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00:00 - Vous vous êtes parlé ? - Oui, oui, tout à fait.
00:02 - Oui ? - Il m'a tapé sur l'épaule en me disant "t'es mon pote, toi t'es mon pote".
00:06 J'ai dit un petit truc, il m'a dit "Petit gars, t'as pas mes yeux, t'as pas mes cheveux, t'es pas mon fils, tu seras jamais mon fils".
00:11 - Nous allons maintenant poursuivre cette émission avec un autre témoignage, celui d'Harry Boulogne,
00:18 qui est dans une situation différente de la vôtre, puisque Harry est toujours, lui, à la recherche de son père.
00:24 Pour sa mère et pour certaines personnes de son entourage, Harry Boulogne est le fils d'Alain Delon.
00:30 Je vous invite à retrouver Harry Boulogne juste après ces quelques images.
00:34 Harry a toujours vécu écartelé entre deux mondes.
00:45 Celui de ses grands-parents à Bourg-la-Reine, dans la banlieue de Paris, où il a passé son enfance,
00:49 et celui de sa mère, qui donnait des concerts partout à travers le monde.
00:53 Sa mère, c'est cette belle jeune femme d'origine allemande, à la voix si particulière,
00:57 la chanteuse Nico, légérie du groupe Velvet Underground.
01:01 Ceux qu'il appelle ses grands-parents, c'est Edith Boulogne et son mari, la mère et le beau-père d'Alain Delon, qui l'ont élevée.
01:14 - Je dormais à Bourg-la-Reine, dans le lit où avait été conçu Alain Delon.
01:20 Et au-dessus de mon lit, au lieu d'avoir une image pieuse, ou un Christ, ou une croix,
01:27 il y avait la photo d'Alain Delon, qui me regardait dormir.
01:30 C'est une des rares fois où ma mère est venue me voir à Bourg-la-Reine.
01:36 Voilà, d'un côté, la maman d'Alain Delon, la dureté du silex opposée à la douceur du satin.
01:42 L'histoire a commencé à la naissance d'Harry, lorsque Nico a demandé à Alain Delon de reconnaître l'enfant.
01:49 Delon a refusé, et la justice lui a donné raison.
01:52 Deux ans plus tard, Nico, malade et affaibli par la drogue, est contrainte de se séparer de son enfant.
01:57 Elle le confie à Edith Boulogne, la mère d'Alain Delon, qui accueille Harry à Bourg-la-Reine,
02:02 et l'éduque comme son propre fils dans la charcuterie familiale.
02:05 - J'ai un pincement au cœur en regardant ces photos, parce que je fais un bond en arrière de quelques 35 années.
02:12 C'est ce qu'il me reste de ma petite enfance, des tirages photos de ma mère et de moi,
02:20 prises par Paul Morisset, qui était son grand ami, son confident, son manager.
02:27 À l'âge de 17 ans, le monde bascule de nouveau autour du jeune homme.
02:30 Harry doit renoncer au nom qu'il porte depuis sa naissance, celui de sa mère, Pafgön,
02:35 pour prendre celui des Boulognes, qui ont décidé de l'adopter.
02:38 Aujourd'hui, Harry témoigne du chaos de son existence dans un livre qui est aussi un chant d'amour dédié à sa mère.
02:45 - Harry Boulogne, nous venons de voir les images qui parlent de vous, de votre histoire.
02:49 Alors, je rappelle que votre mère, Nico, pour elle, pour des gens de votre entourage, vous êtes le fils d'Alain Delon.
02:57 - Oui. - La justice, donc, a répondu non quand elle a été interrogée par votre mère.
03:03 C'était juste après votre naissance, puisqu'elle a demandé une reconnaissance en paternité.
03:07 - Oui. - Alors, pour qu'on comprenne bien, vous avez, vous, vécu une partie de l'enfance avec votre mère.
03:13 Puis, à un moment donné, vous avez été élevé par la mère d'Alain Delon et son beau-père, monsieur Boulogne.
03:21 - Monsieur Boulogne, voilà. - Mais qu'est-ce qu'en grandissant, qu'est-ce qu'on vous disait, par exemple, d'Alain Delon ?
03:26 Qu'est-ce que vous faisiez dans cette famille ? Quelles explications vous donnaient à vous, justement, Harry ?
03:32 - Ça va vous faire certainement sauter au plafond. C'est-à-dire qu'on ne me disait pas "oui, quand il fera Alain Delon".
