La grande interview : Stanislas Guerini

  • l’année dernière
Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, était l’invité de #LaGrandeInterview d'Anthony Favalli dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
Transcript
00:00 -Bonjour, Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction Publique.
00:03 -Bonjour.
00:04 -Je voudrais tout d'abord parler avec vous d'un sujet d'actualité, la tempête Kharan,
00:08 le jour d'après. Beaucoup de foyers sont encore privés d'électricité aujourd'hui,
00:11 des transports publics perturbés, des routes barrées, conséquence de ces vents qui ont
00:15 soufflé jusqu'à 200 km/h. Il y a même eu deux décès. Emmanuel Macron se rend en
00:20 Bretagne aujourd'hui auprès des sinistrés, auprès des forces de secours également.
00:25 Est-ce qu'on peut dire aujourd'hui que le pire a été évité ?
00:27 -Probablement oui. C'est toujours difficile à dire quand deux de nos compatriotes ont
00:32 perdu la vie et je veux avoir une pensée pour eux et pour leur famille. Évidemment,
00:37 c'est toujours un drame quand cela arrive. Mais oui, par rapport à l'ampleur de la tempête
00:43 que nous avons vécue, quand on compare aux tempêtes précédentes qui avaient déferlé
00:47 sur notre territoire, on peut dire effectivement qu'il y a eu une mobilisation exceptionnelle.
00:51 Je veux saluer l'ensemble des agents publics qui ont été mobilisés. Ils ont été très
00:55 nombreux. Il y a 13 500 sapeurs-pompiers qui sont intervenus, 3500 fois. Il y a des dispositifs
01:02 pour adapter notre société à ces phénomènes climatiques, pour pouvoir alerter nos concitoyens.
01:08 Dans la nuit, au cœur de la tempête, beaucoup de nos concitoyens ont reçu des SMS pour
01:13 leur indiquer qu'ils étaient dans une zone dangereuse, qu'il ne fallait pas sortir.
01:16 Donc on voit bien que grâce à cette mobilisation exceptionnelle, notre société s'adapte
01:22 et fait face aux pires événements climatiques. Je crois qu'il faut se préparer. Évidemment,
01:27 on voit bien que l'intensité de ces épisodes, du fait du changement climatique aussi, monte
01:33 un peu à chaque fois. Et donc, on a besoin d'adapter notre société et de mobiliser
01:37 toutes les forces vives de la nation.
01:40 Stanislas Guerini, avant de revenir en France, tout d'abord un mot sur le conflit au Proche-Oriente,
01:45 Israël et le Hamas. Plusieurs experts, mandatés par l'ONU, ont alerté hier sur un grave
01:50 risque de génocide du peuple palestinien. Génocide, c'est un mot très fort. C'est
01:54 l'intention de détruire en toute ou en partie un groupe national, ethnique ou religieux.
01:59 Ça veut dire que ces experts de l'ONU pourraient prêter à Israël d'autres intentions,
02:04 bien plus graves, que celles de sa propre sécurité. Est-ce que le mot génocide, selon
02:08 vous, est un terme mesuré et responsable ?
02:11 Non, il ne me semble pas adapter la position française, celle que le président de la
02:17 République a toujours été extrêmement claire. Il faut dire les choses. Israël a
02:22 le droit de se défendre. Israël a vécu les pires attentats terroristes d'un groupe,
02:28 le Hamas, terroriste, qui est venu sur son sol, celui d'une démocratie, tué, exterminé,
02:36 justement là, avec des intentions de faire disparaître une partie de la population parce
02:41 qu'ils étaient juifs. Il faut dire les choses. Et la position de la France a toujours été
02:45 claire. Israël a le droit de se défendre dans le cadre des règles internationales.
02:49 Ces experts de l'ONU mettent de l'huile sur le feu en utilisant ce mot.
02:52 Je ne sais pas et je ne veux pas le commenter au-delà.
02:54 On rappelle l'antisémitisme en France.
02:56 La position de la France, c'est le respect pour Israël au droit de se défendre dans
03:02 le cadre du droit international, du droit humanitaire. C'est aussi de ne pas confondre
03:07 le Hamas, qui est un groupe terroriste, et le peuple palestinien. Les victimes civiles,
03:12 elles ont la même valeur, qu'elles soient palestiniennes ou israéliennes. C'est pour
03:16 ça que la France est engagée, justement, pour qu'il y ait ce corridor humanitaire,
03:21 pour qu'il y ait une trêve humanitaire. C'est une position claire, justement, pour
03:25 éviter la désescalade.
