• il y a 2 ans

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00:00 de gens sont, par exemple, sortis dans la rue
00:02 pour protester contre les fraudes électorales
00:04 de décembre 2011,
00:06 puis suite à l'élection présidentielle de 2012,
00:09 lorsque Vladimir Poutine revient au pouvoir
00:12 après la parenthèse Medvedev.
00:13 Oui, mais alors comment est-ce que Vera Grandseva
00:16 explique ces sondages, les résultats de ces sondages ?
00:19 Eh bien, vous dites tout simplement, Vera Grandseva,
00:22 qu'il faut les prendre avec prudence,
00:24 que c'est un soutien de façade.
00:26 Les sondages d'opinion par le biais de minis interviews
00:29 dans la rue ou d'appels téléphoniques
00:31 sont perçus par la population
00:32 comme une menace pour la sécurité personnelle.
00:35 Elle ne peut être contrée que d'une seule manière,
00:38 donner la bonne réponse à la question posée.
00:41 Et d'ailleurs, vous racontez qu'en mars 2022,
00:43 une équipe de sociologues a tenté de mener une étude par téléphone.
00:47 Le résultat, sur 32 000 personnes sollicitées,
00:50 29 000 ont refusé de parler aux enquêteurs sous-entendus.
00:55 Celles qui répondent sont celles qui ont une bonne opinion.
00:58 Vous parlez même d'une spirale du silence,
01:00 c'est-à-dire que le soutien a augmenté
01:03 en même temps que les lois répressives.
01:05 Rappelons qu'au tout début de la guerre, en mars 2022,
01:07 le Kremlin instaure des lois pour punir les positions antiguerres.
01:12 Et d'ailleurs, le mot "guerre" lui-même est même interdit.
01:15 Et vous rappelez que de mars 2022 à février 2023,
01:18 19 586 Russes ont été poursuivis
01:22 par les autorités pour leurs positions antiguerres.
01:25 C'est deux fois plus que ceux qui ont été inculpés
01:28 pour motifs politiques en clair.
01:30 Désormais, en Russie, critiquer la guerre
01:32 est davantage puni que critiquer Poutine.
01:35 Et ainsi, vous racontez que les dissidents
01:37 se sont montrés plus prudents
01:39 et que les discussions politiques se sont déplacées dans les cuisines,
01:43 comme c'était le cas à l'époque soviétique.
01:45 C'est ça.
01:46 Lorsqu'on voit que plus il y a de répression
01:49 et plus il y a de soutien à Vladimir Poutine,
01:52 vous dites clairement, c'est la peur.
01:54 C'est la peur.
01:55 Donc c'est un soutien affiché,
01:58 ce n'est pas un soutien réel.
01:59 C'est un soutien qui correspond à la peur de dire la mauvaise vérité,
02:04 d'une certaine manière.
02:05 Mais maintenant sur le fond,
02:06 qu'en est-il de cette opinion russe
02:10 et est-ce que Vera Grandseva a réussi à la mesurer,
02:14 soutien ou pas soutien à cette guerre ?
02:16 Soutien ou pas soutien ?
02:17 Eh bien, votre diagnostic principal,
02:20 c'est qu'à l'évidence, il n'y a pas de soutien populaire majeur.
02:23 Vous parlez d'une absence de réaction de la société
02:26 proche de l'apathie.
02:27 Et de l'indifférence.
02:29 Et vous en voulez pour preuve l'absence de files d'attente
02:32 de volontaires pour partir au front,
02:34 devant les fameux bureaux d'enrôlement militaire,
02:36 ou encore de tous ces Russes dans les grandes villes
02:39 qui vivent leur vie normalement,
02:41 qui partent travailler le matin avec leur gobelet de café à la main.
02:44 On pourrait rajouter également qu'au moment de la mutinerie
02:46 avortée de Prigojin, on n'a vu personne dans la rue
02:49 pour défendre les pouvoirs du Kremlin.
02:51 Autre argument, et c'est là que la chercheuse
02:53 en sciences politiques que vous êtes nous éclaire grandement,
02:56 vous avez accès à des études peu connues,
02:58 et vous citez notamment les sociologues russes
03:01 indépendants de Chronicles.
03:02 Eux ne réalisent pas des sondages, mais des entretiens approfondis.
03:06 Et donc, selon eux, 22 % des Russes
03:08 sont des partisans constants de la guerre,
03:11 dont vous dressez d'ailleurs le portrait robot,
03:13 un retraité vivant dans une petite ville ou un village
03:17 avec un faible revenu,
03:18 qui s'informe sur les événements en Russie
03:20 et dans le monde par la télévision.
03:22 Ensuite, il y a, selon vous, et selon Chronicles,
03:25 10 à 12 % d'opposants constants.
03:28 Là, il s'agit souvent de jeunes âgés de 18 à 34 ans
03:31 qui habitent dans des grandes villes
03:33 et qui ont fait des études supérieures.
03:35 Et entre ces deux extrêmes, ce que vous appelez
03:38 la majorité de non-résistance,
03:40 ceux qui choisissent l'option "j'ai du mal à répondre"
03:43 ou "je ne veux pas répondre".
03:44 Et vous dites qu'ils ne veulent pas que la loi martiale soit imposée,
03:48 ils n'ont pas besoin d'une victoire dans la guerre avec l'Ukraine
03:50 et ils sont prêts à approuver,
03:52 prêts à approuver la tenue de "Pour parler de paix" dès maintenant.
03:56 Alors, comment expliquer cela ?
03:57 Eh bien là, cette fois, vous invoquez l'histoire récente.
04:01 Vous revenez à ces manifestations de 2011 et 2012.
04:04 Vous dites qu'après les premières années de Vladimir Poutine
04:07 en tant que président,
04:08 et avec l'élection de Dmitri Medvedev en 2008,
04:11 eh bien, il y a eu beaucoup d'espoir.
04:13 Nombre de citoyens pensèrent
04:16 que le pays avait là une occasion d'évoluer vers la démocratie
04:19 et que les élections de 2012
04:21 pouvaient porter de nouveaux leaders au pouvoir.
04:23 Eh bien, ces espoirs ont été douchés.
04:26 Vladimir Poutine fait réviser la Constitution
04:28 pour être réélu en 2012.
04:30 Et vous dites qu'à ce moment-là, malgré les manifestations,
04:34 les Russes ont compris que rien n'allait changer.
04:36 Vous dites que cela a été une désillusion terrible,
04:39 comme un fardeau hérité de l'histoire soviétique.
04:42 La simple idée de société civile fait figure d'abstraction.
04:46 Elle est comme une impossibilité, un non-sens.
04:49 - Ça, c'est très important.
04:50 La simple idée de société civile fait figure d'abstraction.
04:54 On va revenir sur le plateau.
04:56 Chez nous, elle est à peu près évidente,
04:58 mais là-bas, elle fait figure d'abstraction.

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