Bien qu’il n’ait pas entrepris de carrière universitaire (ou grâce à cela…) Jean-Christian Petitfils est devenu l’un des tout premiers historiens français (et sans doute, délivré de toute contrainte idéologique ou mandarinale le plus libre). Extraordinairement précoce, il s’intéresse très jeune aux énigmes de l’Histoire de France, mais c’est par la science politique qu’il commence ses études, puis par la publication d’ouvrages politiques. Il comprend alors, notamment par son admiration pour le général De Gaulle, qu’il n’est pas de grande politique qui ne se fonde sur l’Histoire - c’est pourquoi, toute nation a besoin de bons historiens, capables de tracer les continuités d’une tradition nationale. Le voici donc biographe à grand succès de Louis XIV, dont il trace le siècle entier autant qu’il en fait le portrait, puis de Louis XVI, qu’il réhabilite magnifiquement, ensuite des trois autres Bourbon, finissant par Henri IV, monument au centre de notre histoire. Se désolant de voir notre mémoire nationale s’étioler au fil d’une Vème République dont les chefs semblent en avoir tout perdu, jusqu’aux actuelles impasses dans lesquelles il voit clair, il s’attaques alors à l’immense projet d’une biographie de Jésus, démontrant en historien la véracité du récit évangélique, notamment de l’Evangile de saint Jean. Ce chrétien sûr de sa foi sait bien que c’est en éclairant les sources mêmes de notre civilisation, et en pointant sa part mystique (jusque dans l’étude du saint Suaire de Turin) qu'il peut encore le mieux la servir, préservant ses forces, assurant sa pérennité dans l’avenir.
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00:00:00 [Musique]
00:00:24 Jean-Christian Petitfils, bonjour.
00:00:26 Bonjour Fred Marie.
00:00:28 C'est une grande joie et puis c'est une fierté de vous avoir chez nous,
00:00:32 au Nouveau Conservateur, revue trimestrielle à laquelle vous avez collaboré.
00:00:35 Nous allons en parler à propos d'un de vos derniers livres.
00:00:38 Je dis toujours un de vos derniers livres parce que vous en produisez tellement
00:00:41 qu'on ne sait jamais si c'est le dernier.
00:00:43 C'était votre Henri IV.
00:00:44 C'est une pêterie ou quoi ?
00:00:46 C'est une aimable complice perdue.
00:00:49 [Rires]
00:00:53 Vous avez publié tant de livres, il y en a plus de 40 que je me méfie un peu.
00:00:57 Je ne sais pas si on pourra parler de tous, mais je vous connais depuis un certain temps.
00:01:03 Je ne sais pas comment j'ai fait votre connaissance.
00:01:05 Nous nous connaissons depuis une bonne vingtaine d'années.
00:01:07 J'ai une admiration profonde pour vous, si bien que pour la première fois
00:01:11 depuis le début de cette série, j'ai presque un peu le trac.
00:01:14 Le monument que vous êtes m'impressionne, pour tout vous dire.
00:01:17 D'ailleurs, je vais vous raconter une anecdote.
00:01:20 Un jour, j'étais avec Marie-France Garot et elle me dit
00:01:24 "C'est catastrophique, dans ce pays, il n'y a plus d'historien, il n'y a plus de grands historiens."
00:01:28 Je lui dis "Quand même, il y a une exception."
00:01:30 Et elle dit, en même temps que moi, "Jean-Christophe Petitfils."
00:01:33 [Rires]
00:01:34 Et il faut...
00:01:35 Très flattée.
00:01:36 Elle est flatteuse, mais elle est vraie, figurez-vous.
00:01:39 Parce qu'il faut des historiens dans un pays.
00:01:42 C'est très important.
00:01:43 C'est essentiel.
00:01:45 Est-ce que vous vous représentez ce que vous êtes ? Le rôle que vous jouez ?
00:01:49 Oui, moi j'essaie de contribuer à la permanence de la pensée française,
00:01:57 de cette tradition qui est...
00:02:01 qui s'ancre aussi bien dans la monarchie.
00:02:03 On me présente comme un spécialiste des Rois de France, ce qui n'est pas faux.
00:02:07 Et puis la République aussi, puisqu'il y a une continuité.
00:02:11 Vous n'avez pas simplement "Nous allons voir",
00:02:13 simplement "Jetez votre dévolu sur les Rois de France".
00:02:16 Encore que c'est un peu votre cœur.
00:02:18 C'est-à-dire que vous avez traité à fond les cinq Rois Bourbons.
00:02:22 Oui.
00:02:23 Vous avez commencé par Louis XIV.
00:02:26 Ah oui, avant le désordre, c'est vrai.
00:02:28 Parce qu'en fait, je n'avais pas du tout ce projet de traiter les cinq Rois Bourbons.
00:02:33 C'est tout simple.
00:02:34 Au départ, j'ai eu la passion de l'histoire tout jeune, grâce à mon père.
00:02:40 Mon père m'a appris Napoléon.
00:02:44 Lui-même d'ailleurs n'était pas très bonapartiste.
00:02:47 Il avait un certain arc-en-ciel.
00:02:49 Mais il m'a appris à admirer Napoléon, l'histoire de Napoléon.
00:02:52 Il devait être un peu monarchiste, non ?
00:02:54 Comment ?
00:02:55 Il devait être un peu monarchiste, non ?
00:02:56 Oui, un petit peu monarchiste, bonapartiste.
00:02:58 J'ai eu un grand-père qui a été député pendant deux législatures, de 1918 à 1928,
00:03:06 et qui a été plébiscitaire, bonapartiste,
00:03:10 qui a été un des fondateurs du Parti démocrate populaire, qui est l'ancêtre du MRP.
00:03:15 Il était catholique et en même temps assez droite, proche de Pierre Tétaché, par exemple.
00:03:21 Les jeunesses patriotes.
00:03:23 Donc il avait un petit journal, il s'est lancé dans la politique.
00:03:26 Vous l'avez connu ?
00:03:27 Très peu.
00:03:28 Il est mort en 1950 et j'avais cinq ans.
00:03:31 Quant à votre père, puisque vous en parlez, je ne pensais pas en parler si tôt, mais c'est très bien.
00:03:37 C'est plutôt un artiste, non ?
00:03:39 Alors mon père, d'abord il a fait toute sa carrière dans la banque, au Crédit foncier.
00:03:43 Et puis, un peu comme moi aussi, double vie.
00:03:47 En même temps, il est revenu.
00:03:49 Et il s'est passionné pour l'histoire littéraire, et notamment pour Rimbaud,
00:03:55 Arthur Rimbaud, puisque lui-même est né à Charleville.
00:03:59 Et d'ailleurs que son grand-père, donc mon arrière-grand-père, a été en classe avec Rimbaud à Charleville.
00:04:06 Et on avait des petits souvenirs, on a même retrouvé une petite photo d'Arthur Rimbaud,
00:04:10 qui était la première photo de Rimbaud qu'on connaisse, et qui était inédite il y a quelques années.
00:04:16 Alors il y a un paysage derrière vous, parce que je vous voyais très parisien, Jean-Christophe Petitfils.
00:04:20 Né à Paris, en tout cas.
00:04:21 Je suis né à Paris, je suis parisien, mais ma famille est d'origine des Ardennes.
00:04:25 Et mon père est né à Charleville, mon grand-père à Sèvres-d'Or.
00:04:30 Et vous avez toujours une maison de famille ?
00:04:33 Non, non, non, non, il y a eu la guerre, ces familles ont connu des revers aussi de fortune du fait des invasions.
00:04:44 Vous travaillez tellement qu'on s'imagine que vous n'avez même pas de maison de campagne.
00:04:47 Si, j'ai une maison de campagne.
00:04:49 Ah bon, on a l'impression que vous travaillez dans la Sarthe.
00:04:52 Ah oui, dans la Sarthe, du coup de l'autre côté.
00:04:54 Voilà, voilà, et là j'y vais, bon pas toujours souvent, mais quand j'y vais, c'est un moment où je peux travailler,
00:05:00 c'est très agréable, j'ouvre les volets et puis je suis dans le milieu d'un tout peu de pays.
00:05:05 Ah, j'ai eu peur que vous ne soyez plus parisien.
00:05:07 Non, non, non, non, on a eu des arbres.
00:05:09 Un homme comme vous a toujours besoin d'un endroit pour mettre ses livres, c'est pas ça ?
00:05:12 Oui, et puis il y a besoin d'interdures aussi, il y a besoin de promenade, et puis des livres.
00:05:16 Évidemment, j'en ai à Paris énormément, et dès que j'en ai trop à Paris, je les emporte à la campagne.
00:05:23 Et quand vous travaillez à la campagne, ceux qui sont à Paris vous manquent.
00:05:26 Et l'Issée, l'Issée est là.
00:05:28 Vous savez tout.
00:05:29 Nous avons tous les mêmes problèmes, mon cher.
00:05:33 Enfin, tout au moins ceux qui se piquent d'écriture.
00:05:36 Donc, votre enfance, alors, parlons-en.
00:05:39 Mais mon enfance, c'était donc une enfance après-guerre assez difficile, dure.
00:05:46 Mon père avait été prisonnier de guerre, et puis il a réussi à s'évader.
00:05:52 Enfin, il avait une permission spéciale après le bombardement de la porte de Saint-Ours en 1943.
00:05:58 Et grâce aux démarches effectuées par ma mère, il a obtenu une permission pour pouvoir revenir juste 8 jours.
00:06:05 Et puis là, tout le monde lui a dit, il ne faut pas repartir, parce qu'il voulait repartir.
00:06:09 Il disait, j'ai promis, j'ai des camarades là-bas.
00:06:12 Et donc, il est rentré dans la clandestinité, il s'est caché, tout le reste.
00:06:17 Et c'est comme ça que vous êtes né.
00:06:18 Et c'est comme ça que j'ai suivi.
00:06:19 Par hasard, on met tout le monde par hasard.
00:06:22 Le 25 décembre 1945, le jour de Noël, le dernier Noël de la guerre.
00:06:26 Le 25 décembre, on m'a piqué, parce qu'on verra que vous avez écrit Jésus.
00:06:29 Je m'empresse de montrer d'ailleurs la nouvelle version de votre gros Jésus.
00:06:33 Alors, il y a un gros Jésus que je ne montre pas, parce que je ne l'ai pas sorti de la bibliothèque.
00:06:38 Je ne sais plus où il est.
00:06:39 Et puis récemment paru, une version…
00:06:42 Il sort le 4 octobre.
00:06:44 En octobre. Alors, c'est très bien.
00:06:46 Alors, c'est une version illustrée.
00:06:48 Très illustrée, le feuillet.
00:06:50 C'est ça, donc, ce sont les techniques du récit.
00:06:52 Un peu ramassé, un peu plus court que la version originale.
00:06:55 C'est un récit graphique avec l'intelligence artificielle pour illustrer.
00:07:00 Que dites-vous ?
00:07:01 C'est le pari de l'éditeur et on va voir ce que ça va faire.
00:07:06 Pour essayer d'élargir un peu le lectorat.
00:07:08 Revenons au 25 décembre, puisque vous êtes bien le 25 décembre.
00:07:11 D'ailleurs, on n'est même pas sûr que Jésus soit né le 25 décembre.
00:07:13 Ah non, sûrement pas.
00:07:15 Je l'ai appris en vous lisant d'ailleurs, en lisant votre gros Jésus, la version initiale.
00:07:19 Alors, voyez, on parle un peu dans tous les sens, mais parlez-nous encore de votre enfance.
00:07:23 L'histoire est arrivée comment ?
00:07:24 Donc l'histoire, c'est mon père qui m'a emmené aux Abadie, me promenait sur les quais,
00:07:31 j'achetais des livres d'histoire passionnés.
00:07:33 J'avais 8 ans, 10 ans.
00:07:36 Après, j'y allais tout seul.
00:07:37 À 10 ans, un jeune homme sur les quais achetait des livres d'histoire ?
00:07:40 Oui, accompagné de ma tante, de mon père.
00:07:45 Mais j'achetais des livres d'histoire.
00:07:46 Oui, j'étais passionné.
00:07:47 Alors, qu'est-ce qui a été l'élément déclencheur de ma passion véritablement ?
00:07:52 Ce sont les romans d'Alexandre Dumas, et en particulier, le cycle des Mousquetaires.
00:07:57 Oui, c'est très banal.
00:07:58 Une banalité affreuse.
00:08:00 Je ne sais pas si Alexandre Dumas n'avait pas vécu et écrit, combien de Français seraient passés à côté de l'histoire de France ?
00:08:07 Oui, voilà.
00:08:08 Un peu comme vous d'ailleurs.
00:08:09 Ce qui m'a passionné, c'est le cycle des Mousquetaires.
00:08:13 D'Artagnan, le véritable d'Artagnan.
00:08:17 J'ai fait des recherches énormes sur d'Artagnan, tout jeune.
00:08:21 Et puis après, ultérieurement, dans les archives, j'ai trouvé des documents, des lettres d'Artagnan inédites.
00:08:27 Et puis, je me suis occupé aussi, alors là j'avais une vingtaine d'années, mais même un bon quinze ans, de l'Homme au masque de fer.
00:08:36 Tout ça, c'est lié au cycle d'Alexandre Dumas, vingt ans après, et le Vicomte d'Aubrajeune, où on parle de cet épisode de l'Homme au masque de fer.
00:08:44 Vous avez publié les énigmes de l'histoire de France et les énigmes de l'histoire du monde.
00:08:50 Voilà, j'ai un chapitre, bien sûr, sur le masque de fer, mais j'ai écrit deux livres sur le masque de fer, des articles.
00:08:57 Et mon premier article a été consacré, dans le Mercure de France, à l'Homme au masque de fer.
00:09:02 À quel âge aviez-vous ?
00:09:03 J'avais quinze ans.
00:09:04 Oh, incroyable ! À quinze ans, vous étiez…
00:09:06 À quinze ans, dans une revue à Comité, c'était très sympathique.
00:09:09 Ah, quelle précocité terrible !
00:09:11 Donc, c'était sérieux, ce n'était pas du tout un roman, c'était un CD des recherches.
00:09:17 Et j'avais avancé une hypothèse nouvelle, que j'ai abandonnée.
00:09:21 Sur le masque de fer ?
00:09:22 Oui, oui, c'est ça.
00:09:23 Vous avez la clé de l'énigme, en fait ?
00:09:25 En grande partie, oui, oui.
00:09:27 Alors, qui était-ce ?
00:09:28 Alors, c'est simple et en même temps compliqué.
00:09:31 Ça n'a pas l'air simple.
00:09:34 C'est un personnage, banalité totale, c'est un valet, qui n'a pas d'articularité physique,
00:09:42 qui s'appelle Eustache d'Angers, qui a été arrêté à Calais en 1669,
00:09:50 conduit à la prison de Pignorol en Italie, à l'Italie du Nord,
00:09:55 avec un tout petit détachement d'ailleurs de garde et un capitaine,
00:10:00 et qui a été enfermé pendant 34 ans.
00:10:05 Et qui n'était pas masqué au départ.
00:10:08 Il détenait un secret, et à mon avis, alors là c'est une clarification personnelle,
00:10:14 mais c'est lié au problème de négociations diplomatiques entre la France et l'Angleterre.
00:10:18 Il est arrêté à Calais en 1669.
00:10:20 Donc il savait des choses.
00:10:22 Il y avait un traité très secret qui était le traité de Douvres,
00:10:25 signé entre la France et l'Angleterre l'année suivante.
00:10:27 Il y a eu des négociations qui étaient entamées par la belle-sœur de Louis XIV,
00:10:32 Henriette d'Angleterre, qui est la sœur du roi Charles II,
00:10:35 lequel roi de Charles II voulait très secrètement se convertir au catholicisme,
00:10:41 et en échange, obtenir l'appui du roi de France.
00:10:44 Et le roi de France avait besoin de l'Angleterre pour attaquer la Hollande,
00:10:48 parce qu'il voulait se venger de la Hollande qu'il avait bloquée pendant la guerre de Dévolution.
00:10:52 C'est un peu compliqué tout ça, mais...
00:10:54 - Ah bah oui, Louis XIV c'est compliqué.
00:10:56 - Voilà, donc ce qu'on appelle le grand secret.
00:10:59 Et alors il y avait des correspondants chiffrés, et entre la France et l'Angleterre,
00:11:03 et puis il y a eu un document qui était en français, bien, très clair,
00:11:07 et que probablement ce valet qui servait d'intermédiaire a lu.
00:11:10 Et donc ce qu'il a vu, sans que lui reprocher, c'est ce qu'il avait vu.
00:11:13 Il a vu quelque chose, et il a vu un document.
00:11:16 Et puis à partir de là... - Il est mort en captivité.
00:11:19 - Il est mort en captivité, mais il y a eu des changements.
00:11:22 À un moment donné, on a atténué son régime carcéral,
00:11:26 on l'a mis même au service d'un personnage très important qui était Nicolas Fouquet,
00:11:31 avec des instructions très particulières, comme quoi il ne devait parler à personne,
00:11:34 en dehors de Nicolas Fouquet.
00:11:36 Et puis comme on a allégé le régime carcéral de Fouquet,
00:11:39 on lui a permis de rencontrer le comte de Lauzun,
00:11:43 le fameux amoureux de la grande mademoiselle,
00:11:47 qui était un personnage aussi, et que les deux hommes se sont parlé,
00:11:51 notamment à travers un conduit de cheminée qui était travaillé par Lauzun.
00:11:55 Lauzun s'est hissé dans la chambre de l'état supérieur.
00:11:58 - Ils ont pu communiquer.
00:12:01 - Ils ont pu communiquer. Donc ce qui a été interdit a été...
00:12:05 - Et on ne saura jamais le secret.
00:12:08 - Alors on ne sait pas le secret. Ce qu'on sait, c'est qu'à la mort de Fouquet,
00:12:11 qui était intervenu à ce moment-là, probablement d'une crise cardiaque,
00:12:14 parce qu'on a découvert ce conduit secret entre les deux cellules,
00:12:19 les instructions ont été très claires.
00:12:23 Vous devez faire croire à tout le monde que le valet a été libéré,
00:12:28 et vous devez le renfermer dans un lieu où personne ne saura où il se trouve,
00:12:34 et dire à tous ceux qui vous l'intéressent, je crois qu'il est sorti.
00:12:39 Il s'agissait de démonétiser les éventuels bavardages de Lauzun.
00:12:44 Et à partir de là, M. Tsama, je vais être très court,
00:12:48 parce que c'est une longue histoire.
00:12:51 - Une conversation de trois ou quatre heures.
00:12:54 - M. Tsama, qui était le gouverneur de Figuerolles,
00:12:58 et qui avait été nommé à l'île Sainte-Marguerite,
00:13:01 a commencé à bavarder en disant "je garde un personnage très important,
00:13:05 personne ne doit le connaître, j'ai honte de le tuer si jamais il dit son nom".
00:13:10 Et du coup, il en a rajouté aux instructions.
00:13:14 Et notamment, comme le personnage devait être censé avoir été libéré,
00:13:19 il lui a mis un masque d'acier sur le visage.
00:13:23 Ce masque d'acier figure dans une petite gazette de l'année 1687.
00:13:29 Au moment où il est transféré à l'île Sainte-Marguerite,
00:13:32 on peut encore voir sa cellule.
00:13:35 - C'est terrible, mais finalement, cette monarchie était assez clémente ou humaniste,
00:13:39 parce que la plus simple but était de l'estourbir.
00:13:42 - Oui, mais on ne tuait pas. C'est ça le problème.
00:13:45 - C'est très intéressant.
00:13:47 - J'ai vu les archives de la Bastille en entier, j'ai lu toutes les archives.
00:13:55 Jamais vous trouvez un ordre de tuer quelqu'un de la part du roi.
00:14:00 Jamais, jamais, jamais.
00:14:02 Non, non, non.
00:14:04 Alors il y a des cas, mais ça c'est...
00:14:07 - Louis XIII et Saint-Marc.
00:14:09 Louis XIII a voulu la mort de Saint-Marc.
00:14:12 - Il n'a pas donné l'ordre de tuer.
00:14:15 C'est-à-dire que si jamais il résistait, le capitaine de Vitrielli...
