Pauvreté : "Il y a urgence" s'alarme Françoise Dessertine, présidente de la Banque Alimentaire de l'Isère

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00:00 Vous avez la parole chaque matin et ce matin on se penche au chevet des associations caricatives du département.
00:04 Oui elles aident des milliers de personnes mais elles ont aussi maintenant besoin d'aide.
00:09 Elles sont en calaire comme l'illustre le cri d'alarme par exemple des Restos du Coeur début septembre, un parmi d'autres.
00:15 Alors comment aider les personnes précaires ? Est-ce que vous donnez aux associations caricatives ?
00:19 Et si vous bénéficiez aussi de l'aide de ces associations ?
00:22 On venait témoigner ce matin, un seul numéro, 04 76 46 45 45.
00:27 Et pour nous éclairer sur la situation, la présidente de la Banque Alimentaire de l'ISER. Bonjour Françoise de Sertin.
00:33 Bonjour.
00:33 Merci d'être avec nous ce matin. Vous lancez, on le disait tout à l'heure, une collecte de lait particulièrement aujourd'hui et demain.
00:40 Pourquoi ce produit spécifiquement ?
00:43 Alors nous nous sommes retrouvés au mois de juin avec un déficit extrêmement important en lait lié essentiellement à l'inflation
00:52 parce que nous achetons le lait à la Banque Alimentaire de l'ISER grâce à des fonds européens.
00:57 Ces fonds, le montant en est déterminé pour 6 ans, il est fixe pour 6 années.
01:02 Et donc on a acheté en 2023 du lait avec un montant alloué en 2019.
01:08 D'accord, depuis les prix ont monté.
01:10 L'inflation était passée par là et du coup la quantité de lait a été réduite de 40% ce qui est considérable.
01:16 Donc il y a urgence là.
01:17 Il y a absolument urgence parce qu'on a absolument plus de lait dans l'entrepôt.
01:23 Continuer à distribuer du lait c'est essentiel parce que nous avons une augmentation énorme des personnes qui ont recours à l'aide alimentaire.
01:30 10 000 chaque semaine on le disait.
01:32 Alors en ISER on approvisionne oui 10 000 personnes.
01:36 On a franchi ce chiffre un peu emblématique.
01:40 C'est un record dont on se serait bien passé.
01:43 On était à un peu plus de 8 000 au mois de janvier.
01:46 Donc ça vous donne l'étendue de la croissance.
01:49 On a énormément d'enfants aussi.
01:51 C'est ça qui nous a mobilisés.
01:53 On va revenir sur les profils effectivement de vos bénéficiaires dans un instant.
01:57 Je veux d'abord aller au standard de France Bleu ISER.
01:59 Retrouvez André. Bonjour André.
02:01 Oui bonjour.
02:02 Vous vous êtes bénévole également dans une association caritative qui utilise justement les services de la banque alimentaire.
02:08 Quelle est votre situation aujourd'hui ?
02:10 Notre situation aujourd'hui c'est vrai que bon...
02:13 Alors aujourd'hui on a un stock de déficit on va dire assez important.
02:20 Parce que au niveau de tout ce qui est sec, boite de conserve, pâtes, riz, c'est vrai que c'est limite.
02:30 Les stocks sont à flux tendu ?
02:32 Oui c'est ça oui.
02:33 Et vous voyez aussi de plus en plus de personnes faire appel à vos services ?
02:37 Oui oui encore une personne est venue hier nous solliciter faire partie des bénéficiaires.
02:46 Parce que bon voilà ils n'y arrivent absolument plus du tout.
02:49 On a encore pris une autre personne encore hier.
02:53 Donc c'est vrai qu'on arrive à pas mal de monde à l'heure actuelle.
02:57 Donc moi je trouve personnellement que c'est très important
03:03 que beaucoup de monde mette la main au portefeuille pour qu'on puisse justement aider toutes ces personnes dans le besoin.
03:10 Et vous vous êtes à la MURE André Picconato, vous êtes bénévole à l'association Beurre-Epinard.
03:15 Merci beaucoup de nous avoir appelé, de nous avoir décrit votre situation qui, Françoise de Sertin,
03:21 une situation qui est partagée par beaucoup d'associations.
03:24 Vous voyez effectivement le nombre de bénéficiaires augmenter et beaucoup de jeunes vous nous le disiez.
