène à l'enfer malgré tout.
10:39 Et le président de la République fait bien de se rendre à la messe ?
10:42 Oui, il s'est rendu à la messe du couronnement de Charles III.
10:45 Charles III, chef d'État, Charles III, patron de l'église anglicane.
10:49 Pour autant, il n'est pas devenu royaliste.
10:51 Merci Bruno Retailleau.
10:54 Et merci Sonia Devilleur.
10:55 7h59.