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00:00 Bonjour à tous, je m'appelle Virgilia S.
00:02 On m'a diagnostiqué un cancer du sein
00:04 alors que j'étais enceinte de 5 mois et demi.
00:06 Ma vie avant le cancer, c'était la vie
00:08 d'une jeune femme de 32 ans,
00:10 heureuse dans sa vie
00:12 personnelle et professionnelle.
00:14 Je faisais le métier dont je rêvais.
00:16 Journaliste météo
00:18 pour une chaîne d'information.
00:20 J'étais enceinte à ce moment-là de 5 mois et demi
00:22 et tout se passait très bien.
00:24 J'ai eu une grossesse qui était
00:26 plutôt idyllique.
00:28 J'ai fait mes contrôles régulièrement
00:30 chez le gynécologue obstétricienne.
00:32 Ce jour-là, elle me dit
00:34 qu'il y a une masse dans ton sein gauche.
00:36 C'est bizarre, je vais quand même te prescrire
00:38 une échographie mammaire.
00:40 T'inquiète pas, c'est fréquent
00:42 avec la grossesse qu'il y ait des modifications.
00:44 Les seins deviennent un peu plus gros.
00:46 Vu qu'elle n'était pas du tout inquiète
00:48 et qu'on était le 22 décembre,
00:50 je laisse passer Noël,
00:52 le jour de l'an.
00:54 Je vais ce jour-là pour faire
00:56 une échographie mammaire.
00:58 Par contre, la radiologue qui me reçoit,
01:00 je vois à sa tête que
01:02 c'est quand même pas normal.
01:04 Elle me dit que ce qu'elle voit s'apparente
01:06 plus à une tumeur qu'à un nodule.
01:08 Mais tout de suite, elle me rassure aussi.
01:10 Elle me dit qu'une tumeur, ce n'est pas forcément cancéreux,
01:12 ça peut être bénin.
01:14 Elle me fixe une date pour venir récupérer les résultats.
01:16 Elle me conseille de venir accompagner
01:18 au cas où ce ne serait pas très bon.
01:20 Là, j'attends
01:22 11 jours.
01:24 C'est un jour interminable.
01:26 J'essaye de ne pas stresser parce que je suis enceinte
01:28 et on me dit que quand tu es enceinte,
01:30 le bébé ressent toutes tes émotions.
01:32 Le jour des résultats arrive
01:34 et je vis avec ma maman.
01:36 La radiologue arrive, tête d'enterrement.
01:38 Je ne lui demande pas mes résultats.
01:40 Elle sait que je les attends depuis 11 jours.
01:42 Je me dis, est-ce que je suis
01:44 à cinq minutes près ?
01:46 On se regarde avec ma maman. On avait les masques Covid.
01:48 Je ne voyais que les yeux de ma maman.
01:50 Là, tout de suite, on se comprend.
01:52 Encore une fois, tant que les mots n'étaient pas prononcés,
01:54 on n'y croit pas.
01:56 On ne se dit pas que c'est un cancer.
01:58 Elle s'arrête et dit qu'on a reçu les résultats
02:00 et que c'est bien ce que je craignais.
02:02 Ce n'est pas bon.
02:04 Là, gros blanc,
02:06 elle ne me dit rien.
02:08 C'est moi qui prononce les mots.
02:10 Je lui dis que j'ai un cancer.
02:12 Elle me dit que j'avais un cancer.
02:14 J'étais dans une bulle
02:16 où c'était grossesse,
02:18 petite fille, vêtements de bébé, berceau.
02:20 D'un seul coup, on me balance
02:22 cancer, chimiothérapie,
02:24 perte de cheveux. En voyant l'oncologue,
02:26 c'est à ce moment-là qu'elle m'a
02:28 un peu plus détaillée
02:30 mon cancer. Il y a
02:32 plusieurs cancers du sein. Il y a le stade
02:34 et le grade. Ce sont deux choses différentes.
02:36 Le stade 1, c'est vraiment
02:38 pour dire que c'est le début. Par contre,
02:40 le grade, c'était un grade 3.
02:42 C'est le maximum.
02:44 Le grade, c'est la vitesse de propagation.
02:46 Grade 3, c'était un
02:48 cancer du sein très agressif.
02:50 La question ne s'est même pas posée. Il fallait
02:52 que j'attaque la chémio enceinte
02:54 parce que si j'avais attendu
02:56 l'accouchement, mon pronostic vital
02:58 aurait été
03:00 sérieusement engagé. Je ne me reconnaissais plus
03:02 parce que j'avais
03:04 les kilos de grossesse en plus,
03:06 les cheveux en moins, les sourcils en moins,
03:08 les cils en moins. Je me disais
03:10 que ce n'était pas possible.