00:14:18 Et s'il résiste, si le roi se tait.
00:14:22 - C'est une autorisation.
00:14:25 - Alors on est déjà parti dans l'érudition.
00:14:28 - On devrait faire son procès.
00:14:30 - Ce qu'il faut dire, c'est que dans ces régimes...
00:14:32 - Même pour vous, l'histoire a des secrets.
00:14:34 - Oui, bien sûr. Il y a deux systèmes.
00:14:36 Il y a d'un côté la justice déléguée et de l'autre la justice retenue.
00:14:41 La justice retenue, c'est la justice du roi qu'ils exercent par l'être décaché.
00:14:45 Mais à ce moment-là, le roi ne peut pas tuer.
00:14:48 Le roi très chrétien ne peut pas dire "je me débarrasse d'un individu".
00:14:51 - Ce que fera la République abondamment.
00:14:53 Les républiques abondamment, par ici.
00:14:55 - Oui, oui, et puis ce que font les régimes dictatoriaux aujourd'hui.
00:14:58 On n'a qu'à regarder du côté de Moscou.
00:15:00 - Mais même les républiques françaises vont faire ça.
00:15:02 - Mais oui, oui, oui. Les barbouzes.
00:15:04 Il n'y a pas de service de barbouze.
00:15:06 Ça c'est la justice...
00:15:08 - Très chrétien.
00:15:09 - Le roi très chrétien ne tue pas.
00:15:11 Regardez, il y a un truc particulier, c'est l'affaire des poisons.
00:15:15 Il y a un certain nombre d'individus, de basse catégorie, de sorciers, d'empoisonneurs,
00:15:21 qui ont commencé à vouloir impliquer Mme de Montespan.
00:15:25 Le roi qui avait commencé un procès pour toutes ces personnes impliquées dans l'affaire des poisons,
00:15:32 ils étaient très nombreux, près de 400, le procès de l'arsenal.
00:15:35 C'était une gigantesque affaire que j'ai étudiée aussi, puisque j'ai fait un livre sur l'affaire des poisons.
00:15:39 - Je sais bien.
00:15:40 - Eh bien, le roi est obligé d'arrêter la procédure judiciaire.
00:15:44 Ça c'est la justice déléguée, justement, faite par des juges.
00:15:48 Et là, les juges ont le droit de condamner à mort.
00:15:50 Et on arrête pour pas que le nom de Mme de Montespan soit prononcé.
00:15:53 - Apparaissent.
00:15:54 - Et à partir de là, le roi va envoyer dans les citadelles une quarantaine de personnes, sur les 400,
00:16:01 qui ont prononcé le nom de Mme de Montespan.
00:16:03 - Pour les isoler.
00:16:05 - Avec des instructions données aux geôliers, en disant que vous ne devez jamais écouter ce que ces gens voudront vous dire.
00:16:09 Il leur est arrivé de prononcer des insanités contre Mme de Montespan.
00:16:14 Voilà.
00:16:15 Donc on est dans le même schéma intellectuel, la même construction.
00:16:19 - On protège, mais on ne tue pas. Enfin, on protège. On empêche la communication, mais on tue pas.
00:16:24 - Voilà. On enferme à vie. Alors ces gens, ils sont restés 30 ans, 40 ans en prison.
00:16:28 La dernière, c'était une femme, Loiseau, qui est morte au début du 18e siècle, vers 1730, par là, et qui était restée 35 ans.
00:16:38 - Alors tout ça, l'enfant que vous étiez, je reprends mon fil.
00:16:41 - Voilà.
00:16:42 - Excusez-moi, je sais que de toute façon, avec vous, c'est trop foisonnant.
00:16:45 Je ne vais pas pouvoir suivre mon fil. D'ailleurs, j'en ai pas.
00:16:48 Mais revenons donc au jeune homme que vous étiez dans les années 50, attiré par l'histoire.
00:16:55 Vous ne nous avez toujours pas dit pourquoi. Vous vouliez résoudre les énigmes, c'est ça ?
00:16:59 - Oui, au départ, c'était résoudre les énigmes.
00:17:01 - Et puis celle qu'il pouvait y avoir sous la peluche d'Alexandre Dumas.
00:17:03 - Voilà, trouver la personnalité du vrai d'Artagnan.
00:17:07 - Le collier de la Reine, etc.
00:17:09 - Oui. Alors peu à peu, j'ai tourné autour du 17e. J'ai commencé à écrire des ouvrages sur Mademoiselle de la Vallière.
00:17:17 J'ai écrit une biographie de Mademoiselle de la Vallière, Madame de Montespan.
00:17:19 - C'était vos premiers livres, ça ?
00:17:21 - Non, non, non. J'avais écrit d'autres livres avant.
00:17:24 - Plus contemporains.
00:17:26 - Oui, voilà, c'est ça. Si vous voulez, j'ai fait des études nombreuses.
00:17:31 - D'abord sciences politiques.
00:17:33 - J'ai fait Sciences Po au Paris, j'ai fait du droit, une maîtrise de droit.
00:17:37 J'ai fait l'Institut d'administration des entreprises.
00:17:41 - Pour votre malheur.
00:17:42 - J'ai fait un doctorat d'État en sciences politiques.
00:17:44 Et j'ai fait une licence d'enseignement d'histoire géographique.
00:17:48 Et j'ai voulu au départ me spécialiser dans la science politique et les analyses politiques.
00:17:55 Les idées politiques, ça avait été ma grande passion au sortir de Sciences Po.
00:17:59 - D'où un livre sur le gaullisme, le socialisme utopique.
00:18:02 - Voilà, un livre à Cussèges sur le gaullisme, à Cussèges sur la droite en France,
00:18:07 sur l'extrême droite, sur les socialismes utopiques.
00:18:11 - Qui vous a valu l'inimitié de la gauche, ça.
00:18:13 - Oui, oui, oui.
00:18:14 - On a trouvé que vous n'étiez pas assez sympathisant de la cause.
00:18:17 - Voilà, un livre sur la vie quotidienne des communautés utopistes au 19ème.
00:18:21 Ça m'avait intéressé parce que c'était une gauche un peu particulière par rapport...
00:18:25 C'est pas la gauche communiste qui veut la révolution, c'est pas la gauche socialiste qui veut la réforme,
00:18:31 mais qui veut transformer la société à partir d'un modèle expérimental.
00:18:37 Donc on va faire une petite société, on va quitter le monde pourri, le monde décadent,
00:18:43 et on va créer la cité utopique, l'utopie de Thomas More, et il y en a eu des quantités.
00:18:50 Et tout ça, c'est un mouvement très intéressant que j'ai étudié,
00:18:54 Kabe, par exemple, qui va aux États-Unis, qui font une société communiste.
00:18:58 L'idée, c'est à partir d'une cellule expérimentale, d'une société,
00:19:02 de proche en proche, de transformer la société.
00:19:05 Et évidemment, c'est malheureux, il part plein d'espoir.
00:19:09 - Une naïveté folle, en fait.
00:19:10 - Un nom en Icarie, on vend tout, c'est bien, ce sont des pauvres paysans qui vont,
00:19:16 et qui s'en vont, et qui quittent.
00:19:18 Et ce sont des milliers de gens qui ont quitté pour créer des utopies,
00:19:22 - Des phalanstères.
00:19:23 - Des phalanstères, avec Fourier, Kabe, c'était donc un idéal communiste, etc.
00:19:31 Et ces gens se sont trompés parce qu'en réalité, ils n'avaient pas compris qu'en fait,
00:19:36 au sein même de l'homme, il y a le péché originel.
00:19:39 - Et ça revient toujours.
00:19:40 - Ils ont transporté avec eux-mêmes.
00:19:42 - C'est le problème de la gauche, c'est qu'il faut abstraction du péché originel.
00:19:45 - Voilà, voilà.
00:19:46 - Ça revient toujours, encore plus fort.
00:19:48 - Alors toutes les discussions d'assemblée, ces gens ne savaient pas du tout travailler l'inter,
00:19:53 évidemment, c'était parfois des artisans.
00:19:55 - C'est 68 avant la Lestre.
00:19:57 - Voilà, mais il y en a eu, il y a eu aussi des communautés 68 avant.
00:20:00 - D'ailleurs, vous étiez étudiant à Sciences Po, que vous vous intéressiez à ces...
00:20:04 - Oui, oui, oui, et puis après j'ai écrit au sortir de Sciences Po.
00:20:06 - Là, vous aviez 20 ans, 22 ans.
00:20:07 - Oui, oui, j'ai écrit au sortir de Sciences Po.
00:20:09 - Déjà à 22 ou 23 ans, vous avez lu plusieurs livres à votre actif.
00:20:12 - Alors, non, à 25 ans, mon premier livre était à sortir,
00:20:16 après j'ai fait sur la droite, sur l'extrême droite, donc à 25 et 30 ans.
00:20:23 - Puis De Gaulle.
00:20:24 - Et puis le gaudisme, oui, qui est un peu ma famille politique, disons.
00:20:29 - Certes, certes.
00:20:30 - En tout cas, je me retrouve le mieux.
00:20:33 - Avec toutes les ramifications du général De Gaulle qui lui...
00:20:35 - Plus gaullien qu'ailleurs que gaulliste, parce que je n'aime pas trop le parti gaulliste.
00:20:40 - Il n'y en a pas, rassurez-vous.
00:20:42 - Non, mais il y en a eu.
00:20:43 - Il y a eu un stirp, un petit sac, un peu, pfff...
00:20:46 Avec toutes les ramifications du général De Gaulle qui plonge dans l'histoire de France.
00:20:49 - Voilà, voilà.
00:20:50 - Il y avait un écho qui vous était familier peu à peu, parce que vous êtes assez hyper mnésique,
00:20:55 j'ai l'impression que vous retenez tout ce que vous lisez.
00:20:57 Il y a des gens comme ça.
00:20:58 - Oui, oui.
00:20:59 - Et bien, je me demande comment avez-vous pu tellement travailler,
00:21:01 parce qu'alors l'histoire est encore plus corsée,
00:21:03 d'où mon admiration un peu ébahie.
00:21:06 Vous n'avez pas fait, pardon de cette question que 50 000 personnes ont dû vous poser,
00:21:12 avec le goût de l'histoire que vous aviez de longue date,
00:21:15 le creux de votre enfance,
00:21:17 vous n'avez pas fait d'études d'histoire.
00:21:19 - Si, si, j'ai fait 400 études d'histoire.
00:21:20 - Et vous n'êtes pas entré à la faculté.
00:21:21 - Oui, j'ai fait 400 études d'histoire.
00:21:22 - Autant vous n'avez pas pontifié.
00:21:24 - Mais je n'ai pas passé la grégation.
00:21:26 Non, parce qu'alors au départ...
00:21:28 - L'université ne vous tentait pas ?
00:21:30 - Si, à un moment donné, mon idée c'était la science politique.
00:21:34 Et c'est surtout les idées politiques d'ailleurs,
00:21:36 plutôt que les sondages et la science politique.
00:21:39 - D'ailleurs vous aviez eu un maître qui...
00:21:41 célèbre, le Chevalier.
00:21:42 - Ben, Jean-Jacques Chevalier.
00:21:44 - Jean-Jacques Chevalier.
00:21:45 - Jean-Jacques Chevalier qui était mon directeur de thèse.
00:21:47 Donc, moi j'ai beaucoup aimé cela, les idées politiques.
00:21:51 Et je voulais faire, ce qui était en préparation,
00:21:53 mais qui n'était pas sorti à 120,
00:21:55 c'était une agrégation de sciences politiques,
00:21:57 mais pas une agrégation des universités,
00:22:00 comme l'agrégation de droit,
00:22:01 il y avait une agrégation de sciences éduques.
00:22:03 - C'était très étroit, il y avait très peu de postes.
00:22:05 - Mais il n'y a pas d'agrégation de sciences politiques.
00:22:07 Il n'y en avait pas.
00:22:09 Et ça a été créé par Edgar Faulx,
00:22:11 la loi Edgar Faulx, mais c'était trop tard,
00:22:13 je partais au service militaire,
00:22:15 je me mariais,
00:22:17 et donc j'ai trouvé du travail dans la vie économique,
00:22:21 dans le privé, et je suis rentré...
00:22:23 - Dans la banque ?
00:22:24 - Dans la banque, oui, voilà, je suis rentré dans la banque.
00:22:26 - Avec ton père ?
00:22:27 - Avec mon père, oui, absolument.
00:22:29 Sauf que mon père, lui, était au Crédit foncier de France,
00:22:31 et moi, je suis rentré dans la banque
00:22:33 qui s'appelait la Banque de Suèze et de l'Union des mines,
00:22:36 qui est devenue la Banque Indo-Suèze,
00:22:38 en fusionnant avec la Banque de l'Indochine,
00:22:40 puis après qui a été rachetée par le Crédit Agricole,
00:22:43 qui a fusionné aussi avec le Crédit Lyonnais,
00:22:47 enfin bon, il y a eu énormément de...
00:22:49 - Alors, c'est ça aussi mon admiration.
00:22:51 Je vous avais posé la question un jour,
00:22:53 vous étiez venu à mon micro de radio courtoisie,
00:22:55 parce que je ne savais pas comment on pouvait faire ça.
00:22:57 Moi, j'écrivais mes livres avec...
00:22:59 Je prends un temps fou, je me perds,
00:23:02 je m'abandonne, je reprends, etc.
00:23:04 Ce n'était pas le sujet, mais alors vous,
00:23:06 vous avez une régularité de métronome,
00:23:08 et en plus, vous avez fait une grande carrière
00:23:10 dans la banque, enfin dans les finances, on peut dire.
00:23:12 - Oui, ce n'est pas la banque...
00:23:14 - Quel était votre carrière ?
00:23:15 - Ce n'est pas la banque classique,
00:23:16 moi, je suis rentré dans un secteur,
00:23:19 dans le secteur financier.
00:23:20 - Vous avez monté tous les échelons,
00:23:22 vous étiez fondé de pouvoir, directeur...
00:23:24 - Sous-directeur, directeur adjoint, oui, oui, tout à fait.
00:23:26 - C'est Indosuesse, ça ?
00:23:28 - C'était Indosuesse, oui.
00:23:29 - Et après, le Crédit Agricole, non ?
00:23:31 - Bah, ça a fusionné, moi, je suis...
00:23:33 Indosuesse a été repris pour le Crédit Agricole.
00:23:35 - Mais attendez, attendez, là, je vous arrête,
00:23:37 parce que vous alliez au bureau tous les jours ?
00:23:39 - Bah oui !
00:23:40 - Il n'y avait pas de télétravail à ce moment-là.
00:23:43 - Vous êtes devenu le plus grand historien,
00:23:45 un des plus grands historiens,
00:23:46 pensé contemporain, vivant,
00:23:48 en même carrière,
00:23:49 - Je travaillais le soir.
00:23:50 - qui n'avait rien à voir.
00:23:51 - Je commandais mes livres le samedi, d'un samedi à l'autre,
00:23:55 à la Biothèque Nationale, ou aux Archives Nationales,
00:23:58 ou au Département des Manuscrits de la Biothèque Nationale,
00:24:01 et puis j'y allais le samedi,
00:24:03 je travaillais, je copiais, là,
00:24:05 et je revenais le soir, puis je méditais.
00:24:07 Quand je...
00:24:08 Après, j'ai longuement travaillé...
00:24:11 - À la Défense, peut-être, aussi ?
00:24:12 - À la Défense, et le...
00:24:15 Je relisais dans le métro,
00:24:17 mes pages que j'avais écrites le week-end.
00:24:23 J'arrivais à m'isoler dans un train ou dans un métro,
00:24:27 et j'avais une heure de trajet, ou presque une heure.
00:24:31 - Ce n'était pas assez ?
00:24:32 - Ce n'était pas assez.
00:24:34 Enfin, il ne fallait trouver qu'une place,
00:24:35 parce que sinon, ça n'était pas très facile.
00:24:37 - Et puis, se concentrer,
00:24:38 ça demande une faculté intellectuelle,
00:24:40 d'organisation, de concentration,
00:24:43 une volonté de faire,
00:24:44 parce que vous aviez une femme et des enfants, quand même.
00:24:46 - Oui, bien sûr.
00:24:47 Bien sûr, oui.
00:24:48 J'ai quatre enfants.
00:24:49 - Vous m'avez dit que vous travailliez le matin,
00:24:51 avant d'aller au bureau ?
00:24:52 - Oui, un petit peu, le soir ou le matin,
00:24:55 mais pas de lecture, en ce moment-là.
00:24:56 - Ah, lecture.
00:24:57 - Je ne sais pas, non.
00:24:58 - Pour écrire, c'était les fins de semaine ?
00:25:00 - Et puis, les vacances, aussi, bien sûr.
00:25:02 Pendant les vacances...
00:25:03 - Les vacances, on n'écrit pas 40 et quelques livres en vacances, quand même.
00:25:07 - J'ai écrit 40 livres en combien ?
00:25:10 - Ah oui, vous n'avez pas 30 ans, d'accord.
00:25:12 - 40 ans, oui.
00:25:13 45 ans.
00:25:15 - On ne fait pas 40 livres comme ça.
00:25:18 Il faut dire que vous n'avez plus 30 ans,
00:25:21 mais en ayant pour activité principale,
00:25:24 outre la vie familiale,
00:25:27 une activité importante, professionnelle,
00:25:30 vous êtes monté assez haut.
00:25:31 D'ailleurs, vous avez fait des choses importantes.
00:25:33 - Alors, oui, mais...
00:25:34 - Dans la banque, je veux dire.
00:25:35 - Mais maintenant, je suis à la retraite depuis bientôt...
00:25:38 depuis 19 ans.
00:25:39 - Vous avez pris votre retraite à 60 ans, assez tôt.
00:25:41 - Voilà.
00:25:42 Donc, depuis ce temps-là,
00:25:43 évidemment, je fais les bouchées doubles.
00:25:46 Donc, j'écris selon mes passions
00:25:50 et puis selon les discussions que j'ai avec les éditeurs.
00:25:55 Et c'est comme ça qu'après avoir commencé à Louis XIV...
00:25:58 - Louis XIV, vous avez dit que c'est 25 ans de travail.
00:26:01 - Oui, 25 ans, parce que je tournais un peu autour de Louis XIV.
00:26:05 J'ai écrit un livre sur le basket de fer,
00:26:07 "La Louise de la Vallière", "La Dame de Montespan",
00:26:10 "L'affaire des poisons".
00:26:12 Donc, je commençais à bien connaître le XVIIe,
00:26:15 à aimer ce siècle, ce grand siècle.
00:26:18 Et puis, donc, je tournais autour du roi, évidemment.
00:26:22 Donc, à partir de ce moment-là, j'ai dit,
00:26:24 il faut que j'écrive quelque chose sur...
00:26:26 - Carrément, "L'hymographie de Gatow".
00:26:28 C'est une histoire de presque tout un siècle, en réalité.
00:26:31 - Oui, bien sûr.
00:26:32 Ce n'est pas seulement la vie du roi,
00:26:34 c'est l'histoire du siècle.
00:26:36 - Le pire, c'est qu'en plus, vous écrivez, au sens...
00:26:38 Vous écrivez très bien.
00:26:40 - J'essaie.
00:26:41 - Ça vous vient comme ça, les phrases ?
00:26:43 - Ah non, non, ça se travaille, tout ça.
00:26:45 - Mais quand...
00:26:46 - Ça se travaille aussi.
00:26:47 - Vous dormez, ce n'est pas possible.
00:26:49 - Ça se travaille.
00:26:50 - Bon, alors, Louis XIV, grand succès.
00:26:52 - Oui, très grand succès.
00:26:54 - Grassement dedans à...
00:26:55 - Grand prix de la biographie de l'Académie française,
00:26:58 puis d'autres prix.
00:27:00 - De 60 000 à 70 000, ce qui est rare pour un livre de ce genre.
00:27:03 - Oui, oui, oui, oui.
00:27:04 - Grassement dedans à l'université,
00:27:06 comment ce jeune universitaire
00:27:08 devient un historien reconnu ?
00:27:10 Qui est ce Jean-François Petitfils ?
00:27:12 - Voilà, oui, peut-être.
