Le journaliste, poète et écrivain, Omar Youssef Souleimane est l'invité d'Elodie Suigo ce mardi 26 septembre. Son nouveau livre autobiographique "Être Français", vient de paraître aux éditions Flammarion.
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00:00 - Bonjour Omar Youssef Souleyman. - Bonjour.
00:02 - Vous êtes journaliste, poète et écrivain français.
00:04 Vous êtes né près de Damas, en Syrie, avant de passer votre enfance en Arabie
00:08 saoudite, où vous avez suivi une éducation coranique avec comme lecture,
00:11 en parallèle, les deux poètes, Paul Éluard et Louis R.
00:14 Ragon. Vous avez ensuite été correspondant de presse syrienne avant de vous enfuir
00:17 de Syrie, qui était à feu et à sang.
00:19 C'était en 2012, c'est à Paris que vous atterrirez enfin avec
00:23 cette exfiltration. En France, donc, dix ans plus tard, en 2022,
00:28 vous êtes devenu citoyen français après un parcours compliqué, parfois désespérant,
00:32 vous plongeant aussi dans une solitude et une détresse profonde.
00:36 Mais cette France, vous l'aimez.
00:37 Vous avez même un attachement littéraire presque charnel, vous le dites,
00:41 pour ce pays d'adoption.
00:43 C'est d'ailleurs ce que vous racontez dans ce livre "Être français", qui vient de sortir
00:46 chez Flammarion. Après "Le petit terroriste", "Le dernier Syrien" et "Une chambre en exil",
00:50 voici une nouvelle histoire emplie d'espoir.
00:52 Dans "Une chambre en exil", vous écriviez "Ma vie ressemble à celle d'une tortue,
00:55 mon sac et ma maison". Aujourd'hui, votre sac est posé, rangé dans votre nouveau
01:00 chez vous, quelque part dans votre nouveau pays en France.
01:03 Omar Youssef Suleiman, il y a donc une lumière au bout du couloir ?
01:06 - Évidemment. Merci pour cette belle présentation.
01:10 Je suis touché. Évidemment, il y a de la lumière parce qu'on ne peut pas vivre sans
01:14 cette lumière.
01:15 D'une manière ou d'une autre, on est condamné à l'espoir, surtout après tout ce
01:20 qu'on avait perdu à cause de l'exil, à cause de la guerre dans son pays
01:24 maternel. Et je pense que cette perte nous pousse encore plus à avoir l'espoir,
01:29 mais l'espoir réel.
01:30 Aujourd'hui, comme vous avez dit, je suis un citoyen français.
01:33 Je lutte en France.
01:36 J'ai mes propres causes dans mon nouveau pays.
01:39 Je suis plongé dans ce pays.
01:41 Et évidemment, il y a l'amour envers la France, mais ce n'est pas un amour
01:46 aveugle. Ce n'est pas un amour lié d'une manière ou d'une autre à la
01:50 responsabilité sur la France.
01:55 Cette responsabilité, on peut l'exprimer, on peut l'envisager
01:59 par l'engagement, par avoir
02:05 d'être lié ou d'être engagé d'une manière ou d'une autre.
02:11 Par exemple, l'année dernière, pendant les élections présidentielles, j'étais
02:15 tellement ému, j'étais tellement touché de voter pour la première fois de ma vie.
02:19 Vous pouvez imaginer la situation pour un Syrien qui n'a jamais vécu, qui a passé
02:23 sa vie au barabon dans un régime dictatorial, qui vote, c'est à dire
02:28 sa voix compte, c'est à dire sa vie compte dans son nouveau
02:33 pays. Alors pourquoi j'ai l'amour pour cette France?
02:37 Parce que tout simplement, la France m'a sauvé la peau.
02:40 La France m'a protégé de la dictature et la France m'a offert ce
02:45 cadeau qui s'appelle la citoyenneté, que je n'ai jamais eu pendant toute ma
02:48 vie précédente. Et la France m'a donné aussi la possibilité
02:53 de m'exprimer et d'avoir une résistance d'une manière ou d'une autre
02:58 dans cette démocratie.
02:59 Comment vous avez vécu vos premières minutes quand on vous a annoncé que vos
03:03 papiers d'identité vous attendaient?
03:05 Qu'il ne nous manquait plus que vous pour les récupérer.
03:08 Vous pouvez imaginer, c'est à dire pendant toute ma vie, je n'avais pas,
03:12 moi je dis toujours que les Syriens sont nés comme des exilés, dans un pays
03:16 sans aucun droit, sans aucune liberté d'expression.