03:29 Alors effectivement on voit arriver des associations avec lesquelles la Banque Alimentaire est partenaire.
03:37 Nous on travaille avec un réseau de plus de 98 associations sur l'ensemble du département de l'ISER.
03:42 Ce qu'on constate effectivement c'est une évolution des personnes concernées.
03:46 On a de plus en plus de travailleurs.
03:49 20% des personnes qui adressent l'aide alimentaire ont un CDI.
03:55 Donc ne sont pas, si vous voulez, normalement en précarité, ne devraient pas être en précarité.
04:02 Et ça c'est nouveau, vous ne le voyez pas avant.
04:04 Dans ces chiffres-là, c'est tout à fait nouveau.
04:07 On voit également arriver énormément de femmes seules avec enfants.
04:12 On voit également arriver énormément d'étudiants, évidemment.
04:18 Et beaucoup plus à cette rentrée qu'à la rentrée précédente.
04:21 Donc on soutient les associations étudiantes qui font de la distribution alimentaire.
04:27 Mais aujourd'hui, on les a rencontrées à la rentrée, elles sont débordées.
04:33 On voit arriver aussi des nouveaux retraités, si je puis dire.
04:38 C'est-à-dire que ce sont des personnes qui font valeur à leur droit aujourd'hui.
04:42 Et qui ont subi les différentes réformes de retraite qui se sont empilées.
04:47 Et qui font que même lorsqu'on a travaillé toute sa vie, qu'on a ses 42 années de cotisation,
04:53 parfois on se retrouve avec un montant de retraite qui est inférieur à 1000 euros.
04:58 Et quand on a moins de 1000 euros pour vivre, aujourd'hui, avec un appartement, des factures d'énergie, etc.
05:05 On n'arrive plus à s'acheter à manger.
05:09 Des personnes très variées, et de plus en plus nombreuses qui arrivent chez vous.
05:12 - France Bleu Isère, 7h51, comment lutter contre la précarité ? On en parle ce matin avec vous au 04 76 46 45 45.
05:19 Et notre invitée, Françoise Decertine, présidente de la Banque Alimentaire de l'Isère.
05:23 - Et face à ces bénéficiaires, ces personnes en difficulté de plus en plus nombreuses, vous avez aussi besoin de bras.
05:29 Françoise Decertine, et justement il y a un bénévole, une bénévole au standard de France Bleu Isère.
05:34 Bonjour Nicole. - Oui bonjour.
05:37 - Expliquez-nous, vous êtes bénévole aussi pour une association caritative.
05:41 - Alors, moi je suis bénévole pour une association, mais je suis également la secrétaire l'animatrice du collectif des associations de bénévoles luttant contre la précarité sur la région grenobloise.
05:54 - D'accord, et comment évoluent vos effectifs, justement, de bénévoles ?
05:57 - Alors, nos effectifs, ils n'évoluent pas dans le bon sens, dans la mesure où c'est difficile au quotidien de lutter, de donner de son temps, sans qu'il y ait de solution au bout.
06:09 La situation est loin de s'améliorer et je voulais déjà dans un premier temps, au nom du collectif, remercier la BAI pour tout le soutien qu'elle apporte à nos associations au quotidien.
06:18 On a besoin d'eux, ils sont présents, ils font ce qu'il faut. On voudrait les remercier.
06:24 Nous, au sein des associations, on a des problèmes de recrutement, des problèmes de vieillissement de bénévoles.
06:29 - D'accord, pas assez de jeunes qui viennent vous voir.
06:32 - Pas assez de jeunes et on peut le comprendre, je vous assure que lutter tous les jours, donner de son temps et quand on voit que la situation ne fait que s'empirer, c'est difficile.
06:43 - C'est usant.
06:44 - C'est usant. On fait les mêmes constats que la BAI.
06:47 Des nouvelles populations qui arrivent, des gens qui travaillent, des femmes seules.
06:51 On peut vous donner un exemple chiffré ?
06:54 - Rapidement, qu'on donne la parole aussi.
06:56 - Au niveau des soupes, on distribue des soupes en projet qui date d'il y a 7 ans.
07:01 On distribuait 4 000 soupes le samedi et le dimanche dans la semaine.
07:05 Aujourd'hui, on en distribue 12 000 avec les mêmes budgets.
07:08 - Effectivement.
07:09 - Et on ne peut plus.
07:12 - On entend effectivement votre sentiment.