00:27:13 - Ça a commencé, il y a un peu d'inimitié qui...
00:27:15 - Un peu de jalousie, oui.
00:27:16 - Un peu de jalousie, oui.
00:27:18 Qui n'a pas cessé, d'ailleurs, je crois.
00:27:20 - Non, non, non, mais il y a eu quand même de la reconnaissance,
00:27:22 à un moment donné, au lieu...
00:27:24 Ah, bon, ben...
00:27:25 - C'est un peu purite, oui.
00:27:26 - Moi, je ne cherche pas à marcher sur les plates-bandes des universitaires.
00:27:30 Bon, moi, c'est mon style,
00:27:33 j'ai ma propre réflexion.
00:27:35 Je pense que pour écrire un livre,
00:27:37 il faut d'abord avoir envie d'écrire, bien sûr,
00:27:40 aimer son personnage, avoir une empathie avec le personnage,
00:27:43 même si c'est un personnage complexe,
00:27:45 avec ses défauts, ses qualités.
00:27:47 Il faut rassembler une documentation pointue,
00:27:50 et même voir des travaux...
00:27:53 - Tout le monde se fait révérence là-dessus,
00:27:55 sur la qualité de la documentation.
00:27:57 - Voilà.
00:27:58 - L'appareil, comme on dit...
00:27:59 - L'appareil critique.
00:28:00 - Je crois qu'il y a un de vos livres, c'est Jésus,
00:28:02 je crois qu'il y a 160 pages d'appareils critiques.
00:28:04 - Oui.
00:28:05 Il faut des appareils critiques, il faut des références.
00:28:07 Ne pas hésiter à les voir aussi à l'étranger.
00:28:09 Bon, je ne veux pas donner des noms,
00:28:11 mais des biographes de Louis XIV et autres,
00:28:16 qui ne traitent que des bibliographies franco-françaises,
00:28:20 c'est insuffisant.
00:28:21 Les anglo-saxons ont fait des choses extrêmement importantes
00:28:25 pour étudier dans ces régimes.
00:28:27 Il faut bien voir que...
00:28:28 - Par exemple, on fait des biographies de Marie-Antoinette
00:28:30 sans aller en Autriche.
00:28:31 - Oui, voilà, exactement.
00:28:33 - Je veux dire ça en particulier.
00:28:35 - Il y a des approches très importantes
00:28:42 qui n'ont pas été...
00:28:44 Pendant longtemps, maintenant, ça a changé,
00:28:46 mais pendant longtemps, on est resté dans l'histoire de France
00:28:51 avec des enseignants marqués par l'idéologie marxiste-léniniste.
00:28:58 Toutes les études sur l'évolution française
00:29:00 étaient des marxistes-léninistes, des robespyristes,
00:29:03 et toutes les études sur les rois de France
00:29:06 étaient marquées par une vision très classique
00:29:12 et un peu vieillotte par rapport aux travaux anglo-saxons.
00:29:16 Ce que moi, pour apporter les travaux anglo-saxons,
00:29:19 c'est les études de mécanismes, de clientèle, de clan,
00:29:25 montrant que quand l'État n'est pas encore construit véritablement,
00:29:30 ce sont ces mécanismes hérités de la féodalité en France.
00:29:35 - Tout simplement.
00:29:36 - C'est une féodalité, mais...
00:29:38 - Avec des liens d'allégeants.
00:29:39 - Avec des liens d'allégeants, c'est ça.
00:29:41 Il n'y a plus d'hommage-lige, véritablement.
00:29:44 - Et c'est domaume.
00:29:45 - Ce n'est pas lié à la terre, mais il y a des liens domaume.
00:29:47 Et ces liens domaume structurent complètement la société.
00:29:50 - Vous avez tout le temps mis l'accent là-dessus,
00:29:52 à travers plusieurs ouvrages.
00:29:53 - À plusieurs ouvrages, parce que ça permet de comprendre la société française
00:29:56 jusqu'à la Révolution.
00:29:58 - Il reste féodal.
00:30:00 - Oui, bien sûr, l'aristocratie, c'est elle qui a fait la Révolution,
00:30:06 il faut bien le dire.
00:30:07 C'est elle qui a voulu renverser le roi,
00:30:09 parce que le roi était porteur d'une idée...
00:30:12 - La bourgeoisie.
00:30:13 - Non, non, non.
00:30:14 - Oh, Laurence Perdoux.
00:30:15 - Non, mais la bourgeoisie avait un idéal,
00:30:19 c'était d'intégrer la noblesse.
00:30:21 - Oui.
00:30:23 - Au 18e siècle, M. Danton se faisait appeler D'Apostrophe A N.
00:30:28 M. De Robespierre, en un seul mot, s'est mis De Robespierre.
00:30:33 - Mais alors, je dis Laurence Perdoux, c'est Régine Perdoux.
00:30:36 - Oui, Régine Perdoux.
00:30:38 - Qui fait un travail...
00:30:39 - Non, mais la bourgeoisie, elle aspirait à s'intégrer dans la noblesse.
00:30:44 - C'est ça.
00:30:45 - Et le grand drame du 18e siècle,
00:30:47 qui permet de comprendre une grande partie de la Révolution,
00:30:50 c'est le fait que, pendant la guerre de succession d'Espagne,
00:30:55 donc de 1801 à 1813-14,
00:30:59 où il y avait les traités de Rézvic et Rastatt,
00:31:02 eh bien, la noblesse a perdu un tiers de ses effectifs.
00:31:08 Donc, ils étaient 200 000 et ils n'étaient plus que 120 000.
00:31:12 Et le mouvement ne s'est pas renouvelé.
00:31:14 Et au contraire, la noblesse s'est fermée.
00:31:16 La réaction de Milière, la réaction aristocratique, se ferme.
00:31:19 Se bloque.
00:31:20 On n'admet plus à la cour de ceux qui ont tant de degrés...
00:31:24 - Quartier.
00:31:25 - Et donc, Barnave, l'avocat Barnave, dira sur la Révolution,
00:31:31 toutes les voies étaient fermées.
00:31:33 Donc, c'est le refus, finalement, de la noblesse, d'intégrer...
00:31:37 - De nouvelles.
00:31:38 - De nouvelles.
00:31:39 - Du sang neuf.
00:31:40 - Voilà, d'intégrer du sang neuf.
00:31:41 - Et de faire des enfants.
00:31:42 - Et de faire des enfants.
00:31:43 Et surtout, une faiblesse, finalement, de cette aristocratie,
00:31:47 qui reste traitérienne, pas très riche, finalement,
00:31:51 par rapport, par exemple, à l'Angleterre...
00:31:53 - Elle n'avait pas l'obsession de l'argent, comme les anglo-saxons, les protestants.
00:31:56 - Voilà, l'Angleterre...
00:31:57 - C'est tout à notre honneur.
00:31:58 - Oui, mais ça explique les évolutions sociologiques différentes.
00:32:01 L'Angleterre, par exemple, la jaitrie anglaise, à la fin du 18e,
00:32:06 elle était très impliquée dans les affaires.
00:32:08 On avait le droit de déroger.
00:32:10 On a des affaires, on a des intérêts dans les ports, dans le commerce...
00:32:14 - Sur le protestantisme, c'est ça ?
00:32:16 - Oui, bien sûr.
00:32:17 - L'insertion catholique sur l'argent...
00:32:19 - Cette jaitrie anglaise était extrêmement puissante,
00:32:21 et c'est elle qui a fait tomber la monarchie absolue de Jacques II,
00:32:27 et qui l'a remplacée par Guillaume d'Orange.
00:32:29 Bon, Marie et Guillaume d'Orange.
00:32:31 Avec la Glorious Revolution, 1688,
00:32:35 donc un siècle avant la Révolution française.
00:32:38 Là, en France, ce qui s'est passé,
00:32:40 c'est que l'aristocratie a voulu détruire le pouvoir centralisateur du roi,
00:32:46 et notamment les essais de centralisation de Louis XIV,
00:32:49 qui était quand même bien timide, d'ailleurs,
00:32:51 et n'a pas été capable...
00:32:53 - Commencer avec Louis IV, si je comprends bien.
00:32:55 - Oui, mais c'était pas grand-chose.
00:32:57 C'était pas grand-chose, la centralisation...
00:32:59 - L'abdiciment.
00:33:00 - Je m'inscris en faux...
00:33:02 - Tocqueville.
00:33:03 - Contre la doctrine de Tocqueville.
00:33:04 - Je vois que vous allez attaquer Tocqueville.
00:33:06 - Mais j'aime bien Tocqueville, c'est un immense...
00:33:08 - Attention aux conservateurs, vous y vous rassez, Tom.
00:33:10 - Mais bien sûr, c'est un immense esprit,
00:33:12 un analyste extraordinaire sur la démocratie réveillée.
00:33:15 Mais son livre sur l'ancien régime et la Révolution,
00:33:18 par...
00:33:20 - Système.
00:33:22 - Système, par...
00:33:24 La préliminaire qui me paraît fausse,
00:33:26 c'est de dire que c'est Louis XIV qui,
00:33:28 en centralisant à l'extrême la France,
00:33:31 a provoqué la Révolution.
00:33:32 Pas du tout.
00:33:33 - Un peu comme Frédéric Jacobin.
00:33:34 - C'est l'inverse.
00:33:35 La France s'écroule parce que l'État est très faible
00:33:39 et tombe du fait de la résistance des aristocrates.
00:33:43 On n'a pas posé le principe de la souveraineté.
00:33:47 C'est ça qui est essentiel.
00:33:49 C'est qu'à partir du moment où les États généraux,
00:33:52 qui étaient une assemblée consultative,
00:33:55 se sont proclamés Assemblée nationale le 17 juin 89,
00:34:00 font le serment du jeu de paume de ne pas se séparer
00:34:03 et ne vont pas rédiger une constitution,
00:34:06 deviennent une Assemblée nationale constituante
00:34:08 le 9 juillet 89,
00:34:10 le pouvoir royal s'effondre.
00:34:12 C'est fini.
00:34:13 - La souveraineté...
00:34:14 - La souveraineté passe à la nation
00:34:16 et à son corps représentatif,
00:34:18 qu'elle, l'Assemblée nationale.
00:34:20 - C'est un effondrement à la nation, en fait.
00:34:22 - Oui, bien sûr.
00:34:23 - L'illusion passion parfaite.
00:34:25 - Bien sûr.
00:34:26 Il y a trois souverainetés qui se heurtent sous la Révolution.
00:34:29 La souveraineté royale qui va disparaître.
00:34:32 La souveraineté nationale qui s'affirme.
00:34:34 Et puis derrière, il y a la souveraineté populaire,
00:34:36 prétendument populaire,
00:34:38 qui est en fait incarnée par les jacobins et par les clubs
00:34:41 qui parlent au nom du peuple
00:34:42 et qui veulent détruire la souveraineté nationale
00:34:44 ou la mettre sous tutelle.
00:34:46 - Quelquefois contre le peuple,
00:34:47 en dépit des résistances du peuple.
00:34:49 - Donc c'est ce genre d'analyse que j'ai faite
00:34:53 dans les quatre à Louis XVI.
00:34:55 - J'ai l'impression que vous admirez le modèle anglais
00:34:57 Jean-François Pétitfils.
00:34:58 Un peu, non ?
00:35:00 - J'aime bien chez les anglais,
00:35:05 c'est le goût de la tradition.
00:35:07 Ils ont une royauté qui est ce qu'elle est.
00:35:10 On la critique par le petit bout de la dorniète.
00:35:13 C'est le problème des frasques de la famille royale.
00:35:17 Ce n'est pas très intéressant.
00:35:19 Par contre, moi j'aime bien ce faste déployé
00:35:24 autour d'un homme, autour de...
00:35:26 - Les oranges ont une vulgarité.
00:35:28 - Qui ? - Les oranges,
00:35:30 la famille d'Angleterre, du monde.
00:35:32 - Oui, mais...
00:35:34 - Elle subsiste.
00:35:36 - Ah bah oui, elle subsiste.
00:35:38 - Elle subsiste et elle incarne la nation
00:35:41 dans sa dimension historique.
00:35:43 - Ma question, en tous les cas,
00:35:45 c'est vous qui en faites l'histoire,
00:35:47 c'est-à-dire un français, et plus les anglais,
00:35:49 parce que les anglais se mêlaient beaucoup
00:35:51 de notre histoire, si je comprends bien ce que vous dites.
00:35:53 Et vous voyez votre responsabilité.
00:35:55 Il faut que nous réappropriions
00:35:57 la conscience de notre propre histoire.
00:35:59 Ça a une portée politique énorme.
00:36:01 Vous êtes conscient de ce...
00:36:03 - Oui, oui, oui.
00:36:05 Moi je ne suis pas un homme politique.
00:36:07 - Non, non, non.
00:36:09 Ce que je veux dire, c'est que les historiens
00:36:11 servent la France beaucoup plus que les hommes politiques.
00:36:13 - Oui, mais les hommes politiques
00:36:15 se penchent un peu sur l'histoire de France.
00:36:17 Parce que plus on avance en ce moment,
00:36:20 depuis quelques générations même,
00:36:22 moins les connaissances historiques
00:36:24 au sein des hommes politiques...
00:36:26 - C'est des hommes politiques qui me touchent.
00:36:28 - Qui me restent en voyant la culture
00:36:30 des hommes politiques que j'ai servi.
00:36:32 - Voilà, voilà.
00:36:34 - Je reviens sur un point que vous avez touché
00:36:36 des bouts de lait, Jean-Christophe Petitfils.
00:36:38 Pouvoir est limité parce qu'il vient de Dieu.
00:36:40 Et si la conscience
00:36:42 d'une origine métaphysique du pouvoir
00:36:44 n'était pas plutôt une limitation du politique ?
00:36:46 Parce que du coup, le politique
00:36:48 ne peut pas devenir totalitaire.
00:36:50 Il y a une instance extra-politique
00:36:52 - Vous avez raison, bien sûr.
00:36:54 - qui limite le pouvoir des hommes.
00:36:56 - Oui, bien sûr.
00:36:58 - C'est une humilité.
00:37:00 - Dans un certain sens, il est limité
00:37:02 par le décalogue, il est limité par le respect
00:37:04 des lois de l'Église.
00:37:06 Mais il ne tient son pouvoir que de Dieu.
00:37:08 Louis XIV dira
00:37:10 "Le roi ne tient son épée que de Dieu."
00:37:12 - Et pas de Rome.
00:37:14 - Et pas de Rome, bien sûr.
00:37:16 - C'est une grande affaire.
00:37:18 - C'est le premier aspect.
00:37:20 Et le second aspect, c'est un aspect
00:37:22 sociologique ou historique.
00:37:24 C'est qu'à partir
00:37:26 du XVIIe siècle,
00:37:28 très exactement à la fin
00:37:30 du XVIIe siècle, moi je situe ça
00:37:32 avec l'Édith de Nantes,
00:37:34 1598,
00:37:36 le pouvoir royal, au lieu
00:37:38 d'être simplement
00:37:40 un pouvoir se situant au-dessus des différents
00:37:42 corps sociaux,
00:37:44 des noblesses, du clergé,
00:37:46 en rivalité,
00:37:48 on est dans une société
00:37:50 des cascades de mépris,
00:37:52 on parlait ça à Simon,
00:37:54 mais aussi des corps
00:37:56 qui défendent leurs privilèges
00:37:58 et cherchent à accroître
00:38:00 leur nombre.
00:38:02 Eh bien, le pouvoir
00:38:04 royal va vouloir
00:38:06 centraliser,
00:38:08 transformer la société.
00:38:10 Et l'image centrale,
00:38:12 c'est déjà l'Édith de Nantes
00:38:14 qui fait que le pouvoir royal se situe
00:38:16 au-dessus des religions.
00:38:18 Tout en étant un pouvoir très chrétien,
00:38:20 il va essayer d'instaurer
00:38:22 la paix religieuse. Donc c'est déjà
00:38:24 une volonté de transformer
00:38:26 la société à partir du pouvoir.
00:38:28 Et la machine est marquée.
00:38:30 Et elle va se poursuivre
00:38:32 avec Richelieu
00:38:34 et Louis XIII
00:38:36 et Louis XIV.
00:38:38 Donc on va essayer d'user, de limiter,
00:38:40 de fractionner
00:38:42 les pouvoirs locaux
00:38:44 pour accroître
00:38:46 le pouvoir central. Mais de façon
00:38:48 très difficile.
00:38:50 Notamment, vous aviez évoqué
00:38:52 les offices, par exemple.
00:38:54 L'office, c'est une dignité de service
00:38:56 public qu'on achète et qu'on vend
00:38:58 à partir de
00:39:00 1704, à partir d'une loi
00:39:02 qu'on appelle la Paulette. On peut vendre
00:39:04 son office. Vous êtes
00:39:06 conseiller au Parlement, vous pouvez
00:39:08 céder votre office
00:39:10 à votre fils. Il a juste à passer
00:39:12 un petit examen de droit, mais
00:39:14 ça ne pose pas de problème
00:39:16 entre pères.
00:39:18 Donc cet office,
00:39:20 finalement, au lieu
00:39:22 d'accroître le pouvoir royal,
00:39:24 comme on l'avait pensé au départ,
00:39:26 devient une entrave au pouvoir royal
00:39:28 puisque les parlementaires
00:39:30 vont mettre des obstacles,
00:39:32 vont vouloir créer
00:39:34 un pouvoir des juges.
00:39:36 Donc les offices ont finalement
00:39:38 été limités. Même chose pour
00:39:40 les mécanismes comme
00:39:42 les intendants qui, au départ,
00:39:44 étaient des commissaires,
00:39:46 cette fois, qui avaient une mission spéciale
00:39:48 et qui étaient des fonctionnaires
00:39:50 un peu
00:39:52 plus modernes que les officiers.
00:39:54 Les commissaires vont
00:39:56 devenir un peu des complices, notamment au XVIIIe siècle,
00:39:58 de leurs administrés
00:40:00 et vont défendre
00:40:02 les intérêts des administrés face au pouvoir royal.
00:40:04 Le pouvoir royal n'arrive pas
00:40:06 à centraliser. - Vous avez vu grossir
00:40:08 tout ça un peu en désordre, parce qu'après le Louis XIV,
00:40:10 vous faites...
00:40:12 - Après le Louis XIV, j'ai fait un Louis XVI.
00:40:14 - Louis XVI, encore plus gros
00:40:16 succès d'ailleurs, je me suis aperçu. - Oui, oui.
00:40:18 - C'est intéressant. C'est que vous le vendez à 80 000
00:40:20 exemplaires, encore plus
00:40:22 peut-être pour votre talent, mais aussi
00:40:24 l'intérêt que les Français gardent pour l'énigmatique
00:40:26 Louis XVI. - Exactement.
00:40:28 Et puis pour le drame qu'il a vécu
00:40:30 et la personne même de
00:40:32 Louis XVI, qui est un homme très intelligent,
00:40:34 qu'on a... - Oui, qui n'aime pas les...
00:40:36 - ... qu'on a méprisé,
00:40:38 qu'on a brocardé,
00:40:40 c'est un homme très fin, très
00:40:42 intelligent, indécis.
00:40:44 C'est ça son gros problème, c'est qu'il avait
00:40:46 du mal à décider, parce qu'il voyait
00:40:48 les avantages et les inconvénients
00:40:50 de tous les problèmes. Il n'arrivait pas
00:40:52 à décider. - C'est l'intelligence. - C'est le dernier qui
00:40:54 parlait qui... bon, ben voilà, tant pis.
00:40:56 Mais il avait une intelligence. Il lisait
00:40:58 les postes anglais
00:41:00 et il était capable, au conseil,
00:41:02 de remontrer à Vergène, qui ne connaissait pas
00:41:04 très bien la monarchie anglaise. Il connaissait
00:41:06 à la perfection la monarchie
00:41:08 anglaise. Il n'était pas pour la monarchie anglaise,
00:41:10 mais il connaissait à la perfection ce monde. - On a tellement
00:41:12 un jury, ce qu'il a fait. - Donc on sait
00:41:14 d'où il venait. - Vous vous souvenez de la mission du bicentenaire,
00:41:16 qui fait placarder sur les routes de France
00:41:18 des affiches honteuses
00:41:20 extraites du journal de Louis XVI en
00:41:22 1789, - Ah oui.