03:37 C'est ma grand-mère qui me disait "quand tu seras convoqué par qui tu sais".
03:41 "Quand tu seras convoqué par qui tu sais". C'est-à-dire qu'elle ne prononçait même pas le prénom.
03:47 "Qui tu sais", c'était Delon, quoi. C'était... Voilà.
03:53 "Quand tu seras convoqué par qui tu sais". C'est-à-dire qu'il faudrait que tu obéisses, que tu...
03:58 - Elle l'attendait, ce moment où vous seriez convoqué ? - Ah oui, oui, oui. Elle rêvait de mettre sa main dans la mienne.
04:05 Ma grand-mère, de son côté, a mis Alain Delon en nourrice à Frennes.
04:12 Parce qu'il était brimbalé entre l'Aïl-et-Rose, qui était le domicile de son père, M. Delon,
04:17 et Bourg-la-Reine, le domicile de M. Paul Boulogne, son beau-père.
04:22 Et qu'il faisait les 400 coups dans la charcuterie, donc qu'il a fait plein d'institutions privées.
04:28 Donc, de ce côté-là, je peux comprendre sa souffrance.
04:33 - Mais qu'est-ce que vous voulez dire par là ? Avec vous, il y avait une sorte de réparation ?
04:40 D'une enfance qu'elle avait peut-être manquée avec son propre fils ?
04:47 - Quelque chose d'un backlash qu'elle a voulu rattraper avec moi, en projetant tout l'amour qu'elle avait pour son fils sur moi.
04:55 - En me considérant comme son fils ? - Jusqu'à mélanger les noms.
04:59 Parfois, elle me disait "Ari, Ari". Elle ne savait plus sur quel pied danser. Elle m'appelait Alain.
05:06 - Mais comment ? C'est difficile, effectivement, pour s'en sortir.
05:12 - Alors, Alain, je ne suis pas Alain, je suis Ari, voilà.
05:16 - Vous avez aujourd'hui 38 ans, un enfant, et vous publiez aux éditions Pauvert "L'amour n'oublie jamais".
05:23 C'est un cri d'amour pour votre mère, mais en même temps, c'est une autobiographie.
05:30 Qu'est-ce que vous attendez de ce livre et pourquoi vous l'avez écrit maintenant ?
05:33 - Pourquoi je l'ai écrit ? Pour me restructurer, parce que j'ai eu beaucoup de problèmes d'identification avec un adolescent
05:42 qui est un adolon dont on m'a bassiné, rebattu les oreilles toute ma jeunesse.
05:48 Et une mère qui était présente, mais qui, de par son travail, ne pouvait pas s'occuper de moi.
05:56 C'est-à-dire qu'elle a fait quand même 1200 concerts en 8 ans.
06:00 - Mais pendant toutes ces années, vous étiez chez ses parents, le beau-père et la mère d'Alain Delon.
06:07 Il n'est jamais venu ? Vous ne l'avez jamais rencontré ?
06:10 - Non. Anthony venait pour jouer avec mes jouets. Anthony, donc.
06:16 Pendant que j'étais à l'école, donc, pense à là.
06:21 Et ma grand-mère avait besoin de mentir quand il lui demandait à qui étaient ses jouets.
06:28 Elle disait "c'est au fils du charcutier".
06:32 Voilà. Donc, des mensonges, il y en a eu beaucoup, oui, de cet acabie.
06:40 - Et donc, tout le temps, vous avez été là-bas, jamais de contact ?
06:43 Pas une lettre d'Alain Delon ? Pas un mot ?
06:45 - Si, si, justement. Alain Delon m'a envoyé une lettre,
06:51 en réponse à une lettre de vœux que je lui avais envoyée, où il y avait de la tendresse.
07:01 Il disait notamment "je t'embrasse tendrement".
07:05 Donc, c'est à ni plus rien comprendre.
07:09 - En tout cas, vous, Harry, vous n'aviez jamais cherché à entrer en contact avec lui ?
07:13 - J'ai essayé, j'ai essayé, à une époque, d'aller le voir, qu'est Kennedy.
07:21 Je suis tombé sur le majordome, qui m'a dit qu'il n'était pas là.
07:26 C'est tout. Puis, je l'ai vu, une fois, par hasard, chez sa mère, à Bourg-la-Reine, donc.
07:31 Et il m'a accompagné en voiture à Paris.
07:34 - Ah, donc, oui, à un moment donné, vous vous êtes dit...
07:36 - Voilà, et là... - Et vous vous êtes parlé ?