03:21 C'était la première fois après avoir vécu dix ans en France comme un patriote.
03:25 Voir ce papier, cette lettre envoyée par le chef de l'État et une autre
03:32 par le ministre de l'Intérieur, c'est à dire avoir un passeport pour
03:37 la première fois après avoir passé dix ans en exil, c'est un sentiment
03:41 incroyable. Et j'avais le sentiment de, comme si la France est ma nouvelle
03:47 mère. Parce qu'à ce moment là, si vous voulez, je n'avais pas la personne
03:51 la plus intéressante pour moi à voir à mes côtés.
03:54 C'était ma mère biologique que je n'avais pas vue, que je n'ai toujours pas vu
03:57 depuis onze ans, lorsqu'elle vit en Syrie.
04:00 Et j'avais cependant cette femme, cette personne n'était pas à mes côtés.
04:06 Donc il y a toujours quelque chose qui manque dans l'exil.
04:09 Et le manque nous pousse, on nous encourage à chercher à quelque
04:14 chose qui nous remplace peut être pour, comme on dit, tisser le vide
04:19 ou pour omblir certaines blessures peut être de l'exil.
04:25 Donc à ce moment là, j'avais l'impression que je pouvais considérer
04:30 la France comme ma nouvelle mère et c'est toujours le cas.
04:32 - On comprend à travers vos mots d'ailleurs à quel point c'est un
04:35 arrachement d'arriver dans un nouveau pays.
04:38 À quel point il y a un sentiment même limite de culpabilité, de trahison,
04:42 d'avoir laissé les siens, de ne pas être resté dans le pays d'origine.
04:46 Vous avez encore ce sentiment là aussi ou pas ?
04:48 - Je l'ai, mais beaucoup moins qu'avant.
04:52 Tout simplement parce que j'ai aussi cette hypothèse.
04:55 Je me dis toujours si je suis resté en Syrie, ça ne changera rien.
05:00 Au moins ici en France, j'ai la possibilité d'aider ma famille
05:03 d'une manière ou d'une autre.
05:04 Mais si j'étais resté en Syrie, je serais mort.
05:07 C'est sûr et certain parce que j'étais déjà condamné à mort avant de sortir
05:11 de la part de la police syrienne.
05:12 Vous savez, le sentiment de vivre nulle part, d'être suspendu,
05:18 accroché entre le ciel et la terre.
05:19 C'était ça, mes sentiments, en arrivant en France, sans connaître le système,
05:24 sans parler aucun mot en français.
05:25 En Syrien, j'étais comme un chiffre.
05:28 Et c'était un sentiment très difficile, mais aussi recommencer sa vie de zéro
05:34 à l'âge de 25 ans.
05:35 Ça nous offre une très grande liberté, énorme.
05:39 Et c'est ça, en fait, ce pourrait être aussi...
05:42 On peut considérer ça comme un cadeau de l'exil.
05:44 - Quand on lit cet ouvrage, on se rend compte à quel point
05:48 l'expression "parcours du combattant" colle parfaitement avec ce que vous
05:52 avez vécu, parce que vous êtes un combattant de la paix.
05:55 L'idée, c'était de libérer votre pays, effectivement, d'un régime
05:59 qui ne vous convenait pas.
06:00 Le point de départ, c'est ça, d'ailleurs.
06:01 C'est que vous décidez la suite d'une immolation qui est survenue,
06:06 qui est arrivée finalement en Égypte, parce que ce peuple s'est levé
06:10 en Tunisie. Le peuple s'est levé en Égypte.
06:13 Et vous, derrière votre télé, alors que vous étiez en train d'étudier
06:16 la littérature arabe, vous avez eu envie de vous lever pour votre
06:19 pays en vous disant "c'est maintenant ou jamais".
06:21 Le fait d'avoir participé, effectivement, à cette manifestation,
06:25 vous étiez très peu nombreux, vous a condamné à mort.
06:28 C'est à partir de ce moment-là, effectivement, que vous êtes obligé
06:31 de quitter votre pays et vous raconter votre histoire.
06:34 Vous êtes obligé de quitter votre pays et vous raconter cet échange
06:37 avec votre mère. Votre mère, tout de suite, elle a peur pour vous
06:39 parce qu'elle a vécu ça et elle a fait partie des gens qui n'ont
06:42 pas réussi à changer les choses.
06:45 On a l'impression que vous étiez persuadé que vous réussiriez
06:48 à changer les choses.