00:41:24 - où on voyait en gros rien. - Oui.
00:41:26 - Parce qu'il n'avait écrit rien.
00:41:28 - Oui, il n'avait pas chassé. - C'est son journal de chasse.
00:41:30 - C'est son journal de chasse. - Ce matin-là, il n'avait pas chassé.
00:41:32 - Il n'avait pas chassé. - Et...
00:41:34 Il n'avait rien. C'était pas très gibroyeux.
00:41:36 Je crois qu'il chassait tous les jours, quand même.
00:41:38 Il n'avait pas appris grand-chose. Il n'étudiait rien.
00:41:40 Et on en fait une sorte
00:41:42 d'animal stupide qui ne comprend pas
00:41:44 ce qui se passe le 14 juillet. Mais le 14 juillet,
00:41:46 c'est à 17h. On ne chasse pas à 17h.
00:41:48 - Non, non, non. - Le matin. - Le 14 juillet,
00:41:50 c'est le soir, simplement, qu'on dit
00:41:52 que le duc de la Rochefoucauld-Liancourt
00:41:54 vient le trouver.
00:41:56 Et il dit que la Bastille est tombée.
00:41:58 Et...
00:42:00 Le roi dit
00:42:02 que c'est une révolte.
00:42:04 Et le duc de la Rochefoucauld-Liancourt lui aurait dit
00:42:06 "Non, Sire, c'est une révolution."
00:42:08 - C'était bien vu. - C'est un mot apocryphe,
00:42:10 je pense. Trop bien vu.
00:42:12 - "Sinone verro e benetto vanto."
00:42:14 Alors, il y a une petite...
00:42:16 Je n'oserais pas dire
00:42:18 pas d'arbre entre vous et moi,
00:42:20 mais il y a quelque chose qui me chiffonne.
00:42:22 Et je voudrais qu'on en revienne
00:42:24 sur vos autres rois un peu. Quand vous arrivez
00:42:26 vos autres rois, après, il vous parle d'une quantité
00:42:28 d'autres sujets.
00:42:30 Des cinq capets dont vous avez écrit
00:42:32 la biographie un peu en désordre de tous,
00:42:34 après il y a eu Louis XV, et vous avez fini
00:42:36 par Henri IV. - Voilà. - Louis XIII.
00:42:38 - Oui. - Et puis aussi quantité sous Louis XIII,
00:42:40 quantité de génie. - Louis XV,
00:42:42 Louis XIII, Louis XV, et Henri IV.
00:42:44 Henri IV, j'ai hésité
00:42:46 à le faire. Il y avait un très bon ouvrage
00:42:48 avec les détails de Babelon,
00:42:50 Jean-Pierre Babelon. - Ah oui, mais
00:42:52 vous ajoutez beaucoup de choses, vous faites de la sociologie.
00:42:54 - Voilà, c'est ça. Alors, bon, bien sûr,
00:42:56 j'ai essayé d'apporter quelque chose. Louis Babelon,
00:42:58 l'ouvrage a bien vieilli. - C'était pas
00:43:00 la biographie pur sucre.
00:43:02 - Très classique, elle était très classique à la française
00:43:04 comme on en faisait. C'est là aussi, j'ai introduit
00:43:06 des analyses sociopolitiques, comme
00:43:08 j'ai essayé de faire. - De foisonnement,
00:43:10 c'est Henri IV. Mais alors, Henri IV,
00:43:12 et justement, je viens là-dessus,
00:43:14 c'est...
00:43:16 c'est le mauvais
00:43:18 côté des...
00:43:20 des Bourbons, c'est leur côté
00:43:22 modernisateur. D'abord, je n'oublie pas
00:43:24 qu'Henri IV a des origines protestantes.
00:43:26 Bon. Et
00:43:28 que son premier ministre subit un protestant.
00:43:30 On lance un peu la machine
00:43:32 productiviste, il le fallait
00:43:34 peut-être. Mais...
00:43:36 Et du coup,
00:43:40 le dernier se trouve,
00:43:42 Louis XVI prend toutes les fautes
00:43:44 de ses quatre Bourbons prédécesseurs.
00:43:46 Henri IV,
00:43:48 c'est très intéressant ce que vous avez dit tout à l'heure
00:43:50 à propos de l'édit, donc,
00:43:52 la machine est lancée.
00:43:54 J'ai bien aimé le sens
00:43:56 caché et très profond de "Paris vaut
00:43:58 bien d'une messe". Il l'a dit,
00:44:00 je ne l'ai pas dit. - Oui, oui, oui,
00:44:02 il n'a pas dit. - Il l'a testé.
00:44:04 Mais ce "vaut bien" est intéressant, parce que
00:44:06 Paris, c'est la logique politique, la messe
00:44:08 c'est la logique religieuse.
00:44:10 "Vaut bien", ça va,
00:44:12 ça établit une égalité, c'est-à-dire
00:44:14 si on compagnie
00:44:16 l'un de l'autre,
00:44:18 ces deux piliers de la société,
00:44:20 l'Église et le Roi.
00:44:22 Comme on disait au Moyen-Âge, le Roi dort
00:44:24 près du livre. Le Roi n'a pas de mission sacerdotale
00:44:26 en France, contrairement aux empereurs
00:44:28 araméniques par exemple, mais en fait, il dort près du livre,
00:44:30 c'est-à-dire qu'il ne quitte pas de vue non plus la Bible.
00:44:32 Et ensuite, vous l'avez dit,
00:44:36 ça se déchaîne. La logique
00:44:38 politique
00:44:40 prend le pas sur la logique religieuse,
00:44:42 c'est le début de ce qui sera
00:44:44 la séparation du pouvoir
00:44:46 et même la haine,
00:44:48 en tous les cas, le conflit entre
00:44:50 ces deux logiques,
00:44:52 religieuse et politique, qui produit
00:44:54 aujourd'hui des effets terribles.
00:44:56 Oui, mais en tout cas, dans l'histoire de France,
00:44:58 il y a eu aussi des tensions entre
00:45:00 le pouvoir religieux et le pouvoir
00:45:02 politique,
00:45:04 les légistes qui étaient plus belles,
00:45:06 Agnani,
00:45:08 il y avait bien des gens qui faisaient des figures.
00:45:12 Le royaume de France voulait être
00:45:14 indépendant du point de vue temporel
00:45:16 de la papauté, et la papauté
00:45:18 avait une volonté universaliste
00:45:20 de domination à un moment donné.
00:45:22 Mais ça, ça vous dit quelque chose,
00:45:24 au fond, il y a l'arrière-pensée d'Henri IV,
00:45:26 la logique politique l'emporte
00:45:28 sur la réptilité morale,
00:45:30 et c'est aussi le problème pour aujourd'hui.
00:45:32 Oui, vous avez raison. Henri IV,
00:45:34 au départ, à la mort
00:45:36 d'Henri III, il a
00:45:38 un sixième du royaume à sa disposition
00:45:40 avec la Réunion et les
00:45:42 banques protestantes qu'il dirigeait.
00:45:44 Et il a la ligue
00:45:46 contre lui, la ligue catholique
00:45:48 qui est en fait alliée avec
00:45:50 l'Espagne, financée
00:45:52 avec des troupes
00:45:54 espagnoles dans Paris.
00:45:56 Et il va penser
00:45:58 et les compagnons
00:46:00 d'Henri III
00:46:02 veulent lui imposer
00:46:04 une monarchie limitée.
00:46:06 Ils veulent lui faire
00:46:08 l'obliger
00:46:10 à signer un pacte
00:46:12 qu'il va signer, comme quoi
00:46:14 il reconnaît aux uns
00:46:16 et aux autres
00:46:18 leurs prérogatives,
00:46:20 leur pouvoir.
00:46:22 On voit là, il y a un côté médiéval.
00:46:24 Le roi ne veut pas se laisser limiter.
00:46:26 Henri IV, c'est un homme très indépendant
00:46:28 et qui a une grande conscience
00:46:30 de sa valeur et une volonté
00:46:32 très ferme de s'imposer.
00:46:34 C'est un roi absolutiste
00:46:36 dans ce sens là. Et encore plus absolutiste
00:46:38 que Louis XIV d'ailleurs. Plus absolutiste.
00:46:40 C'est lui qui arrive au Parlement
00:46:42 et qui va faire des remontrances.
00:46:44 Et Louis XIV, quand il fera sa petite séance
00:46:46 au Parlement en 755
00:46:48 arrivant en costume de chasse,
00:46:50 c'est Mazarin qui copie Henri IV.
00:46:52 Il était jeune et Mazarin lui dit
00:46:54 "Vous allez vous habiller comme ça, vous allez venir
00:46:56 et on refait le coup d'Henri IV."
00:46:58 Mais Henri IV, c'était lui qui avait une volonté terrible.
00:47:00 Et donc,
00:47:02 il ne veut pas se laisser ligoter
00:47:04 par le Marquis d'Eau par exemple
00:47:06 qui était sur l'intendant des finances.
00:47:08 Et puis tous les mignons du roi,
00:47:10 de l'ancien roi,
00:47:12 Henri III qui voulait en fait
00:47:14 le mettre sous tutelle.
00:47:16 - Les mignons c'était les ministres,
00:47:18 il faut faire attention à ce mot.
00:47:20 - Oui, oui, tout à fait.
00:47:22 Non mais bien sûr, des pernons,
00:47:24 etc. Ce sont des
00:47:26 puissances politiques
00:47:28 des hommes extrêmement
00:47:30 puissants en France.
00:47:32 - Mais c'était pas un roi LGBT.
00:47:34 - Non, non, non, tout à fait.
00:47:36 Il faut pas se...
00:47:38 Enfin on les appelait les mignons.
00:47:40 C'est vrai que c'était la Bible joyeuse
00:47:42 et qu'il se mettait des lignes,
00:47:44 mais ça n'avait...
00:47:46 On n'est pas dans le même contexte
00:47:48 culturel.
00:47:50 Donc Henri IV ne veut pas
00:47:52 se laisser imposer le catholicisme
00:47:54 et ne veut pas se convertir
00:47:56 pour ne pas se laisser ligoter
00:47:58 par... Donc il pense devenir
00:48:00 un roi absolu
00:48:02 par l'épée.
00:48:04 Et il va commencer à réussir
00:48:06 par des batailles,
00:48:08 la bataille
00:48:10 d'Arc.
00:48:12 - Il se bat farouchement lui.
00:48:14 - Voilà, il se bat farouchement.
00:48:16 - Pas fatigable.
00:48:20 - Voilà, il bat
00:48:22 le chef des ligueurs,
00:48:24 mais il vit la bataille,
00:48:26 grande victoire aussi.
00:48:28 Et puis il va échouer
00:48:30 devant Paris.
00:48:32 Siège de Paris, échec,
00:48:34 siège de Rouen, échec.
00:48:36 - Le nord-vendée, il est perdu.
00:48:38 - Les choses vont mal.
00:48:40 Et c'est là où il se dit
00:48:42 il va falloir que je me convertisse.
00:48:44 Alors après, il y a le problème
00:48:48 psychologique évidemment,
00:48:50 et religieux.
00:48:52 Ses conceptions religieuses
00:48:54 n'étaient pas tout à fait celles du protestantisme.
00:48:56 Par contre, il avait
00:48:58 une certaine vision
00:49:00 du catholicisme. Enfin, il n'était pas
00:49:04 pour le culte des saints
00:49:06 comme les protestants. Il était assez proche
00:49:08 d'un côté des protestants, mais aussi
00:49:10 proche des catholiques. Il faisait un peu une synthèse
00:49:12 entre les deux, et il disait
00:49:14 au fond finalement, il n'y a pas grand différence,
00:49:16 ce qui est une erreur quand même, sur le plan
00:49:18 notamment de l'eucharistie,
00:49:20 entre les catholiques et les protestants.
00:49:22 Et pour lui, donc, il va
00:49:24 faire ce qu'il dira à Gabriel Descartes
00:49:26 dans une manière de saut périlleux, c'est-à-dire
00:49:28 il tente le coup. Tout pour le tout,
00:49:30 c'est un acte politique, c'est sûr.
00:49:32 Il fait le saut périlleux, c'est-à-dire il va se convertir.
00:49:34 Parce que se convertir, c'est se couper de ses anciens
00:49:36 compagnons qui l'ont soutenu,
00:49:38 qui vont là
00:49:40 être furieux contre lui, qui vont retenir
00:49:42 des synodes et des assemblées
00:49:44 protestantes pour l'empêcher
00:49:46 d'accéder au pouvoir.
00:49:48 Donc voilà le jeu complexe qu'a fait
00:49:50 Paris-Veuillenais, ça veut dire
00:49:52 que je passe du côté politique parce que
00:49:54 il y a une nécessité de me connaître.
00:49:56 C'est la leçon de choses que j'ai apprise.
00:49:58 C'est finalement que
00:50:00 Dieu est contre moi.
00:50:02 Dieu a été pour moi pendant un certain temps,
00:50:04 le Dieu des Victoires.
00:50:06 - Il y a eu des Rouen, sauf que...
00:50:08 - Oui, Rouen et Paris,
00:50:10 l'échec de Paris.
00:50:12 Et par conséquent,
00:50:14 Dieu n'est pas de mon côté, donc je change de camp.
00:50:16 - Il est réédité régulièrement, votre Enricat.
00:50:18 - Oui, oui.
00:50:20 - Je l'ai écrit dans le livre, d'ailleurs.
00:50:22 Ils sont passionnants et je répète tellement bien écrit que...
00:50:24 C'est pas du...
00:50:26 C'est pas Alexandre Dumas, mais presque.
00:50:28 A la différence que tout est vrai avec vous.
00:50:30 Bon, mais je ne veux pas me
00:50:32 enfermer dans ces bourbons, parce que fait tout le monde.
00:50:34 Mais...
00:50:36 Tout de même, les autres
00:50:38 rois, les...
00:50:40 les petits capés, les premiers capés,
00:50:42 qui ont ma préférence à moi, je l'avouerai,
00:50:44 ma corde honte, ou alors les Valois,
00:50:46 dont certains sont de très beaux personnages.
00:50:48 Vous les avez un peu...
00:50:50 Enfin, je ne sais pas si vous voulez voir ce qu'ils ont fait, mais...
00:50:52 - Je les ai apprêtés dans mon
00:50:54 Histoire de la France, bien sûr.
00:50:56 - Il y a une contributé qui est...
00:50:58 Je vous montre aussi ce très beau livre, Histoire de France.
00:51:00 Alors là, c'est du petit fils.
00:51:02 - Histoire de la France.
00:51:04 - Ah, j'allais dire 800 pages.
00:51:06 Oui, 1100 pages, c'est extraordinaire.
00:51:08 C'est gros.
00:51:10 Histoire de la France.
00:51:12 Est-ce que vous avez... Alors, ma question est d'une
00:51:14 manialité folle, mais elle me vient sans cesse à l'esprit.
00:51:16 Est-ce que vous avez de l'affection pour quelques rois,
00:51:18 plus que pour d'autres ?
00:51:20 En comprenant cette fois les Capets et les Valois.
00:51:22 Tous, hein, les 40.
00:51:24 - Alors, premièrement...
00:51:26 - Tout le monde vous pose cette question.
00:51:28 - Oui, oui, oui. Mais en préliminaire,
00:51:30 pour moi, la France
00:51:32 ne commence pas avec
00:51:34 Clovis et Charlemagne. C'est très clair.
00:51:36 Pour moi, la France commence
00:51:38 en 843 au Traité de Verna.
00:51:40 - Oui.
00:51:42 - Donc je commence... - Et puis les servent aux strates.
00:51:44 - Et puis la bataille de Puys-erres-Valois
00:51:46 où
00:51:48 les petits-fils
00:51:50 de Charlemagne se battent
00:51:52 et l'Empire de Charlemagne
00:51:54 va être divisé en trois.
00:51:56 La Française occidentaliste,
00:51:58 l'Ottaringie...
00:52:00 - Avec cet épisode extraordinaire
00:52:02 qui sont les serments d'Ostrasbourg.
00:52:04 C'est ça la clé de l'essence.
00:52:06 C'est-à-dire quand Louis le Germanique
00:52:08 prête serment d'assistance
00:52:10 ou d'aide contre le frère
00:52:12 aîné l'Ottaringien qui veut
00:52:14 tout l'Empire,
00:52:16 Charles
00:52:18 et Louis le Germanique parlent
00:52:20 français, ce qui deviendra le premier texte français.
00:52:22 Il est à quelques pas d'ici
00:52:24 à l'Hôtel de la Monnaie. Ce texte
00:52:26 est tellement émouvant.
00:52:28 Charles répond en langue tudesque,
00:52:30 c'est-à-dire germanique. C'est-à-dire qu'il y a
00:52:32 une reconnaissance de l'altérité des deux.
00:52:34 C'est presque le début de la logique nationale.
00:52:36 - Mais bien sûr. - Chacun manque un. C'est très symbolique.
00:52:38 - Ces entités vont évoluer.
00:52:40 - C'est le 842, je crois.
00:52:42 - C'est ça. Et le traité de Verdun, c'est le 843.
00:52:44 Les entités vont évoluer
00:52:46 de façon indépendante.
00:52:48 C'est comme ça que la France
00:52:50 va devenir la France.
00:52:52 Le français occidentaliste va devenir la France.
00:52:54 Si tu rencontres une petite bande...
00:52:56 - Et contre l'Empire.
00:52:58 - Le frère aîné qui veut récupérer tout.
00:53:00 - Voilà. Pour moi, c'est bien clair.
00:53:02 Charlemagne n'appartient pas à l'Empire.
00:53:04 Clovis non plus.
00:53:06 C'est vrai que...
00:53:08 Après, on va très vite aller
00:53:10 parce que les derniers carolingiens
00:53:12 vont disparaître.
00:53:14 On va avoir les Capétiens,
00:53:16 le 987.
00:53:18 Là,
00:53:20 les Capétiens vont
00:53:22 construire leur royaume, centraliser
00:53:24 avec un petit domaine
00:53:26 royal
00:53:28 qui va cesser de s'agrandir.
00:53:30 Développement de la féodalité.
00:53:32 On est dans des constructions
00:53:34 très complexes aussi.
00:53:36 Mais ils vont s'autonomiser
00:53:38 par rapport.
00:53:40 Et ils vont réutiliser, évidemment,
00:53:42 le symbolique de Clovis.
00:53:44 Du baptême de Clovis.
00:53:46 - Les Louis s'appellent Louis
00:53:48 en référence à Clovis.
00:53:50 Clovis, c'est le premier Louis.
00:53:52 Le premier des Louis
00:53:54 s'appelle Louis II.
00:53:56 Clovis, c'est Louis Ier.
00:53:58 Ça introduit une continuité.
00:54:00 - Oui, mais
00:54:02 les Mérovingiens,
00:54:04 ce n'est pas la France.
00:54:06 - Moi, je vois bien Clovis, pour tout vous dire.
00:54:08 - Mais beaucoup de choses.
00:54:10 Je ne vous interdis pas de l'écrire.
00:54:12 - C'est très facile parce qu'on sait à peu près.
00:54:14 - Oui, voilà.
00:54:16 - Et Charlemagne, c'est la même chose.
00:54:18 On récupère.
00:54:20 - Il y a chez Clovis beaucoup de choses qui annoncent
00:54:22 ce que sera l'histoire de France.
00:54:24 - Oui, mais aussi, on réutilise
00:54:26 le baptême, notamment,
00:54:28 dans le sacre.
00:54:30 - Oui, on l'évite.
00:54:32 - Le sacre.
00:54:34 - Une intégration d'une tradition,
00:54:36 mais qui n'est pas française.
00:54:38 - Qui a été interrompue par l'épisode
00:54:40 carolingien.
00:54:42 - Alors, vous m'avez parlé
00:54:44 de Louis IX.
00:54:46 - Oui, il y a Louis IX.
00:54:48 - Vous aimez Louis IX.
00:54:50 - Oui, Philippe Lebel.
00:54:52 - Philippe Lebel, c'est ça.
00:54:54 - Un personnage très, très important.
00:54:56 - Un roi de gauche, parce que c'est un roi dû.