07:38 - Oui, oui, tout à fait. - Oui ?
07:40 - Il m'a tapé sur l'épaule en me disant "t'es mon pote, toi, t'es mon pote".
07:43 J'ai dit un petit truc, il m'a dit "petit gars, là, t'as pas mes yeux, t'as pas mes cheveux,
07:46 t'es pas mon fils, t'as jamais mon fils".
07:48 - Et il vous a dit ça ? - Oui.
07:54 - Mais de toute façon, pour la justice, vous n'êtes pas son fils ?
07:57 - Je suis pas son fils. Non, non.
07:59 Ce sont des...
08:01 C'est une coïncidence morphologique.
08:05 Mais cependant, il m'a dit qu'il avait couché avec ma mère une fois.
08:08 C'est tout.
08:10 - Mais pour vous, ce serait...
08:13 Si tout cela, finalement, était, pour des raisons qui échappent à tous,
08:17 simplement, une... Bon.
08:19 Encore une autre histoire, effectivement,
08:21 que de l'on n'ait rien à voir dans votre histoire,
08:24 même si vous avez bizarrement été élevé par sa mère, par son beau-père...
08:29 - C'est tout le situation, c'est rocombolesque,
08:32 rocombolesque au possible.
08:34 Ça me semble tellement ahurissant, quoi,
08:39 que quelqu'un puisse tenir des propos attendrissants,
08:44 quand on dit "je t'embrasse tendrement",
08:48 et qu'ensuite, ce jeune homme est un imposteur, ou est un menteur.
08:54 - T'en sens que c'est difficile, pour vous, de passer pour un imposteur,
08:58 alors que vous n'avez rien demandé. - Moi, j'ai rien demandé, du tout.
09:01 - Mais qu'est-ce qui est le plus difficile dans ce que vous dites ?
09:04 Est-ce que c'est de ne pas vraiment savoir qui est votre père ?
09:07 - Non, non, non. - D'avoir grandi dans le culte
09:09 de quelqu'un dont on vous parlait tout le temps ?
09:11 - Ça, à la rigueur, ça ne m'intéresse plus, maintenant.
09:13 Ça m'a beaucoup gêné à une époque.
09:15 Ça ne m'intéresse plus, peut-être depuis que je suis père moi-même.
09:18 Et que la première chose que j'ai faite, c'est d'aller reconnaître mon fils à la mairie.
09:21 - Pourquoi M. et Mme Boulogne ont tenu à vous donner leur nom ?
09:26 À vous adopter, à vous donner leur nom ?
09:29 - Pfff... Peut-être parce qu'il y a un descendant.
09:33 Je ne sais pas. Probablement pour ça, oui.
09:36 - Parce que ça, c'est une histoire un peu folle.
09:38 Vous aviez le nom de votre mère. - C'est une histoire de fou, oui.
09:40 J'ai perdu mon nom, Pefguen, et je suis devenu Français.
09:44 Je suis passé de la naissédité allemande à la naissédité française.
09:48 Voilà.
09:50 Donc, à 17 ans, ça fait quand même un choc.
09:53 Pendant 17 ans d'avoir vécu avec un nom,
09:55 et de se retrouver 17 ans plus tard avec un autre nom.
09:58 - Alors, vous écrivez aussi, toujours dans votre livre,
10:01 que lorsque votre mère vous a demandé "Mais pourquoi tu t'appelles Boulogne ?"
10:04 Tout à coup, elle a découvert que vous ne portiez plus son nom.
10:07 Vous n'avez pas pu lui répondre. Vous étiez paralysé par la culpabilité.
10:10 - Voilà.
10:11 - Vous vous sentiez coupable de quoi, à 17 ans ?
10:14 - De l'avoir reniée, elle.
10:16 De l'avoir reniée, elle. Voilà.
10:18 Ils m'ont fait comprendre que ma mère était mauvaise, droguée,
10:24 et ils m'ont fait pointer du doigt comme une malpropre.
10:27 - Alors, c'est ce qui est un peu étonnant.
10:28 C'est qu'en même temps, ce sont des gens qui vous ont donné de l'amour.
10:31 On a l'impression que vous leur en voulez, aussi, dans le même temps.
10:34 Parce qu'ils ont détérioré l'image maternelle.
10:37 - Oui, on n'a pas le droit de toucher à l'image d'une mère.
10:40 - Qu'elle soit.
10:41 S'il avait été une prostituée, ça aurait été pareil, quoi.