06:49 Tout à fait. On était très enthousiastes.
06:51 C'était un grand rêve.
06:53 Il y a une phrase de l'écrivain Mark Twain.
06:56 Il dit "ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait".
07:00 Cette phrase résume notre situation à l'époque, comme
07:03 une génération, comme des jeunes Syriens,
07:09 je dois dire. Ma mère a vécu, ou la génération de ma mère,
07:12 a vécu les années 90 et 80, où il y avait des combats
07:17 atroces entre le régime dictatorial en Syrie et les frères musulmans.
07:20 Ils n'avaient plus aucun espoir qu'un changement arriverait en Syrie.
07:24 Nous, on n'a pas vécu ça.
07:25 Et on était vraiment des rêveurs, parce que c'était très
07:30 difficile, très compliqué, c'était impossible.
07:32 Même aujourd'hui, quand je visualise la scène,
07:35 comment on a osé manifester à Damas et crier "liberté",
07:40 c'était très dangereux, c'était même suicidaire.
07:42 Mais je pense que c'était aussi Annabel, ce qui nous a encouragés à l'époque,
07:47 c'était l'étincelle qui était déclenchante, comme vous avez dit,
07:51 en Tunisie, puis en Égypte, puis au Yémen et en Libye.
07:53 Et ces peuples ont réussi. Alors, on se disait toujours, pendant des
07:57 mois, pourquoi pas nous ? C'est notre tour.
08:00 Nous aussi, on a la possibilité, parce qu'il est insupportable.
08:03 Nous ne voulions pas être, nous ne voulions plus être condamnés au régime Assad,
08:07 cette mafia qui vole et viole la Syrie depuis plus de 50 ans,
08:10 jusqu'à toute sa vie, même pour nos enfants.
08:14 Alors, on était des rêveurs, on était peut-être des suicidaires, mais
08:18 honnêtement, évidemment, ce grand rêve est devenu un cauchemar plus tard,
08:22 quand une guerre civile atroce qui a déchiré la Syrie.
08:25 Et c'est toujours le cas, pour plein de raisons.
08:27 Ce n'est pas le moment de les traiter.
08:31 Mais je veux dire qu'honnêtement, aujourd'hui, je ne regrette pas.
08:34 Je ne regrette pas. On a tout perdu.
08:36 Mais ce moment, ce cri de liberté, ce combat
08:40 méritait d'être pratiqué d'une manière ou d'une autre.
08:44 Aujourd'hui, peut-être on a perdu, peut-être on va gagner
08:48 un jour à travers une nouvelle génération qui porte cette étincelle,
08:52 cette flamme de liberté.
08:53 Mais mon propre combat est divisé entre la Syrie et la France,
08:57 parce que je pense que la révolution, comme vous avez dit, la révolution pour la paix,
09:01 on peut la pratiquer n'importe où, pas forcément sur une seule terre ou un seul pays.
09:06 Aujourd'hui, mon combat, c'est dans mon nouveau pays, la France,
09:10 que je considère, comme je dis toujours, qu'en fait,
09:13 aujourd'hui, ma seule communauté, c'est la France, qui pourrait être aussi
09:16 mon combat en France, c'est aussi mon combat en Syrie.
09:19 - Ce qui vous a valu la peine de mort, c'est effectivement que vous soyez positionné,
09:22 que vous ayez fait participer à cette manifestation contre le régime
09:26 et cette envie de crier ce mot "liberté".
09:28 C'est quoi la liberté ?
09:29 - De vivre, pour moi, c'est très simple, de vivre, de s'exprimer
09:34 et de crier, c'est un manuel personnel, et de dire tout ce qu'on souhaite,
09:40 sans avoir un policier qui frappe sur notre porte
09:44 et nous emprisonne d'une manière ou d'une autre, sans avoir, en fait,
09:46 tout simplement sans avoir des oreilles sur les murs,
09:50 sans avoir, sans traiter les murs par des oreilles.
09:55 Comme on dit, on sait, on dit ça aussi en France.
09:57 Donc, je pense que c'est très simple.
09:59 Donc, chacun et chacune vit sa vie tranquillement, tout simplement.
10:02 - Le livre démarre sur vos premiers pas et les premiers regards que vous posiez sur la France.
10:06 Vous venez d'arriver, vous avez froid, vous écrivez "J'éprouve un froid différent dans le cœur,
10:11 celui du déracinement".
10:12 Vous avez choisi la France, Omar, parce que...
10:15 - La France m'a choisi aussi.