00:54:58 - Ah oui, oui.
00:55:00 - Déformé par les rois maudits.
00:55:02 - Ah, votre ami Druon.
00:55:04 - Voilà, le vôtre aussi.
00:55:06 - Oui, certes.
00:55:08 Mais...
00:55:10 - Et puis Charles V.
00:55:12 - Oui, oui, très grand roi.
00:55:14 - Formidable Nicolas Auret.
00:55:16 - Oui, oui.
00:55:18 - Il y a de très beaux rois.
00:55:20 - Philippe Auguste aussi, bien sûr.
00:55:22 L'unité de la France.
00:55:24 J'aime moins François Ier.
00:55:26 Je pense qu'il a fait énormément de bêtises.
00:55:28 - C'est la France.
00:55:30 - Alors, c'est un homme de culture,
00:55:32 d'art, certainement très raffiné,
00:55:34 mais que d'erreurs politiques.
00:55:36 - Éric Zemmour, assassin de son...
00:55:38 - C'est ça.
00:55:40 - C'est un professeur de France.
00:55:42 - Oui, oui, oui.
00:55:44 - Et puis, il a posé sa candidature
00:55:46 au Saint-Empis, alors ça, c'est...
00:55:48 - Oui, oh, ben, ça, c'était...
00:55:50 Louis XIV aussi.
00:55:52 Mazarin voulait que Louis XIV...
00:55:54 - Oui, mais ça, sortir de la logique nationale.
00:55:56 - Oui.
00:55:58 - Il fout tout en mer, là.
00:56:00 - Oui, oui, oui.
00:56:02 - À propos d'idéologie,
00:56:04 ce qu'un historien ne peut pas faire,
00:56:06 parce qu'à la fois, il se demande des choses telles
00:56:08 que rien n'est réductible.
00:56:10 - Non, mais les rois de France, quand même,
00:56:12 ont défendu la chair de la France.
00:56:14 - Avec une ligne.
00:56:16 - La territoire français,
00:56:18 ils ont défendu âprement,
00:56:20 ils ont essayé d'élargir, de conquérir.
00:56:22 - Il y a une essence
00:56:24 qu'on pourrait appeler la politique de la France,
00:56:26 comme une sorte de chose mémoriale
00:56:28 qui se prolonge et se...
00:56:30 - Ah, ben, il y a une politique des Capétiens,
00:56:32 une politique d'acquisition
00:56:34 autour du royaume,
00:56:36 autour de l'île de France,
00:56:38 d'accroissement du domaine...
00:56:40 - Non, mais cette logique de la nation
00:56:42 contre les empires, cette logique de l'indépendance
00:56:44 contre l'empire germanique,
00:56:46 mais aussi contre Rome...
00:56:48 - Contre la papauté.
00:56:50 - Tout ça existe et ça se prolonge.
00:56:52 - C'est un peuple très ancien qui s'est survi
00:56:54 après 1789, contre les barons et les fémininités.
00:56:56 - Et que Louis XVI,
00:56:58 au revoir, est reconstitué,
00:57:00 est restitué.
00:57:02 - Et la volonté de faire civilisation,
00:57:04 c'est le troisième terme, à mon avis,
00:57:06 de ce qui est inaccessible dans la civilisation,
00:57:08 dans la politique de la France,
00:57:10 strictement parlant,
00:57:12 c'est la volonté de faire civilisation aussi.
00:57:14 D'où la défense de la langue,
00:57:16 d'où l'idée de ne se fondre
00:57:18 avec aucune autre civilisation,
00:57:20 autre grand problème pour aujourd'hui
00:57:22 où on peut même parler d'identité.
00:57:24 Et de Gaulle a été le dernier capétien.
00:57:26 Votre gaullisme est très fondé
00:57:28 sur cette continuité capétienne.
00:57:30 - Bon, Pidou aussi,
00:57:32 Giscard un peu moins, mais quand même.
00:57:34 - Vous avez dit Clémence, vous avez dit Clémence.
00:57:36 Je me demande s'il n'y a pas une nostalgie
00:57:38 derrière votre Clémence. Je vais raconter une anecdote,
00:57:40 puisque vous m'aviez autorisé.
00:57:42 Nous étions invités,
00:57:44 c'était pour moi un grand honneur,
00:57:46 à écouter au Bernardin,
00:57:48 c'était en 2008,
00:57:50 le pape Benoît qui venait délivrer
00:57:52 une leçon sur le monarchisme.
00:57:54 Alors il y avait 200 personnes,
00:57:56 on était un peu triés, c'était très bien.
00:57:58 Et après, là, je m'en souviendrai toujours,
00:58:00 parce qu'il s'est mis une certaine importance
00:58:02 dans ma vie, je vous l'ai dit,
00:58:04 mais ce n'est pas la peine de revenir devant nos caméras.
00:58:06 Vous m'avez dit, écoutez, Paul-Marie,
00:58:08 intervenez, faites quelque chose.
00:58:10 Vous êtes député européen,
00:58:12 vous avez été élu à la tête
00:58:14 de la liste souverainiste en 1929,
00:58:16 à la tête de la liste souverainiste
00:58:18 en Ile-de-France, parrainé,
00:58:20 ça sera logique, par Philippe de Villiers.
00:58:22 Vous voulez continuer ?
00:58:26 Vous m'avez dit ça comme ça, un peu en catimini,
00:58:28 avec votre gentillesse, votre sourire habituel.
00:58:30 Vous devriez mettre en piste
00:58:32 Jean, le prince Jean,
00:58:34 qui était le petit-fils de...
00:58:36 Enfin, il était mort,
00:58:38 le petit-fils du comte de Paris, Henri,
00:58:40 mais c'était le fils du second Henri,
00:58:42 le comte de Paris,
00:58:44 qui était un prétendant qui ne prétendait pas beaucoup.
00:58:46 Et Jean, qui à ce moment-là avait une quarantaine d'années,
00:58:48 pouvait se mettre
00:58:50 un peu en avant
00:58:52 en se faisant élire avec notre aide,
00:58:54 peut-être celle de Philippe de Villiers,
00:58:56 vous imaginez ça, mais ça n'a pas du tout été le scénario,
00:58:58 le moins qu'on puisse dire.
00:59:00 Ça m'a rajouté mon siège, d'ailleurs, cette histoire.
00:59:02 Et Jean
00:59:04 n'avait pas accepté,
00:59:06 mais enfin s'intéressait à la question,
00:59:08 m'avait invité à déjeuner en disant "mais oui,
00:59:10 aidez-moi, formez-moi",
00:59:12 il y avait beaucoup d'hésitation.
00:59:14 Vous avez eu cette idée
00:59:16 pour remettre en scelle
00:59:18 la famille de France,
00:59:20 Orléans, en tous les cas.
00:59:22 Qu'est-ce que vous avez derrière la tête ?
00:59:24 Cette histoire est allée très loin pour moi,
00:59:26 vous savez, parce que j'ai essayé
00:59:28 de vous suivre.
00:59:30 Il est clair que je ne pense pas que la monarchie
00:59:32 puisse être restaurée en France aujourd'hui.
00:59:34 Une monarchie avec la famille de France
00:59:36 ou même la famille d'Espagne,
00:59:38 le prétendant espagnol.
00:59:40 Ce n'est pas possible
00:59:42 parce que c'est fini,
00:59:44 on a passé notre tour.
00:59:46 Le dernier grand espoir
00:59:48 c'était en octobre 1873
00:59:50 au moment où
00:59:52 le comte de Chambord
00:59:54 dit Henri V
00:59:56 a tout saccagé
00:59:58 au dernier moment.
01:00:00 Il y avait une chambre qui était
01:00:02 royaliste, monarchiste,
01:00:04 il y avait des orléanistes, des légitimistes,
01:00:06 des fusionnistes,
01:00:08 mais majoritairement
01:00:10 quelques centristes qui étaient prêts à se rallier
01:00:12 à une monarchie constitutionnelle
01:00:14 puisqu'on était en train de construire
01:00:16 les institutions.
01:00:18 Il y avait un président de la république
01:00:20 qui était Adolphe Thiers
01:00:22 et puis après Adolphe Thiers, il y a eu
01:00:24 Maréchal MacMahon.
01:00:26 Mais il fallait construire
01:00:28 ces institutions.
01:00:30 Tout était mis en place
01:00:34 pour restaurer la monarchie.
01:00:36 Les deux branches
01:00:38 qui s'étaient opposées
01:00:40 c'est à dire
01:00:42 les orléanistes
01:00:44 et les légitimistes
01:00:46 avec Henri V
01:00:48 s'étaient mis d'accord.
01:00:50 Il y avait un accord
01:00:52 qui s'était reconnu
01:00:54 et le comte de Paris devint succéder
01:00:56 puisque Henri V n'avait pas d'enfant.
01:00:58 Tout était prêt.
01:01:02 La cérémonie était organisée.
01:01:04 On avait même
01:01:06 commandé des drapeaux,
01:01:08 des placards, des pancartes
01:01:12 et on avait même
01:01:14 particulièrement entraîné
01:01:16 un cheval pour pouvoir supporter
01:01:18 le corps assez lourd
01:01:20 du comte de Chambord
01:01:22 qui n'est pas de ruade
01:01:24 malencontreuse au cours du défilé.
01:01:26 Donc tout était prêt.
01:01:28 Et au dernier moment,
01:01:30 Henri V,
01:01:32 le comte de Chambord, a dit
01:01:34 "je ne veux pas du drapeau tricolore".
01:01:36 - Qu'est-ce qui lui a pris ?
01:01:38 - C'est une question de principe.
01:01:40 Pour moi, c'est le drapeau d'Henri IV.
01:01:42 La monarchie n'avait jamais eu de drapeau.
01:01:44 Le drapeau blanc,
01:01:46 c'est vrai, c'était le drapeau d'Henri IV.
01:01:48 Mais avant, il n'y avait pas un drapeau
01:01:50 particulier pour la France.
01:01:52 - Pour les couleurs. Les balois étaient bleus,
01:01:54 les cafés étaient rouges.
01:01:56 - Oui, oui, oui, il y avait
01:01:58 le fendard de Sainte-Denis.
01:02:00 - C'était rouge, c'était pour les cafés.
01:02:02 - Bien sûr.
01:02:04 C'est une méconnaissance de l'histoire,
01:02:06 une obstination, mais plus que ça,
01:02:08 probablement une crispation
01:02:10 sur une idéologie contre-révolutionnaire
01:02:12 qui faisait que
01:02:14 le comte de Chambord avait des idées sociales.
01:02:16 C'est vrai.
01:02:18 - C'est l'inventeur de la participation.
01:02:20 Il était très loin dans...
01:02:22 - Il était assez ouvert sur certaines choses,
01:02:24 mais il restait quand même très marqué
01:02:26 par l'idée d'un retour
01:02:28 à l'ancien régime,
01:02:30 mal formé par notamment
01:02:32 la duchesse d'Angoulême,
01:02:34 la fille de Marie-Antoinette
01:02:36 et de Louis XVI, qui était très revancharde.
01:02:38 - C'est vrai qu'elle en avait joué aussi.
01:02:40 - Voilà.
01:02:42 Un entourage qui était mauvais,
01:02:44 mauvais conseiller.
01:02:46 Et donc là, c'est lui
01:02:48 qui a... Henri V n'a pas été
01:02:50 Henri IV.
01:02:52 - Exactement. Il n'a pas fait
01:02:54 le seul politique.
01:02:56 - Il n'a pas le drapeau tricolore.
01:02:58 - Le grand saut, comme il dit à Nouvelle-Espagne.
01:03:00 - C'est le grand saut.
01:03:02 - Il ne l'a pas fait.
01:03:04 - C'est dommage parce que
01:03:06 ça aurait pu fonctionner
01:03:08 qu'il y ait des monarchies dans toute l'Europe,
01:03:10 Belgique, l'Espagne, maintenant.
01:03:12 - Il faut des monarchies un peu d'opérette.
01:03:14 - Il ne peut pas y avoir
01:03:16 une monarchie absolue.
01:03:18 - Vous avez dit vous-même
01:03:20 qu'il n'y a jamais eu de monarchie absolue.
01:03:22 - Oui, mais il ne peut pas y avoir
01:03:24 une monarchie sans parlement.
01:03:26 - Ce qui a été un peu de vôle, finalement.
01:03:28 - Oui, sans l'hérédité.
01:03:30 - C'est-à-dire en étant obligé
01:03:32 de passer par l'élection
01:03:34 aux suffrages universels
01:03:36 qui pose un problème théorique.
01:03:38 C'est-à-dire qu'on n'est plus
01:03:40 le roi de tous.
01:03:42 - Ça ne peut être qu'un pouvoir d'influence,
01:03:44 un pouvoir neutre, un Benjamin Constant,
01:03:46 un roi qui ne peut pas non plus
01:03:48 trop s'impliquer dans le jeu politique
01:03:50 puisqu'il y a des assemblées qui sont élues.
01:03:52 - De Gaulle ne s'impliquait pas trop
01:03:54 parce qu'on a beaucoup contémoigné
01:03:56 et le secrétaire général
01:03:58 le disait, que très souvent,
01:04:00 De Gaulle renvoyait les textes
01:04:02 qui arrivaient sur son bureau en disant
01:04:04 « Ceci n'est pas de la compétence du président de la République. »
01:04:06 Comme si c'était le roi.
01:04:08 - Oui, bien sûr.
01:04:10 - Ça, on aurait bien dépassé ce stade-là.
01:04:12 - Alors, oui, il faut vous dire que je ne suis pas
01:04:14 monarchiste parce que je ne pense pas
01:04:16 que la monarchie sera restaurée.
01:04:18 Je pense par contre que les princes
01:04:20 ont quelque chose à dire
01:04:22 par leur origine,
01:04:24 par ce qu'ils représentent,
01:04:26 ce que représentent leurs familles
01:04:28 et par conséquent,
01:04:30 ça aurait été une très bonne idée
01:04:32 d'avoir
01:04:34 le prince Jean
01:04:36 comme député européen de la même manière
01:04:38 qu'il avait eu au taux de Habsbourg.
01:04:40 - Il y avait des élections ensuite
01:04:42 quand vous m'avez dit que c'était cette idée.
01:04:44 C'était à six mois des élections européennes.
01:04:46 - Oui, oui, je ne savais pas que cette idée allait faire du chemin.
01:04:48 - J'avais l'accord de Jean Passe,
01:04:50 mais qui est devenu hélas.
01:04:52 - Oui, mais...
01:04:54 - Mais en fait, ça aurait été...
01:04:56 - Ce n'est pas ce que ça aurait donné.
01:04:58 - Ça aurait été en effet un pétale pour partir.
01:05:00 - Après, je ne pense pas qu'il y aurait eu
01:05:02 la possibilité de restaurer la monarchie.
01:05:04 Mais au moins,
01:05:06 les familles françaises
01:05:08 ont été représentées.
01:05:10 De Gaulle a donné des fonctions
01:05:12 de représentation en compte de Paris.
01:05:14 - Et des missions importantes en Asie-Rie.
01:05:16 - Des missions importantes, voilà.
01:05:18 Donc, c'était quelque chose qui était concevable
01:05:20 qu'au niveau européen,
01:05:22 il y ait un prince français
01:05:24 qui soit à l'époque présent.
01:05:26 Mais ça ne s'est pas fait.
01:05:28 - C'est entre les mains de la Providence.
01:05:30 Vous savez, si Jean, un jour, se pointe à Reims
01:05:32 et se fait sacrer,
01:05:34 qu'est-ce qui se passe ?
01:05:36 Que faisons-nous ?
01:05:38 - On ne sait pas.
01:05:40 - C'est ce que j'appelle la Providence.
01:05:42 Vous ajoutez foi au...
01:05:44 au témoignage
01:05:46 assez nombreux de gens
01:05:48 qui disent qu'au début des années 60,
01:05:50 de Gaulle,
01:05:52 voyant régulièrement le compte de Paris,
01:05:54 alors ça, un échange de lettres en plus,
01:05:56 un appui de ces rencontres
01:05:58 en témoignent, a songé
01:06:00 dans le double sens du terme "songé".
01:06:02 C'est-à-dire qu'il faut que je songe
01:06:04 à ranger ma chambre
01:06:06 et puis c'est le songe
01:06:08 de quelque chose
01:06:10 qui ne s'arrivera jamais.
01:06:12 Il a songé à rétablir la monarchie.
01:06:14 Vous ajoutez foi à cette hypothèse ?
01:06:16 - Je m'interroge.
01:06:18 Parce que c'est compliqué,
01:06:20 de Gaulle.
01:06:22 De Gaulle, c'est un homme aussi qui lance des idées,
01:06:24 qui gère des projets,
01:06:26 puis qui regarde comment les choses se passent.
01:06:28 Je ne sais pas s'il avait une très grande estime
01:06:30 du compte de Paris.
01:06:32 Pour ça, personne ne l'aime.
01:06:34 - Je crois que non.
01:06:36 Pour les autres, en témoignage.
01:06:38 - Il avait dit...
01:06:40 - Il était scatagin de l'Élysée à l'époque.
01:06:42 - Si le prétendant avait
01:06:44 une volonté,
01:06:46 il aurait dû être à côté de moi
01:06:48 le 18 juin 1941.
01:06:50 - Je dis Bernard Tricot, c'est Burin Desrosiers
01:06:52 qui était scatagin de l'Élysée
01:06:54 à cette époque où de Gaulle voyait souvent
01:06:56 le soir le compte de Paris.
01:06:58 Etienne Burin Desrosiers
01:07:00 m'avait dit à mon micro
01:07:02 à l'époque j'étais France Culture,
01:07:04 en baissant un peu la voix,
01:07:06 et puis de Gaulle
01:07:08 avec une admiration
01:07:10 modérée pour le compte de Paris.
01:07:12 Il a dit ça avec beaucoup de confonction.
01:07:14 Je crois que ça cachait
01:07:16 beaucoup de prévention.
01:07:18 Et encore plus hélas
01:07:20 vis-à-vis de son fils
01:07:22 qui est disparu en 2019.
01:07:24 Il avait fait compte de Paris
01:07:28 une vingtaine d'années.
01:07:30 - Il n'était pas très politique.
01:07:32 - Vous dites les choses aussi gentiment que j'ai entendu.
01:07:34 En tous les cas, votre
01:07:36 nostalgie du général de Gaulle
01:07:38 qui est une nostalgie plus ancienne,
01:07:40 on vient de le comprendre, est très fondée
01:07:42 chez vous. Je ne sais pas si je peux
01:07:44 m'aventurer
01:07:46 à vous poser
01:07:48 une question plus délicate.
01:07:50 Le regard que vous posez sur la Ve République
01:07:52 et ses différents
01:07:54 chefs d'État.
01:07:56 Elle a beaucoup décliné, cette Ve République.
01:07:58 Vous vous y êtes intéressé jeune
01:08:00 puisque vous avez écrit la Démocratie dans son journalisme.
01:08:02 - Oui, oui, oui.
01:08:04 - La gauche et la droite. Les droites et l'extrême-droite, pardon.
01:08:06 Deux livres différents.
01:08:08 - Alors, moi je...
01:08:10 - Il y a un côté politique chez vous. Un politiste.
01:08:12 - Oui, oui. Je ne suis pas un homme politique.
01:08:14 - Vous regardez de Sirius.
01:08:16 - Non, pas de Sirius.
01:08:18 - Ah, de haut.
01:08:20 - La Saint-Gervais-République,
01:08:22 c'est le régime
01:08:24 qui est fait pour la France.
01:08:26 Je suis convaincu qu'elle a été bâtie
01:08:28 au départ,
01:08:30 après les expériences malheureuses
01:08:32 des républiques.
01:08:34 - Troisième, quatrième.
01:08:36 - Troisième, avec
01:08:38 à un moment donné,
01:08:40 MacMahon,
01:08:42 le coup d'État du 16 mai,
01:08:44 enfin tous ces gros problèmes
01:08:46 qui ont empêché finalement la présidence
01:08:48 de la République de s'installer
01:08:50 au pouvoir.
01:08:52 Il y a un rejet constant
01:08:54 de la gauche, des républicains,
01:08:56 tout au long du 19ème, à l'égard d'une présidence
01:08:58 de la République,
01:09:00 même en soi,
01:09:02 et d'un président fort.