03:27 Stanislas Guérini, les mots sont très importants. Je pense à la haine des juifs qui se manifeste
03:30 aujourd'hui partout dans le monde et également en France. Et on y vient. 850 actes antisémites,
03:36 plus de 850 actes antisémites recensés dans notre pays depuis le 7 octobre dernier.
03:39 C'est davantage, bien davantage que sur l'ensemble de l'année dernière. Des croix gammées,
03:45 des étoiles de David sur les bâtiments, des chants de haine envers les juifs entonnés
03:49 dans le métro parisien, plus grave encore, des menaces et des agressions contre les personnes.
03:53 Stanislas Guérini, quand on en est là, dans notre société aujourd'hui, est-ce qu'il
03:57 n'est pas déjà trop tard ?
03:58 Je crois qu'il n'est jamais trop tard, mais il faut ouvrir les yeux sur le fait qu'il
04:03 y a un antisémitisme qui ressurgit, qui est présent dans notre pays, qui est latent,
04:10 qui n'est pas, contrairement à ce que je peux entendre parfois, l'importation du
04:13 conflit, dont vous venez de me parler, entre Israël et la Palestine, ces actes antisémites,
04:18 cette résurgence d'actes antisémites, l'intervenait dès le 7 octobre, au moment où Israël était
04:24 touché en son cœur et 1 400 Israéliens perdaient la vie parce qu'ils étaient juifs,
04:30 justement. Et c'est l'affaire de tous.
04:31 Quelle est la source de l'antisémitisme aujourd'hui, si ce n'est pas le conflit
04:35 israélien et palestinien ?
04:36 On voit bien qu'il y a aujourd'hui des formes déguisées d'antisémitisme. Dans
04:39 des manifestations, on ne crie pas forcément "morts aux Juifs", on crie "nique les
04:44 Juifs". On ne dit pas forcément "sales Juifs", on dit "sales sionistes". Et un
04:49 certain nombre le dénonce depuis plusieurs années. Nous avions porté, justement, à
04:54 l'Assemblée nationale une résolution pour voir ces nouvelles formes d'antisémitisme,
04:59 voir qu'aujourd'hui, l'antisionisme, c'est souvent une façon déguisée d'attaquer
05:05 les Juifs. Et je voulais le dire, ce n'est pas que l'affaire des Français de confession
05:09 juive, c'est l'affaire de tous.
05:11 L'antisémitisme, est-ce qu'il est porté aussi par l'islamisme ? Pensez-vous que
05:16 l'islamisme est une menace pour la France ? Pourquoi je vous dis ça ? Parce que 78%
05:20 des Français répondent que oui, et ceux-mêmes à gauche d'ailleurs. 61%, c'est le résultat
05:25 d'un sondage CSA pour CNews.
05:26 Ce qui est étonnant, c'est qu'on ne soit pas à 100% à répondre que l'islamisme,
05:31 c'est une menace pour notre pays, sans jamais confondre l'islam et le droit de pratiquer
05:37 une religion. C'est le cas de la laïcité et de l'islamisme, qui est un projet politique
05:43 et un projet évidemment menaçant pour notre pays. Tous ceux qui ont péri des attentats
05:48 islamistes sont là ou ne sont plus là, malheureusement, pour pouvoir en témoigner. Et donc sont évidemment
05:54 la preuve que l'islamisme est une menace. Je crois que la question de l'antisémitisme
05:59 sur lequel vous m'interrogez, c'est une question qui doit nécessiter une mobilisation
06:03 collective de dire aux Français de confession juive dans notre pays, qui ont évidemment
06:10 le droit de vivre en sécurité dans notre pays, que la République doit être là pour
06:13 les protéger.
06:14 J'entends bien Stanislas Guérini, mais quand hier l'imam de Bocquer a été condamné
06:18 à 8 mois de prison avec sursis, je précise bien avec sursis, après avoir incité au
06:22 meurtre de juifs sur les réseaux sociaux. Quel est le message qui est envoyé aux juifs
06:27 de France ?
