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Xerfi Canal a reçu Eric Séverin, professeur des universités en sciences de gestion à l'IAE de Lille, pour parler des coûts de faillites. Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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Transcription
00:00 Bonjour Éric Séverin.
00:09 Bonjour Jean-Raphaël Bionni.
00:10 Éric Séverin, professeur des universités, professeur de finances à l'IEE de l'Université
00:15 de Lille.
00:16 Éric Séverin, auteur de "Zombification et faillite déterminant enjeu et perspective",
00:22 ouvrage que vous publiez avec David Véganzones.
00:25 Éric Séverin, comment on comprend les chemins et évidemment les coûts aussi de la faillite.
00:32 J'ai envie de vous prendre une petite formule.
00:34 "We are all gonna die, the only question is how".
00:37 C'est dans Point Break, le film Point Break.
00:39 Voilà, nous allons tous mourir, la seule question c'est savoir comment.
00:42 Alors c'est vrai qu'à long terme nous sommes tous morts, c'est ce qu'a dit Keynes.
00:46 Donc nous sommes d'accord.
00:47 Alors en fait effectivement les entreprises sont des organismes vivants qui naissent,
00:54 mais qui meurent.
00:55 Ils ne vivent pas et ils ne meurent pas de la même façon.
00:57 Il y en a qui meurent soudainement, il y en a qui mettent longtemps à mourir, d'autres
01:02 qui ont croit mort et puis qui revivent.
01:04 Alors on s'est interrogé, mais il y a de cela quelques années, dans la littérature
01:09 managériale, le premier qui a fait ça c'est d'Argenti, s'il n'existait pas des trajectoires
01:13 types, qu'est-ce qui nous amène à mourir ? Alors il part d'un concept assez simple,
01:19 à savoir un organe de gestion rigide, un dirigeant autocrate par exemple, manque d'information,
01:25 etc. des erreurs de gestion et puis ces erreurs de gestion qui vont finalement se traduire
01:33 dans des symptômes d'entreprise, fort endettement, baisse des ventes, etc.
01:36 Il distingue trois chemins de faillite.
01:38 Les start-up qui n'arrivent pas finalement à développer leur activité parce qu'ils
01:45 ont mal mesuré le marché par exemple, font des erreurs, dirigeants autocrates par exemple.
01:50 Des entreprises qui n'arrivent pas à maîtriser une croissance trop rapide, entre 5 et 10
01:54 ans, qui sont ébouies par leurs premiers résultats et qui n'arrivent pas à s'adapter.
01:58 Et puis des grandes entreprises ou des entreprises plus âgées qui elles vont tout d'un coup
02:04 s'affaisser progressivement, ne vont pas réussir à s'adapter à un changement technologique
02:09 ou à un changement de marché.
02:10 Et globalement, tous les chemins d'entreprise se résument dans ces trois grandes trajectoires
02:17 types.
02:18 Alors ça peut être soudain, ça peut être progressif, ça peut être durable, mais dans
02:22 tous les cas effectivement, il y a un chemin vers la mort.
02:25 Alors évidemment il y a des variantes, par exemple prenez une PME, elle peut mourir tout
02:31 simplement parce que le chef d'entreprise y meurt.
02:33 Et donc là effectivement c'est soudain, mais la PME ou la TPE est très liée au
02:38 chef d'entreprise.
02:39 Donc effectivement il y a des chemins de faillite.
02:41 Il y a eu d'autres études qui ont été faites qui reprennent un peu ça.
02:44 Et globalement, qu'est-ce qu'on observe dans ces chemins de faillite ? On observe
02:49 à un moment donné un déséquilibre de mauvaise décision, quelle qu'elle soit opérationnelle,
02:55 financière, qui se traduisent à un moment donné dans les comptes et à la fin, ce qui
02:59 marche ou ce qui ne marche plus, c'est le cash.
03:02 Il n'y a plus de liquidité et donc on ne pourra pas faire face à ces engagements.
03:05 Et donc on fait faillite.
03:07 On a des exemples mémorables en France notamment, tous en tête du lundi, etc.
03:14 La faillite, pas que des startups, mais vous l'avez évoqué sur le cas des startups.
03:19 Finalement, les coûts, les coûts quand une entreprise fait faillite.
03:22 Alors, on parle des coûts de faillite et moi je préférais dire les coûts de l'échec.
03:28 Il y a des coûts directs et des coûts indirects.
03:31 Les coûts directs c'est assez simple, c'est le mandataire de justice en procédure
03:35 collective, c'est un coût direct.
03:36 C'est assez facilement calculable, à un 10% de la valeur de la firme quand même,
03:41 selon des études assez anciennes.
03:42 Mais il y a surtout les coûts indirects et ça c'est extrêmement difficile à chiffrer,
03:47 mais c'est extrêmement lourd.
03:49 On les situe entre 10 et 20% de la valeur.
03:52 La perte de clients, la perte de fournisseurs, la perte de salariés.
03:58 Donc on perd des compétences et les salariés restants peuvent avoir aussi des phénomènes
04:04 de deuil qui font qu'ils sont moins motivés pour redresser l'entreprise.
04:07 La vente d'actifs à vil prix.
04:09 Quand on a besoin de cash et qu'on est en difficulté, on vend ses actifs à n'importe
04:14 quel prix et donc pas en bon prix.
04:16 Et puis les problèmes liés aux désaccords qui peuvent exister entre le dirigeant et
04:20 les actionnaires.
04:21 Un dirigeant retire son bien-être et sa fortune essentiellement de sa position de dirigeant,
04:26 les actionnaires moins.
04:27 S'il se dit que tout est perdu, va-t-il vouloir engager des projets d'investissement
04:31 à vannes positives, comme on dit dans le monde académique, pour restaurer la valeur.
04:35 Il va plutôt faire des opérations de cashing out en essayant de sortir le maximum avant
04:40 de lui-même partir de l'entreprise.
04:42 Et ces coûts indirects, ils existent après la faillite, mais ils existent aussi avant,
04:48 pendant qu'on est en train de mourir.
04:49 Donc un sujet à absolument regarder très très très attentivement.
04:56 Zombification et faillite, déterminant enjeux et perspectives pour mieux comprendre ce
05:00 sujet, c'est une très grande actualité, j'ai envie de dire, malheureusement.
05:03 Hélas.
05:04 Merci Eric Sébastien.
05:05 Merci.
05:07 [Musique]
05:12 [SILENCE]

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