01:09:04 - Rejet qui nous a coûté très cher.
01:09:06 - Et ça, c'était une nécessité.
01:09:08 C'était une nécessité absolue.
01:09:10 En 40, on a vu...
01:09:12 - Rejet qui nous a coûté cher en 40,
01:09:14 parce qu'il n'y avait plus personne pour diriger le navire,
01:09:16 et en 58. Il faut dire qu'en France,
01:09:18 les républiques finissent mal. En 58, ça finit par
01:09:20 un coup d'État et une pantalonnade.
01:09:22 En 40, par un disastre
01:09:24 pour la Troisième République.
01:09:26 La Deuxième République avait fini par aussi
01:09:28 un coup d'État. Elle avait été éphémère.
01:09:30 - Elle est arrivée d'un homme fort.
01:09:32 - La Première République a fini dans la terreur.
01:09:34 Ça finit mal, les républiques en France.
01:09:36 Vous avez remarqué ?
01:09:38 - La cinquième, elle dure.
01:09:40 - La cinquième, elle finit pas très bien.
01:09:42 - Oui, oui.
01:09:44 Elle a, je trouve, dégénéré
01:09:46 sur un certain nombre de points.
01:09:48 Moi, je trouve que c'est très bien
01:09:50 d'avoir un pouvoir fort,
01:09:52 d'avoir un contrôle de la constitutionnalité
01:09:54 sain, naturelle,
01:09:56 alors que là, il y a une dérive
01:09:58 quand même assez importante
01:10:00 avec les questions
01:10:02 prioritaires de constitutionnalité,
01:10:04 des choses comme ça,
01:10:06 qui ont modifié
01:10:08 quand même, et même toute l'évolution
01:10:10 du Conseil constitutionnel,
01:10:12 ont renforcé le pouvoir des juges.
01:10:14 Le Conseil d'État aussi,
01:10:16 qui se met maintenant à sanctionner
01:10:18 le pouvoir exécutif
01:10:20 parce qu'il ne
01:10:22 suit pas la trajectoire
01:10:24 écologique selon
01:10:26 ses propres définitions.
01:10:28 Il y a des choses qui commencent à venir
01:10:30 assez graves du côté du pouvoir des juges.
01:10:32 D'un autre côté,
01:10:34 cette histoire
01:10:36 de quinquennat a été
01:10:38 une stupidité absolue.
01:10:40 Et puis,
01:10:42 l'interdiction de faire
01:10:44 plus de deux quinquennats,
01:10:46 alors là, c'est un truc
01:10:48 que j'ai jamais pu comprendre.
01:10:50 Si le peuple français est souverain,
01:10:52 il a envie d'avoir un président...
01:10:54 Pour casser toute idée de continuité.
01:10:56 C'est l'obsession de la gauche.
01:10:58 Si le président
01:11:00 est excellent, pourquoi ne pas
01:11:02 continuer avec lui ?
01:11:04 Imaginons que nous ayons eu les institutions
01:11:06 de la Ve République en 1940
01:11:08 et que le général de Gaulle,
01:11:10 ayant fini les deux quinquennats,
01:11:12 devait s'en aller en 1940
01:11:14 et qu'il y avait Lebrun qui se présentait
01:11:16 pour le remplacer.
01:11:18 Ils ont fait une exception.
01:11:20 Mais nous, on ne l'aurait pas fait.
01:11:22 On a voulu copier ça sur les Américains.
01:11:24 Je trouve ça stupide.
01:11:26 Il n'y a pas de raison de bloquer.
01:11:28 Il faut laisser l'imagination.
01:11:30 - Vous voulez un troisième quinquennat Macron ?
01:11:32 - Non, mais moi,
01:11:34 je vais préférer
01:11:36 un septennat Hollande
01:11:38 parce que je suis pour le septennat,
01:11:40 même si je n'étais pas favorable à Hollande.
01:11:42 Mais qu'on ait un septennat.
01:11:44 Il y aurait une cohabitation, etc.
01:11:46 La cohabitation, ça a été une construction
01:11:48 intelligente
01:11:50 qui n'était pas tout à fait
01:11:52 dans l'esprit du général de Gaulle
01:11:54 mais qui a permis de fonctionner,
01:11:56 a permis une alternance.
01:11:58 Tout ça fonctionnait très bien
01:12:00 jusqu'à Chirac.
01:12:02 C'est Chirac en introduisant
01:12:04 le quinquennat
01:12:06 qui a donné une dose...
01:12:08 - Le PDO, que vous aimez tant,
01:12:10 a failli l'introduire.
01:12:12 C'est la majorité qui l'a pas su.
01:12:14 - Bien sûr.
01:12:16 - Pompidou, de Gaulle aussi,
01:12:18 a fait des bêtises.
01:12:20 - Peut-être que sa principale bêtise,
01:12:22 c'était Pompidou, justement.
01:12:24 - Non.
01:12:26 - Je crois que oui.
01:12:28 Mais enfin, écoutez, vous n'êtes plus
01:12:30 Clément avec Pompidou, un peu moins
01:12:32 avec l'escargots d'Estaing, j'imagine.
01:12:34 Et puis il y a une espèce de dérive
01:12:36 de la Ve République.
01:12:38 L'idée du bien commun,
01:12:40 et ça c'est beaucoup plus social,
01:12:42 l'idée du bien commun, même,
01:12:44 alors ça le bien commun c'est plutôt du côté du pouvoir,
01:12:46 mais l'idée de la cohésion nationale,
01:12:48 - Et même de la puissance, etc.
01:12:50 - Et puis tout le monde a un sentiment
01:12:52 de décadence,
01:12:54 qui se concrétise aujourd'hui
01:12:56 par les absences
01:12:58 dans tous les domaines,
01:13:00 et les lacunes, alors qu'on était,
01:13:02 mais là je fais un peu de politique,
01:13:04 les meilleurs,
01:13:06 de la SNCF,
01:13:08 des TGV,
01:13:10 les meilleurs en énergie nucléaire,
01:13:12 le DEF,
01:13:14 on avait des structures solides,
01:13:16 peut-être un peu trop bureaucratiques,
01:13:18 mais quand même, qui étaient fortes,
01:13:20 et puis tout ça s'est tombé,
01:13:22 on avait le meilleur système de santé du monde,
01:13:24 - Oui, c'était la moins chère du monde,
01:13:26 etc.
01:13:28 - Et puis on voit cette bureaucratisation,
01:13:30 - Ce phénomène magnifique qu'on a avant-guerre,
01:13:32 - phénomène bureaucratique,
01:13:34 - Et puis il y a la soumission à l'étranger aussi,
01:13:36 - Oui, à Bruxelles,
01:13:38 qui est elle-même une super bureaucratie,
01:13:40 - Qui n'a pas de...
01:13:42 - Et qui est elle-même une bureaucratie pilotée par Bruxelles,
01:13:44 ou pilotée par Washington et un peu Berlin,
01:13:46 - Oui, enfin, Washington et Berlin,
01:13:48 et puis par des gens pas très compétents,
01:13:50 - Par des gens pas très compétents,
01:13:52 - Des gens pas très compétents, en plus, des bureaucraties.
01:13:54 Alors, puisque nous sommes sur le terrain politique,
01:13:56 ça ne vous choque pas,
01:13:58 historiens que vous êtes,
01:14:00 c'est-à-dire bons connaisseurs des chefs d'État,
01:14:02 cette espèce de rupture
01:14:04 qu'il y a dans l'esprit public,
01:14:06 pendant des siècles et des siècles,
01:14:08 je n'ose pas poser cette question à tout le monde
01:14:10 parce que je n'ai pas envie de me faire comprendre,
01:14:12 j'espère que vous allez comprendre ce que je veux dire,
01:14:14 c'est pas simple, pendant des siècles et des siècles,
01:14:16 la politique, ça a consisté à servir la puissance de son pays.
01:14:20 La dépendance,
01:14:22 mais la puissance dans la mesure où
01:14:24 elle garantissait l'indépendance.
01:14:26 Bon.
01:14:28 Et puis tout à coup,
01:14:30 je crois que c'est l'influence de la gauche
01:14:32 et des idéologies,
01:14:34 faire de la politique, ça n'est plus du tout
01:14:36 aujourd'hui concourir à la puissance de la France.
01:14:38 Vous écoutez de l'information,
01:14:40 vous écoutez des débats, plus personne ne parle
01:14:42 de la puissance, plus personne n'a la logique
01:14:44 du bien commun
01:14:46 ou le souci de la puissance nationale,
01:14:48 de l'intérêt national.
01:14:50 La politique, mais c'est pas évaporé,
01:14:52 vous n'êtes pas choqués par,
01:14:54 vous qui connaissez la continuité multiséculaire
01:14:56 de ce souci d'indépendance
01:14:58 et de puissance,
01:15:00 évidemment, l'une et l'autre sont liées,
01:15:04 cette évaporation du souci politique premier.
01:15:08 C'était le bien commun,
01:15:10 et en même temps la notion de grandeur de la France.
01:15:12 La grandeur, oui.
01:15:14 Et sachant que ta grandeur,
01:15:16 avait un ruissellement
01:15:18 propre aussi.
01:15:20 Oui, bien sûr,
01:15:22 mais c'est un changement complet du paradigme
01:15:24 auquel nous assistons, c'est qu'on est dans une société
01:15:26 individualiste,
01:15:28 hédoniste,
01:15:30 subjectiviste,
01:15:32 chacun prépare la propre vérité
01:15:34 et veut l'assainer à l'autre.
01:15:36 Individualiste, chacun veut mener
01:15:38 sa propre barque et avoir
01:15:40 sa propre logique. Hédoniste,
01:15:42 chacun recherche le maximum de plaisir
01:15:44 pour lui-même. Et ce qui est
01:15:46 dramatique, c'est que l'État s'est mis
01:15:48 au service
01:15:50 de ses fondamentaux.
01:15:52 Y compris, c'est stupéfiant,
01:15:54 les socialistes,
01:15:56 y compris la gauche,
01:15:58 qui voulait de la solidarité,
01:16:00 l'entente entre
01:16:02 classes, c'est
01:16:04 l'individu, il faut servir
01:16:06 l'individu. Alors,
01:16:08 dans tous les domaines, vous avez des subventions
01:16:10 à droite, à gauche,
01:16:12 vous avez des aides de ceci,
01:16:14 des panneaux solaires,
01:16:16 des 7 000 euros
01:16:18 pour changer votre voiture,
01:16:20 en voiture électrique, pendant que les chinois
01:16:22 construisent des centrales
01:16:24 thermiques à gogo.
01:16:26 Tout ça, l'État
01:16:28 s'endette pour sauver
01:16:30 l'individu.
01:16:32 Ce qui fait que les individus
01:16:34 ont perdu le sens
01:16:36 de la communauté nationale,
01:16:38 de la souveraineté, je répète, de la puissance,
01:16:40 et que l'affaiblissement de la France
01:16:42 est irrémédiable, dès lors que
01:16:44 plus personne ne se soucie d'elle.
01:16:46 Bien sûr.
01:16:48 C'est terrible pour un historien comme vous,
01:16:50 qui est habitué à la grandeur.
01:16:52 La réaction des États africains,
01:16:54 votre humiliation permanente.
01:16:56 On est humilié, parce qu'on voit bien
01:16:58 qu'on n'est plus la puissance qu'on était.
01:17:00 Ça vous menace un peu ?
01:17:02 Bien sûr.
01:17:04 Ça vous peine ?
01:17:06 Énormément. Pas vous ?
01:17:08 Beaucoup. Ça vous tient demi-jour.
01:17:10 C'est une grande tristesse.
01:17:12 Mais cette société individualiste,
01:17:14 si on ne revient pas dessus,
01:17:16 si en tout cas l'État
01:17:18 n'est pas le serviteur
01:17:20 absolu
01:17:22 de l'individu roi,
01:17:24 dans tous les domaines.
01:17:26 Alors le servissement,
01:17:28 c'est vrai qu'on est très dépendant
01:17:30 de l'Europe,
01:17:32 et que l'Europe,
01:17:34 c'est quasiment le fônet des États-Unis.
01:17:36 En tout cas de l'OTAN.
01:17:38 C'est un peu le contraire
01:17:40 de ce qu'ont essayé de faire
01:17:42 vos chers rois.
01:17:44 Oui, je n'étais pas pour Maastricht,
01:17:46 je n'étais pas pour
01:17:48 la réintégration
01:17:50 dans le commandement unifié de l'OTAN,
01:17:52 ça c'est certain.
01:17:54 Aujourd'hui, alors j'ai probablement
01:17:56 des divergences par rapport à vous,
01:17:58 à vos positions.
01:18:00 Je vous entends, je dis, sur l'Europe.
01:18:02 Non, sur l'Ukraine.
01:18:04 Oui, mais c'est ce que j'entends
01:18:06 par Ukraine,
01:18:08 c'est l'Europe, le sujet c'est l'Europe,
01:18:10 c'est la domination totale de l'Europe
01:18:12 par les États-Unis, c'est le sujet.
01:18:14 Alors, on peut parler d'ambassade, d'armement.
01:18:16 L'intégration dans l'OTAN
01:18:18 est destructeur de notre industrie
01:18:20 à un certain moment, à terme, c'est évident.
01:18:22 Il faudra, évidemment,
01:18:24 pour les États-Unis,
01:18:26 vendre des F-16,
01:18:28 des F-35,
01:18:30 remplacer les F-16 qu'on donne aux Italiens
01:18:32 par des F-35, les Béges,
01:18:34 on n'a pas été capable
01:18:36 de vendre un seul Rafale
01:18:38 à un pays européen.
01:18:40 C'est phénoménal.
01:18:42 Mais c'est le fait de la domination américaine.
01:18:44 Oui, ça on est bien d'accord.
01:18:46 Mais je pense que la guerre en Ukraine aussi.
01:18:48 Il y a une agression,
01:18:50 il y a un agresseur, un agressé.
01:18:52 C'est les États-Unis qui ont mis les agresseurs ?
01:18:54 Oui, c'est ça.
01:18:56 À Kiev en 2015, c'est ça ?
01:18:58 On ne s'entendra pas là-dessus.
01:19:00 Par chance, vous avez été mis à l'écart,
01:19:02 vous êtes tenu à l'écart,
01:19:04 je ne doute pas d'autres expliqués,
01:19:06 de ce prêt-à-penser de gauche
01:19:08 par le fait que justement, vous n'avez pas été un mandarin.
01:19:10 Oui, c'est ça.
01:19:12 Dans l'institution,
01:19:14 je crois que
01:19:16 je fais très attention
01:19:18 à l'agrégé d'université,
01:19:20 enseignant, je regarde
01:19:22 ce que pensent mes pairs,
01:19:24 je regarde les productions que font mes pairs
01:19:26 dans telle et telle revue
01:19:28 et on s'observe.
01:19:30 Je m'observe croyalement.
01:19:32 Et vous, vous êtes confondus.
01:19:34 Je dis ce que je pense.
01:19:36 Je n'ai pas une pensée
01:19:38 ultra-ariaque,
01:19:40 mais je dis ce que je pense.
01:19:42 Et notamment,
01:19:44 vous dites votre tristesse.
01:19:46 Et cette tristesse-là, je l'ai reliée
01:19:48 tout de suite
01:19:50 quand je vous ai vus,
01:19:52 à mon grand étonnement, partir dans
01:19:54 cette immense biographie de Jésus.
01:19:56 Comme si la tristesse politique
01:19:58 pouvait trouver un secours
01:20:00 ou un peu d'eau fraîche
01:20:02 dans la foi, parce que vous êtes un catholique,
01:20:04 on peut dire,
01:20:06 pas militant,
01:20:08 mais très pratiquant.
01:20:10 Et comme s'il y avait
01:20:12 dans la foi un secours
01:20:14 dans les temps malheureux.
01:20:16 Bien sûr, la foi est un secours
01:20:18 dans les temps malheureux,
01:20:20 mais elle doit être aussi un secours
01:20:22 par tous les temps,
01:20:24 les temps de tempête,
01:20:26 comme aujourd'hui, d'ailleurs, dans l'Église,
01:20:28 mais aussi par les temps de carne-plat,
01:20:30 parce que c'est la relation
01:20:32 essentielle, c'est celle
01:20:34 qui nous lie au Christ.
01:20:36 J'ai toujours eu la foi,
01:20:38 je veux dire, sauf à un moment donné,
01:20:40 vers 15 ans, je me suis posé des questions,
01:20:42 mais j'ai reconstruit tout intellectuellement,
01:20:44 et à partir de là,
01:20:46 les choses se sont déroulées.
01:20:48 On est perdu quand même.
01:20:50 Non, non, on se pose des questions.
01:20:52 Quand on a 15 ans,
01:20:54 on se pose des questions.
01:20:56 C'est normal, d'ailleurs.
01:20:58 Avant d'en venir à Jésus, je montre à la caméra
01:21:00 cette photo de vous, quand vous aviez quel âge ?
01:21:02 19 ans, 20 ans.
01:21:04 Un beau gosse qui fume la pipe,
01:21:06 devant la mer.
01:21:08 Oui, à Cannes.
01:21:10 À Cannes.
01:21:12 Je crois qu'on aperçoit,
01:21:14 je ne sais pas si on le voit,
01:21:16 le fort royal de Nice-Saint-Marguerite,
01:21:18 où était enfermé l'homme
01:21:20 au reste de fer.
01:21:22 On a un rapport.
01:21:24 J'étais passionné à ce moment-là,
01:21:26 je venais dans la prison.
01:21:28 Et ce jeune homme, il avait la foi en quoi ?
01:21:30 La France, l'Histoire ?
01:21:32 L'Histoire, la France,
01:21:34 la foi dans l'avenir, à ce moment-là.
01:21:36 Maintenant, je l'ai derrière moi, l'avenir.
01:21:38 Mais je dois dire,
01:21:40 non, j'ai toujours eu la foi.
01:21:42 J'ai eu de l'eau et des barres,
01:21:44 j'ai eu de très grands malheurs dans ma vie,
01:21:46 notamment
01:21:48 le malheur d'un père qui a perdu sa fille.
01:21:50 Une de ses filles qui m'a aidé.
01:21:52 Vous n'avez pas eu de vieille fille ?
01:21:54 Je ne savais pas ça. Vous n'avez pas eu de vieille fille ?
01:21:56 Oui, oui.
01:21:58 À 15 ans, elle a eu un cancer,
01:22:00 donc ça a été vraiment terrible.
01:22:02 Mais on a vécu ça avec ma femme dans la foi.
01:22:04 On l'a renversée complètement.
01:22:06 On l'a vécu dans la grâce.
01:22:08 On le respecte.
01:22:10 Comme disait Sainte Thérèse,
01:22:12 "Tout est grâce".
01:22:14 On l'a accueilli comme ça.
01:22:16 Avec beaucoup de souffrance, bien sûr.
01:22:18 Pour chacun.
01:22:20 Mais ça, bon,
01:22:22 ça ne fait rien.
01:22:24 J'ai toujours eu cette foi.
01:22:26 Mais je suis aussi historien.
01:22:28 Je me pose des questions.
01:22:30 Quand j'assiste à la messe, je me dis,
01:22:32 "Ah, c'est l'âge de Saint Marc, Saint Matthieu,
01:22:34 il y a des contradictions,
01:22:36 à quelle époque ça se passe,
01:22:38 à quel moment..."
01:22:40 Je cessais de me poser des questions d'historien,
01:22:42 tout en adhérant pleinement.
01:22:44 Et c'est à partir de 1983
01:22:46 que je me suis intéressé
01:22:48 véritablement
01:22:50 à l'histoire de Jésus.
01:22:52 Notamment,
01:22:54 à cette grande polémique qui avait lieu
01:22:56 entre 1983 et 1984
01:22:58 sur l'origine des évangiles.
01:23:00 Sur Jean,
01:23:02 sur...
01:23:04 en quelle langue
01:23:06 les évangiles ont été écrits.
01:23:08 Il y avait la controverse
01:23:10 carmignac
01:23:12 contre
01:23:14 l'abbé Grelo,
01:23:16 etc.