06:28 Vous savez, le message que nous envoyons de façon extrêmement claire, c'est qu'il
06:31 ne peut pas y avoir d'impunité pour ceux qui attaquent, pour ceux qui menacent. Vous
06:38 voyez, il y a quelques jours, le rabbin de Levallois a été menacé par quelqu'un sur
06:41 un réseau social. Il a été repéré, il a été conduit devant la justice, il a été
06:46 déféré. Plus de 400 personnes ces derniers jours ont été interpellées. Il y a une
06:52 fermeté extrêmement grande, et de la part de la police, et de la part de la justice,
06:57 pour justement ne pas laisser s'installer un sentiment d'impunité. Je parlais à
07:02 l'instant des formes déguisées parfois d'antisémitisme. Il faut pouvoir les condamner,
07:08 il faut pointer du doigt. Ça doit être une mobilisation des forces publiques, je viens
07:11 de parler de la sécurité, de la police, de la justice. Ça doit être une mobilisation
07:15 de société. Il fut un temps où les Français descendaient dans la rue quand un cimetière
07:20 juif était profané. Et nous avons aujourd'hui des actes qui sont pires que cela. J'ai
07:25 échangé hier avec un dirigeant de société dans ma circonscription, dont les crèches,
07:32 puisque c'est un réseau de crèches, ont été menacés, tagués. Il a porté plainte,
07:37 à la fois parce qu'il y a des étoiles de David qui ont été mises, mais aussi des
07:40 croix gammées sur d'autres crèches. Tout ceci est insupportable. On voit bien, les
07:44 témoignages sont extrêmement nombreux, que beaucoup de nos concitoyens français, de
07:48 confessions juives, retirent leur kippa pour aller dans la rue, changent leur nom sur des
07:54 applications et téléphones portables. C'est une mobilisation de société.
07:58 - Ces jeunes qu'on entend scander dans le métro, des slogans haineux envers les Juifs,
08:05 est-ce que la bataille n'est pas aussi amenée au niveau de l'éducation nationale ?
08:09 - Mais la bataille est amenée à toutes les échelles, dans tous les pans de notre société.
08:14 Ça doit être une bataille régalienne pour pouvoir protéger tous nos concitoyens,
08:19 quelles que soient leurs confessions, que ce soit l'islam, que ce soit le judaïsme,
08:25 que ce soit la chrétienté. Tout le monde doit vivre en sécurité dans la République,
08:28 mais ça doit être une mobilisation générale, à l'école, dans l'enseignement supérieur,
08:33 dans la fonction publique aussi. Je le dis en tant que ministre de la fonction publique,
08:36 nous formons l'ensemble des agents publics à la lutte contre le racisme, à la lutte
08:41 contre l'antisémitisme, et nous devons encore accélérer ces formations-là.
08:45 Ça doit être, encore une fois, une mobilisation de la société toute entière,
08:49 parce que quand ce sont les Juifs qui sont attaqués dans notre pays, en réalité,
08:54 c'est la République, ce sont nos valeurs que certains veulent éradiquer,
08:58 et ça, nous ne pouvons pas l'accepter, nous ne pouvons pas avoir de faiblesse sur ces questions-là.
09:02 - Une manifestation pro-Palestine, Stanislas Guérini s'est tenue hier à Paris,
09:06 Place de la République, manifestation à l'initiative de la France Insoumise
09:09 et d'autres collectifs politiques et syndicaux. Une autre aura lieu demain, samedi.
09:14 Est-ce que l'antisionisme ouvertement affiché aujourd'hui par la France Insoumise
09:17 dans ces manifestations fait le lit de l'antisémitisme en France ?
09:20 - Écoutez, je crois que le pire des pièges, au fond,
09:24 ce serait de confondre le peuple palestinien et le Hamas.
09:30 Nous en parlions à l'instant, il y a un groupe terroriste, on a bien vu,
09:34 c'était évident que certaines forces politiques, la France Insoumise,
09:38 n'étaient pas capables de mettre les mots sur le terrorisme.
09:41 Dès lors, ils sont disqualifiés pour porter des positions d'équilibre,
09:46 justement de concorde et d'unité dans notre pays,
09:49 quand ils ne savent pas qualifier même la situation.
09:52 Donc je crois qu'il ne faut pas confondre la volonté de manifester
09:56 pour le peuple palestinien, elle peut s'entendre, je la respecte,
10:00 et les débordements que nous venons d'évoquer à l'instant d'antisionisme, d'antisémitisme.
10:07 Moi, j'ai évidemment vu que dans ces manifestations,
10:10 il y avait des pancartes qui niaient les crimes abjects
10:15 qui ont été commis sur le sol d'Israël,
10:17 qui niaient le fait que des bébés aient été tués.
10:21 On en a aujourd'hui toutes les preuves et donc ça, ça n'est pas acceptable.
10:25 Donc le rôle de la République, encore une fois,
10:29 c'est de ne pas laisser ces débordements se faire.
10:32 C'est à chaque fois, les décisions, je veux dire, difficiles,
10:35 que prennent les préfets de la République.
10:36 71% des Français considèrent que Jean-Luc Mélenchon est un danger pour la République.
10:41 Sondage CSA pour CNews, là aussi.
10:44 Qu'en pensez-vous ?
10:45 Dès lors que sa parole porte et personne ne le conteste,
10:49 moi, j'ai respecté pendant longtemps la parole de Jean-Luc Mélenchon,
10:53 qui était une parole, au fond, empreinte de culture,
10:58 qui était une parole réfléchie.
