Lors de son 6e mois de grossesse, Virgilia Hess apprend qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. Elle revient sur le sentiment de culpabilité qu'elle a pu ressentir, l'ambivalence de sentiments dans un quotidien partagé entre grossesse et maladie, et la force transmise par sa fille, Léna-Rose.
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00:00Je n'arrive pas, en fait, à intégrer aussi cette notion de
00:04je suis enceinte, je porte la vie et en même temps, j'ai une maladie mortelle
00:08alors que je suis en train de choisir
00:11le berceau pour mon bébé, ses biberons.
00:17Je m'appelle Virgilia S.
00:18Je suis journaliste météo-climat en télévision
00:21et j'ai été diagnostiquée d'un cancer du sein lors de ma grossesse.
00:25L'été 2022, j'apprends que je suis enceinte
00:28et très rapidement par la suite d'une petite fille.
00:32C'est un grand bonheur pour moi à ce moment-là
00:34parce que ça a toujours été mon rêve.
00:36C'était ma première grossesse qui s'est bien déroulée les premiers mois.
00:41Lors de l'examen du sixième mois de grossesse,
00:44mon obstétricienne découvre une petite boule dans ma poitrine
00:48et de là, eh bien, j'ai eu beaucoup, beaucoup d'examens à faire.
00:53J'en ai suivi, on va dire plusieurs semaines d'attente.
00:56Le couperet est finalement tombé début janvier 2023.
01:00On me diagnostique à ce moment-là un cancer du sein.
01:03C'est pour moi impossible d'y croire.
01:06J'ai l'impression à ce moment-là d'être à l'extérieur de mon propre corps.
01:12Je n'arrive pas à intégrer aussi cette notion de
01:15je suis enceinte, je porte la vie et en même temps, j'ai une maladie mortelle
01:20alors que je suis en train de choisir le berceau pour mon bébé,
01:25ses biberons.
01:26Juste après l'annonce, c'est vrai que j'ai dû démarrer les traitements
01:30très rapidement, comme c'était un cancer très agressif.
01:33On m'a vite fait comprendre, dès le premier jour d'ailleurs,
01:36qu'il ne fallait pas attendre l'accouchement.
01:38Il fallait tout de suite démarrer la chimiothérapie en étant enceinte.
01:42C'est des informations qui venaient des oncologues,
01:46donc je n'allais pas faire la tête brûlée et ne pas les écouter.
01:50Mais je n'arrivais pas à comprendre comment ça n'allait avoir
01:52aucun impact sur mon enfant, alors qu'on sait très bien que
01:55quand on est enceinte, on nous dit de ne pas boire, de ne pas fumer,
01:59de ne pas manger même le moindre sushi ou de la viande crue.
02:05La question de vie ou de mort s'est posée.
02:08Il fallait vraiment que je démarre cette chimiothérapie
02:13parce que si j'attendais l'accouchement, c'était le risque que ma fille
02:16se retrouve peut-être sans maman.
02:19Heureusement, aujourd'hui, je vous rassure, elle va très, très bien.
02:22Elle a un an et demi et heureusement que j'ai suivi ses traitements,
02:27même en étant enceinte, parce que c'est une petite fille formidable
02:31et il n'y a eu aucune conséquence sur sa santé.
02:34J'ai eu beaucoup de sentiments de culpabilité pour plein de choses.
02:39Au début, culpabilité d'être en colère, de pleurer, de stresser
02:44suite à l'annonce, parce que pareil, beaucoup de personnes nous disent
02:49que l'enfant va tout ressentir, donc il faut faire attention.
02:53Moi, je savais que je n'allais pas pouvoir allaiter
02:55à cause des traitements de chimiothérapie,
02:57donc ça, c'était une culpabilité supplémentaire.
03:00Et au bout d'un moment, forcer de constater que ça ne servait à rien
03:05et qu'il fallait que je fasse front, finalement.
03:09Il fallait justement que je prenne cette grossesse comme une force,
03:12même si j'étais très contente d'accoucher.
03:15Pour lui éviter la suite des traitements,
03:17je n'avais pas envie qu'elle ait plus de chimio.
03:19Elle n'était plus dans mon ventre, mais je l'avais aussi à mes côtés
03:21et j'ai utilisé ça comme une force et on était deux à faire front
03:26face à ce cancer.
03:27Lorsque j'étais enceinte, beaucoup de personnes, forcément,
03:30prenaient des nouvelles de ma grossesse, de l'évolution du fœtus.
03:35Et à partir du moment où il y a eu l'annonce du cancer,
03:38j'ai vraiment eu ce sentiment que c'est ça qui prenait le dessus.
03:41J'ai essayé de penser à autre chose, j'ai essayé de me raccrocher beaucoup
03:44à mon bébé et souvent, c'est les autres, malheureusement,
03:47mais malgré eux, je ne leur en veux pas,
03:49qui me renvoyaient finalement à cette maladie constamment.
03:54Avoir Léna Rose à mes côtés, ça a été une force incroyable.
03:59Dans ses yeux, je ne me suis jamais vue malade.
04:02Finalement, elle m'a connue pendant.
04:05Elle n'a pas vu la Virgilia d'avant.
04:07J'étais déjà malade et en traitement lorsqu'elle est née.
04:10Je lui parlais beaucoup déjà quand elle était dans mon ventre.
04:13Donc, je pense que quelque part,
04:14elle avait conscience qu'il y avait quelque chose.
04:17D'ailleurs, elle a toujours été un bébé modèle pourvu que ça dure.
04:21Aujourd'hui, je suis en rémission.
04:23Les gros traitements sont finis,
04:25mais il y aura un suivi plus, plus, plus, si je puis dire,
04:29pendant les cinq années au moins qui vont suivre.
04:32Et après ces cinq années, ça sera toute ma vie
04:35que j'aurai des contrôles, des échographies, des mammographies tous les ans.
04:38C'est vrai qu'il y a forcément toujours un peu cette épée de Damoclès,
04:42ce petit nuage gris qui flotte quelque part au-dessus de notre tête.
04:46J'essaye de le mettre dans un placard,
04:48un placard fermé à double tour et de ne pas trop y penser.
04:51Et je me dis que la recherche évolue tellement
04:54et il y a eu tellement de progrès ces dernières années
04:56qu'il faut que je fasse confiance,
05:00que j'ai confiance en l'avenir et que je fasse confiance au corps médical.
05:04Et voilà, maintenant, je suis maman
05:06et c'est hors de question que je ne sois plus là et que je baisse les bras.