01:23:18 Il y avait donc des discussions
01:23:20 et parfois très vives
01:23:22 entre spécialistes.
01:23:24 Et ça, ça m'intéressait.
01:23:26 Je n'ai pas fait d'araméen, d'hébreu,
01:23:28 pour poser des questions.
01:23:30 Et j'ai accumulé pendant des années
01:23:32 et des années des documents pour écrire
01:23:34 une histoire de Jésus.
01:23:36 - En descente et droite, cette fois.
01:23:38 - En parallèle, en descente.
01:23:40 - Mais c'est l'idée de faire une vie de Jésus.
01:23:42 - Oui.
01:23:44 - Extrêmement ambitieuse.
01:23:46 - C'était très ambitieux.
01:23:48 Et ça a duré 25 ans.
01:23:50 Et j'ai hésité
01:23:52 sur le seuil, il faut bien le dire,
01:23:54 avant de me lancer.
01:23:56 J'ai vu des livres
01:23:58 stupéfiants, pour ne pas dire autre chose,
01:24:00 d'un Jacques Duquesne, par exemple.
01:24:02 - Sur Jésus.
01:24:04 - Ou d'un Frédéric Lenoir.
01:24:06 Des choses qui étaient
01:24:08 extrêmement
01:24:10 destructrices.
01:24:12 - Qui remettaient tout en cause.
01:24:14 - Là, je me suis dit,
01:24:16 finalement,
01:24:18 je n'ai peut-être pas de légitimité,
01:24:20 mais il faut que je me lance pour dire ce que je pense.
01:24:22 - C'était un autre Jésus qui est très critique,
01:24:24 mais on l'attendait tellement, parce qu'il est très postérieur.
01:24:26 C'est celui d'Alain de Benoist.
01:24:28 - Oui, je ne l'ai pas vu.
01:24:30 - C'est un très gros volume.
01:24:32 - Je ne l'ai pas lu.
01:24:34 - Alors, lui, il conteste même le siècle de Jésus.
01:24:36 Le 2 siècles plus tard, il conteste tout.
01:24:38 - Oui.
01:24:40 Michel Onfray, aussi, lui,
01:24:42 il conteste l'existence même de Jésus,
01:24:44 alors que c'est un mythe.
01:24:46 - Alors, vous, justement, vous rétablissez.
01:24:48 Vous faites un bien fou au cas de lui,
01:24:50 parce que vous remettez Jésus dans l'histoire,
01:24:52 et au fond, assez conforme à ce qu'on en sait,
01:24:54 à ce qu'en disent les évangiles.
01:24:56 C'est-à-dire, vous attestez en historien
01:24:58 ce qui a été écrit.
01:25:00 - Oui, voilà.
01:25:02 Et en historien, qui n'est pas un historien chrétien.
01:25:04 L'historien, je ne mets pas à l'ordre
01:25:06 de sa foi chrétienne,
01:25:08 mais s'interroge sur l'histoire,
01:25:10 sur le contexte religieux,
01:25:12 économique, politique
01:25:14 de la Palestine du temps,
01:25:16 avec des luttes intestines très fortes,
01:25:18 des révoltes nombreuses,
01:25:20 avant la grande révolte de l'an 66,
01:25:22 et puis la guerre des Juifs,
01:25:24 et la destruction de Jérusalem en 70,
01:25:26 par les armées de Titus.
01:25:28 Mais, dans ce contexte,
01:25:30 l'arrivée de ce rabbi Jésus,
01:25:32 qui enseigne
01:25:34 sur les routes de Galilée,
01:25:36 qui se rend de temps en temps
01:25:38 à Jérusalem,
01:25:40 m'a passionné.
01:25:42 Et pour le faire,
01:25:44 et pour ce faire,
01:25:46 il a pas dû, bien sûr,
01:25:48 utiliser les différentes sources historiques,
01:25:50 Flavius Joseph...
01:25:52 - Flavius Joseph, vous avez fait de grands usages.
01:25:54 - Ah oui, bien sûr, sur le contexte...
01:25:56 - Il faut dire, c'est un prélat romain
01:25:58 qui raconte David Jésus, la première vie.
01:26:00 - C'est un juif romanisé
01:26:02 qui était conseiller des Flaviens,
01:26:04 alors qu'il était un juif considéré
01:26:06 comme un traître, mais qui,
01:26:08 à un moment donné... - Il s'intéresse à Jésus.
01:26:10 - Qui a parlé très peu, il y a un passage sur Jésus,
01:26:12 mais qui s'interroge au contexte,
01:26:14 pharisiens, esséniens,
01:26:16 saducéens,
01:26:18 qui montre les dynasties des grands prêtres,
01:26:20 qui permet de comprendre
01:26:22 le contexte politique
01:26:24 et religieux de l'époque.
01:26:26 - Il mentionne Jésus et il atteste...
01:26:28 - Ah oui, bien entendu, il y a même les textes...
01:26:30 - Et c'est pas pour entrer, justement,
01:26:32 dans la construction de la théorie.
01:26:34 - Mais il parle de Jésus
01:26:36 qui a été suspendu
01:26:38 la veille de la...
01:26:40 la veille de la Bâque,
01:26:42 donc il n'y a pas lieu de...
01:26:44 - Il écrit l'art romain aussi, il en parle...
01:26:46 Donc, il n'y a pas de raison,
01:26:48 ça, l'authenticité de Jésus.
01:26:50 Mais pourquoi cette spécificité
01:26:52 de Jésus et quel est le mystère
01:26:54 de Jésus ? C'est ça que j'ai voulu comprendre.
01:26:56 Et à partir des évangiles,
01:26:58 alors Jésus utilisait... - Non, attendez, vous avez voulu
01:27:00 comprendre le mystère ou la véracité de Jésus ?
01:27:02 - La véracité de Jésus, de l'existence
01:27:04 de Jésus, elle ne fait aucun doute. - Oui, mais les actes...
01:27:06 - Mais à partir de là se pose le mystère
01:27:08 de Jésus. Qui est ce Jésus ?
01:27:10 Qui est-il ?
01:27:12 Est-ce qu'il est simplement le Messie
01:27:14 que Jésus attend, attendu par Israël,
01:27:16 par exemple ? Bon, ben c'est pas tout à fait vrai.
01:27:18 Il n'est pas le Messie d'Israël.
01:27:20 Il n'est pas le Messie attendu. C'est pas ça qu'on attendait.
01:27:22 On attendait un chef de guerre. On attendait
01:27:24 un libérateur. Les Esséniens,
01:27:26 qui étaient ce petit groupe qui s'étaient
01:27:28 retirés du Temple
01:27:30 et de...
01:27:32 du judaïsme traditionnel
01:27:34 pour se retirer dans le désert ou dans
01:27:36 un quartier spécial de Jérusalem,
01:27:38 eux, attendaient deux Messies.
01:27:40 Le Messie d'Aaron et le Messie d'Israël.
01:27:42 Le Messie d'Aaron, ce serait le nouveau grand-prêtre
01:27:44 parce qu'il considérait que les grands-prêtres
01:27:46 étaient des traîtres
01:27:48 et des personnages
01:27:50 apostas.
01:27:52 Et puis le Messie d'Israël, ce serait le chef
01:27:54 de guerre, le grand vainqueur qui battrait
01:27:56 les Kittim, qui battrait les Romains.
01:27:58 Donc, dans
01:28:00 toute cette atmosphère,
01:28:02 on attend en effet un Messie
01:28:04 en Israël,
01:28:06 surtout depuis l'an 63
01:28:08 avant notre ère, à laquelle
01:28:10 Pompée est arrivé à conquis
01:28:12 Jérusalem. Occupation
01:28:14 romaine ou utilisation de
01:28:16 rois clés comme Hérode le Grand
01:28:18 et puis ses successeurs,
01:28:20 Arkelaus, etc. Et puis
01:28:22 Hérode Antipas,
01:28:24 les Tétrarchs de Galilée.
01:28:26 Donc, je me suis intéressé à... - Votre édition
01:28:28 vous stipule... - Je m'intéresse au contexte
01:28:30 et je me suis intéressé bien sûr
01:28:32 à la lecture de l'Évangile. Alors, bien sûr,
01:28:34 pour moi, ce sont des textes sacrés,
01:28:36 ce sont des textes inspirés,
01:28:38 mais on peut les traiter
01:28:40 en historiens. C'est-à-dire qu'on
01:28:42 peut les hiérarchiser d'un point de vue
01:28:44 historique. Et on voit
01:28:46 qu'il y en a trois qui se ressemblent,
01:28:48 Mathieu, Marc
01:28:50 et Luc, et puis il y en a
01:28:52 un qui est très différent, qui est Jean.
01:28:54 - Mais qui est ce Jean ?
01:28:56 - Alors, d'une part, et très
01:28:58 longtemps, et même encore aujourd'hui,
01:29:00 la plupart des
01:29:02 exégètes ou des
01:29:04 historiens vont suivre
01:29:06 le Jésus des synoptiques.
01:29:08 Et moi, je fais le pari,
01:29:10 et j'ai fait le pari, que d'un point
01:29:12 de vue historique, c'était le
01:29:14 Jean, le Jésus de Jean, qu'il fallait
01:29:16 prendre en compte. - Le quatrième. - Alors,
01:29:18 il ne s'oppose pas, bien sûr, à ce quatrième Évangile,
01:29:20 mais il...
01:29:22 - Je vous sers un peu d'eau, vous voulez peut-être
01:29:24 un petit scotch ou quelque chose
01:29:26 comme ça ? Non, non, non, non, non. - Il ramasse.
01:29:28 - Il vous suffit. - Merci. - Il y a tout ce qu'il faut ici,
01:29:30 vous savez. - Le
01:29:32 Jésus de Jean et le
01:29:34 Jésus des synoptiques ne s'opposent pas.
01:29:36 Mais il y a des contradictions
01:29:38 entre les dates
01:29:40 de... du durée
01:29:42 du ministère
01:29:44 public de Jésus, par exemple,
01:29:46 pour les synoptiques, c'est en une
01:29:48 année, il y a une montée vers
01:29:50 Jérusalem, ça commence... le ministère
01:29:52 commence en Galilée avec le baptême de Jean,
01:29:54 puis on monte vers Jérusalem. Bon. Ça,
01:29:56 c'est en fait une construction
01:29:58 didactique, mais qui n'est pas historique.
01:30:00 Et Jean montre que Jésus
01:30:02 est allé en Galilée,
01:30:04 à Canard, ensuite il est revenu,
01:30:06 il est allé à Capharnaüm, puis Capharnaüm,
01:30:08 il est revenu à Jérusalem. À Jérusalem,
01:30:10 en l'entrante, il s'aperçoit
01:30:12 que le marché
01:30:14 des bestiaux et des changeurs
01:30:16 qui étaient installés sur le mont des Oliviers
01:30:18 avaient été transférés à l'intérieur
01:30:20 sur le parvis du Temple,
01:30:22 et c'est là où il prend un fouet et il
01:30:24 chasse les marchands du Temple.
01:30:26 C'est la première fois que ça arrivait, c'est un
01:30:28 changement, c'est ce que nous disent les textes
01:30:30 juifs. Trente ans avant la prise
01:30:32 de Jérusalem, il y a eu cette
01:30:34 installation des marchés. Alors tout ça, il y avait
01:30:36 des arrières-pensées économiques,
01:30:38 c'est que les profits
01:30:40 du marché
01:30:42 du mont des Oliviers,
01:30:44 qui étaient liés à l'économie du Temple,
01:30:46 il faut bien voir qu'on avait
01:30:48 besoin de sacrifices. Pour sacrifier les
01:30:50 animaux, les toulturels,
01:30:52 les bestiaux, on les achetait sur le
01:30:54 mont des Oliviers. Ou alors, on les
01:30:56 emportait avec eux,
01:30:58 mais le danger, c'est qu'un animal
01:31:00 qui se blesse, à la patte par exemple,
01:31:02 on ne peut pas le sacrifier.
01:31:04 Donc c'est fini.
01:31:06 Donc on l'achète,
01:31:08 et puis on a besoin du chéquenne, puisque la monnaie
01:31:10 en usage dans le Temple, c'est le chéquenne,
01:31:12 et non pas les monnaies de tir.
01:31:14 Donc,
01:31:16 ce n'est pas les marchands de lourdes,
01:31:18 les marchands de lourdes, ils sont indépendants,
01:31:20 ils ne sont pas loin du sanctuaire, mais
01:31:22 ils sont indépendants du culte. Là, ils sont liés au culte.
01:31:24 Le culte des sacrifices.
01:31:26 Il faut imaginer
01:31:28 le Temple, avec le sang
01:31:30 qui ruisselle, ces fumées
01:31:32 âcres des carcasses
01:31:34 d'animaux qu'on brûle,
01:31:36 toutes ces fumées qui se rejettent dans les
01:31:38 ruelles de Jérusalem, c'est phénoménal.
01:31:40 On est dans l'Orient.
01:31:42 Et donc Jésus a vécu dans cette atmosphère.
01:31:44 Et en même temps, Jésus considère que le Temple,
01:31:46 évidemment, c'est la maison de son père.
01:31:48 Il faut que je sois auprès de mon père,
01:31:50 c'est ce qu'il veut dire, dès l'âge de 12 ans.
01:31:52 Donc la construction historique,
01:31:54 pour moi, c'est Jean. C'est très clair.
01:31:56 Et les sédoptiques
01:31:58 ont utilisé
01:32:00 des choses vraies,
01:32:02 mais qui ne sont pas,
01:32:04 qui ne s'enchaînent pas directement.
01:32:06 - Et plus c'est bescupule, je sens qu'à
01:32:08 entrer dans la querelle des deux Jean,
01:32:10 parce qu'on a pris Jean pour un autre.
01:32:12 - Oui, oui.
01:32:14 Je sais bien que ça a choqué
01:32:16 beaucoup de gens,
01:32:18 de gens, j'ai l'air hénes.
01:32:20 - Des gens d'église.
01:32:22 - Des gens d'église.
01:32:24 Pour moi, Jean est un
01:32:26 prêtre de Jérusalem,
01:32:28 un polycrate d'Éphèse.
01:32:30 - Un aristocrate.
01:32:32 - Probablement, oui.
01:32:34 Jean, polycrate d'Éphèse,
01:32:36 qui a été évêque d'Éphèse
01:32:38 en 70-80,
01:32:40 mais qui avait plusieurs oncles
01:32:42 qui avaient été évêques à Éphèse,
01:32:44 donc qui avaient connu ce Jean
01:32:46 qui a fini sa vie à Éphèse.
01:32:48 Un polycrate d'Éphèse dit qu'il fut
01:32:50 hiérousse, c'est-à-dire prêtre,
01:32:52 il a porté le pétalon, c'est-à-dire
01:32:54 la lame d'or des grands prêtres
01:32:56 et des familles sacerdotales,
01:32:58 et il s'est endormi à Éphèse.
01:33:00 Donc ce Jean-là n'est pas
01:33:02 le Jean, fils de Zébédée
01:33:04 et frère de Jacques,
01:33:06 qui réparait les filets
01:33:08 le long du lac de Génézaret,
01:33:10 qui étaient des gens incultes.
01:33:12 - Beaucoup plus simples d'esprit.
01:33:14 - Beaucoup plus simples.
01:33:16 Pierre et Jean,
01:33:18 les deux pêcheurs du lac,
01:33:20 sont passés devant le Sanhédrin
01:33:22 et le Sanhédrin les considérait
01:33:24 comme des gens
01:33:26 pas très intelligents,
01:33:28 pas très...
01:33:30 - Vous suivez...
01:33:32 - Notre Jean à nous, c'est Jean l'évangéliste,
01:33:34 Jean le théologien aussi.
01:33:36 Oui, c'est extraordinaire,
01:33:38 il a des visions extraordinaires
01:33:40 et en même temps tout ce qu'il dit est vrai.
01:33:42 C'est ça que je me suis aperçu.
01:33:44 - C'est très belle chez Jean,
01:33:46 ce qu'il n'y a pas chez les autres,
01:33:48 comme cette phrase,
01:33:50 "Si ton cœur te condamne,
01:33:52 n'oublie pas que Dieu est plus grand que ton cœur."
01:33:54 Enfin, il ajoute de la théologie
01:33:56 très chrétienne.
01:33:58 C'est presque un idéologue,
01:34:00 le premier idéologue de la chrétienté.
01:34:02 - Oui, mais c'est celui qui a mieux compris Jésus.
01:34:04 C'est celui qui a mieux compris Jésus.
01:34:06 C'est celui qui a compris
01:34:08 sa nature profonde
01:34:10 et qui a noté toutes ces phrases.
01:34:12 Et tout ce que dit Jean est vrai.
01:34:14 Quand Jésus dit
01:34:16 "Je suis le chemin, la vérité et la vie,
01:34:18 nul ne peut aller au Père
01:34:20 s'il ne passe par moi,
01:34:22 qui me voit, voit le Père."
01:34:24 Tout ça, ce sont des notations.
01:34:26 Soit Jean était présent,
01:34:28 soit Jean les a reçus des apôtres.
01:34:30 Il a une grande présence.
01:34:32 Jean était au pied de la croix,
01:34:34 alors que les apôtres n'y étaient pas.
01:34:36 Les fils de Zébédée, ils étaient partis,
01:34:38 ils étaient cachés.
01:34:40 C'est lui qui a accueilli Marie.
01:34:42 J'ai lu dans sa maison à Jérusalem.
01:34:44 Il avait une belle maison, c'était un notable
01:34:46 de Jérusalem, ce n'était pas un pêcheur du lac.
01:34:48 - Il y a un peu une vie de Jean dans votre vie de Jésus.
01:34:50 - Oui.
01:34:52 - Vous suivez Jésus, pas d'un pas.
01:34:54 C'est un livre vertigineux.
01:34:56 - Voilà, alors j'essaie de restituer...
01:34:58 - C'est un livre qui fait du bien,
01:35:00 parce qu'il racénère votre foi.
01:35:02 En tous les cas, il...
01:35:04 - J'essaie, mais...
01:35:06 L'historien, finalement,
01:35:08 bute sur un mystère.
01:35:10 Parce qu'il ne peut pas, en tant qu'historien,
01:35:12 expliquer le mystère.
01:35:14 Il ne peut pas dire tel miracle
01:35:16 est authentique, tel autre n'est pas,
01:35:18 c'est rapporté par... - La résurrection.
01:35:20 - Et la résurrection, il s'arrête devant la résurrection.
01:35:22 Après, c'est une question de foi.
01:35:24 Mais il va loin, quand même.
01:35:26 - Parce que Jésus ne fait pas grand-chose après la résurrection.
01:35:28 - Il apparaît aux apôtres pendant 40 jours,
01:35:30 donc il les enseigne.
01:35:32 - Il ne les touchait pas.
01:35:34 - Oui, mais pendant 40 jours, il leur enseigne.
01:35:36 Et vous savez qu'il est sur le lac,
01:35:38 il réalise la pêche miraculeuse.
01:35:40 - Jésus est très orthodoxe.
01:35:42 - Mais non, mais c'est vrai.
01:35:44 Tout vient de Jean,
01:35:46 et Jean est absolument authentique.
01:35:48 Le malheur, c'est que Jean est tellement
01:35:50 symbolique,
01:35:52 qu'il va prendre un petit événement
01:35:54 de l'histoire,
01:35:56 et puis, immédiatement,
01:35:58 lui donner ou laisser entendre
01:36:00 son sens symbolique.
01:36:02 Donc, on aimerait bien, en tant qu'historien,
01:36:04 qu'il nous donne davantage de détails.
01:36:06 Le coup de lance, par exemple, c'est extraordinaire.
01:36:08 Le coup de lance, il est sorti de l'eau
01:36:10 et du sang.
01:36:12 Pour Jean, bien sûr, c'est la suggestion
01:36:14 de l'eau du baptême, le sang du sacrifice,
01:36:16 etc. Et beaucoup
01:36:18 ont interprété ça comme ça.
01:36:20 Or, on sait que physiquement,
01:36:22 quand un crucifié,
01:36:24 évidemment,
01:36:26 tétanisé par
01:36:28 plusieurs heures sur la croix,
01:36:30 doit s'appuyer sur
01:36:32 les pieds, respirer.