03:12 Même s'il n'y a pas que le physique,
03:14 il est tombé amoureux de moi
03:16 qui a été grande, plutôt fine,
03:18 avec des cheveux longs. Ça aussi, c'est quelque chose
03:20 dont on ne parle pas beaucoup. Mais je sais qu'il y a
03:22 beaucoup de femmes, et c'est une réalité qui est triste,
03:24 mais qui se font quitter
03:26 après l'annonce d'un cancer du sein.
03:28 Je pense que pendant cette période,
03:30 ce qui m'a aidée, bon déjà,
03:32 c'est le soutien de mes proches,
03:34 donc de mon conjoint, de ma famille.
03:36 Je me suis mise en contact aussi avec
03:38 des associations comme Jeunes et Roses,
03:40 Ruban Rose. Bien sûr,
03:42 mon bébé m'a énormément aidée.
03:44 Je ne la connaissais pas encore,
03:46 elle n'était pas née, mais je me raccrochais
03:48 à ça. L'accouchement devait être
03:50 déclenché, parce que
03:52 le terme, c'était le 6 avril,
03:54 mais c'est vrai qu'ils avaient envie de programmer un accouchement
03:56 finalement, pour qu'il soit suffisamment
03:58 espacé de deux chimiothérapies,
04:00 sachant que le système immunitaire est vraiment
04:02 diminué après les chimios.
04:04 Ils avaient envie que j'ai suffisamment de force
04:06 pour accoucher. C'était ma première
04:08 grossesse, j'avais envie d'allaiter mon bébé.
04:10 Tout de suite, on m'a dit qu'avec les traitements
04:12 de chimiothérapie, impossible, forcément.
04:14 J'étais tellement, je pense,
04:16 à me dire, j'aimerais bien qu'elle naisse
04:18 toute seule, qu'elle arrive toute seule,
04:20 qu'elle décide la date de son accouchement.
04:22 Au final, c'est ce qui s'est passé.
04:24 Au lieu de naître le 6 avril,
04:26 elle est née le 6 mars,
04:28 mais elle était
04:30 formée comme il faut. C'était une petite
04:32 crevette de 2,3 kg,
04:34 mais tout allait bien. J'ai eu un accouchement
04:36 naturel,
04:38 par voie basse, qui s'est très bien passé.
04:40 Pendant deux semaines, j'ai pu profiter
04:42 de mon bébé. J'étais
04:44 un petit peu dans ma petite bulle.
04:46 Le cancer, on l'avait un petit peu mis de côté.
04:48 Mais très vite, après,
04:50 il faut quand même reprendre les traitements.
04:52 On ne peut pas laisser passer
04:54 trop de temps entre deux chimios.
04:56 J'étais quand même rassurée de ne
04:58 plus faire mes chimios
05:00 enceintes, parce que, si je
05:02 pouvais l'épargner, même si encore une fois,
05:04 il n'y avait pas de risque, et la preuve,
05:06 elle va très bien. Ma fille, il n'y a eu aucun
05:08 souci à ce niveau-là. Elle est en parfaite
05:10 santé. Aujourd'hui, ça va bien.
05:12 Ça paraît bizarre de dire ça,
05:14 parce que, en plus, je suis encore en
05:16 traitement. J'essaie toujours de me dire
05:18 aussi que ce n'est que temporaire, ce que je
05:20 vis. Donc là, j'essaie de donner aussi des
05:22 petits conseils, peut-être aux femmes qui
05:24 seraient en train de vivre la même chose,
05:26 ou qui, malheureusement, vivront peut-être un jour
05:28 la même chose, parce que le cancer du sein, ça touche
05:30 encore une femme sur huit.
05:32 C'est énorme. Alors, encore une fois,
05:34 il se soigne, certes,
05:36 mais à condition d'être pris en charge
05:38 suffisamment tôt. Même si vous avez
05:40 un petit doute, vous sentez quelque chose dans
05:42 votre poitrine en faisant l'autopalpation
05:44 et que vous vous dites "Ah bah, pourtant
05:46 je suis gêne", ben non, le moindre doute,
05:48 il faut faire ses examens. Il y a un
05:50 truc qui m'a frappée tout de suite,
05:52 c'est que, bien sûr, la maladie,
05:54 c'est terrible et très souvent,
05:56 on se sent seul, mais il y a une
05:58 espèce de soutien,
06:00 de vraie communauté. D'ailleurs,
06:02 il y a un nom pour les femmes qui
06:04 vivent le cancer du sein, on s'appelle
06:06 les "sœurs de combat".
06:08 C'est le côté "beau"
06:10 que j'ai trouvé
06:12 dans cette maladie qui est
06:14 extrêmement difficile.
06:16 Le soutien et vraiment
06:18 l'amour que j'ai pu recevoir
06:20 et qu'on se donne toutes
06:22 entre nous, et tous aussi, parce que
06:24 ça touche un pour cent des hommes, quand même,
06:26 le cancer du sein.
06:28 [Bruit de bouche]