07:14 Merci beaucoup Nicole de nous avoir appelé de Montféra ce matin.
07:17 Votre réaction Françoise de Sertine ?
07:19 - Alors effectivement, Nicole a raison.
07:22 On fait face à un vieillissement des bénévoles.
07:26 Nous on a quand même deux noyants à la Banque Alimentaire de l'Isère qui ont 86 et 87 ans
07:31 qui viennent toutes les semaines préparer des palates.
07:34 Donc on est quand même assez fiers de ça.
07:37 - Mais vous avez besoin de jeunes ?
07:39 - On a besoin de jeunes.
07:41 C'est très compliqué pour les jeunes de s'impliquer.
07:43 D'abord parce que quand vous êtes jeune, vous travaillez.
07:46 Vous avez des enfants, vous avez des charges de famille, etc.
07:50 La Banque Alimentaire de l'Isère, c'est une structure relativement importante.
07:55 On a aujourd'hui 180 bénévoles.
07:57 On demande des engagements un peu impliquants si vous voulez.
08:01 Nous la solution qu'on applique aujourd'hui,
08:05 on travaille beaucoup avec les entreprises du bassin grenoblois.
08:09 Parce que certaines entreprises ont des obligations au regard du RSE.
08:14 - Responsabilités sociales et environnementales.
08:17 - Voilà exactement.
08:18 On travaille notamment avec le Fonds de dotation Sésame
08:21 qui regroupe 34 des entreprises du bassin grenoblois.
08:24 Ce week-end, on va avoir une cinquantaine de salariés de ces entreprises
08:29 qui vont être aux côtés des bénévoles de la BAI
08:32 pour la collecte de lait dans les deux grands hypermarchés
08:36 Le Claircomboire et Carrefour Mélan.
08:39 On est assez fiers de ça.
08:41 - Donc il y a des dispositifs qui permettent de pallier au manque de bénévoles ?
08:44 - Alors ça permet à des salariés d'entreprise
08:51 de s'engager sur quelques heures,
08:54 de mettre un pied dans un engagement bénévole associatif,
08:59 de mieux connaître cet environnement associatif
09:02 et éventuellement de décider de s'engager un peu plus.
09:07 C'est un premier teaser si je peux m'exprimer ainsi.
09:10 - Le gouvernement a présenté il y a dix jours son plan pauvreté,
09:13 des petits déjeuners gratuits dans certaines écoles,
09:16 200 000 places de crèche, le maintien des places d'hébergement d'urgence.
09:19 Est-ce que ça, ça vous convient Françoise de Sertin ?
09:22 - Ecoutez, ça n'a pas à me convenir ou à ne pas me convenir.
09:26 - Vous ne vous sentez pas emballée ?
09:27 - Nous ferons avec.
09:29 Non, je ne suis pas emballée parce que moi j'aurais quand même aimé
09:32 que les mots "aide alimentaire", "précarité alimentaire",
09:37 qu'une référence à l'alimentation et à manger soient faites,
09:42 ce qui n'a pas du tout été le cas.
09:44 Les petits déjeuners dans les écoles, la banque alimentaire de l'ISER,
09:47 elle en fait déjà, elle en organise.
09:50 Quand on va dans les écoles et qu'on organise ces petits déjeuners,
09:53 on rencontre des enfants qui ont faim.
09:55 Et ça c'est absolument terrible si vous voulez.
09:58 Ça atteint une ampleur, je me répète.
10:01 - Donc il faut aller plus loin ?
10:03 - Il faut aller plus loin et puis il faut effectivement
10:06 prendre peut-être les choses davantage à la racine
10:09 parce qu'on rêve tous de la disparition de cette précarité alimentaire.
10:14 Parce qu'avoir faim, vous ne pouvez pas aller chercher du travail,
10:17 vous ne pouvez pas étudier correctement.
10:20 C'est un besoin primaire dans la vie de manger à sa faim.
10:24 - Et on entend aussi votre espérance ce matin, Françoise de Sertin.
10:27 Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin, président de la banque alimentaire de l'ISER.
10:30 Je rappelle votre collecte de lait ce week-end dans deux hypermarchés de la Globe,
10:35 Grenobloise au Leclerc-Comboire-Deschirol et au Carrefour-Mélenc.
10:38 Merci beaucoup.
10:39 Merci à vous.
10:40 Cet entretien est à retrouver sur francebleu.fr et notre application.

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