10:16 - Voilà, c'est ça, parce qu'elle avait la réputation d'être le pays
10:18 qui protège les journalistes réfugiés politiques.
10:21 Et à Paris, il y a "Reporters sans frontières".
10:23 Vous dites qu'il y avait également aussi la littérature.
10:26 C'est limite ce qui vous fait craquer, d'ailleurs,
10:29 le fait de pouvoir vous rapprocher davantage de la littérature et de la culture française.
10:33 - Il me fait toujours craquer, c'est pendant les premières années en France.
10:36 Évidemment, je n'ai pas trouvé ni "Paul-Éloir", ni "La lumière",
10:41 ni, vous savez, ni ce cliché envers de la France.
10:46 Parce que l'image de la France au Proche-Orient, c'est ça, en fait.
10:48 Surtout pour quelqu'un qui a étudié la littérature là-bas.
10:50 Au début, j'ai trouvé, à la place de "Paul-Éloir",
10:53 j'ai trouvé le "RERB", à la place de la littérature,
10:57 le théâtre, la musique, le parfum, toute cette douceur française.
11:00 J'ai trouvé la préfecture de 93, ça n'a rien à voir l'un avec l'autre.
11:04 Mais vous savez, aussi, sans vivre ces années,
11:07 c'est-à-dire que j'ai passé environ les premiers trois ans de ma vie en France,
11:13 dans ce cadre, entre apprendre la langue française à Wabini,
11:18 où j'ai commencé de zéro, la langue française,
11:22 et aussi les papiers administratifs, qui sont très, très simples.
11:26 Ce n'est pas vrai, bien sûr.
11:27 En France, même les Français, jusqu'à aujourd'hui,
11:30 en fait, ne comprennent pas ce que c'est les papiers administratifs.
11:32 Et voilà, le métro.
11:36 Donc, je pense qu'on dit en France "Métro-Boulot-Dodo", à Paris.
11:39 Je pense qu'un réfugié, c'est "Métro-Français-Préfecture", tout simplement.
11:44 Et donc, sans vivre dans ce cadre, dans cette atmosphère si dure,
11:49 si grave, si cruelle même,
11:51 j'ignorais jusqu'à aujourd'hui la France de bas,
11:55 l'autre visage de la France qui est si dure et si difficile à vivre.
11:59 Et c'est comme ça, grâce à cette période, il y a toujours l'espoir,
12:03 il y a toujours des points positifs.
12:04 Grâce à cette période si difficile, aujourd'hui, je connais,
12:07 je reconnais même tous les visages et tous les côtés de mon propre pays,
12:11 mon nouveau pays qui s'appelle la France.
12:13 - Vous avez craqué pour cette langue française qui vous a...
12:16 - Pas grave.
12:17 - Qui vous a vraiment tant torturé, parce que de l'apprendre,
12:20 ça a été très, très compliqué.
12:22 On a deux façons différentes de parler, entre le français et l'arabe,
12:26 enfin, entre le français et la langue arabe.
12:28 Et vous vous êtes accroché.
12:30 - Je suis très accroché. Vous savez, au début, c'était très difficile
12:34 parce que c'est très, très loin de l'arabe.
12:37 Le français fait partie d'une autre famille linguistique.
12:40 On écrit de gauche à droite, en arabe de droite à gauche.
12:43 Les prononciations de lettres, ça a pris des mois.
12:46 Entre la différence entre le masculin et le féminin,
12:49 entre le français et l'arabe, laissez tomber, c'était très, très compliqué.
12:51 C'est jusqu'à aujourd'hui, je me trompe d'ailleurs.
12:52 Mais je pense que vivre en comparaison, c'est très intéressant,
12:56 vivre en comparaison linguistique, comme j'ai déjà étudié la littérature arabe en Syrie.
13:00 Je comparais toujours ma langue maternelle avec la langue française.
13:02 Et c'était passionnant, c'était très beau.
13:04 Une fois que j'ai terminé mon premier livre,
13:08 le premier livre en français, qui était un livre de Christian Boban,
13:12 qui est mon auteur préféré, et je rends hommage à lui,
13:16 qui est décédé il y a quelques mois.
13:17 J'avais ce sentiment, le début d'une sorte d'intégration linguistique.
13:23 C'était très beau.
13:24 C'est-à-dire, je m'identifiais à la langue française.
13:26 Je trouvais que la langue française est tellement spacieuse, tellement riche.
13:30 Et après des années plus tard, à peu près trois ans plus tard,
13:35 j'ai commencé à écrire en français.