11:00 On voit bien qu'il y a eu une dérive insupportable aujourd'hui de la France insoumise,
11:05 de son dirigeant actuel.
11:06 Je suis encore glacé en me remémorant le tweet qu'il a pu faire
11:10 en évoquant le fait qu'Yael Bonpivé campe à Tel Aviv.
11:15 Tout ça est une dérive qu'il a amenée, effectivement, en dehors du champ républicain.
11:20 Donc je crois que cette parole-là, elle est dangereuse,
11:23 précisément parce qu'elle porte dans notre société.
11:25 Stanislas Guérini, ministre de la Transformation et de la Fonction publique.
11:29 On va parler du projet de loi Immigration qui arrive au Sénat le 6 novembre,
11:33 c'est-à-dire lundi prochain.
11:34 Est-ce que vous allez entendre les Français,
11:37 qui sont une majorité, à réclamer des dispositions plus répressives ?
11:40 C'est ce que révèle cette semaine un sondage au DOXA pour le Figaro.
11:43 Ils veulent rétablir le délit de séjour irrégulier,
11:45 durcir les conditions du regroupement familial,
11:47 faire des quotas annuels pour l'immigration et les demandes d'asile,
11:50 ou encore supprimer l'aide médicale d'État.
11:53 Tiens donc, ce sont en fait les propositions DLR.
11:56 Vous savez, je crois que les Français, nos concitoyens,
11:58 ils veulent, sur ces questions-là et sur les enjeux de l'immigration, de l'efficacité.
12:03 Ils veulent que les lois de la République puissent s'appliquer.
12:07 Ils veulent que, quand on prend des décisions de reconduire
12:10 des personnes qui n'ont pas leur place sur le territoire français à la frontière,
12:14 on puisse le faire, qu'on puisse expulser
12:17 celles et ceux qui sont justement des dangers pour notre République,
12:20 qu'on puisse mettre en place des critères,
12:23 par exemple par les Français, pour accorder des titres de séjour.
12:26 Ils veulent qu'on puisse raccourcir les délais.
12:29 On voit bien qu'aujourd'hui, il y a beaucoup de procédures de recours.
12:32 Quand on donne une décision quant au droit d'asile,
12:35 tout ça, c'est ce que porte le projet de loi que présente Gérald Darmanin,
12:40 le ministre de l'Intérieur.
12:41 Et l'article 3 qui permet de régulariser les sans-papiers dans les métiers en tension.
12:44 Parce que c'est ça aussi la réalité de notre pays.
12:47 Je pense que nos concitoyens, ils sont très pragmatiques en réalité.
12:50 C'est ce que veulent les concitoyens ?
12:51 C'est ce que les sondages montrent.
12:53 Ils veulent qu'on puisse coller à la réalité de notre pays.
12:55 La réalité, c'est qu'aujourd'hui, on n'applique pas suffisamment bien le droit
12:59 et nous nous en donnons les moyens dans ce projet de loi.
13:02 Mais que la réalité, c'est aussi que certains, aujourd'hui, étrangers en France,
13:11 travaillent, travaillent durement, sont attachés aux valeurs de la République,
13:15 le sont dans des métiers en tension.
13:17 Et donc, on doit pouvoir régulariser ces situations.
13:20 Encore une fois, la ligne du gouvernement, notre ligne de conduite,
13:24 c'est une ligne d'efficacité sur ces questions-là.
13:26 Et je mesure aujourd'hui à quel point...
13:29 - Donc pas de référendum pour modifier la Constitution ?
13:31 - Un référendum, pourquoi pas ? Mais ça prendrait trois ans.
13:33 Il faudrait d'abord faire un référendum sur le référendum
13:36 pour pouvoir, à la fin, avoir un débat sur l'immigration.
13:40 Moi, je préfère, et je crois que les Français raisonnent,
13:43 comme je suis en train de le faire, des mesures d'efficacité
13:45 qu'on puisse appliquer rapidement.
13:47 C'est une bonne chose que le débat parlementaire puisse se faire
13:51 au Sénat puis à l'Assemblée pour pouvoir, encore une fois,
13:54 nous donner tous les moyens de l'efficacité
13:57 et de coller aux réalités de terrain
13:58 pour apporter des réponses attendues par nos concitoyens.
14:01 - Merci à vous, Stanislas Guerini,
14:03 ministre de la Transformation et de la Fonction publique.
14:06 Vous étiez l'invité de CNews et d'Europe 1.
14:09 Vos programmes continuent sur nos deux antennes.
14:11 (Générique)
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