01:36:34 Jésus a été flagellé, horriblement
01:36:36 flagellé, ça on le voit sur l'insole
01:36:38 du Turin. Donc, il y a une accumulation
01:36:40 de liquide péricardique, qui fait
01:36:42 que le coup de lance donné par
01:36:44 le soldat Romain
01:36:46 a fait jaillir du liquide péricardique
01:36:48 avant de faire jaillir
01:36:50 du sang. Tout ça est très, très
01:36:52 physique.
01:36:54 Mais, ce coup,
01:36:56 c'est simplement ce petit détail...
01:36:58 Bien sûr, mais les médecins
01:37:00 l'ont fait,
01:37:02 et ont donné une parfaite
01:37:04 explication, parfaitement claire,
01:37:06 qui confirme...
01:37:08 C'est pas seulement symbolique,
01:37:10 il y a une réalité physique.
01:37:12 Ce genre de choses.
01:37:14 Je comprends que vous ayez eu un succès de 150 000, 200 000,
01:37:16 un peu moins de 200 000
01:37:18 dans les comptes.
01:37:20 C'est extraordinaire pour un...
01:37:22 une période tellement déchristianisée.
01:37:24 C'est une grande récompense
01:37:28 pour un auteur d'avoir vendu
01:37:30 tant de livres et conforté
01:37:32 tant de fois.
01:37:34 Alors j'ai fait ensuite un dictionnaire
01:37:36 amoureux de Jésus.
01:37:38 Ensuite, il y a une suite, et puis il y a le Saint-Suèvre.
01:37:40 J'ai fait le Saint-Suèvre de Thurin aussi, ça s'est terminé.
01:37:42 Alors vous avez fait un dictionnaire amoureux.
01:37:44 Dans le dictionnaire amoureux, là je m'applique en tant que chrétien,
01:37:46 historien et chrétien.
01:37:48 C'est évident, parce qu'on est amoureux de Jésus,
01:37:50 donc...
01:37:52 dans la collection des dictionnaires amoureux.
01:37:54 C'est pas
01:37:56 Jésus amoureux,
01:37:58 certains l'ont mal compris.
01:38:00 Non, le dictionnaire amoureux de Jésus.
01:38:02 C'est le mot d'amoureux.
01:38:04 Oui, mais comme tout chrétien, il doit être amoureux de Jésus.
01:38:06 Bien sûr.
01:38:10 Alors au point d'aller chercher la vérité
01:38:12 du Saint-Suèvre,
01:38:14 ça, c'est coton.
01:38:16 Je me suis intéressé au Saint-Suèvre,
01:38:20 déjà dans mon livre sur Jésus,
01:38:22 j'ai en apérilis une étude sur le Saint-Suèvre de Thurin.
01:38:24 Bien sûr, là aussi, ça fait des années.
01:38:26 Moi, je traîne des sujets pendant des années.
01:38:28 Ça éclot ou pas, mais...
01:38:32 le Saint-Suèvre, je voulais écrire
01:38:34 quelque chose sur le Saint-Suèvre.
01:38:36 J'ai essayé de faire un livre de synthèse.
01:38:38 Je ne suis pas un scientifique.
01:38:40 J'ai résumé les approches scientifiques,
01:38:42 les études italiennes, américaines.
01:38:44 Parce qu'il y a un décalage abyssal
01:38:46 entre ce que les médias nous racontent
01:38:48 sur le Suèvre, le carbone 14
01:38:50 en 1988,
01:38:52 et on considère que c'est fini, c'est réglé.
01:38:54 Aujourd'hui, on a les chiffres bruts
01:38:56 des analyses du carbone 14,
01:38:58 et on voit qu'il y a une dispersion complète,
01:39:00 que l'expérience a été mal faite,
01:39:02 et on ne sait pas ce qui s'est passé.
01:39:04 Mais en tout cas,
01:39:06 le résultat n'est pas bon, n'est pas fiable.
01:39:08 Et tout le reste va converger
01:39:10 vers l'authenticité
01:39:12 du Saint-Suèvre.
01:39:14 - Et vous l'avez vu ?
01:39:16 Vous avez été autorisé à le voir ?
01:39:18 - Non.
01:39:20 J'ai vu une ostention privée
01:39:22 qui avait été réalisée
01:39:24 et télévisée ultérieurement,
01:39:26 en très gros plan,
01:39:28 mais je n'ai pas vu l'installation.
01:39:30 Je ne sais pas si...
01:39:32 D'ailleurs, quand vous avez
01:39:34 une ostention où il y a 2 millions de personnes
01:39:36 qui viennent, vous restez 5 secondes
01:39:38 devant un objet éclairé au loin,
01:39:40 c'est émouvant, mais...
01:39:42 - On voit quand même le visage du Christ
01:39:44 qui est tellement émacié,
01:39:46 qui est presque évidemment guérir.
01:39:48 - C'est un peu inversé, puisque vous savez
01:39:50 que le nacelle, c'est une image inversée.
01:39:52 C'est quand la photographie est intervenue
01:39:54 en 1898,
01:39:56 quand Segondo Pia, le chevalier
01:39:58 photographe, avocat
01:40:00 et photographe de Turin, a été autorisé
01:40:02 à photographier pour la première fois
01:40:04 le nacelle.
01:40:06 Donc il est arrivé avec ses plaques photographiques,
01:40:08 ça a échoué une première fois,
01:40:10 et puis il a réussi, dans la cathédrale
01:40:12 de Saint-Jean-Baptiste, à photographier.
01:40:14 Et sortant
01:40:16 de son bac à développement,
01:40:18 avec la petite lumière rouge, sortant la première plaque,
01:40:20 il a été stupéfait !
01:40:22 Il a été stupéfait, il a tremblé,
01:40:24 il a manqué de lâcher la plaque.
01:40:26 Qu'est-ce qu'il a vu ? Il a vu le vrai
01:40:28 visage de Jésus qu'on ne voyait pas depuis
01:40:30 2000 ans. Parce que ce qu'on voit, en réalité,
01:40:32 c'est un
01:40:34 négatif photographique.
01:40:36 La propriété du nacelle, c'est d'être un négatif photographique.
01:40:38 C'est-à-dire, les contrastes
01:40:40 sont inversés.
01:40:42 Les contrastes en noir,
01:40:44 en fait, c'est blanc.
01:40:46 Et l'inverse, c'est du noir.
01:40:48 Et c'est seulement quand l'inversion
01:40:50 des contrastes se produit
01:40:52 qu'on voit la vraie photographie.
01:40:54 Ceux qui voient la photo
01:40:56 du nacelle, c'est souvent une photo
01:40:58 inversée. Quand vous voyez le nacelle
01:41:00 lui-même, vous voyez simplement des tâches sombres.
01:41:02 - C'est pas du tout ça non plus. - Ah si, si, si !
01:41:04 Alors comment on aurait pu inventer
01:41:06 la photographie
01:41:08 au Moyen-Âge ? C'est impossible !
01:41:10 - Je vous choque si je vous dis qu'on ne peut pas voir la superstition.
01:41:12 - Pardon ?
01:41:14 - C'est pas grand-chose de métaphysique, au fond.
01:41:16 Je comprends
01:41:18 le culte des reliques,
01:41:20 la stupéfaction qu'on peut avoir devant
01:41:22 le sueur
01:41:24 qui a enveloppé le corps du Christ,
01:41:26 évidemment, mais qu'est-ce que ça implique ?
01:41:28 - Il ne faut pas avoir une dévotion toute particulière
01:41:30 pour le sueur en lui-même.
01:41:32 C'est le sueur qui construit le Christ.
01:41:34 Oui, mais attendez,
01:41:36 c'est quand même quelque chose de très important
01:41:38 parce que ça nous conduit directement
01:41:40 au mystère. Nous ne savons pas
01:41:42 comment, par exemple, l'homme
01:41:44 du Lassalle a pu sortir
01:41:46 de ce linge
01:41:48 sans laisser la moindre trace d'arrachement
01:41:50 au niveau des blessures.
01:41:52 Comment ? - Ah, mais donc il y a une dimension,
01:41:54 en effet, sur la sonnerie. - Il y a une dimension métaphysique.
01:41:56 Oui, on ne sait pas
01:41:58 comment l'homme du Lassalle
01:42:00 a disparu, comment
01:42:02 s'est formé l'image, on ne sait pas.
01:42:04 - Ça fait une trace, non ? - On ne sait pas comment l'image s'est formée.
01:42:06 - Sur le linge ? - Oui, on ne sait pas.
01:42:08 On a fait des tas d'essais,
01:42:10 il y a des quantités d'hypothèses,
01:42:12 des radiations,
01:42:14 tout ce qu'on veut. - Ça veut dire que sur les autres
01:42:16 Lassalle, il n'y a pas de trace ? - Mais non !
01:42:18 Ou il y a quelques traces. - Pas à ce point.
01:42:20 - Mais non, on voit le détail
01:42:22 entre le sang artériel et le sang veineux,
01:42:24 on voit les coulées de sang.
01:42:26 Il y a une image de sang d'un côté
01:42:30 et puis une image... Alors l'image de sang,
01:42:32 elle est en fait
01:42:34 reproduite sur un linge
01:42:36 qui a recouvert la tête par exemple.
01:42:38 Et donc quand on déplie, on voit
01:42:40 les taches de sang sont éloignées du centre
01:42:42 du visage. Mais par contre,
01:42:44 l'image, elle, c'est une projection orthogonale.
01:42:46 Comment ça se fait ? Sans effet latéral.
01:42:48 - C'est surnaturel.
01:42:50 - Peut-être.
01:42:52 Le scientifique... - Oui, donc je veux
01:42:54 rétire ce que je viens de dire sur toutes les superpositions.
01:42:56 On entre dans la dimension métaphysique.
01:42:58 - Mais on entre dans une dimension...
01:43:00 Comment l'homme de Lassalle a pu,
01:43:02 sans laisser la moindre trace
01:43:04 de décomposition au bout de 36 heures ?
01:43:06 On sait que c'est un corps
01:43:08 qui a été enveloppé
01:43:10 dans ce Lassalle, qui ne présente
01:43:12 aucune trace de décomposition
01:43:14 à la bouche, au bas ventre,
01:43:16 là où commence la décomposition des corps en général.
01:43:18 Et puis surtout,
01:43:20 aucune trace d'arrachement
01:43:22 des caillots sanguins
01:43:24 qui sont impeccables.
01:43:26 Quand vous avez un sparadrap, ça se voit.
01:43:28 Pas besoin d'avoir un microscope électronique.
01:43:30 Là, au microscope électronique,
01:43:32 on ne sait rien, nous ne savons pas comment...
01:43:34 - Donc c'est pas normal. - Ben non.
01:43:36 Donc c'est pas une relique
01:43:38 banale.
01:43:40 C'est pas une relique banale,
01:43:42 cela étant, cette relique, il ne se dit pas...
01:43:44 C'est le doigt qui monte la Lune.
01:43:46 Il ne faut pas regarder le doigt, il faut regarder la Lune.
01:43:48 Et là, c'est Lassalle
01:43:50 qui monte le Christ.
01:43:52 - Ce qui est le plus important, d'ailleurs, derrière la vie du Christ,
01:43:54 c'est le rapport au Père.
01:43:56 - Et le Christ montre le Père.
01:43:58 - Voici le Père.
01:44:00 - Ce qui nous dépasse tous.
01:44:02 - Voilà. - Et qui nous tient debout et qui nous fait vivre.
01:44:04 C'est ça qui vous fait vivre.
01:44:06 - Ah oui.
01:44:08 Pas vous ? - Cette passion.
01:44:10 Écoutez, j'ai des hésitations.
01:44:12 Je n'ai jamais été interrogé
01:44:14 dans le cadre de ces conversations.
01:44:16 Je suis très platonicien, moi.
01:44:20 - C'est-à-dire ?
01:44:22 - Ce qui me fait vivre,
01:44:24 c'est la conjonction du beau, du bien et du vrai.
01:44:26 - Ah oui.
01:44:28 - Le moment que vous avez le vrai,
01:44:30 vous avez le reste.
01:44:32 - Vous êtes tout le reste du Christ.
01:44:34 - Vous avez le reste.
01:44:36 - Je suis chrétien et pratiquant.
01:44:38 Vous me prenez au dépourvu, mon cher Jean-Pierre.
01:44:40 C'est difficile pour conclure cette conversation
01:44:42 qui a été longue
01:44:44 et qui aurait pu l'être davantage.
01:44:46 - Merci de votre accueil.
01:44:48 - J'ai encore
01:44:50 deux choses à dire.
01:44:52 D'abord, trois.
01:44:54 On n'a pas fini.
01:44:56 Premièrement,
01:44:58 je souhaite
01:45:00 de tout mon cœur que vous ayez conscience
01:45:02 du bien que vous avez fait à la France.
01:45:04 Aux Français
01:45:06 et donc à la France,
01:45:08 qui se savent mieux français.
01:45:10 C'est ça le problème. Les Français ne se savent plus français.
01:45:12 Ils ne savent pas ce qu'être français veut dire.
01:45:14 Et en lisant Jean-Christian Petitfils,
01:45:16 que de pistes,
01:45:18 que de confort, au sens,
01:45:20 comme pour le Christ.
01:45:22 Conforter ce qu'on n'était même
01:45:24 plus sûr de pouvoir croire.
01:45:26 C'était le bien que vous avez fait.
01:45:28 Avec ce travail acharné,
01:45:30 est-ce que ça en a été le moteur ?
01:45:32 Inconsciemment, peut-être.
01:45:34 Votre carrière comme homme d'affaires,
01:45:36 tous ces livres,
01:45:38 tellement fouillés.
01:45:40 Quand je vous lis, vous avez 10 ans pour écrire ce livre.
01:45:42 Le problème, c'est qu'il y en a 40.
01:45:44 Vous n'avez pas lu 400,
01:45:46 vous savez, quelques années de vie.
01:45:48 Donc il y a un mystère là aussi.
01:45:50 - Je n'ai pas de collaborateur.
01:45:52 - Votre femme peut peut-être.
01:45:54 - Ma femme m'aide à relire les textes.
01:45:56 Mais c'est moi qui les écris.
01:45:58 - Je pense que vous avez encore
01:46:00 plusieurs années,
01:46:02 plusieurs livres,
01:46:04 certainement en gestation.
01:46:06 Je crois que vous vous préparez une surprise.
01:46:08 Je ne le dis pas.
01:46:10 Mais de toute façon, Diable d'homme,
01:46:12 ça ne peut pas ne pas être.
01:46:14 Vous allez nous surprendre encore.
01:46:16 Et je vous en remercie.
01:46:18 Ça a été un peu le moteur de cette vie quand même.
01:46:20 Vous avez conscience de faire du bien
01:46:22 ou c'est tout simplement l'intérêt,
01:46:24 le goût, la curiosité, le plaisir de lire ?
01:46:26 - Non, je ne veux pas tirer une glorieuse
01:46:28 de ce que je fais.
01:46:30 En disant que j'ai conscience.
01:46:32 Il y a beaucoup trop d'écrivains
01:46:34 qui ont la grosse tête,
01:46:36 qui considèrent que...
01:46:38 - C'est la grotesque.
01:46:40 - Oui absolument.
01:46:42 Une fois qu'on est mort,
01:46:44 on ne laisse pas beaucoup de traces.
01:46:46 Mais quels que soient les historiens,
01:46:48 les historiens disparaissent.
01:46:50 On est toujours recouvert.
01:46:52 On est vite recouvert par d'autres.
01:46:54 - Les livres restent.
01:46:56 - Les livres restent.
01:46:58 - Alors tout ça, c'est quoi ?
01:47:00 L'histoire de la France,
01:47:02 ça je crois qu'il faut lire.
01:47:04 Bien entendu, aux biographies de rois.
01:47:06 Elles sont magnifiques.
01:47:08 Il faut lire aussi, bien entendu, ce Jésus.
01:47:10 Alors dans la version première,
01:47:12 c'est plus long que dans la version dernière.
01:47:14 C'est-à-dire, c'est un livre qui paraît...
01:47:16 - Il sort dans quelques jours, oui.
01:47:18 - Ces jours-ci, Jean-Christophe Le Difficile,
01:47:20 Jésus, votre auditeur,
01:47:22 cette fois c'est Fayard.
01:47:24 Ça a longtemps été Perrin,
01:47:26 il faut dire.
01:47:28 - Oui, Fayard a édité mon premier livre sur Jésus,
01:47:30 a édité mon histoire de France.
01:47:32 - Beaucoup de biographies.
01:47:34 - Et puis Perrin édite mes biographies historiques,
01:47:36 mes grandes biographies.
01:47:38 - Ce livre, Fayard, très...
01:47:40 J'ai Fayard très illustré, celui-ci.
01:47:42 Je pense qu'il connaîtra autant de succès
01:47:44 que le premier.
01:47:46 Et je me demande,
01:47:48 pour finir,
01:47:50 Jean-Christophe Le Difficile,
01:47:52 parce que vous m'avez posé cette question,
01:47:54 quelle est la première de vos fois ?
01:47:56 Le Père, le Fils,
01:48:00 la France, l'Histoire,
01:48:02 votre grand auteur ?
01:48:06 - Ah, pour moi, c'est évidemment
01:48:08 le Christ.
01:48:10 Ma foi personnelle,
01:48:12 c'est sûr,
01:48:14 c'est celle qui me guide,
01:48:16 mais pour moi aussi,
01:48:18 évidemment,
01:48:20 je suis très attaché à la France,
01:48:22 à l'histoire de France,
01:48:24 très attaché à la vision
01:48:26 des rois
01:48:28 et puis à la vision gaullienne.
01:48:30 Les deux se recoupent, bien évidemment.
01:48:32 - Petit incise, d'ailleurs,
01:48:34 dans votre histoire de la France,
01:48:36 on voit bien que l'histoire de France
01:48:38 est faite de la France,
01:48:40 l'histoire de la France est faite de complots,
01:48:42 ce qu'on appelle aujourd'hui complotistes.
01:48:44 En réalité, ils sont permanents,
01:48:46 c'est la trame même de l'histoire.
01:48:48 - Oui, bien sûr,
01:48:50 mais il y a quand même une certaine idée
01:48:52 de la France,
01:48:54 et ça, de Gaulle l'a bien dit,
01:48:56 et c'est cette idée certaine de la France,
01:48:58 c'est-à-dire l'idée de l'indépendance,
01:49:00 de la grandeur,
01:49:02 du bien commun,
01:49:04 toutes choses qui, aujourd'hui,
01:49:06 sont sérieusement entamées,
01:49:08 mais on peut garder l'espoir
01:49:10 de cette France
01:49:12 qui ne mourra peut-être pas.
01:49:14 - Il y a donc un lien
01:49:16 entre vos deux grandes foies,
01:49:18 la France et la foi chrétienne.
01:49:20 Ce ne sont pas deux.
01:49:22 - Oui, oui,
01:49:24 mais je ne mélange pas les genres.
01:49:26 - C'est une même espérance
01:49:28 à la résurrection permanente
01:49:30 de ce qui est,
01:49:32 des choses qui ne meurent jamais.
01:49:34 - Oui, mais il faut relativiser quand même les choses.
01:49:36 "Le ciel et la terre passeront,
01:49:38 mais mes paroles ne passeront pas",
01:49:40 dit Jésus.
01:49:42 C'est là où je vois l'erreur
01:49:44 de ces chrétiens qui se lancent
01:49:46 dans une défense effrénée
01:49:48 de l'écologie.
01:49:50 Non, il faut se souvenir de cette parole
01:49:52 de Jésus. "Le ciel et la terre passeront,
01:49:54 mais mes paroles ne passeront pas."
01:49:56 La terre sera appelée à disparaître,
01:49:58 la France sera appelée à disparaître,
01:50:00 c'est sûr, mais l'espérance en Dieu
01:50:02 et en Jésus, évidemment,
01:50:04 ça ne disparaîtra pas, puisque ça sera
01:50:06 la contemplation
01:50:08 de la divinité
01:50:10 en permanence.
01:50:12 - Vous répondez très bien à mon ultime question.
01:50:14 Merci beaucoup, Jean-François.
01:50:16 - Au revoir. Merci de votre invitation.
01:50:18 [Générique]