10:44 - Et en même temps, c'est un acte d'amour de s'occuper de vous et de vous donner,
10:47 parce que ce n'est pas rien, à un moment donné, de vous donner leur nom.
10:50 - Ils m'ont fait grandir. J'étais entouré d'amour.
10:53 Mais d'amour de personne, d'une autre génération,
10:56 qui, de toute façon, mon grand-père avait fait la guerre contre les Allemands,
10:59 donc ne pouvait pas imaginer une seconde
11:03 de pouvoir avoir, entretenir un dialogue avec ma mère,
11:08 qui, elle-même, était allemande, donc une ennemie dans son inconscient à lui.
11:12 - Oui, c'est ça. C'est carrément, c'est même le grand écart.
11:16 D'un côté, c'est la vie d'artiste, puis de l'autre côté, c'est la vie pour la reine.
11:22 - C'est une enfance schizophrénique, je dirais.
11:25 C'est-à-dire qu'on m'a coupé en deux.
11:28 - Alors, à un moment donné, vous avez souhaité, Harry, vous rapprocher de votre mère, de Nico.
11:32 - Je me suis rapproché de ma mère.
11:33 - Et vous avez passé toutes les dernières années auprès d'elle.
11:36 - J'ai passé de 19 ans jusqu'à sa mort.
11:39 - Voilà.
11:40 - Jusqu'à l'âge de 19 à 25 ans.
11:44 Et j'ai quand même eu un combat avec elle,
11:49 c'est-à-dire que je lui ai demandé de choisir entre moi et l'héroïne.
11:53 Je lui ai dit "Maman, maintenant, s'il te plaît, tu arrêtes l'héroïne.
11:57 Soit tu choisis, soit c'est l'héro, soit c'est moi."
12:00 Et elle a arrêté de se droguer.
12:03 - Alors, pourquoi vous dites, vous, Harry, qu'à un moment donné,
12:06 vous-même, vous êtes passé par la drogue pour mieux vous approcher d'elle ?
12:10 - Bien sûr, parce que c'était la seule manière de pouvoir communiquer.
12:13 De pouvoir communiquer en dehors de... Je ne suis pas psychiatre, je ne suis pas psychanalyste non plus.
12:17 C'était communiquer, c'est parce que ça balayait les frontières, l'héroïne.
12:23 - Et quand on retrouve justement sa mère à l'âge de 19 ans,
12:27 qu'on ait eu une image un peu écrabouillée,
12:30 vous l'avez découverte, j'imagine, tout à fait sous un autre jour ?
12:33 - Je me suis dit que, justement, il ne fallait pas parler du passé, qu'il fallait maintenant vivre.
12:38 Et on a vécu à fond tous les deux, quoi, ce qu'on avait à vivre.
12:42 - Est-ce qu'ensemble, vous reparliez, vous, d'Alain Delan ?
12:44 - Je me rappelle d'un moment où nous étions à Bruxelles ensemble pour un de ses concerts.
12:52 Nous sommes restés deux jours et nous étions allés dans un pub, un café à Bruxelles.
12:58 Et là, il y avait la chanson d'Alain Delan comme au cinéma.
13:01 Et elle la passait, la remettait sans arrêt, sans arrêt, sans arrêt, comme une petite fille.
13:06 Et là, elle me montrait un magazine de lui, parfum Alain Delan, je crois, ou lunettes Alain Delan.
13:14 Donc, elle se faisait un cinéma un peu comme une midinette.
13:18 Donc, elle était quelque part.
13:21 Mais d'un autre côté, elle était très, très sérieuse.
13:24 - Alors, vous, votre vie n'a été faite que de ruptures.
13:27 Donc, après le décès de votre mère, des années après, c'était en 95,
13:32 Edith Boulogne est morte à son tour.
13:37 Vous étiez à l'enterrement, bien entendu.
13:39 Et alors là, il y avait aussi son fils Alain Delan.
13:42 - Oui, bien sûr.
13:44 - Vous vous êtes retrouvés pour...
13:45 - On ne s'est pas retrouvés du tout.
13:48 Nous étions sur le bas-côté gauche de l'église.
13:52 Et lui était sur le bas-côté droit, plus en avant avec son fils et un avocat ou un garde du corps.
13:57 Enfin, je ne sais pas.
13:59 Et donc, nous étions en retrait, lui plus en avant.
14:02 Et il est parti tout de suite après.
14:05 Il s'est clipsé vite.
14:07 - Et vous, vous avez essayé d'aller vers lui ou pas ?
