L'interview d'actualité - Thierry Beaudet

  • l’année dernière
Aujourd'hui, Maud Descamps reçoit Thierry Beaudet, président du CESE, le Conseil économique, social et environnemental, pour faire le point sur ce qui ne va pas en France. Le CESE a réalisé une grande enquête d'opinion et les résultats sont sans équivoque : les Français sont inquiets, notamment sur trois grands sujets, le pouvoir d'achat, les inégalités et la crise environnementale. 

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Transcript
00:00 Bonjour Thierry Baudet, bienvenue sur le plateau de Télématin.
00:03 Dites-nous, qu'est-ce qui ne va pas aujourd'hui en France ?
00:06 Écoutez, les Français sont inquiets.
00:09 On vient de rendre un rapport inédit où on a croisé des statistiques,
00:13 des expertises de terrain et puis le ressenti des Français
00:16 à travers une grande enquête d'opinion.
00:18 Il y a trois grands sujets de préoccupation majeure.
00:21 Le pouvoir d'achat en période d'inflation, on n'est pas étonné.
00:25 Une perception très forte des inégalités.
00:29 Et puis peut-être pour la première fois, on met en évidence
00:32 à quel point l'éco-anxiété malheureusement a progressé
00:35 chez l'ensemble de nos concitoyens.
00:37 Justement, je vous pose la question parce que,
00:39 est-ce que c'est un ressenti d'un pays qui n'a pas le moral
00:42 ou est-ce que c'est vrai, est-ce que cette réalité
00:45 elle se confirme par les faits au quotidien ?
00:47 Je crois que cette réalité, elle est très présente
00:50 et le mérite de ce rapport, c'est de montrer que ces sujets
00:53 ne s'effacent pas, même parfois, quand d'autres sujets
00:56 font irruption dans l'actualité.
00:57 Mais ces trois sujets, ils sont extrêmement présents.
01:01 Pour parler par exemple du pouvoir d'achat,
01:04 un Français sur deux interrogé indique qu'il parvient
01:09 difficilement à faire face à ses dépenses les plus courantes
01:13 et qu'il ne peut pas avoir une vie décente au plan personnel,
01:17 familial, professionnel, la difficulté à se soigner par exemple,
01:21 à vivre en bonne santé.
01:22 Pourtant, il y a eu beaucoup d'aides de l'État,
01:24 il y a eu le bouclier tarifaire, il y a eu le chèque carburant.
01:26 Est-ce que c'est une perception qu'on a
01:29 ou est-ce que vraiment c'est plus compliqué aujourd'hui ?
01:31 Je pense que c'est très compliqué.
01:33 Pour parler du pouvoir d'achat, ça ne peut pas se résumer
01:36 d'une certaine manière à un chiffre, à une statistique.
01:39 Le niveau de vie décent, en réalité, ce qu'il faut comprendre,
01:43 c'est qu'il varie selon l'endroit où vous vivez.
01:47 C'est-à-dire qu'il y a des disparités en fonction de ce qu'on dit
01:50 en ville, en banlieue, à la campagne ?
01:52 C'est ça. Selon la composition familiale également.
01:55 Et dans la perception des inégalités, ce que vous venez de dire est très important
01:59 parce que les Français considèrent que la principale inégalité,
02:03 elle résulte de l'endroit où vous vivez.
02:05 Ce n'est pas la même chose si vous vivez en ville ou à la campagne,
02:09 au centre-ville ou en banlieue, par exemple.
02:11 Mais c'est quoi ? C'est une inégalité d'accès aux soins, une inégalité d'infrastructure ?
02:15 Cette perception des inégalités, effectivement,
02:18 ils le ressentent, les Français, dans la difficulté,
02:21 comme vous l'avez dit, d'accéder à l'emploi.
02:24 Le taux d'emploi, par exemple, dans nos quartiers,
02:27 est beaucoup moins élevé que dans le reste du territoire.
02:30 De combien ?
02:31 40%, à peu près. C'est le cas aussi dans les Outre-mer.
02:35 La difficulté d'accéder à l'enseignement supérieur,
02:38 la difficulté d'accéder à la santé, aux services publics, c'est très concret.
02:41 Cette perception des inégalités, elle se traduit par cette difficulté
02:45 à accéder à ces services essentiels.
02:48 Il y a 30% des Français qui se disent très pessimistes sur l'avenir du pays.
02:52 Qu'est-ce que vous préconisez, vous ?
02:54 Nous, ce que nous pensons, c'est qu'il faut regarder les choses globalement.
02:59 Finalement, ça suppose un engagement rigoureux et des réponses de long terme.
03:06 Actuellement, dans l'actualité, on parle beaucoup des quartiers.