13:38 Vous savez, tous mes livres que vous avez cités, y compris "Être français",
13:42 je les ai écrits en français.
13:44 C'est-à-dire, la langue française, avec le temps, est devenue mon propre pays.
13:48 Et ça, c'est...
13:51 À travers cette langue, je trouve mon nid chaleureux, d'une manière ou d'une autre.
13:56 - En tout cas, ce qui est certain, c'est que cette France, vous l'aimez.
13:59 Ça, c'est sûr. Ce livre raconte votre parcours, mais il montre une chose très importante et essentielle.
14:03 C'est l'importance d'avoir accès à la culture.
14:05 On se rend compte aussi à quel point les dictateurs de nombreux pays,
14:09 justement, coupent l'accès à la culture.
14:12 - Bien sûr. En comparaison avec la France, ça n'a rien à voir.
14:16 C'est pour ça que je ne suis pas d'accord avec le terme qui circule ces dernières années,
14:20 qui s'appelle la dictature sanitaire, la dictature française,
14:23 qui a été exprimée par les Gilets jaunes et plus tard par
14:27 les manifestants contre le pass sanitaire.
14:29 Une fois qu'ils savaient que je venais de la Syrie, ils me disaient "oui, Macron, c'est comme Bachar el-Assad,
14:34 c'est bon, donc ici, on est en dictature masquée.
14:37 En Syrie, c'est une dictature visible.
14:39 C'est inacceptable parce qu'en faire cette comparaison, je pense que c'est dangereux, car
14:43 premièrement, ça donne en sorte d'innocence à Bachar el-Assad,
14:50 qui a massacré plus de 500 000 personnes de son peuple.
14:52 Et deuxièmement, ça donne en sorte de légitimité de lutter en France avec des armes.
14:57 C'est très dangereux parce que dans un pays dirigé par un régime dictatorial,
15:01 les manifestations pacifiques ne fonctionnent pas.
15:04 Évidemment, en France, on n'est pas en dictature.
15:06 - Vous êtes loin de votre maman.
15:08 Votre papa est décédé depuis que vous êtes en France.
15:11 Évidemment, ce sont des moments très, très durs pour vous à vivre.
15:14 Comment vous vivez ça ?
15:15 Comment vous continuez à garder contact avec eux ?
15:17 Avec ceux que vous aimez, votre mère et le reste de votre famille ?
15:22 - Il y a une distance qui grandit tous les jours dans le cœur.
15:26 Quand on est déraciné dans son pays maternel,
15:29 ma mère et tous mes proches en Syrie ont changé depuis ces 11 ans jusqu'à aujourd'hui.
15:37 Moi aussi, j'ai beaucoup changé.
15:38 Il y a évidemment le manque, la tristesse, la solitude.
15:42 Tout ça, c'est difficile.
15:43 Il y a la perte parce que toutes ces années, on ne peut pas les rattraper,
15:46 même si on se voit à l'avenir.
15:47 Ce changement, j'avoue que si je pourrais voir ma famille un jour,
15:55 ma mère un jour, il y aura toujours cette distance.
15:58 Je pense qu'à travers cette théorie, cette réalité, disons,
16:05 on est condamné à l'exil.
16:07 Pour ça, je dis toujours que je suis français exilé en France.
16:11 Il y a les deux.
16:12 Et pour la communication avec ma famille, c'est très compliqué.
16:17 Je ne peux pas raconter des détails parce qu'ils sont toujours en Syrie,
16:21 mais on n'arrive pas à se communiquer facilement.
16:24 On a des moyens, mais très légers pour leur sécurité.
16:28 Pour terminer, ce livre, c'est un livre d'espoir.
16:31 Donc, il faut y croire.
16:35 Un espoir, mais un espoir est force aussi, je pense.
16:38 Évidemment, il faut le croire parce que, comme je disais tout à l'heure,
16:41 on est condamné à l'espoir, mais aussi, il faut être fort pour pratiquer cet espoir.
16:44 Donc, comme le disait Paul Lénuère, il n'y a pas de hasard,
16:47 il n'y a que des rendez-vous alors.
16:48 Toujours.
16:48 Merci beaucoup Omar Youssef Suleiman d'être passé dans le monde d'Elodie
16:53 sur France Info. Ça s'intitule "Être français, c'est votre dernier ouvrage".
16:56 Et c'est sorti aux éditions Flammarion.
16:58 Merci beaucoup.
16:59 Merci, ça me plaît.