14:09 - Non.
14:10 - Vous étiez tétanisé.
14:11 - Non, je n'étais pas tétanisé.
14:12 C'est simplement, quelqu'un ne veut pas m'approcher.
14:14 Je n'ai pas à aller vers lui.
14:18 Ce serait plutôt à lui.
14:19 Moi, je ne lui donnerais rien.
14:21 - Est-ce qu'aujourd'hui, vous regrettez, puisque vous dites qu'on vous a finalement bourré la tête d'Alain Delon,
14:26 que vous n'avez rien demandé, qu'on vous a toujours parlé de lui, est-ce que vous le regrettez ?
14:30 Qu'il y ait eu, finalement, tout cela autour de vous,
14:34 et tous ces mots, toutes ces références qui vous aient été données ?
14:39 - Non, je n'ai pas de regrets.
14:43 Du tout.
14:44 J'ai mené ma vie difficilement.
14:47 La galère, c'est quelque chose que je connais.
14:50 Que je connaîtrais certainement encore pendant un petit bout de temps.
14:55 Mais maintenant, j'ai un enfant, et c'est pour lui que je vis.
15:02 Et une compagne.
15:04 - Donc, aujourd'hui, votre nom, c'est Harry Boulogne.
15:07 Je crois que vous souhaitez récupérer le nom de votre père.
15:09 - Le oui.
15:10 Pour me retrouver comme quand j'avais 17 ans.
15:13 J'étais heureux de m'appeler Harry Pefguen.
15:15 - Donc, c'est la démarche que vous avez envie d'entreprendre aujourd'hui, c'est ça ?
15:18 - Si, Boulogne. Je ne peux pas l'enlever.
15:21 Au moins que Pefguen soit rajouté.
15:24 Voilà.
15:26 - Je suis désolée d'insister, mais pourquoi vous voudriez enlever Boulogne ?
15:32 Ça fait partie de vous aussi, maintenant ?
15:34 Est-ce que vous pouvez le nier ?
15:35 Est-ce qu'on peut enlever des choses comme ça ?
15:37 - Ça ne peut pas faire partie de moi,
15:39 quand ça arrive à l'âge de 17 ans, comme ça, comme un cheveu sur la soupe.
15:43 - Trop tard.
15:44 - Je ne suis pas d'accord, c'est trop tard, là.
15:46 J'ai porté ça comme un fardeau, le nom Boulogne.
15:50 Et c'est un nom que je dirais que je renie.
15:56 J'ai envie de renier, du moins.
15:58 Et d'oublier complètement.
16:00 Pour retrouver mes racines.
16:02 Bon, je ne peux pas être coupé en deux.
16:04 Il y a également le côté paternel, mais le côté paternel, je n'en parlerai pas,
16:08 étant donné que c'est défendu.
16:11 Enfin, ce n'est pas défendu, mais bon.
16:14 Il y aura...
16:16 Je n'ai pas envie de mettre le souc, comme on dit.
16:21 - Je crois qu'on a bien compris. - Oui.
16:24 - Est-ce que, d'une certaine manière, ce livre,
16:26 même si c'était un cri d'amour vis-à-vis de votre mère,
16:29 ce n'est pas un appel vis-à-vis d'Alain Delon ?
16:33 - Si vous le dites...
16:34 - Non, c'est une question que je pose.
16:36 Est-ce que c'est une bouteille jetée à la mer ?
16:39 - Non, je ne pense pas. Oui, peut-être.
16:42 - C'est vrai que c'est compliqué.
16:44 - J'ai droit à ça et à son contraire.
16:48 Une fois, à Berlin, justement, quand je tournais ce film,
16:52 un taxi me dit "Mais vous êtes le fils d'Alain Delon ?"
16:56 Et je lui dis "Oui, absolument."
16:59 Parce qu'il était tellement naturel, le mec,
17:01 qu'il était sympa et tout.
17:03 Et je lui dis "Oui, oui, oui, pas de problème, c'est moi."
17:06 Et puis, il y a souvent d'autres personnes.
17:08 Et là, je dis "Non, vous vous confondez, c'est une méprise."
17:12 J'ai 38 ans et je tiens à dire que je ne considère pas
17:18 que M. Delon est mon père, quoi. C'est tout.
17:22 Je suis avant tout moi-même.
17:24 Je suis le fils de mon père, le fils de ma mère, oui,
17:27 sans aucun doute, mais je suis avant tout ma propre personne.
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