03:09 La Première ministre devrait s'exprimer cet après-midi et probablement demain.
03:14 On entend dire qu'un certain nombre de réponses de nature sécuritaire
03:18 pourraient être apportées. Probablement, les Français les attendent-ils,
03:21 mais ils attendent aussi qu'on tienne tous les fils et qu'on apporte des réponses sociales.
03:26 Et nous, au CESE, nous considérons notamment que les politiques d'emploi sont très importantes.
03:32 Le taux de chômage dans ce pays a baissé.
03:34 On a connu le chômage de masse, on n'est plus dans le chômage de masse.
03:37 Probablement, maintenant, il faut réfléchir pour passer d'un quasi plein emploi à un bon emploi.
03:43 On a l'impression que les rapports s'enchaînent, un peu comme les rapports de la Cour des comptes,
03:47 mais qu'il ne se passe jamais rien derrière.
03:49 Qu'est-ce que vous demandez concrètement, que ce soit au gouvernement, à la Première ministre,
03:53 justement, qui va s'exprimer cet après-midi, ou encore au chef de l'État ?
03:56 Ce qui est important, déjà, c'est de partager ce diagnostic, c'est d'avoir des politiques vigoureuses.
04:05 Pour nous, ce qui était très important, c'était la présence hier dans notre Assemblée
04:10 du ministre Olivier Véran, qui est venu naturellement...
04:14 Il est venu vous écouter poliment ou il y a des engagements derrière ?
04:17 C'est un sujet de long terme. Nous, nous renvoyons naturellement,
04:21 le rôle du Conseil, c'est d'alerter, nous renvoyons la question au gouvernement.
04:26 Pour ce qui nous concerne, nous allons nous saisir des sujets, et par exemple,
04:29 faire des propositions pour améliorer l'accès à l'emploi dans les quartiers prioritaires,
04:33 comme on vient d'en faire récemment, pour améliorer le pouvoir d'achat dans les Outre-mer.
04:38 Vous le disiez, ce qui gangrène aujourd'hui le pays, c'est ce sentiment d'inégalité.
04:41 Alors, tout le monde semble en avoir conscience aujourd'hui, pourtant, ça empire. Pourquoi ?
04:46 La perception des inégalités est très forte.
04:51 Et moi, je voudrais parler, par exemple, de l'éco-anxiété, voyez, parce qu'y compris sur le sujet...
04:56 C'est nouveau, ça, l'éco-anxiété ?
04:57 Oui, c'est... Sur le sujet de la transition environnementale, là aussi,
05:01 les Français ont le sentiment qu'ils ne sont pas tous égaux.
05:04 Ce qui est très frappant dans le rapport que nous venons de publier, c'est que,
05:08 contrairement à ce que certains pensent, les Français ne sont pas climato-sceptiques.
05:12 Ils sont très inquiets du dérèglement climatique et ils ont commencé à agir.
05:16 Ils ont commencé à agir, le réemploi, le recyclage, le fait de baisser la température des logements, l'hiver, etc.
05:24 Mais ils sont frustrés parce qu'ils voudraient faire davantage.
05:27 Et qu'est-ce qui bloque ? Pourquoi on ne peut pas faire plus ?
05:29 Ils voudraient pouvoir rénover leurs logements, ils voudraient pouvoir acheter un véhicule électrique,
05:33 mais là, ça nous ramène à la question précédente que j'évoquais, la question du pouvoir d'achat.
05:37 Et j'insiste sur ce point parce que ça signifie finalement qu'il faut apporter des réponses qui soient globales et combinées.
05:43 On ne peut pas traiter les sujets séparément les uns des autres, il faut les appréhender globalement.
05:49 Mais sur la transition écologique, par exemple, qu'est-ce que vous préconisez ?
05:51 Il faut faire plus de chèques carburants ? Il faut plus d'aides, par exemple, de la part de l'État ?
05:55 Il faut que l'ensemble des acteurs s'investissent.
05:58 Il y a ce qui appartient naturellement aux Français, mais il y a aussi ce qui appartient à l'ensemble des acteurs économiques,
06:07 les entreprises qui s'engagent dans la transition environnementale, le monde agricole, naturellement, qui doit y réfléchir.
06:13 Et puis, le gouvernement doit y prendre sa part.
06:17 Je crois comprendre que c'est le sens de la planification écologique sur lequel le gouvernement a fait des annonces récemment.
06:24 Merci beaucoup Thierry Baudet d'être venu nous voir sur le plateau Télématin.
06:27 je rappelle donc que vous êtes le président du Conseil économique et social et environnemental.

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